Pour vous et en exclusivité, Major-Prépa publie une double étude comparée. Celle du nombre d’admissibles par grande catégorie de prépas et de son évolution avec le temps, d’une part ; et la comparaison entre le nombre total d’admis et le nombre d’admissibles de chaque grand type de prépas pour l’année 2017.

Les résultats présentent des statistiques intéressantes à avoir en mémoire lors du choix de sa classe préparatoire.

Mais avant tout, il convient de faire un point sur la méthodologie utilisée.

Méthodologie

Nos chiffres sont obtenus en combinant les classements Major-Prépa 2017 d’admissibilité à HEC, et le classement Major-Prépa 2017 d’admission à HEC.

La subdivision des groupes de prépas a été effectuée de la façon suivante :

  • On appellera « grosse prépa publique parisienne » l’ensemble composé par Louis-le-Grand, Saint-Louis, Henri IV, Janson de Sailly, Hoche, et Lakanal. Le choix de ces prépas répond à la logique des classements, ce sont les prépas publiques de Paris et sa banlieue pour lesquelles on a constaté une moyenne de plus de 10 admissibles HEC sur les années 2017 et 2018.
  • On appellera de la même manière « grosse prépa privée parisienne » l’ensemble composé par Sainte-Geneviève, Saint-Louis de Gonzague, Daniélou, Stanislas, Notre-Dame du Grandchamp, et Saint-Jean de Passy. Ces prépas privées sous contrat remplissent le critère d’avoir obtenu en moyenne plus de 10 admissibles sur les 2 dernières années.
  • On appellera « grande prépa lyonnaise » l’ensemble composé des Chartreux, du Parc et des Maristes. Ce sont les prépas lyonnaises ayant eu en moyenne plus de 8 admissibles sur les quatre dernières années.
  • On appellera Autre grande prépa provinciale ou étrangère toute prépa de province ou étrangère ayant figuré au moins une fois dans le top 35 des prépas pour l’admissibilité à HEC en 2017 ou 2018, et ayant présenté plus de 20 candidats, et n’étant pas située à Lyon, sauf Saint-Jean de Douai.
  • On appellera « Prépa à fort effectif de cubes » les prépas hors contrat (groupes Ipésup, Intégrale, Commercia, Ipecom), et Saint-Jean de Douai. Ces prépas sont rassemblées dans une seule et unique catégorie même si Saint-Jean de Douai est sous contrat car Saint-Jean de Douai présente de nombreuses caractéristiques communes avec les prépas hors contrat : surreprésentation des cubes, professeurs en commun, pédagogie similaire… Ces prépas obtiennent systématiquement un très grand nombre d’admissibles à HEC, et sont séparées des « grandes prépas privées parisiennes » à cause de la spécificité de leur pédagogie : il est donc intéressant de comparer les fruits de chacune des stratégies.

Cette subdivision, ces dénominations et ces critères sont évidemment discutables, mais il a fallu faire des choix, et tels ont été les miens. Le but était principalement de donner des ordres d’idées.

On appelle proportion d’admissibles (d’admis) le quotient du nombre d’admissibles (d’admis) d’un type de prépas et du nombre total d’admissibles (d’admis). Ce n’est donc pas la proportion d’élèves admissibles (admis) à HEC parmi le total des élèves d’une catégorie de prépa.

Le taux de conversion d’un type de prépas est le quotient entre son nombre d’admis et d’admissibles. Si toutes les prépas performaient de manière égale, il devrait être – pour 2017 – égal au taux théorique de 373/701, soit à peu près 53%

Qui convertit le plus d’admissibles en admis ?

Type de prépas Nombre d’admissibles 2017 Proportion d’admissibles 2017 Nombre d’admis 2017 Proportion d’admis 2017 Taux de conversion
« Grande » prépa publique parisienne : LLG, HIV, St Louis, Hoche, Janson, Lakanal 171 24,39% 121 32,44% 70,76%
« Grande » prépa privée parisienne : Ste Geneviève, Grandchamp, Stanislas, Daniélou, Saint-Jean de Passy, Franklin 189 26,96% 126 33,78% 66,67%
« Grande » prépa lyonnaise : Ste Marie, Le Parc, Chartreux 42 5,99% 20 5,36% 47,62%
Prépa à forte proportion de cubes : Groupes Intégrale, Ipésup, Commercia, Ipécom, et Institution Saint-Jean de Douai 123 17,55% 47 12,60% 38,21%
« Grande » prépa de province ou de l’étranger : Groupe La Résidence, Masséna, Chateaubriand, Thiers, Montaigne, Ozenne, Kléber, St Vincent Providence, Joffre, Champollion, Fermat, Berthollet 75 10,70% 27 7,24% 36,00%
Total 600 85,59% 341 91,42% Taux théorique : 53%

Clé de lecture : Parmi tous les admissibles à HEC, 24,39% viennent d’une grande prépa publique parisienne. Parmi tous les admis, 32,44% viennent d’une grande prépa publique parisienne. Parmi les admissibles d’une grande prépa parisienne, 70,76% sont admis in fine.

Analyse de la capacité de conversion

Quelques remarques générales

Certaines observations peuvent sauter à l’œil : en sommant les prépas recensées dans les catégories, l’on obtenait près de 92% des admis HEC en 2017, contre 86% des admissibles, révélant ainsi la quasi absence de prépas réellement petites parmi les admis HEC.

C’est particulièrement impressionnant sachant que certaines prépas intégrant très fréquemment un nombre assez significatif d’élèves à HEC n’ont été retenues dans aucun groupe : Ampère à Lyon, Carnot ou St Michel de Picpus à Paris, Michelet à Vanves, Fabert à Metz, Marcelin Berthelot à St Maur, pour ne citer qu’elles.

A chaque type de prépa sa caractéristique

C’est un fait : lorsqu’on vient d’une des plus grosses prépas publiques et privées parisiennes, la conversion de son admissibilité à HEC en admission est nettement plus probable.

Cependant, si ce phénomène n’a pas de quoi étonner, son ampleur – elle – me semble particulièrement digne d’intérêt.

Les étudiants des grosses prépas publiques parisiennes voient leur proportion augmenter de 24% des admissibles à 32% des admis, ceux des grosses prépas privées parisiennes de 27% à 34%, ce qui n’est pas surprenant (cf supra). Ce sont les seules à augmenter leur proportion entre étudiants admissibles et admis, et de manière assez spectaculaire : de 51% à 66% à elle deux. Leur taux admis/admissibles est d’à peu près 70%, très nettement au dessus du taux moyen attendu (53%).

La grosse surprise vient plutôt du très faible taux de conversion des prépas à forte proportion de khûbes : ils représentaient 18% des admissibles, ils représentent seulement 12% des admis en 2017. Cela est explicable par l’accent tout particulier mis sur le concours écrit par ces prépas, qui n’organisent finalement qu’assez peu de colles dans l’année (sauf Ipésup, qui s’en tire avec un taux de 49%, et qui fait des kholles). Avec un taux de conversion de 38% pour HEC, elles se situent bien en dessous de la moyenne de conversion de 53% pour 2017.

Si les prépas lyonnaises ont un taux de conversion proche du taux théorique (48%), on ne peut pas en dire autant des autres prépas provinciales, dans le dur aux oraux de HEC avec seulement 36% de conversion.

Quant aux prépas non répertoriées par notre typologie, leur taux est encore plus bas : 31% des admissibles sont admis in fine.

Comment expliquer de telles disparités ?

Pourquoi les grandes prépas parisiennes convertissent si bien les admissibilités en admissions ?

A mon sens, la responsabilité incombe à quatre facteurs :

Top 100 et prépas parisiennes

Premièrement, il y a le grand nombre d’étudiants des prépas les mieux classées dans les cent premiers admissibles.  Parmi ce top 100, ce sont chaque année près de 90 étudiants qui parviennent à transformer l’essai, grâce à l’avantage que leur donne leur nette avance après les écrits.

Parmi les cinquante premiers, typiquement, on ne retrouve en 2018 que cinq étudiants qui ne soient pas issus d’une des 12 « grosses prépas parisiennes », publiques ou privées, ou d’une prépa à fort effectif de khube. Cette observation est une régularité statistique notamment due à l’exigence particulière de ces prépas à propos des dossiers des lycéens qu’ils choisissent.

Asymétrie d’informations

Deuxièmement, il y a l’asymétrie d’information. En venant d’une prépa avec un nombre d’admissibles à HEC traditionnellement élevé, un plus large accès à des ressources qui facilitent l’admission à HEC est conféré.

Ainsi, les prépas ayant le plus d’admissibles à HEC chaque année peuvent – si elles sont bien organisées – avoir une banque très importante d’annales de sujets, particulièrement en triptyque, HGGMC, économie et CSH. C’est pour lutter contre cette asymétrie d’information que chaque année nous recensons les sujets d’oraux à HEC.

Même si HEC publie chaque année 10 sujets d’annales (60 sont disponibles par matière au total), la possible similarité entre sujets d’annales et nouveaux sujets peut s’avérer créatrice d’inégalités.

Type de prépas, et type de colles

Enfin, il y a la particularité des oraux de HEC. Ces six épreuves mythiques, dont deux ne sont finalement qu’assez peu pratiquées en dehors des plus grandes prépas : l’oral de CSH, et le très confidentiel triptyque. Les étudiants de prépas qui n’intègrent traditionnellement que peu d’étudiants à HEC ne sont donc pas particulièrement formés à ces épreuves. Un grand nombre découvre les triptyques à Jouy, ou quelques jours avant leurs oraux.

C’est d’autant plus dommageable que ce sont là parmi les épreuves qui réclament le plus d’entraînement et de maîtrise pour être réussies. Le triptyque, par ses nombreux codes à respecter, et par son originalité d’une part ; et la CSH par sa relative difficulté, et son haut potentiel de déstabilisation d’autre part. Bien malin qui, en ayant fait peu de colles de CSH, peut disserter dix minutes sur certains sujets distribués par HEC.

Dans certaines prépas, ces épreuves sont préparées, et les élèves arrivent donc aux oraux en connaissant mieux les épreuves que les admissibles de petites prépas, ce qui leur confère ipso facto un avantage.

Oraux de HEC et solitude des étudiants de petites prépas

Enfin, il y a peut-être une autocensure des étudiants de petites prépas, peut-être impressionnés par l’institution HEC, par l’omniprésence autour de lui des étudiants issus de grosses classes préparatoires, en groupe, qui connaissent certains admisseurs, qui peut avoir un impact, si marginal soit-il, sur leur réussite. La solitude que peuvent les étudiants de petites prépas peuvent ressentir pendant les oraux, d’autant plus importante que la durée de ces oraux (3 jours où l’on dort sur le campus) est longue, peut être discriminante. Ceci en dépit des efforts clairs et louables consentis par HEC et ses admisseurs (chaque admissible à un admisseur quasi personnel qui lui est assigné).

Conclusion et solutions ?

L’auteur de ces lignes ne reproche rien à aucune prépa : leur attitude est totalement légale et compréhensible. A mon sens, le problème ne vient pas des grosses prépas, qui auraient bien tort de se priver d’exercer ses élèves au triptyque, et à ses us et coutumes particuliers. A mon sens, elles n’ont pas la volonté de mal faire et de léser les étudiants de plus petites prépas, mais souhaitent simplement remplir leur objectif en préparant leurs propres étudiants à HEC du mieux qu’elles peuvent.

Je ne reproche rien non plus à aucun élève, bien évidemment, qui – quelle que soit leur prépa – doivent réellement donner d’eux mêmes pour accéder à HEC, d’autant plus que dans les meilleures prépas, la préparation à HEC et aux parisiennes se fait au détriment d’autres écoles, pour lesquelles les étudiants sont moins bien préparés, ce qui conduit les étudiants n’ayant pas eu de parisienne à ne pas obtenir la meilleure école dans leurs cordes, faute de préparation.

Malgré la politique globalement ambitieuse menée par l’école de Jouy pour l’égalité des chances, comme l’atteste sa proportion assez importante de boursiers (15%), ou encore l’existence de bourses prenant en charge l’intégralité des frais de scolarité, ces résultats montrent que le travail pour l’égalité des chances est bien à effectuer en amont. Le fait même que les étudiants issus des plus grosses prépas soient statistiquement favorisés lors des oraux de HEC est problématique pour l’égalité des chances en géréral. En effet, comme l’a montré l’association de sondages et sociologie de HEC QPVHEC dans son article sur la reproduction sociale à HEC, les grosses prépas publiques et privées attirent une proportion d’étudiants aisés bien supérieure à la moyenne des étudiants à HEC, qui est déjà incomparablement supérieure à la moyenne des Français.

A cet effet, quelques solutions peuvent être envisagées.

HEC nous a d’ores-et-déjà confirmé que dès l’an prochain, toutes ses annales seront publiques, et qu’un travail serait fait pour améliorer la visibilité de ses fiches méthodologiques sur les épreuves spécifiques à l’école.

D’autres idées pourraient être d’organiser une sorte de Spring Day, retransmis en live pour garantir un accès à chacun, durant lequel seraient distillés des conseils méthodologiques, ou encore penser à un changement de coefficients pour certaines épreuves.

Enfin, il me semble particulièrement important de noter que cet article concerne les oraux de HEC parce que ce sont les seuls pour lesquels nous avons des données claires et complètes pour les admissibles et admis par classe préparatoire, mais – si nous avions eu les chiffres – ce constat de la meilleure réussite des grandes prépas aux oraux serait sûrement valable bien bien au-delà de Jouy.
Le mode de sélection à l’oral des autres écoles de commerce n’est en effet a priori clairement pas en faveur de l’égalité des chances non plus. L’épreuve d’entretien, typiquement, fait la part belle aux expériences vécues, aux voyages et autres expériences professionnelles, souvent obtenues à cet âge par contacts familiaux : autant de facteurs discriminants pour les étudiants les moins aisés, quelle que soit leur classe préparatoire.