Souvent négligée, que ce soit durant l’année en suivant peu l’actualité juridique en rapport avec le thème donné, ou bien le jour du concours, faute de temps, la veille juridique peut pourtant s’avérer décisive pour gratter facilement de précieux points qui feront la différence pour votre admissibilité. En effet, d’une part, elle peut représenter entre 3 et 4 points sur 10 concernant la partie juridique, ce qui n’est pas négligeable. D’autre part, ces quelques points sont presque « offerts » dans la mesure où, si vous la préparer correctement, vous pouvez la boucler en moins d’une demie heure voire vingt minutes. En effet, les sujets possibles étant peu nombreux au final, puisqu’ils sont, la plupart du temps, liés à un chapitre du programme, vous pouvez très bien en préparer 4 ou 5 différentes que vous pourrez apprendre « par cœur » (pas forcément mot pour mot, mais au moins l’introduction, qui ne changera quasiment jamais selon le sujet, ainsi que le plan et les références mobilisables). Voici donc une légère vue d’ensemble de votre thème de l’année qui est la responsabilité sociale des entreprises, avec sa définition, son historique et les faits juridiques marquants de cette année 2016 (en France, car nous faisons du droit français. Attention à ne pas se perdre avec les évènements internationaux et ceux qui ne sont pas vraiment des faits juridiques. Avec un sujet aussi actuel, global et managérial que celui-ci, il est aisé de céder aux chants des sirènes du hors-sujet).

Définition

La RSE est un sous-ensemble du développement durable et correspond à sa mise en œuvre dans le cadre de l’entreprise. De fait, tout comme le développement durable, la RSE s’articule autour de trois notions clés : – Le pilier social qui vise au respect de toutes les parties prenantes de l’entreprise

–          Le piler environnemental qui vise au respect du milieu naturel

–          Le pilier économique car l’enjeu majeur pour les entreprises sera de réussir à créer de la richesse tout en respectant les deux piliers précédents.

La mise en place d’une démarche RSE dans une entreprise n’est pas une démarche mise en œuvre pour être en accord avec la réglementation applicable. La démarche RSE d’une entreprise commence là où la loi s’arrête. Ce sont les actions menées par l’entreprise dans les domaines sociaux ou environnementaux qui vont au-delà de la loi car celle-ci la jugeait insuffisante. Pour qu’une entreprise puisse se déclarer responsable, celle-ci doit procéder à la notation de sa politique de RSE selon une certaine méthodologie autour de grandes problématiques environnementales, sociales et économiques (respect des droits fondamentaux des personnes, politique managériale ou sociale, respect des fournisseurs, politique d’achat responsable, modalités de gouvernances, mesures prises pour la protection de l’environnement, relation avec le milieu sociétal…) Dès lors, le non-respect d’une norme serait un critère éliminatoire dans l’évaluation de la politique de RSE d’une entreprise.

Historique

Les premières notations de politique de RSE sont apparues dans les années 1960, aux Etats-Unis, où certains fonds éthiques américains refusaient d’investir dans les entreprises qui se révélaient peu respectueuses de l’environnement ou de leurs salariés. En France, la première agence de notation, Arese, est apparue en 1997, fondée par Geneviève Ferone. En 2002, celle-ci est devenue Vigeo et est actuellement dirigée par Nicole Notat. Toujours en 2002, une deuxième agence de notation est apparue en France : Innovest, filiale française d’un grand groupe américain. Aujourd’hui, les agence de notation se multiplient et le marché est devenu ultra-concurrentiel, la plupart des grands groupes français ayant recours à des agences internationales, d’où la fusion, en 2015, de Vigeo avec EIRIS, une agence de notation britannique, pour faire face à la concurrence. En effet, les problématiques environnementales et sociétales n’intéressent plus seulement que les fonds éthiques. Les acheteurs, dans un souci éthique, privilégie généralement des fournisseurs eux-mêmes sensibles à ces questions.  Les prêteurs étudient de plus en plus les risques sociaux avant d’engager des relations d’affaires et les consommateurs portent un intérêt croissant au mode de production des produits pour consommer « mieux ». A cela s’ajoute le fait que la loi sur les Nouvelles Régulations Economiques (NRE ; 15 Mai 2001), puis la loi Grenelle 2 (2010) complétée par la loi Warsmann 4 (2012) obligent les entreprises cotées sur un marché réglementé et les grandes entreprises à publier des indicateurs RSE et développement durable dans leur rapport annuel. De fait, le nombre d’entreprise, grands groupes ou PME, mettant en place une politique de RSE ne cesse de croître.

Faits juridiques marquants en 2016

Le devoir de vigilance :

Pour tout entreprise française de plus de 5000 salariés sur le territoire avec leurs parties prenantes afin de responsabiliser les chaînes d’approvisionnement internationales. Le but est « d’identifier les risques et prévenir les atteintes graves aux droits humains et les libertés fondamentales, ainsi que le risque en matière de santé, de sécurité, et l’environnement ». Ce devoir consiste notamment en une cartographie et une hiérarchisation des risques, la mise en place d’action pour les atténuer ou les prévenir et la vérification régulière du respect des normes par les partenaires commerciaux. Si une entreprise ne le met pas en place, elle peut avoir une amende jusqu’à 10 millions d’euros (première fois qu’une amende peut être infligée pour réparer un dommage) et si le risque se concrétise, l’amende peut être triplée. Les syndicats patronaux contestent cette loi car elle pourrait porter atteinte à leur compétitivité et leur liberté d’entreprendre.

Le « Privacy by Design » :

Dans le but de communiquer commercialement sur leur éthique, et encouragée par la commission européenne, les grandes entreprises dans le domaine des nouvelles technologies comme Facebook, Apple ou WhatsApp, conçoivent désormais leur produit de manière à ce qu’elles ne peuvent pas avoir accès aux donnée échangées sur leur plateforme afin de respecter la vie privée et les données personnelles de leurs utilisateurs. Cependant, cela pose un gros problème pour les Etats dans le cadre d’enquête, notamment dans la lutte contre le terrorisme (voir le scandale entre Apple et le FBI), puisque cela implique que les personnes peuvent échanger librement sur ces plateformes sans avoir à craindre que la discussion puisse tomber dans les mains de la police puisque l’entreprise qui détient l’information s’est engagée à ne pas la communiquer ou ne peut même pas la lire. De fait, en France, un amendement a été adopté le 3 mars 2016 pénalisant par une amende de 350000€ tout constructeur de smartphone qui refuserait de livrer des informations à la justice dans le cadre d’enquête contre le terrorisme. Les entreprises sont donc coincées entre leur politique de RSE et les normes européennes, et la volonté de l’Etat pour lutter contre le terrorisme.

L’affaire Sanofi et la Dépakine (aout 2016) :

Entre 2007 et 2014, c’est plus de 14 000 femmes enceintes et d’enfants qui ont été exposés à la Depakine. Cette substance, prescrite pour soigner l’épilepsie notamment, peut s’avérer dangereuse   pour le fœtus d’une femme enceinte qui peut développer des malformations. Or, Sanofi, qui avait pourtant connaissance de ce risque, n’a pas prévenu les usagers de ce risque. Le groupe, qui distribuait son médicament dans plus de 130 pays, risque, outre le ternissement de son image de marque, un conflit judiciaire dans la plupart des pays et le montant des réparations des préjudices subis par les familles est estimé à plus de 40 milliards d’euros rien qu’en France. Si la responsabilité des médecins ayant prescrit le médicament sera également mise en cause, le groupe Sanofi, pour ne pas avoir communiquer sur le risque du médicament pour certains utilisateurs afin de ne pas restreindre son marché potentiel, ne pourra certainement pas se dédouaner de sa responsabilité.

La loi Sapin 2 (projet de loi relatif à la transparence économique, la lutte contre la corruption et la modernisation de la vie économique ; juin 2016) :

Suite au scandale des Panama Papers, ce projet de loi a pour but d’améliorer la transparence des grands groupes et lutter contre la fraude fiscale et contient :

– un reporting fiscal pays par pays pour tout entreprise dont le chiffre d’affaires annuel est supérieur à 750 millions d’euros, ayant une activité au sein de l’UE, ou ayant un nombre minimal de filiale dans des paradis fiscaux pour les autres. Cependant, beaucoup d’ONG jugent que le fait d’établir un seuil minimal de filiale permet à beaucoup de grands groupes de passer à travers le reporting et est donc inefficace.

– la modification des critères de rémunération des dirigeants concernés par le vote contraignant de l’assemblée générale qui concerneront désormais les avantages en natures liés à l’activité et les éléments de rémunération de l’activité.

– une amende pour les entreprises soupçonnées de corruption (30% de son CA maximum).

– un encadrement des pratiques de lobbying en créant un répertoire des représentants d’intérêts.

– la définition et la protection des lanceurs d’alerte

– la création de l’agence française anticorruption.

La hausse de la taxe sur les transactions financières (Décembre 2016) :

Le 15 Décembre 2016, les députés ont confirmé, à l’assemblée nationale, la hausse de la taxe sur les transactions financières, passant de 0,2% à 0,3%. L’argent récoltée par cette taxe est directement réinvesti dans la lutte contre les inégalités, le réchauffement climatique et autres problématiques liés au développement durable. Cependant, L’ONG OXFAM affirme être déçu que la taxe ne concerne que les actions, pas les produits dérivés, et surtout, qu’elle ne concerne toujours pas les « intradays », c’est-à-dire les échanges les plus spéculatifs puisque réalisés dans une même journée, le gouvernement préférant repousser la question jusqu’en 2018 en attendant une décision européenne.

Véto du Conseil Constitutionnel pour le registre des trusts (21 Octobre 2016) :

Le 21 Octobre 2016, le Conseil Constitutionnel a utilisé son droit de véto contre le registre des trusts, initialement établi le 10 Mai 2016 par décret, et qui permettait au public de consulter librement les données financières des grandes entreprises et ainsi lutter contre la fraude et l’évasion fiscale. Cependant, le Conseil Constitutionnel a considéré ce décret une violation de la vie privée causant un dommage disproportionné au regard du but poursuivi. Cela met ainsi en avant la difficulté malgré tout persistante à instaurer une politique de RSE lorsqu’il s’agit de transparence des entreprises.

Sanction de 97 entreprises pour discrimination :

En 2016, 97 entreprises ont été sanctionnées pour ne pas avoir respecté la « loi pour l’égalité réelle entre les hommes et les femmes », qui obligent les entreprises à établir un diagnostic des inégalités entre les deux sexes, de mettre en place un plan d’action à partir de ce diagnostic et essayer de mettre en place un accord d’égalité professionnelle. Plus de 2000 mises en demeure ont également été envoyées par le gouvernement.

65 propositions de la commission d’enquête parlementaire sur les conditions d’abattage :

Suite à de nombreux scandales dans les abattoirs, la commission d’enquête parlementaire donne 65 propositions dans le but d’améliorer les conditions de vie et le bien-être des animaux, mais également des salariés. On retrouve notamment, parmi ces propositions, l’augmentation des services vétérinaires dans les abattoirs et l’obligation d’installer des caméras de vidéo-surveillance là où les animaux seront conduits ou tués.

Adoption de la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages (Septembre 2016) :

Près de deux ans après les premières discussions, alors qu’elle était initialement annoncée pour 2012, cette loi a enfin été votée et prévoit notamment :

–          Le principe de préjudice écologique dans le code civil (pollueur = payeur) renforçant la jurisprudence Total/Erika

–          Le principe de solidarité écologique (renforçant les liens entre la préservation de la biodiversité et les activités humaines)

–          Le principe de non-régression du droit écologique, c’est-à-dire que les textes de loi concernant l’environnement ne peuvent faire l’objet que d’améliorations.

–          La création de l’Agence Française pour la biodiversité

–          L’interdiction des néonicotinoïdes

Adoption d’un amendement de formation contre la discrimination à l’embauche (Juin 2016) :

Cet été, les députés ont adopté, contre l’avis du gouvernement, un amendement précisant que toute entreprise de plus de cinquante salariés et dans toute entreprise spécialisée dans le recrutement, les employés chargés de missions de recrutements doivent suivre une formation à la non-discrimination à l’embauche au moins une fois tous les cinq ans.

« Le Flicage Généralisé » des salariés de Sanofi (Avril 2016) :

Depuis le mois le début du mois d’Avril, les 3000 salariés du site de Gentilly de Sanofi sont équipés d’une puce permettant à l’entreprise de tracer le moindre de leur mouvement. De plus, les locaux sont désormais entièrement collectifs et partagés par tous, il n’y a plus de bureaux personnels. Si l’entreprise se justifie en évoquant la volonté de permettre la meilleure occupation possible des nouveaux locaux grâce à des flux anonymes, et vouloir encourager le travail collaboratif, les salariés se plaignent bien évidemment d’atteintes à leur vie privée.

Rapport du groupe de recherche sur les méthodes de non-discrimination à l’embauche :

Suite à plusieurs mois de « testing » de centaines d’entreprise de plus de 1000 salariés auxquelles 2 faux CV identiques ont été envoyés mais dont l’un était au nom d’une personne à consonance maghrébine pour faire le constat des discriminations dans le recrutement des grandes entreprises, le groupe de recherche juge les résultats accablants. La ministre du travail Myriam El-Khomri refuse cependant d’avoir recours au « name and shame » et préfère mettre en place un dialogue avec les entreprises concernées.