Voici le corrigé de la synthèse ESCP 2012 proposé par le rapport du jury !

Sujet : ICI

Quelle prison pour une justice criminelle moderne ?

Pourquoi la prison constitue-t-elle la forme privilégiée de la justice criminelle ?
Parce qu’elle peut incarner selon Beccaria, pour peu qu’elle s’humanise, le moyen ordinaire de s’assurer au préalable d’accusés placés sous la protection la loi, et non plus hors du champ de celle-ci. Pour Foucault, elle impose clairement la triple évidence de la privation de liberté, du châtiment quantifiable et d’un projet de redressement des individus. Brossat enfin la désigne comme capable d’imposer la distinction, fictive mais vitale dans nos sociétés, entre « honnêtes gens » et « criminels ».

Quelle fonction lui assigner ?
Une fonction pédagogique pour Beccaria : elle mettrait à l’écart, sans les marquer à jamais, certains membres d’une communauté donnée, car elle incarne le bras séculier d’un pouvoir précis, aucune justice criminelle ne pouvant raisonnablement s’exercer au nom de l’humanité entière. Selon Foucault, elle prolonge le travail de surveillance et de dressage des populations déjà à l’œuvre dans la caserne, l’école ou l’hôpital modernes, tandis que Brossat lui reproche de perpétuer l’illusion néfaste de l’impossibilité du devenir criminel des individus normaux — pourtant historiquement attesté par les dérives totalitaires.

Qu’en faire dès lors ?
La décrire selon Foucault, qui en fait un véritable marqueur de modernité, puisqu’elle signale l’articulation des mécanismes disciplinaires généraux et d’une institution judiciaire spécifique. L’aménager avec mesure pour Beccaria, qui la verrait contribuer à la banalisation du processus accusation-réhabilitation, dans des sociétés pacifiées où elle punirait les délits dans le respect des lois avec un effet dissuasif. La condamner selon Brossat, pour les mensonges qu’elle pérennise sur la réalité des détenus qu’elle stigmatise injustement, sur la nature des hommes ordinaires dont elle fait oublier les pulsions criminelles inconscientes, et sur le fonctionnement des sociétés, qui exorcisent avec elle leur sauvagerie archaïque.

326 mots

Autres questions préliminaires possibles :

Comment appréhender la réalité de la prison dans une justice criminelle moderne ?
Entre régulation, coercition et condamnation pure et simple : comment comprendre l’institution carcérale moderne ?