En ces derniers jours de révisions, Major-Prépa t’aide à être prêt en t’offrant la lecture de très bonnes copies sur des sujets susceptibles de tomber aux concours. Pour cette première copie de géopolitique complète publiée, les remarques du correcteur seront placées en italique entre deux tirets –exemple-. Nous avons choisi de publier une copie sur le sujet Mondialisation, intégration européenne et mutations du système productif français. Comme vous le constatez, ce sujet consiste à une analyse de la France à partir de son environnement proche, européen, et de celui mondial. Bref, c’est le type de sujets aux analyses multiscalaires qu’adorent les concepteurs de sujets !

Cette copie, plus dense que ce qu’on exige aux concours, est très riche en exemples que vous pouvez tout à fait réinvestir. En revanche, sa conceptualisation est perfectible, mais vous le savez : on n’apprend pas de plans de sujets pour les recracher le jour J, c’est le meilleur moyen de passer à côté du sujet et d’avoir une mauvaise note ! 😉

Sujet : Mondialisation, intégration européenne et mutations du système productif français

Introduction :

En 2012, le constructeur français PSA affichait 5 milliards d’euros de pertes tandis que son concurrent allemand, Volkswagen, engrangeait 21 milliards d’euros de profits, de quoi laisser penser que les entreprises françaises ont du mal à évoluer dans la mondialisation et qu’elles sont mises à mal par l’intégration européenne (PSA réalise plus de 60% de ses ventes en Europe). Cependant, en 2014, c’est le constructeur chinois Dongfeng qui apporte des capitaux à PSA, participant à son sauvetage ; et les ventes du groupe repartent à la hausse en Europe. Ainsi, le système productif français semble être victime de ces deux cadres tout en sachant profiter des opportunités qu’ils offrent.

Par le terme de mondialisation, on entend « l’intégration plus étroite des pays et des peuples du monde qu’ont réalisée, d’une part, la réduction considérable des coûts de transport et des communications, et d’autre part, la destruction des barrières artificielles à la circulation transfrontière des biens, des services, des capitaux, des connaissances et (dans une moindre mesure) des personnes » (Joseph STIGLITZ) débutée dans les années 1980. L’intégration européenne désigne quant à elle les actions en faveur de davantage de coopération au niveau européen (dans le cadre de l’Union Européenne) au niveau politique mais surtout au niveau économique. –l’intégration –> plus que des coopérations : des politiques communes– Quant aux mutations du système productif français, cela désigne une dynamique à l’œuvre dont on ne connait pas encore l’issue (ce qui est porteur de beaucoup d’inconnues, d’inquiétudes, mais aussi d’espoirs) marquant « l’ensemble des facteurs et des acteurs concourant à la production, à la circulation et à la consommation de richesses » (Laurent CARROUE) associant ainsi la dimension productive à celle spatiale et sociale. Nous allons considérer que le système productif français désigne ces « facteurs et acteurs » situés sur le territoire français et non pas des implantations étrangères appartenant à une entreprise française (comme une usine située à l’étranger et appartenant à une entreprise française) exerçant dans la sphère productive (agriculture, industrie, BTP). Il apparaît que la mondialisation héritée des années 1980 et l’intégration européenne entrent en contradiction avec les traditions françaises en matière de production (très étatisée) –discutable : la production n’est pas étatisée-, de répartition territoriale des activités industrielles (la DATAR périclite) ou encore de l’Etat-Providence (avec l’émergence du libéralisme héritée à la fois de « Bruxelles » et de la mondialisation et donc la remise en cause des prérogatives de l’Etat centralisateur). Néanmoins, nombreux sont ceux qui, au regard de la conjoncture industrielle morose, dénoncent ces deux nouveaux paradigmes à savoir le  cadre européen unifié (sur lequel nous pouvons influer) ainsi que celui de la mondialisation (sur laquelle nous semblons n’avoir aucune emprise). Nous pouvons donc nous demander si, face à la mondialisation et à l’Union Européenne, le système productif français a réussi son intégration ou bien s’il fait face à une confrontation périlleuse ?

Après nous être intéressé au fait que le système productif français soit mis en difficulté depuis l’avènement de la mondialisation et l’intégration économique européenne effective  le forçant à subir des mutations forcées (I), nous verrons cependant que ce système productif peut orchestrer ses mutations afin de prendre part à la mondialisation et de peser sur l’économie européenne (II) –ne correspond pas vraiment à la phrase-titre-. Néanmoins, le système productif français est toutefois doté d’atouts considérables et est capable de surmonter ses nombreux défis.

Première partie :

L’Europe puis la mondialisation sont des cadres que la France accepte au début des années 1980 (1). Néanmoins, depuis ce tournant, on observe une dégradation des indicateurs économiques  (2), ce qui entraîne des réactions politiques et populistes négatives face à la mondialisation et à l’intégration européenne, ce qui menace la pérennité de notre système productif (3).

A l’aube des années 1980, la France élit un président socialiste, François Mitterrand. Le premier ministre, Pierre Mauroy, mène une politique économique keynésienne visant à relancer la consommation par l’endettement. Hélas, cette politique ne fonctionne pas car la France découvre alors la contrainte extérieure : si les dépenses étatiques sont en hausse, les recettes ne suivront plus forcément la même tendance. En effet, en économie ouverte, une politique de relance bénéficie également aux produits émanant d’entreprises étrangères (japonaises et allemandes notamment). Ainsi, Pierre Mauroy opère un tournant en 1983 en termes de politique économique en menant une politique résolument libérale. Avec la réalisation de l’Acte Unique en 1986 (sous la mandature du français Jacques Delors) visant à unifier effectivement les marchés européens, le système productif français accepte donc deux nouveaux cadres internationaux, celui européen ainsi que celui mondialisé. L’intégration européenne menée depuis le traité de Rome en 1957 a donc été l’occasion pour le système productif français d’opérer des mutations qui agissent comme étant des préparatifs à la compétition mondiale générée par l’avènement du processus de la mondialisation. Pour gagner des parts de marché dans ce nouveau jeu européen et mondial, la France mène des politiques de désinflation et de dévaluation compétitives. Ainsi, la France entre véritablement en concurrence avec des entreprises du monde entier : le taux de pénétration du marché manufacturier français est passé de 20 à 45% entre 1970 et aujourd’hui, symétriquement, la part exportée de la production manufacturière est passée de 20 à 45%. Si cet indicateur économique montre une évolution neutre en termes de réussite ou d’échec, d’autres indicateurs semblent davantage plaider en faveur de la seconde option.

Alors que la France opérait un rattrapage économique depuis 1945 jusqu’aux années 1980, les indicateurs économiques n’ont cessé de se détériorer depuis cette décennie. Sa croissance est atone et plane à 0,3% alors que les Etats-Unis ont connu une croissance de 3,2% en 2013. Depuis 2002 et l’arrivée de l’euro, la balance commerciale française est en déficit ; celle des transactions courantes l’est depuis 2005. En 1999, son excédent commercial représentait 1% du PIB, aujourd’hui, le déficit commercial de 60 milliards d’euros représente 3% du PIB.  Parallèlement, la part des exportations mondiales réalisée par la France est passée de 6% en 1980 à seulement 3,5% aujourd’hui. Alors qu’en 2003, les exportations françaises représentaient 55% de celles allemandes, elles ne représentent plus que 39% de celles allemandes en 2013. De plus, la somme des flux d’IDE en direction de la France n’a cessé de se dégrader au cours des dernières années : en 2011, le pays a reçu 24,1 milliards d’euros contre 12,7 milliards en 2013. La France perd 76 000 emplois industriels par an et la sphère productive (agriculture, BTP et industrie) ne réunit plus que 20% de la population contre plus de 40% au début des années 1980, non seulement à cause de l’externalisation de certaines tâches et les gains de productivité issus de la robotisation, mais aussi à cause des nombreuses délocalisations directes (quand un entreprise licencie des salariés en France pour produire à meilleur coût ailleurs) ou indirectes (quand une entreprise se détourne de la France et ouvre une usine ailleurs, comme Renault l’a fait à Tanger) –Attention, l’étude des facteurs doit être menée avec rigueur-. De ces statistiques, nous pouvons en déduire que le système productif français éprouve des difficultés à retrouver le rythme de croissance de ses concurrents mondiaux,  qu’il marque un recul face à ses adversaires européens et mondiaux, qu’il attire de moins en moins d’investissements de la part des investisseurs internationaux et qu’il est de moins en moins employeur, produisant ainsi ce « capitalisme sans travailleurs » (Viviane FORRESTER). Ces pertes d’emplois pourraient être positives, si elles s’accompagnaient d’un remplacement par des emplois tertiaires. Or si au XXème siècle, le nombre d’agriculteurs a été divisé par 20 et que l’agriculture est aujourd’hui plus productive que jamais grâce à la PAC (c’est d’ailleurs l’exemple d’un secteur du système productif que l’intégration européenne a très fortement avantagé, avec l’aéronautique), la perte d’emplois industriels ne s’accompagne pas d’un renforcement de notre système productif.

L’intégration européenne et la mondialisation servent alors de boucs émissaires, ils se trouvent donc accusés d’être à l’origine de ce recul. Ces accusations constituent le fonds de commerce de certains mouvements politiques d’extrême-droite (Front national) et de gauche radicale (Front de Gauche) qui accusent le libéralisme de « Bruxelles » de menacer le système productif français. Si jusqu’à présent, ce discours était réservé aux partis extra-gouvernementaux (comme lors de la campagne pour le « non » à la Constitution Européenne de 2005 ou des multiples campagnes de José Bové contre les taxes décidées par les Américains sur le Roquefort pour rattraper le préjudice subi par l’interdiction du bœuf aux hormones ou encore les OGM de Monsanto accusés de nuire à l’agriculture), ces pensées ont pu pénétrer au sommet de l’Etat.  Ainsi, entre 2012 et 2014, Arnaud MONTEBOURG a été ministre de l’Economie. Il avait notamment écrit en 2011 un ouvrage intitulé Votez pour la démondialisation dans lequel il remettait en cause ce processus qu’il qualifie « d’escroquerie »  car le système productif français se confronte à des pays comme la Chine où les semaines de travail sont de 60 heures et où les congés annuels n’excèdent les 12 jours (et où le coût de fabrication d’une batterie externe de qualité intermédiaire est de 5$ alors qu’il serait de plus de 20$ en France). Dans cet ouvrage il remet également en cause l’intégration européenne qui se fait au bénéfice de l’Allemagne, pays où existent des « 1-euro-jobs », payés 1€ de l’heure, qu’il qualifie ainsi de « Chine de l’Europe ». Ce pays est également celui qui a le taux de change optimal EUR/USD  le plus élevé (évalué à 1€ = 1,6$ par de nombreux économistes) alors que la France aurait un taux de change optimal compris entre 1,15$ et 1,20$ par euro. Pour Montebourg, l’intégration européenne aboutit sur un gagnant, l’Allemagne, mais sur 26 perdants (le livre a été écrit avant l’intégration de la Croatie). Par ailleurs, la Commission européenne interdit à la France (et aux 27 autres membres de l’Union) de subventionner ses entreprises afin de ne pas pratiquer d’entraves à la libre-concurrence. L’industrie française doit donc se battre à armes égales avec celles d’Allemagne, d’Italie ou de Suède, plus compétitives car se basant sur des modèles efficaces (compétitivité-qualité pour l’Allemagne, les districts industriels en Italie, des marchés de niches comme les poids lourds ou l’ameublement pour la Suède). Il convient alors de vérifier sur quelles bases se fondent ce type de déclarations, le système productif français est-il réellement en train de périr à cause de cette confrontation à l’Europe et à la mondialisation, comme nous le suggèrent les médiatisations de fermetures d’usines (PSA Aulnay, Goodyear Amiens, Arcelor-Mittal Florange, Continental Clairoix, Petroplus Petit-Couronne) ?

Deuxième partie :

Le système productif français est avant tout modelé par des grandes entreprises industrielles qui décident de prendre part à la mondialisation et s’implantent sur les marchés européens et mondiaux, ce sont le plus souvent des « champions nationaux ». (1) Néanmoins, le système productif français, qui ne restreint pas à ces grands groupe éprouve de nombreuses difficultés face à la mondialisation et à son principal concurrent européen : l’Allemagne. (2) Ces difficultés émanent aussi de stratégies n’ayant pas porté leur fruit, aussi bien publiques que privées, laissant présager une confrontation tumultueuse (3).

Le système productif français est des plus performants à l’échelle mondiale : notre pays est 5ème PIB mondial, 2ème PIB européen, 6ème puissance commerciale mondiale, 6ème exportateur mondial. Les entreprises semblent s’être très bien accommodées de ce nouveau cadre : près de 75% du chiffre d’affaires des entreprises du CAC40 est réalisé en-dehors du territoire français, ce qui démontre que les très grandes entreprises françaises ont adopté et semblent réussi leur insertion sur les marchés européens et mondiaux.  La CNUCED a mis en place l’indice de transnationalisation afin de mesurer l’internationalisation croissante des grandes entreprises en prenant en compte la part des actifs, du CA et celle de l’emploi étranger sur celui total. En France, la firme la plus transnationale est Lafarge qui affiche une moyenne de 82% sur ces trois critères et dont la fusion avec le groupe helvétique Holcim aboutira même jusqu’au déplacement de son siège social hors du territoire français, en Suisse. Notre système productif compte de très nombreux numéro 1 : Air Liquide dans le domaine du gaz industriel, Vinci dans le BTP (Bouygues est numéro 2, Eiffage est quatrième), Saint-Gobain et Lafarge dans les matériaux de construction, Essilor dans l’optique (par ailleurs classée comme l’entreprise la plus innovante d’Europe), Airbus Group (entreprise éminemment européenne) dans l’aéronautique, Michelin dans les pneumatiques, Areva dans le nucléaire. D’autres entreprises figurent également dans le podium mondial de leur secteur : GDF Suez, EDF, Vallourec et d’autres sont aussi très compétitives (Total, Sanofi) –Premières capitalisations boursières françaises-. Ces entreprises illustrent la puissance du système productif français qui se transforme, celui capable d’aller chercher des opportunités d’affaires en Europe et dans le monde entier : malgré ce que nous donner à penser le rachat d’une branche d’Alstom par l’américain GE, les entreprises françaises ont davantage fait l’acquisition d’entreprises étrangères qu’inversement (en valeur). Néanmoins, ceci peut se faire aux dépens du système productif français (dont on a défini qu’il n’était que celui implanté sur notre territoire et ne comprenant pas les usines françaises implantées à l’étranger), à l’image de L’Oréal qui a investi 100M€ pour ouvrir une usine en Indonésie ou de Renault qui a investi 1Md€ pour ouvrir une usine à Tanger, ce qui renforce le système productif indonésien et marocain, certainement pas celui français.

Doit-on alors redouter une France sans usines comme nous le suggère le titre de l’ouvrage de Patrick ARTHUS et de Marie-Paule VIRARD ? Si ces grandes entreprises semblent être couronnées de succès, elles ne regroupent que 200 des plus de 3 millions d’entreprises existant en France, 99,8% des entreprises françaises sont des micro-entreprises, des PME ou des ETI: ce sont elles qui éprouvent le plus de difficultés à l’heure actuelle car elles ne peuvent rivaliser avec le Mittelstand allemand (qui compte 350 000 entreprises exportatrices contre 120 000 en France) et encore moins contre les pays à bas coût. P. Arthus et M.-P. Virard expliquent dans leur ouvrage que le problème vient de fait que la France est un territoire dont les mutations récentes du système productif aboutissent à une perte d’attractivité. Son système productif se base majoritairement sur une compétitivité-qualité : elle exporte des biens de bas et de milieu de gamme. Or, les coûts ont progressé plus vite en France qu’ailleurs : le coût horaire du travail a progressé de 45% entre 2000 et 2013 (en monnaie courante) contre 25% en Allemagne sur la même période. Ce dernier s’appuie également sur une externalisation importante dans des pays proches comme la République Tchèque ou la Hongrie où les coûts salariaux sont quatre fois inférieurs à ceux allemands. Comme l’affirme l’éditorialiste du Financial Times Martin Wolf, l’Allemagne « réexporte des importations » et donc par la force de l’euro, ces importations de produits intermédiaires lui reviennent à bon coût. Ce modèle n’est pas reproductible et nuit aux autres pays européens car l’excédent commercial allemand s’appuie sur le déficit de celui des autres pays européens. De même, la « guerre des monnaies » (Song Hongbing) qui voit les monnaies essayer d’être les plus compétitives semble être défavorable à l’euro qui n’est jamais passé en-dessous de son cours d’introduction (1€ = 1,17$), ce qui défavorise des exportations basées sur un bas-coût (seuls 40% des exportations françaises sont assurées par des biens haut de gamme et de haute-technologie). Néanmoins, le cadre européen n’est pas le seul responsable de cette dégradation du système productif français.

Les stratégies des acteurs de ce système productif (les entreprises et l’Etat), définissant ainsi les mutations de cette dernière, sont aussi responsables de cette dégradation. D’une part les stratégies des grandes entreprises françaises ne servent pas forcément le système productif français. Comparons la stratégie des firmes automobiles allemandes et françaises. Celles allemandes délocalisent une partie de leur production, celles des produits intermédiaires, en Europe centrale et orientale afin de bénéficier d’une main d’œuvre relativement bien qualifiée dont le coût est modeste. En fin du processus, l’assemblage se fait en Allemagne ce qui préserve son système productif. A l’inverse, les firmes automobiles françaises ont opéré une autre forme de mutation de leur processus productifs : la totalité de la production ainsi que l’exportation se fait à partir du pays dans lequel la firme est implantée (en Roumanie, au Maroc pour Renault par exemple) –On peut nuancer (Renault-> Espagne)-. Il en résulte des fermetures d’usines et un abandon du système productif français. Ces mutations impliquées par ce type de stratégie d’entreprises est donc néfaste pour notre système productif. A cette stratégie privilégiant les coûts et qui ne se soucie pas de la préservation du système productif français s’ajoute des politiques destinées à soutenir les mutations du système productif peu efficaces. Durant les années 1960, aux prémisses de l’intégration européenne, le Plan Calcul était destiné à développer le secteur informatique (secteur incarnant par excellence ces mutations) en France ; aujourd’hui, nous avons tous des ordinateurs chinois, japonais ou américains. Durant les années 1970, le gouvernement avait soutenu le développement du Minitel, et patatras, Internet l’a balayé malgré l’avance chronologique dont bénéficiait le Minitel. Durant les années 1980, l’Etat avait relancé l’industrie charbonnière, il n’en résulte que des dettes. Ces politiques étatiques inefficaces ont très récemment trouvé un écho chez le patron du fonds spéculatif Greenlight Capital, David Einhorn. Celui-ci s’est insurgé contre le faible taux d’intérêt de la dette française que les investisseurs consentent à accorder : ils accordent trop de confiance à un pays éprouvant des difficultés à se réformer (ce qui est pourtant indispensable pour s’adapter aux mutations), évoquant notamment des mesures qui grèvent le bon fonctionnement du système productif français comme les 35 heures (alors que les Français travaillent en moyenne 40,5 heures par semaine) ou encore la taxe à 75% sur les hauts revenus, un esprit hostile aux réformes des entreprises (grèves), à l’Europe et à la mondialisation (le FN, premier parti en pourcentage de voix exprimées aux élections européennes). La France ne serait donc pas assez business-friendly, ce qui pénalise son système productif. Il cible également le CICE dont les principaux bénéficiaires sont La Poste et les entreprises de grande distribution. Pourtant, elles ne participent que très peu aux innovations nécessaires, ce qui s’avère inefficace dans l’optique d’accompagner les mutations du système productif. Si l’on s’en tient et que l’on s’arrête à ces considérations, il semblerait que la France n’ait que très peu d’atouts. Ainsi, lors du Conseil Stratégique de l’Attractivité (CSA) d’octobre 2014, de nombreux dirigeants étrangers invités à l’Elysée citaient comme atouts de notre pays l’histoire, la culture, le tourisme et l’immobilier…  Ce qui est bien loin des véritables atouts de notre système productif.

Troisième partie :

Les défis à surmonter afin que les mutations à venir du système productif français lui permettent de réussir pleinement son insertion au sein de l’Europe mais aussi de la mondialisation sont nombreux. Ils doivent répondre aux faiblesses actuelles de notre système productif et donc à chaque faiblesse est associé un défi. Premièrement, la France dispose d’atouts qui constituent une base solide de notre système productif. (1) Ensuite, si d’une part l’accent doit être mis sur l’investissement en R&D (recherche et développement) et la formation pour rivaliser au niveau mondial (2),  il faut d’autre part que notre système productif se réoriente vers les secteurs d’avenir afin de redéfinir sa place dans une éventuelle division européenne du travail ou bien dans une DIPP et d’y gagner en compétitivité structurelle (3).

L’intégration européenne constitue le premier atout du système productif français. Cette intégration lui permet de s’inscrire dans l’ensemble ayant le PIB le plus élevé du monde, d’être dans la première zone d’attraction d’IDE (l’UE en attire deux fois plus que les Etats-Unis). Les atouts cités par les dirigeants d’entreprises lors du CSA ne se limitent heureusement pas à ceux précédemment cité. Si la position géographique de la France, au cœur de l’Europe constitue un atout, Jean-Pierre Clamadieu, patron du groupe belge Solvay affirme aussi « apprécier la qualité des ingénieurs, les relations entretenues avec les universités et le CNRS », ainsi, alors que son groupe n’y réalise que 7% de son chiffre d’affaires, 40% de sa R&D est effectuée en France. Le vice-président de BlackRock (plus gros détenteur d’actifs au monde avec près de 4000Ma$), Philipp Hildebrand, y vante « une productivité élevée, autant qu’en Allemagne » et « le premier pays d’Europe en matière d’infrastructures ». Ainsi, l’effort mené par l’Etat pour moderniser ses infrastructures (réseau routier, ferré, aérien notamment) que suppose l’intégration européenne et l’avènement de l’archipel métropolitain mondial (et donc l’interconnexion croissante des axes majeurs) exerce un impact positif, et s’avère apte à accompagner les mutations d’un système productif qui gagne dès lors en compétitivité.  Certaines politiques industrielles, comme le Plan Messmer en 1974 qui a permis l’avènement du nucléaire et donc d’une énergie très bon marché –pas forcément durable-, ont également renforcé l’attractivité de la France, ce qui attire également des entreprises dont les productions sont voraces en énergie.

A ces qualités s’opposent néanmoins le manque critique de R&D dont souffre notre pays ainsi qu’une insuffisance de la formation. Premièrement, notre pays souffre du manque de recherche appliquée. Si la France se distingue par ses qualités en recherche fondamentale (deux Prix Nobels ont été reçus cette année), elle a du mal à être performante en termes de recherche appliquée. Il est étonnant de constater qu’il y a plus de chercheurs qui travaillent en région parisienne (80 000) que dans la Silicon Valley. Pourtant, si les entreprises américaines brillent dans les nouvelles technologies et plus particulièrement dans le hardware, on ne peut que s’inquiéter de la quasi-absence des entreprises françaises dans ce domaine (son seul digne représentant dans les produits multimédias, Archos, éprouve des difficultés à définir son positionnement, tiraillé entre un bas de gamme qui érode les marges, un moyen de gamme saturé et un haut de gamme inaccessible, l’entreprise est attaquée par des fonds spéculatifs).  Or un système productif qui ne se base pas sur une importante R&D ne peut monter en gamme (et sortir donc du piège du milieu de gamme, ce que le secteur automobile tente de faire, notamment avec la création de la marque DS qui rejoint Peugeot et Citroën dans le groupe PSA) et dégager des fortes marges qui peuvent être réinvesties, créant ainsi un cercle vertueux (comme celui enclenché par le système productif allemand il y a 10 ans alors qu’il traversait des difficultés). Ce cercle vertueux pourrait être enclenché par des politiques de formation professionnelle permettant de combler les déficits de main d’œuvre que connaissent certains secteurs du système productif, comme le développement des filières d’apprentissage (et sa juste considération sociale) qui permettrait de le combler. Les filières du supérieur apportent aujourd’hui un nombre important de diplômés en filière scientifique (la France…et la Roumanie sont les champions du nombre de diplômés en sciences par habitant) et les écoles de commerce françaises délivrent des masters très bien classés. Le projet du plateau de Saclay regroupant des très grandes écoles françaises (ENS Cachan et les écoles du groupe ParisTech) et des entreprises (comme EDF)  a pour ambition de créer une « Silicon Valley » à la française, apte à attirer les meilleurs étudiants mondiaux (la France accueille près de 250 000 étudiants étrangers alors que seuls 65 000 français étudient à l’étranger) qui ont longtemps eu du mal à être bénéfique à notre système productif (affaire de la circulaire Guéant). La mobilité offerte par l’intégration européenne et par la mondialisation peut donc être un atout pour notre système productif, capable d’attirer de la matière grise mais aussi capable d’envoyer ses ressortissants étudier à l’étranger.

0,6% du PIB européen est alloué à des aides envers l’industrie. Elles promeuvent notamment les industries vertes, celles qui apporteront la croissance au XXIème siècle. Si notre système productif brille dans certains secteurs d’activité, il ne faut pas pour autant passer à côté des mutations de l’économie mondiale. Ainsi, si le secteur automobile, par nature cyclique, est en difficulté à l’heure actuelle, certains secteurs connaissent une croissance rapide : celui des énergies renouvelables par exemples. Si des grands groupes y participent (comme EDF Énergies Nouvelles ou FirstSolar, propriété de Total), des PME sont également capables de s’implanter. Ainsi, aidées par la BPI, des firmes comme Vergnet ou Urbasolar qui exportent le savoir-faire du système productif français jusqu’en Éthiopie (avec la ferme d’Ageshoda) ou au Kazakhstan (centrale solaire d’Astana). Si le solaire ne présente que peu de perspectives en France à cause de son faible ensoleillement (et pourtant, 4 des 5 plus grandes centrales solaires du pays sont dans le tiers Nord),  l’éolien offshore offre des meilleures perspectives : les côtes venteuses sont plus productrices d’énergie que le soleil.

Conclusion :

Nous nous étions demandé si le système productif français voyait dans l’intégration européenne et la mondialisation une confrontation périlleuse ou bien si son insertion était réussie. Nous pouvons répondre que, malgré les difficultés rencontrées, il semble que le système productif français ait réussi son insertion. Même si les difficultés sont palpables, la France demeure une des toutes premières puissances productives mondiale et sait tenir son rang. Enfin, la France bénéficie d’une configuration démographique optimale (sa population passera devant celle de l’Allemagne d’ici 2050), ce qui aura un impact positif quant à son système productif qui pourra alors y gagner en taille critique. Espérons également que les réformes annoncées par le gouvernement portent ses fruits et puissent permettre à notre système productif de surmonter de ses difficultés car il en va de notre avenir, aussi bien individuel (notre capacité à trouver un emploi) que collectif (la réussite de notre pays sur la scène internationale).

Commentaire du correcteur :

De l’aisance, des données convaincantes, un très bon travail. (Ne pas oublier les territoires et l’agriculture)

  • Attention à la clarté (cohérence du plan – la seconde partie aborde à la fois atouts et faiblesses face à la mondialisation
  • Une argumentation très claire, c’est solide, des faits précis et bien choisis.
  • Des remarques pertinentes, des références bien utilisées qui montrent que les ouvrages ont été lus
  • Il reste que les difficultés du système productif français ne sont pas expliquées pour elle-même (positionnement qualité/prix ?, expliquez les délocalisations, les difficultés à attirer les IDE aujourd’hui, la faible R&D des PME…)

Utilisez les concepts pour problématiser le discours –> justifier celui de système productif, raisonner sur la compétitivité, la contrainte extérieure, la désindustrialisation, le capitalisme “à la française”, DIPP et externalisation.

Tous les articles de géopolitique sont à retrouver ici : /