Raciste, révisionniste, misogyne, virulent et nostalgique du régime dictatorial ayant dirigé le pays de 1964 à 1985, Jair Bolsonaro est devenu le 27 novembre dernier président de la République brésilienne. Ce militaire du Parti social-libéral, parti récemment positionné à l’extrême droite, s’est hissé à la tête d’un pays porteurs il y a 5 ans de nombreux espoirs et encore marquée par les années de dictature. Comment expliquer le triomphe de Bolsonaro, et que devons-nous attendre du nouveau président brésilien ?

Le pourquoi du comment

Parlons d’abord du contexte politico-historique du Brésil en évoquant le passé des dictatures dans le pays et le récent pouvoir laissé vacant par des dirigeants accusés de corruption. De 1964 à 1985, le Brésil est une dictature menée par le général Castelo Branco suite à un coup d’Etat appelant à balayer la menace communiste. Concrètement, le régime mis en place à suspendu l’ancienne Constitution, supprimé bon nombre de libertés individuelles et organisé la suppression et la torture d’opposants politiques. Cet héritage semblait enfoui dans la mémoire des brésiliens comme une blessure profonde, mais le climat politique actuel n’a fait qu’entrainer un révisionnisme actif de la part des soutiens à Bolsonaro.

Le 31 août 2016, alors que les chiffres la désignent comme la présidente la plus impopulaire de l’histoire du Brésil et après huit mois de manifestations, Dilma Rousseff est destituée à l’issue d’une procédure d’Impeachment menée par le Congrès, car visée par une importante enquête de corruption. Son successeur jusqu’à la fin de son mandat qui vient de s’achever, Michel Temer, bat également les records d’impopularité, alors qu’il est confronté à la crise économique et l’image d’homme corrompu dont il ne peut se défaire.

C’est donc un climat de défiance qui s’installe progressivement au Brésil. Ajoutez à cela des résultats économiques très décevants après de beaux espoirs il y a cinq ans et une violence de retour dans les favelas après la trêve des Jeux Olympiques de Rio de 2016, et vous obtenez un pays qui semble avoir voté son retour à la dictature.

Jair Bolsonaro, le « Trump tropical » ou le « Jean-Marie Le Pen brésilien »

Elu le 28 octobre dernier président du Brésil, Jair Bolsonaro, 62 ans, incarne l’espoir anti-corruption et antiviolence de l’extrême droite, le « messie » comme l’implique son deuxième prénom Messias. S’autocomparant à son homologue américain Donald Trump, Bolsonaro s’érige en candidat antisystème, jouant sur le fait qu’il n’ait jamais été cité dans quelconque affaire de corruption. Tant par ses déclarations polémiques, que par sa virulence médiatique et ses quelques « fake news », Bolsonaro s’identifie à son compère américain, jouant ainsi sur sa popularité et se calquant sur sa politique. Par exemple, il fut l’un des rares à immédiatement applaudir la décision américaine de transférer l’ambassade des Etats-Unis à Jérusalem, car prônant, conjointement avec les évangéliques brésiliens, un retour à la terre sainte.

Ses déclarations révisionnistes, elles, le rapprochent de Jean-Marie Le Pen. En effet, avec ses sympathisants, Bolsonaro défend l’idée selon laquelle les années de dictature n’étaient que des années d’occupation militaire, balayant d’un revers de chemise les milliers de personnes emprisonnées ou abattues. Il se fait notamment remarquer en 2016 lors de l’impeachment de Dilma Rousseff, dédiant ce jour « à la mémoire du colonel Carlos Alberto Brilhante Ustra », homme ayant torturé Dilma, femme de gauche, durant la dictature. Bolsonaro entend, comme en temps de dictature, « accélérer le grand nettoyage du pays des marginaux rouges, des hors la loi gauchistes » et ainsi exiler ou emprisonner les opposants politiques.

Quelles mesures ?

Bolsonaro est critiqué par les médias occidentaux et ses opposants pour son programme très flou, et volontairement très (trop ?) concis, puisqu’il tient sur 82 pages A4. Ses principaux objectifs en arrivant au pouvoir sont d’éradiquer la violence et la corruption, alors qu’il rappelait avant le premier tour que si « un policier tue dix, quinze, vingt personnes, il doit être décoré, pas poursuivi ». Afin de lutter contre la corruption de la classe politique, Bolsonaro promet d’œuvrer pour une transparence accrue dans les dépenses publiques et en privatisant bon nombre d’entreprises publiques.

En termes de politique économique, Bolsonaro entend mener une politique très libérale, ouvrant davantage le pays au commerce international, repensant la fiscalité du pays, et diminuer les droits des travailleurs. Bien évidemment, la politique environnementale de Bolsonaro est inexistante et absente de son programme, le nouveau président avait même laissé entendre que le Brésil allait sortir des accords de la COP 21.

Pour sa politique sociale, le « Trump tropical » prône un retour à la famille traditionnelle, autour d’une éducation conservatrice « sans endoctrinement ni sexualisation précoce » et sélective, voulant supprimer les quotas à l’université pour les jeunes de minorités. Rappelons qu’il a également critiqué son adversaire au deuxième tour, Fernando Hadad, ex ministre de l’éducation, pour avoir distribué des manuels visant à lutter contre l’homophobie en 2011. Comble de ridicule mais alarmant de fake news, Bolsonaro avait brandit la version portugaise du légendaire Guide du Zizi Sexuel du français Zep, prétendant que ce « kit gay » avait perverti toute une génération de brésiliens, alors qu’il n’a, bien entendu, jamais été distribué dans les écoles.

En conclusion

Plus de questions que de réponses se posent au Brésil, le doute plane quant au respect des principes démocratiques. Pour résumer, le Brésil a élu un homme qui déclarait en 2003 à la députée Maria do Rosário qu’ « il ne la violerait même pas, parce qu’elle ne le mérite pas », et qu’il serait « incapable d’aimer un fils homosexuel ». Ambiance …