Analyse sujet 1 ESH Ecricome

Retrouvez le sujet d’ESH Ecricome ici  🙂

ndlr : ne pas avoir avancer les mêmes arguments que l’auteur de cet article n’est pas synonyme de mauvaise note pour autant 😉

Conseils

  • Je pense qu’il était pertinent ici de n’analyser le sujet qu’au sein d’une même société. Analyser les inégalités de développement économique entre les pays n’aurait pas apporté grand-chose l’analyse et aurait rendu la réponse assez confuse.
  • Il était impératif de ne pas faire impasse sur les effets de la redistribution opérée par l’Etat (que ce soient des effets négatifs ou positifs). En effet, l’Etat modifie fortement (au moins en France), la distribution des revenus et donc les inégalités sont différentes si on les mesure avant ou après redistribution
  • Accentuer le fait que les inégalités sont aussi une question de perception et de jugement personnel, c’est pourquoi la lutte contre les inégalités n’est pas menée avec la même force dans différents pays.
  • Ne pas confondre “égalité” et “équité”. Cette dernière renvoie à l’idée de justice : il faut juger et traiter de manière égale des situations identiques mais accorder des droits spécifiques aux groupes sociaux dont la situation est jugée désavantageuses. C’est une égalité proportionnée à la situation des individus.

Introduction et éléments de contexte

Définitions

Les inégalités économiques sont des différences entre individus ou groupes sociaux portant sur des avantages ou des désavantages économiques et qui fondent une hiérarchie entre ces individus ou entre ces groupes. Ces désavantages économiques regroupent des différences de niveau de revenus et donc de consommation et d’épargne mais aussi de patrimoine. Les revenus sont ici de différentes natures: revenus du travail, du patrimoine, revenus mixtes et revenus sociaux (transferts).

Les instruments de mesure des inégalités

Prenons l’exemple des revenus. On peut représenter la hiérarchie des revenus en classant la population (individus ou ménages) dans l’ordre croissant des revenus et en les regroupant pour former des déciles, quartiles etc. A partir de ces données, on peut tracer une courbe de Lorenz, c’est-à-dire une représentation graphique de la distribution des revenus avec sur l’axe des abscisses les proportions cumulées d’individus (les 10% ayant les revenus les plus bas, puis les 20% etc) et sur l’axe des ordonnées la proportion cumulée des revenus (les 10% des revenus totaux distribués, puis les 20% etc).

Plus la courbe s’éloigne de la droite d’équirépartition, plus la société est inégalitaire.

Les tendances récentes

  • Les inégalités économiques entre citoyens sont en hausse dans plusieurs des grands pays en développement à expansion rapide, ce qui voudrait dire que beaucoup d’individus restent “à la traîne” et ne tirent aucun profit de cette croissance.
  • En France: il semblerait qu’à long terme il y ait une stabilité des inégalités de salaire, mais les inégalités de revenu sont plus fortes. La période 1965-1983 connait une réduction des inégalités, mais la tendance s’est inversée dans les dernières décennies. Enfin, les inégalités de patrimoine sont encore plus importantes que les inégalités de revenu et ont eu tendance à baisser de 1910 à 1970 pour se stabiliser voire remonter par la suite, que ce soit en termes de décile ou de centile.

Les causes

  • Depuis les années 1980, les inégalités de patrimoine ont fortement augmenté dans les pays développés. En France par exemple, la première guerre mondiale a détruit l’accumulation de capital à l’œuvre par les plus aisés, et les ravages ont débouché sur une plus juste répartition des ressources. Les Trente Glorieuses ont maintenu les inégalités à un niveau relativement bas. Cependant, la récente financiarisation de l’économie a constitué un moyen pour certains d’accumuler de plus en plus alors que les “nouveaux pauvres” caractérisait une nouvelle classe sociale (Piketty, Le Capital au XXIème siècle).
  • Le processus d’accumulation et de concentration des patrimoines dans un monde caractérisé par une croissance faible et un rendement élevé du capital. Pour Piketty, telle est la principale menace pour la dynamique de la répartition des richesses à très long terme.

Oui, les inégalités sont souvent vues comme une source de problèmes économiques

  • Une impression négative des inégalités vient d’études sur le bien- être et la satisfaction de vivre déclarées par les intéressées: il y a une apparente corrélation négative entre ces variables et l’augmentation des inégalités.

Il y a deux enjeux principaux:

  • Le premier en termes de justice sociale: les liens entre justice sociale et revenus mettent en question l’égalité des conditions de vie et l’équité de la répartition des revenus. Comment justifier l’ampleur des inégalités de revenus dans une société donnée? Est-ce vraiment une différence d’efforts, de productivité qui explique des rémunérations différentes? Et puis, les différences d’efficacité proviennent-elles seulement d’une différence d’efforts individuels? Cette question est directement liée aux inégalités dans la réussite scolaire.
  • Le second enjeux se pose en termes d’efficacité économique: comment juger de l’efficacité économique d’une certaine distribution des revenus? Il est pertinent de citer ici des économistes qui ont mis en évidence l’impact positif d’une certaine correction par l’Etat des inégalités de revenu qui proviendraient d’un fonctionnement libre des marchés, notamment du marché du travail. On peut penser, par exemple, que si l’Etat intervient pour aider financièrement les personnes en difficulté, les individus prendront plus de risques dans leurs activités économiques et innoveront plus. Or, un des facteurs clé de la croissance et de la hausse des revenus est l’innovation. Autre argument: dans une société moins inégalitaire, globalement la consommation est plus importante et l’épargne l’est moins: dès lors, il y a une incitation forte à produire et à investir plus.

–> Il faudrait donc combattre les inégalités parce qu’elles représentent en soi une situation injuste socialement, mais aussi parce qu’elles ont des conséquences néfastes pour l’efficacité et le développement économiques d’un pays.

Conséquences néfastes des inégalités économiques sur la croissance : sous l’hypothèse d’imperfection des marchés de capitaux, il est possible de mettre en évidence trois canaux par lequels l’inégalité peut excercer des effets négatifs sur la croissance:

  • Réduction des opportunités d’investissement
  • Diminution de l’incitation à emprunter
  • L’accroissement de la volatilité économique

Or, il faut éviter de tomber dans le piège d’une vision dichotomique de la réalité: les inégalités n’ont pas que des conséquences préjudiciables

La thèse selon laquelle les inégalités sont favorables à la croissance est sous-tendue par trois arguments :

  • L’hypothèse de Kaldor selon laquelle la propension marginale à épargner des plus riches est plus élevée que celle des pauvres : si le taux de croissance est directement relié à la proportion du revenu national qui est épargné, les pays à plus forte inégalité doivent connaître une croissance plus forte
  • L’existence de coûts irrécupérables des investissements qui nécessite une concentration de la richesse
  • L’argument d’une nécessaire antinomie entre efficience et égalité (MIRRLEES 1971). Une taxation plus forte réduit le taux de rendement après impôt de l’épargne, réduit l’incitation à accumuler le capital et par voie de conséquence le taux de croissance.

(cf rapport ATKINSON, GLAUDE, OLIER et PIKETTY).

Finalement, la question est surtout celle de l’efficacité: le gouvernement doit faire un calcul entre les conséquences de ces inégalités et le coût qu’il peut y avoir à lutter contre elles

 

  1. Quels sont les instruments pour lutter contre les inégalités éco?
  • Les politiques volontaristes en matière d’éducation : la diffusion du savoir et des connaissances. Ex: la Chine dont le développement se fait grâce à la montée en compétences de la population. Cela permet notamment un processus de convergence technologique entre les pays pauvres ou émergents et les pays riches. –> Objectif central: l’égalité des chances dans l’accès à l’enseignement supérieur.
  1. Sont-ils efficaces?

–>  Aucune des études disponibles (BARRO, FORBES et BANERJEE, DUFLO, cf article sur les effets des inégalités sur la croissance) n’ont permis de prouver de façon 100% sûre que les inégalités étaient préjudiciables à l’économie.

Il serait cependant absurde de supposer que la croissance économique est naturellement “équilibrée” à long terme. “Il faut se méfier de tout déterminisme économique: l’histoire de la répartition des richesses est toujours une histoire profondément politique et ne saurait se résumer à des mécanismes purement économiques”. En effet, la remontée des inégalités depuis les années 1970 – 1980 doit beaucoup aux retournements politiques des dernières décennies, notamment en matière fiscale et financière. L’histoire des inégalités dépend des représentations que se font les acteurs économiques, politiques et sociaux de ce qui est juste et de ce qui ne l’est pas.

Cependant, la question du “retour de l’Etat” ne se pose pas de la même façon dans les années 2010 que dans les années 1930: le poids de l’Etat est beaucoup plus lourd aujourd’hui qu’il ne l’était à l’époque.  Les deux points de vue, anti-marché et anti-Etat, ont chacun leur part de vérité : il faut tout à la fois inventer de nouveaux outils permettant de reprendre le contrôle d’un capitalisme financier devenu fou, et rénover et moderniser en permanence les systèmes de prélèvements et de dépenses qui sont au cœur de l’État social moderne, et qui ont atteint un degré de complexité qui menace parfois gravement leur intelligibilité et leur efficacité sociale et économique.

Cette double tâche peut sembler insurmontable, et elle constitue de fait un défi immense pour nos sociétés démocratiques dans le siècle qui s’ouvre.