La rentrée est arrivée, il est donc temps de faire le point sur tout ce qu’il s’est passé cet été en Afrique ! Si pour vous, le temps s’est comme arrêté pendant deux mois, l’actualité a été foisonnante et se conclut pour cet été le 27-28 août par la conférence internationale de Tokyo pour le développement de l’Afrique. Mais commençons par le commencement…

Le Nigéria pâtit grandement de la chute des cours du pétrole

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Pénurie d’électricité, insurrection, crise économique…Le Nigéria, puissance montante de l’Afrique perd sa première place économique du continent au profit de l’Afrique du Sud selon le calcul des PIB en dollars du FMI, conséquence de la baisse du prix du pétrole. En effet, alors que l’économie du Nigéria est basée à 70 % sur le pétrole, le prix du baril est passé de 103,08 le 26 août 2014 $ à 49.69$ le 26 août 2016. Mais le Nigéria pâtit aussi des insurrections qui animent le sud du pays et qui ont eu comme répercussion la baisse de 20% de la production de pétrole selon l’OPEP. Le Nigéria est donc devenu le deuxième exportateur de pétrole de l’Afrique, cédant sa première place à l’Angola. Le président nigérien, Muhammadu Buhari a reconnu que le Nigéria est « soudainement devenu un pays pauvre ».

Cet événement rappelle l’importance de la diversification de l’économie d’un pays que soutient le vice-président du Nigéria, M. Osinbajo, notamment à travers le développement de l’agriculture afin d’atteindre l’autosuffisance alimentaire. L’agriculture est d’ailleurs le seul secteur du Nigéria en croissance alors que l’industrie, les services et le secteur bancaire s’effondrent. Selon BMI Research, la croissance du Nigéria devrait passer de 4.3% sur les dix prochaines années par rapport à une moyenne de 7% sur la dernière décennie.

En conclusion, la crise que traverse le Nigéria montre la précarité des puissances montantes africaines confrontées à des crises sociales et économiques importantes et rappelle les nombreux défis qui leur restent à relever, notamment la diversification des économies rentières.

Un nouvel espoir pour l’Egypte ?

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Mi-aout, le FMI (Fond Monétaire International) a annoncé le prêt de 12 milliards de dollars sur 3 ans à l’Egypte. Mais quelles en sont les raisons et les conditions ?

L’Egypte fait face à plusieurs crises en ce début d’année 2016, notamment à la crise du secteur touristique, sa principale rente. Cette crise s’accompagne d’une pénurie de devises étrangères, notamment des dollars, et d’un taux de chômage élevé. De plus, le pays d’El Sissi ne peut plus compter depuis un an sur l’aide de ses financiers du Golfe. Il a donc trouvé le jeudi 11 août un accord préliminaire avec le FMI et la banque centrale sur un mécanisme de crédit élargi (MEDC). Ce mécanisme permet le remboursement du prêt sur des périodes longues (de 4 et demi à 10 ans) à des taux inférieurs à ceux des marchés financiers et est destiné aux pays dont la balance de paiements connait des graves difficultés à moyen terme. Il est conditionné à la mise en place de réformes structurelles.

Dans le cas de l’Egypte, les réformes consistent en : une dévaluation de la livre égyptienne, une hausse d’impôt notamment de la TVA, une baisse de la dette des administrations publiques (aujourd’hui à 98%/PIB) à 88%/PIB d’ici 2018-2019, une baisse des subventions (principalement à l’énergie) et un principe de transparence.

De plus les réformes s’accompagneront de mesures d’austérité. Ce changement s’annonce profond et a pour but le rétablissement d’une croissance durable. Le prêt s’effectuera en trois phases, dont la première pourrait débuter en septembre.

Enfin, ces réformes auront un coût social élevé selon les responsables gouvernementaux.  Les prix de l’alimentation et de l’énergie ont déjà augmenté et cela ne semble être qu’un début car avec ce prêt arrivent de nouvelles baisses dans les subventions.

La Conférence Internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique (TICAD)

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Le 27 et le 28 août prochain s’ouvrira à Nairobi, au Kenya, la sixième conférence internationale du Japon pour l’Afrique. Instaurée en 1993, ce sera la première qui aura lieu sur le continent africain, preuve de la volonté du Japon du respect de l’appropriation africaine.  La conférence internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique  (TICAD)  instaure un dialogue entre les différents participants (une quarantaine dirigeants africains, le premier ministre japonais Shinzo Abe, des membres de l’ONU, de la Banque Mondiale et de l’Union Africaine) au sujet de la croissance économique du continent, du commerce, de l’investissement, de la bonne gouvernance, du développement durable, de la paix, la sécurité et la stabilité.

Cette année, les principaux thèmes abordés seront : l’industrialisation, la santé et la stabilité sociale. De plus, plus de 600 entreprises japonaises seront présentes pour encourager le commerce entre le continent africain et le Japon. Ils espèrent conclure une soixantaine d’accords commerciaux et de protocoles avec le secteur public africain.

La conférence s’est ouverte sur une promesse de Shinzo Abe d’investir 30 milliards de dollars sur les trois prochaines années en Afrique. Un tiers devrait être consacré aux infrastructures. « Il s’agit d’un investissement qui a confiance dans le futur de l’Afrique » a déclaré Shinzo Abe à l’ouverture de la conférence.

Face à la Chine, son principal concurrent asiatique en Afrique, le Japon met en avant son avance technologique et la formation du personnel. La TICAD est l’occasion pour le Japon de renforcer sa présence sur le marché africain. Cependant, les échanges commerciaux entre le Japon et l’Afrique restent bien inférieurs à ceux de la Chine et du continent : 24 milliards de dollars pour le premier en 2015 face à 179 milliards de dollars pour le deuxième.

Pour aller plus loin, allez voir le livre Pékin à la conquête de l’or noir de Serge Michel et de Michel Beuret sur la « Chinafrique » et comparez l’approche chinoise et japonaise du continent africain.

Des élections qui s’annoncent tendues au Gabon

Onze candidats s’affrontent ce samedi 26 août au Gabon dans le cadre des élections présidentielles. Deux candidats sont portés favoris : Ali Bongo Ondimba et Jean Ping. Ces élections se déroulent dans un souci de transparence dans un pays où la dynastie Bongo est au pouvoir depuis plus d’un demi-siècle. Ali Bongo, l’actuel président, est en effet le fils d’Omar Bongo Ondimba, décédé en 2009 et président du Gabon de 1967 à sa mort. Le Gabon n’a connu que trois présidents depuis son indépendance prise en 1960. Jean Ping, lui,  est l’ancien président de l’Union Africaine, anciennement Organisation de l’Unité Africaine,  d’avril 2008 à octobre 2012 et a été cinq fois ministre sous Omar Bongo.  Il a aussi présidé l’Assemblé générale des Nations Unies en 2004-2005. Il est aujourd’hui le principal candidat de l’opposition.

Si les élections de 2009 qui avaient porté Ali Bongo au pouvoir s’étaient déroulées dans un contexte de tensions : consulat de France incendié, émeutes, morts…, c’est dans le calme pour l’instant que se passent ces dernières. Les habitants de la capitale (Libreville) sont encouragés à rester chez eux et une quantité raisonnable de policiers sont déployés dans les rues. Ces élections ont lieu sous l’œil de dizaines d’observateurs internationaux de l’Union Européenne et de l’Union Africaine alors que les deux candidats favoris ont été soupçonnés de diverses fraudes dans leurs mandats précédents de ministre ou de président.

Ces élections sont d’autant plus importantes qu’elles se déroulent dans le cadre des difficultés économiques du petit pays pétrolier qui subit le contrecoup des baisses du prix du pétrole. Sa croissance économique est passée de 5.6% en 2013 à 4% en 2015. En effet, en 2015 selon la Banque Mondiale, l’hydrocarbure représentait 70% des exportations du pays, 20% du PIB et 40% de ses recettes budgétaires. Le Gabon est le cinquième pays pétrolier du continent. La baisse du cours du pétrole a eu donc beaucoup d’impacts, alors que la diversification économique, bien qu’encouragée par le président, n’en est qu’à ses débuts. La misère renforce donc les tensions dans un pays où 30% de la population gagne moins que le SMIC (80 000 francs CFA), selon une étude de McKinsey en 2013 et où le chômage concerne 21% de la population active.

Les résultats des élections permettent à Ali Bongo d’être réélu pour un deuxième septennat avec 49, 80% des suffrages. Son adversaire, Jean Ping, dénonce les résultats notamment dans la province du Haut-Ogooué -la province natale d’Ali Bongo- où le taux de participation a atteint 99,98% contre moins de 60% sur l’ensemble du pays. Il réclame notamment un nouveau décompte des voix. Le scrutin laisse place à la violence notamment à Libreville, la capitale, prise d’assaut par des bérets verts de la garde républicaine. En cause, des chiffres qualifiés de « surréalistes, incohérents et suspects ». Depuis le scrutin la ville est en état d’urgence; les magasins tirent leur rideau de fer et la population se terre chez elle. Les services de sécurité quant à eux se renforcent de plus en plus aux carrefours .

Turquie : Le bouclier Euphrate

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Le 24 aout 2016, la Turquie a lancé son opération la plus ambitieuse depuis le début de la guerre contre l’Etat Islamique : « Bouclier de l’Euphrate ». En quoi consiste-t-elle ? Quels sont ses buts ?

Tout d’abord, cette opération vise l’Etat Islamique qui occupait la ville de Jarablos située à la frontière entre la Turquie et la Syrie. L’offensive de la Turquie a permis de chasser l’organisation jihadiste. Mais ce n’est pas son unique but : le pays d’Erdogan veut mettre fin à l’avancée des forces syriennes kurdes. En effet, ces dernières ont pris au début du mois d’août la ville Manbji, à l’ouest de l’Euphrate. Ce fleuve trace pour la Turquie une ligne à ne pas dépasser par les combattants kurdes car à partir de là, ces derniers peuvent progresser le long de la frontière et avancer dans leur ambition de créer un Kurdistan.

La prise de Jarablos permet donc à Ankara de stopper net la progression kurde. Cette opération permet aussi d’augmenter la pressions sur les forces syriennes kurdes afin qu’elles quittent la région de Minbej et qu’elles se retirent sur la rive est de l’Euphrate.

L’opération lancée par la Turquie est soutenue par la coalition internationale, plus particulièrement par les Etats Unis, qui pourraient aller jusqu’à fournir un soutien aérien au sol. En effet, cette opération a pour contexte la visite du vice président américain en Turquie, Joe Biden, lors de laquelle Ankara s’est engagé à amplifier son rôle dans la guerre contre l’EI. Cependant, les Etats Unis sont aussi les alliés des kurdes des YPG (Unités de protection du peuple) à qui ils continueront d’apporter leur soutien si les kurdes acceptent de rester à l’est de l’Euphrate.

Pour finir, cette opération permet de détourner l’attention des purges massives perpétuées par le régime d’Erdogan depuis la tentative de coup d’état du 14 juillet.

Petit rappel sur les kurdes et le Kurdistan : Estimés entre 20 et 40 millions, les kurdes sont répartis sur quatre pays : la Turquie, la Syrie, l’Irak et l’Iran.  Ils représentent  la plus grande nation sans Etat. Ils demandent leur indépendance depuis le début du XX siècle en avançant les arguments des langues (le kurmandji et  le sorani), de la culture notamment à travers la musique et de la continuité territoriale. Ils sont en majorité musulmans sunnites (70%).

Le Kurdistan est une région frontalière d’environ 50 000km2. La création d’un Kurdistan avait été prévue par la SDN (Société Des Nations) en 1918 mais jamais réalisée.

Aujourd’hui, on peut trouver des mouvements de guérilla kurdes dans les quatre pays : le PKK (partie des travailleurs du Kurdistan) en Turquie qui est considéré par le pays comme une organisation terroriste, le PYD  (Parti de l’union démocratique) en Syrie, le PJAK (Parti de la vie libre du Kurdistan) en Iran et le PCKD (Parti pour une solution démocratique du Kurdistan) en Irak. L’Irak est le seul pays à avoir reconnu l’existence des Kurdes et a instauré la province autonome du Kurdistan. La question de la création du Kurdistan a été remise au goût du jour depuis la guerre contre l’Etat Islamique avec l’annonce d’un référendum sur l’indépendance du Kurdistan irakien par son président, Massoud Barzani.

Daraya : la fin d’un long siège

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Daraya est une petite ville de la banlieue de Damas, en Syrie. Elle était devenue en 2011 le symbole de la révolte contre le régime de Bachar El Assad : c’est une des premières villes à se soulever contre. Assiégée depuis 2012, les combattants rebelles ont finalement trouvés un accord avec le gouvernement pour être soit amnistiés, soit reconduits au nord du pays. L’évacuation des 4 000 civils et 700 combattants commencera le 26 août et Daraya deviendra une zone militaire. C’est une ville détruite par les bombardements que quittent les habitants et où il était devenu impossible de vivre, Daraya étant exclue de l’aide internationale.

La reddition des rebelles de Daraya marque une grande victoire pour le régime de Bachar El Assad : il lui permet de sécuriser l’aéroport militaire de Mazzeh et une zone proche de Damas. De plus, il démantèle aussi une ville soupçonnée jihadiste.

 

Les brèves :

  • Malgré un investissement important, le Cameroun n’a remporté aucune médaille au Jeux Olympiques de Rio 2016.
  • Le secrétaire d’Etat John Jerry a demandé le déploiement d’une force de protection de l’ONU au Soudan du Sud dans la capitale Djouba, théâtre de violents affrontements depuis le début du mois de juillet.
  • Les élections au Congo-Brazzaville n’auront pas lieu avant 16 mois suite à la procédure de renouvellement du fichier électoral lancé en juillet par l’actuel président Joseph Kabila dans le deuxième et ultime mandat devait s’achever en décembre 2016.