Voici trois sujets qui mobilisent l’actualité et qui déchirent la communauté des économistes. Avant de les détailler, je vous rappelle que les ⅔ des sujets de concours s’ancrent dans l’actualité économique (le contre-exemple étant le cru 2016 avec deux sujets « classiques » à HEC et ESCP puis un sujet d’actualité avec la « guerre des monnaies » à ESSEC). Les concepts que nous allons analyser ici sont le quantitative easing, l’ubérisation des économies et l’austérité. Voyons ces notions ensemble !

1) Le Quantitative Easing 

Définition : Le quantitative Easing (ou QE pour les intimes) est une politique monétaire dite non conventionnelle. Une politique monétaire conventionnelle passe par les taux d’intérêt directeurs et les réserves obligatoires par exemple. Le QE consiste pour une banque centrale à racheter des titres sur les marchés financiers pour injecter des liquidités. Schématiquement : la banque centrale « imprime de l’argent » pour acheter des titres. Au final c’est autant de liquidités supplémentaires qui sont sur le marché.

Pourquoi c’est passionnant : C’est passionnant parce que les montants injectés sont astronomiques. Cet été, la BCE a dépassé le seuil des 1000 milliards d’euros. La Fed entre 2008 et 2015 a injecté près de 3800 milliards de dollars. (Je t’invite à mettre ces chiffres dans ton dossier « Kit de survie »). J. YELLEN, l’actuelle boss de la Fed, est en train de doucement lever le pied parce que ça commence à faire beaucoup. Mais la question est : est-ce que ça fonctionne ? Est-ce que cela permet de renouer avec la croissance et l’emploi ? Pour les États-Unis on serait tenté de dire oui. Pour l’Europe ce qui est sûr c’est que cela a constitué une bouffée d’oxygène pour les économies de la zone euro. Néanmoins le QE se heurte au concept keynésien de la « trappe à liquidité ». La trappe à liquidité témoigne de l’inefficacité de la politique monétaire dans une circonstance particulière. Si les agents ont des anticipations pessimistes, ils ne vont pas demander de monnaie (pour investir, consommer, etc.) et donc on a beau injecter des liquidités dans la finance et les banques, si les ménages et les entreprises n’en veulent pas, cela aura un impact très limité sur la conjoncture. Mais alors où va cet argent ? Pour Larry SUMMERS (2013) ou encore Paul KRUGMAN, ces politiques monétaires risquent surtout de créer de nouvelles bulles spéculatives !

2) L’ubérisation des économies

Définition : L’ubérisation des économies renvoie à la montée en puissance de plateformes connectées (souvent liées à des applications mobiles) qui mettent en relation les offreurs et des demandeurs sur un marché donné tout en « court-circuitant » les acteurs traditionnels. Ces nouveaux acteurs peuvent capter une part croissance de la valeur ajoutée et développent des modèles d’affaires innovants. Évidemment, le concept d’ubérisation vient du nom de l’entreprise Uber fondée par Travis KALANICK (celui à qui on doit la déclaration suivante : « Notre adversaire est un connard, qui s’appelle Taxi ») à San Francisco en 2008 et qui est valorisée à près de 70 milliards de dollars.

Pourquoi c’est passionnant : parce que « tout le monde a peur de se faire ubériser » (Maurice LEVY, patron de Publicis). Enfin, tout le monde… Non, surtout les « vieilles » entreprises du CAC 40 et du Dow Jones qui se voient concurrencer par des startups extrêmement innovantes, très agressives dans leur démarche et boostées par une croissance à deux chiffres. De nombreux secteurs se font uberiser : l’hôtellerie avec Airbnb, le transport avec Trusk et même le recrutement de call-girls avec Ohlala (l’app n’est pas disponible en France. Désolé). Reste à savoir si l’ubérisation des économies va créer plus d’emplois qu’elle n’en détruit, si les emplois créés sont aussi bien rémunérés que les anciens ou encore si ces entreprises vont payer leurs impôts ! (Airbnb a payé à peine 69 000 euros d’IS en 2015 en France). Si tu veux en savoir plus sur l’ubérisation des économies (et tu devrais) je t’invite à lire mon article dessus et à lire le corrigé que j’ai rédigé sur « intérêts et limites de l’ubérisation des économies).  

3) L’austérité

Définition : L’austérité est une politique économique qui vise la réduction des dettes et des déficits publics. Celle-ci peut passer par une baisse des dépenses publiques, par une hausse des rentrées fiscales ou par les deux en même temps. Elle a par nature un impact récessif (multiplicateur “inversé”). Aujourd’hui on observe la mise en place de politiques d’austérité dans des pays comme la Grèce. Le but final de ces politiques est de rétablir l’équilibre budgétaire à long terme et d’éviter le creusement du déficit public à court terme. Notons qu’historiquement toutes les politiques d’austérité n’ont pas visé cet objectif. Pendant les trente glorieuses, les “plans de refroidissement” PINAY (1952) et PINAY-RUEFF (1958) avaient eu pour but de freiner l’inflation et l’euphorie des affaires et pas de lutter contre l’endettement public. Gardez à l’esprit que pendant les trente glorieuses la dette publique française est restée sous les 20 % du PIB. C’est à partir des années 1980 qu’elle commence à poser problème.

Pourquoi c’est passionnant : C’est passionnant parce que c’est probablement un des plus grands clashs dans la communauté des économistes. Les libéraux (Pascal SALIN en France, mais aussi la Troïka) soutiennent ces plans comme condition préalable à un retour à la croissance dans les pays confrontés à des crises des dettes publiques. Les plans d’ajustement structurel (PAS) imposés par le consensus de Washington (expression de WILLIAMSON pour désigner le FMI et la Banque mondiale) s’ancrent dans cette représentation de l’économie. De l’autre côté, nous avons les auteurs que l’on peut qualifier de keynésiens qui s’attaquent aux politiques d’austérité. On y trouve KRUGMAN ou encore STIGLITZ, deux Prix Nobel d’économie. Pour ces derniers l’austérité est à l’origine d’un enfermement dans un marasme économique. La faible croissance et le chômage de masse (supérieur à 10 %) dans la zone euro en témoigneraient. En attendant, la Grèce s’est enfoncée dans la dépression. Apparemment dans tous les sens du terme puisqu’entre 2010 et 2015 son PIB a reculé de 25 % et le taux de suicide a augmenté de 100 % (d’après les chiffres fournis par PIGASSE dans L’éloge de l’anormalité).

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