Réussir sa classe préparatoire implique de savoir prendre le temps de se détendre quand il le faut. Malgré tout, beaucoup se sentent parfois coupables de ne pas travailler. Pour remédier à cela, il faut savoir allier l’utile à l’agréable ; et rien de mieux pour cela que de regarder un petit film, une petite série ou un documentaire, toujours en VO (pour travailler les langues bien sûr). Le mieux est que, parfois, ceux-ci sont mêmes réutilisables en dissertation ou en colle (le plus souvent). Major-Prépa vous invite donc à travers une nouvelle série de découvrir ou redécouvrir vos séries et films préférés sous l’angle de la prépa.

Mise en garde : si les exemples originaux sont appréciés, il ne faut pas en abuser. Pour citer un film ou une série, il faut s’assurer que celle-ci soit connue et reconnue pour ses qualités et son sérieux ; les œuvres récentes doivent avoir une plus grande reconnaissance que des plus anciennes (car il faut du temps pour avoir un vrai recul). Le plus souvent, elles seront utiles pour vos exordes ou vos conclusions.

 

Résumé de la série (attention spoils possibles)

 Réalisée par Pedro Pascal et produite par le géant du streaming américain Netflix (fondé en 1997 et aujourd’hui valorisé à près de 63 milliards de $), Narcos retrace l’histoire de la guerre contre la drogue menée par les Etats-Unis en Colombie. Steve Murphy, un jeune agent de la DEA (Drug Enforcement Administration, l’agence fédérale dépendant du Département de la Justice américaine assurant le respect des lois concernant les drogues) est ainsi envoyé en Colombie au début des années 1980 pour démanteler le cartel de Medellin, association des plus puissants narco-traficants de Medellin sur lequel règne Pablo Escobar. Ce dernier, ancien contrebandier, se lance dans la production et l’exportation de cocaïne après sa rencontre avec un chimiste chilien. Très vite, il met en place un réseau lucratif vers Miami aux Etats-Unis, corrompant allègrement la police locale pour éviter tout désagrément. La série décrit ainsi la vie réelle mais quelque peu romancée du baron de la drogue.

Ayant acquis richesse (sa fortune sera estimée à 7 milliards de l’époque, faisant de lui le 7e homme le plus riche selon Forbes), Pablo se lance dans la politique en se vantant de faire plus pour les pauvres que le gouvernement et sera élu député en 1982. Cependant, ses confrères chercheront à l’évincer, ce qui l’amènera (même s’il l’a toujours nié) à attaquer le parlement en 1983. Sombrant dans une logique de violence, inventant le narco-terrorisme, pour faire craquer les politiques, Pablo attire l’attention de la DEA. Mais Steve Murphy et Javier Pena, son partenaire plus terre-à-terre, souffrent des nombreux blocages de l’agence et notamment de la CIA qui cible avant tout la guerilla communiste.

Pablo finira par passer un deal avec le gouvernement colombien en acceptant d’être enfermé dans une prison construite par lui-même, et du nom de « La Cathédrale ». Cette mascarade finira par tourner court après l’assassinat par Pablo de plusieurs membres de son cartel. Condamner à fuir, il sera rattrapé et tué par Javier Pena en 1993.

Pablo Escobar, un personnage mythifié

Pablo Escobar reste aujourd’hui un personnage clivant. En Amérique latine, et surtout en Colombie et notamment Medellin où il a construit tout un quartier pour les plus pauvres, Pablo Escobar est une figure louée par la population, perçue comme un robin des bois moderne, prenant aux riches américains l’argent pour aider les plus pauvres en Colombie. Cette vision contraste avec celle du narco-terroriste occidentale, celle d’un homme n’hésitant pas à faire exploser avion de ligne, magasins, ou à assassiner de grandes figures politiques. Il en résulte que la série à reçu un accueil controversé en Colombie, ceux qui ont connu Pablo Escobar dénonçant même la vision donnée par la série au personnage, notamment son fils.

La guerre contre la drogue : un échec américain ?

Historiquement, la guerre planétaire contre la drogue remonte au début du siècle avec la première conférence sur le sujet en 1909. Cependant, l’expression « War on drugs » reste attachée au Président Richard Nixon (1969-1974) qui l’a utilisée en 1971 pour montrer sa motivation à stopper tous les trafics illégaux de drogues. Dotée de moyen important, elle a été fortement soutenue par l’administration Reagan (1981-1989) sur le sol américain mais aussi en Amérique latine – essentiellement en Colombie, au Pérou et en Bolivie, comme l’illustre Narcos. A cet égard, la Drug Enforcement Administration est créée en 1973. Parmi les mesures prises, on peut notamment citer le renforcement des peines de prison, même pour les étrangers, comme dépeint dans Narcos à travers le fameux « Better a grave in Colombia than a cell in the US ». Durant les années 1980 et 1990, la DEA a notamment agi aux côtés de la CIA en Amérique latine.

En dépit de cela la production et l’exportation de drogues fortes (cocaïne, héroïne) a continué à augmenter au cours des années 1980 et 1990. En 1995, Thomas Constantine, administrateur de la DEA déclarait ainsi devant le Congrès américain que la « disponibilité de l’héroïne et de la cocaïne était plus élevée que jamais ». Le gouvernement américain a donc intensifié sa lutte contre la drogue en Amérique latine ; en 1999 (signé en 2000), le Plan Colombia est ainsi proposé et vise à armer et mieux former l’armée colombienne et les groupes para-miliaires. Cependant, c’est au Mexique que les Etats-Unis ont été le plus actif durant les années 2000. En effet, l’ALENA a été un véritable désastre au niveau de la lutte contre la drogue, facilitant largement l’exportation de la marchandise vers les Etats-Unis et le Canada. Dès la fin des années 1990, le cartel de Juarez et de Tiruajana constituent une véritable menace, El Chapo du cartel de Sinola commence à se faire un nom. Le gouvernement mexicain avec le soutien des Etats-Unis engage alors l’armée, surtout sous Felipe Calderon (2006-2012).

 Trente ans après son début, la guerre contre la drogue est pourtant souvent dénoncée pour ses échecs mais aussi ses véritables motivations. Au Mexique, la militarisation du conflit a fait près de 50 000 morts depuis 2006. Cette militarisation a notamment été dénoncée par l’Europe, qui a reufsé de soutenir le Plan Colombia. Non seulement la consommation de drogue n’a pas baissé mais même augmenté (cf supra). Dans les années 1980, la CIA est elle-même un obstacle pour la DEA. Comme le décrit Narcos, l’agent de renseignement n’hésite pas à bloquer la DEA en soutenant des trafics de drogues pour financer sa lutte contre le communisme. Enfin, de nombreux experts ont accusé la guerre contre la drogue d’être un moyen détourné pour le gouvernement américain d’écarter les minorités. Récemment, l’excellent documentaire de Netflix, the 13th (en référence au 13e amendement qui abolit l’esclavage) exposait l’avis de plusieurs experts qui mettaient en relation l’explosion de l’emprisonnement des noirs aux Etats-Unis (surtout depuis Bill Clinton) et les mesures « anti-drogues ».

Pour aller plus loin : la situation du narco-trafic aujourd’hui en Amérique latine

Aujourd’hui, la Colombie, le Pérou et la Bolivie restent les premiers producteurs de cocaïne au monde. La feuille de coca est la principale production agricole dans ces pays car elle est plus rentable que les autres productions. Ils restent ainsi de nombreux « cocaleros » qui refusent de changer leurs cultures. Cette production est ensuite transformée puis expédiée aux Etats-Unis via le Mexique. Néanmoins, le processus de pacification dans cette région permet d’être plus optimiste quant à l’avenir.

Lucien Gessner & Benjamin Neves