Voilà neuf mois que Donald Trump a pris place à la Maison-Blanche. Entre décret antimusulman rejeté, bombardement d’une base militaire en Syrie, réforme avortée de l’Obamacare, bras de fer incessant avec le Congrès et les polémiques multiples, les premiers mois de son mandat ont été mouvementés. Entre satisfaction et désenchantement des citoyens américains, le personnage de Trump surprend, étonne, passionne ou déçoit.

Que retenir de ces neufs premiers mois ? Major-Prépa s’est posé la question, et vous en dresse un bilan aussi exhaustif que possible … tout au long de la semaine. Retrouvez donc, de lundi à samedi, un article par jour qui revient sur un point précis du début de mandat du 45e Président des États-Unis. On commence donc aujourd’hui, avec un zoom sur sa politique économique.

A-t-il été à la hauteur de ses engagements économiques ? La croissance est-elle aussi porteuse qu’il l’avait promis ? Est-il parvenu à mettre en place le protectionnisme dont il n’a cessé de vanter les mérites pendant sa campagne ? C’est ce que l’on va essayer de voir ici.

De grandes promesses économiques

Rappelons-le, Trump s’était engagé, pendant sa campagne, à améliorer la situation des classes moyennes heurtées par la mondialisation et la désindustrialisation. Protectionniste aguerri parfois qualifié de néo-mercantiliste, le magnat de l’immobilier avait promis de grandes choses aux américains en matière économique : re-localisation d’emplois industriels sur le sol américain, augmentation de 45% des droits de douane sur les produits mexicains, renégociation des accords commerciaux, abolition du dumping monétaire chinois… Qu’en est-il aujourd’hui ?

À vrai dire, pas grand chose. Si ses premiers jours au bureau ovale ont pu donner espoir à ses 60 millions d’électeurs, la plupart de ses déclarations n’ont pas été suivies d’effets. Après une semaine de mandat, il pouvait en effet se targuer d’avoir obtenu la création de 2.000 emplois chez Fiat et l’ouverture d’une nouvelle usine Ford, d’avoir quitté le TPP et d’avoir relancé deux chantiers d’oléoducs fermés par son prédécesseur. Pourtant, sa frénésie de mesures économiques s’est rapidement ralentie.

Le mur de la réalité du pouvoir

De fait, la majorité de ses décrets économiques se heurtent au mur de la réalité et au scepticisme du Congrès. La proposition de réforme fiscale, qui prévoit une baisse des impôts sur les entreprises (de 35% à 15%) et sur les hauts revenus notamment, a été rejetée par le Sénat tandis que la question du financement des grands travaux reste en suspens. D’ailleurs, le projet de Budget prévoit une baisse des crédits pour l’Amtrak (la SNCF américaine), ainsi que pour la réfection des aéroports, ce qui est contraire à ce qui était annoncé à propos des infrastructures.

Un protectionnisme finalement plutôt timide

Sur le plan commercial, les Républicains ont finalement renoncé à la taxe sur les importations, censée favoriser le « made in America ». Début août, le Congrès a enterré la « border ajustment tax » défendue initialement par Donald Trump, au grand plaisir des distributeurs, inquiets des répercussions sur les prix dans leurs magasins, des industriels de la pétrochimie et des entreprises étrangères. De même, les renégociations d’accords commerciaux peinent à venir, bien que les discussions au sein de l’ALENA aient débuté à la mi-juillet. L’imprévisible homme d’affaire a même fait les yeux doux à son homologue chinois qu’il n’avait cessé de fustiger durant sa campagne, l’accusant alors de manipuler sa monnaie et d’envahir les Etats-Unis avec ses produits bon marché.

Ces manquements à ses promesses de campagne soulèvent toutefois une question de taille : comment financer les baisses d’impôt massives prévue par l’administration Trump ? La « border tax » devait rapporter à elle seule plus de 1.000 milliards de dollars sur dix ans et contribuer au rééquilibrage de la balance commerciale. L’abrogation de l’Obamacare étant, elle aussi, très mal partie (on y reviendra en détail demain), on voit mal comment le président pourrait contrebalancer le creusement de la dette que causerait une baisse globale des impôts

Bilan décevant malgré quelques promesses tenues

Une fois n’est pas coutume, Trump a tenu ses promesses en matière de déréglementation financière. En avril dernier, il a fait passer par ordonnance – faisant ainsi fi de l’approbation du Congrès – la révision de la loi Dodd-Frank de 2010, mesure saluée par Wall Street dont la côte a grimpé de 14% depuis janvier. On le rappelle, cette loi a été portée par l’administration Obama suite à la crise des subprims et avait pour objectif encadrer les produits dérivés, à mieux protéger les consommateurs et à mettre un terme à la menace des banques « too big to fail ».

À mettre aussi à son actif : la sortie du processus de ratification du TPP (Transpacific Partnership) et la reprise de la construction des oléoducs Keystone XL et du Dakota. Là encore, ces deux mesures n’ont pas nécessité la ratification du Congrès. Difficile, donc, de parler de véritable victoire politique. Au bout du compte, les grandes promesses économiques ne se sont converties qu’en petits effets.

L’économie américaine retrouve tout de même de la vigueur

Néanmoins, le bilan économique du pays est plutôt bon. Si la croissance du premier trimestre de 2017 était au plus bas depuis 3 ans, Trump peut se prévaloir de la bonne santé économique américaine depuis avril. La croissance a progressé de 2,6% au deuxième trimestre, une performance notable qui doit autant au dynamisme des entreprises qu’à celui des ménages. La confiance semble être revenue tant du côté des consommateurs, qui ont dépensé 2,8% de plus qu’ils ne l’avaient fait entre janvier et mars, que de celui des entreprises, qui volent de record en record à Wall Street. Les exportations ont, quant à elles, crû plus rapidement que les importations, propulsant la balance commerciale dans le positif, phénomène rare au cours de ces dernières années. Une bonne nouvelle pour le Donald Trump, qui avait promis de réduire le déficit commercial du pays.

Une bonne santé économique fragile, dopée par des facteurs exogènes

Mais les performances économiques des Etats-Unis sont d’avantage le fait de phénomènes externes que de l’action de Donald Trump. Les entreprises américaines profitent avant tout de la chute du dollar et du regain de croissance en Europe et Asie pour accroître leurs exportations tandis que les taux de changes avantageux et la remontée du cours du pétrole boostent indéniablement la croissance américaine.

Selon beaucoup d’économistes, il n’est pas certain que la dynamique perdure. Depuis la crise des subprims, l’économie américaine évolue en dents de scie, avec des premiers trimestres médiocres suivis de printemps plus porteurs. La croissance moyenne depuis 2008 avoisine les 2% alors qu’elle était de plus de 3,5% dans les années 1990 et plus encore pendant les Trente Glorieuses. La promesse de Trump d’un PIB annuel en hausse de 3% semble surréaliste dans la mesure où le pays approche le plein-emploi depuis le second mandat d’Obama. Le seul moyen d’y parvenir serait d’améliorer la productivité des salariés. Productivité qui reste désespérément faible voire négative : elle a encore baissé de plus de 0,5% au premier trimestre alors qu’elle était en hausse dans tous les autres pays de l’OCDE sur la même période.

Peu de promesses tenues mais une économie qui se maintient

Le bilan économique de Donald Trump est donc en demi-teinte. Peu de grandes promesses de campagnes ont réellement été tenues et les mesures protectionnistes se font toujours attendre. Ironie du sort, l’économie américaine se porte pour le mieux.

Voilà pour le premier zoom sur une dimension des neuf premiers mois du Président Trump, on s’attaque demain au bilan de sa politique étrangère. Stay tuned !