Analyse sujet CG ECRICOME 2022

Pour tout comprendre de cette épreuve, Major-Prépa te propose son analyse du sujet de Culture Générale ECRICOME 2022 ! Retrouve les points-clefs et tous les éléments de compréhension de l’épreuve ; le premier sujet, comme d’habitude, portait précisément sur le thème de l’année.

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L’analyse

Éléments d’analyse et problématisation

Ecricome nous propose pour cette nouvelle édition un sujet classique dans sa formulation mais qui pouvait être assez déconcertant : est-il vraiment possible de ne rien aimer ? Le « peut-on » a une double nature en dissertation. Il interroge en effet la possibilité, la capacité mais également le caractère éthique, acceptable du fait de ne rien aimer.

En français le mot aimer s’applique à tous les niveaux affectifs, du simple plaisir (aimer un coucher de soleil) à la passion la plus dévorante. Il peut désigner les formes les plus élevées de la vie morale (amour divin) aussi bien que les désirs les plus primitifs. Aimer revêt ainsi une dimension quasi universelle tant l’amour semble poser son dévolu sur de multiples objets. Il apparait ainsi bien difficile voire impossible de ne rien aimer.

Le rien qui apparait quant à lui comme un concept moins chargé philosophiquement que l’amour n’est pas dénué pour autant d’une polysémie éclairante sur ce sujet. Il s’agissait alors d’interroger ce terme pivot en le faisant évoluer au fil de la dissertation. Dans une acception stricte, le rien est ce qui n’existe pas, c’est le néant, le vide. Néanmoins, il est possible d’envisager une force créatrice dans le rien en tant que non-être. Hegel par exemple y voit un opérateur fondamental de la pensée et lance à ses détracteurs le défi de distinguer l’être du non-être.

Ce sujet pose donc de nombreuses questions : peut-on choisir de ne pas aimer ? Y-a-t-il des vertus à une telle pratique, une sagesse dans l’abandon d’un amour qui porterait des sujets et des objets multiples ? Que perd-t-on au contraire à ne rien aimer ?

Proposition de plan

I – A priori il semble impossible de ne rien aimer. De surcroit, une telle pratique pourrait être périlleuse

Nous pouvions commencer dans une première partie par défendre l’idée la plus logique à première vue. Personne n’aime vraiment rien et une telle vie, si elle existait réellement, ne serait pas souhaitable.

1) L’amour est un sentiment incontrôlable de sorte qu’il soit impossible de décider sur quoi il porte et donc de l’éviter

L’amour est une dépossession, un sentiment qui nous prive de la raison. Il n’est pas possible de prévoir sur quoi portera notre amour. Ainsi comment est-il possible d’affirmer ne rien pouvoir aimer ? À cet égard, Edgar Morin évoque le concept d’innamoramento, faisant de l’amour une boucle invariable et éternelle qui nous frapperait constamment. Tomber amoureux renvoie ainsi à une chute inévitable, imprévisible. Nous sommes victimes d’un déterminisme de l’amour, d’une illusion de libre-arbitre là où l’amour semble nous mener où il souhaite, c’est-à-dire partout sauf dans le néant, dans le rien. Retrouve sur Major-Prépa un article dédié à cette idée.

2) Ne rien aimer renvoie par ailleurs à une vie d’ascèse périlleuse

Il fallait en effet s’étonner devant ce sujet. Est-il possible de ne rien aimer ? Les implications d’une telle interrogation sont nombreuses : si je n’aime rien alors je ne m’aime pas, je n’aime pas mon prochain, je n’aime pas Dieu, je n’aime pas la vie, je n’aime pas mes parents… Existe-t-il une telle personne ?

Une vie dénuée d’amour apparaît alors comme une vie dangereuse aussi bien pour soi que pour les autres, une vie de repli, d’exclusion, de ressentiment. Michel Houellebecq offre dans ses romans de tels exemples de personnages insensibles à toute forme d’amour et souligne leur médiocrité tout autant que leur difficulté à faire société tant ne rien aimer prend la forme de la haine de soi et des autres.

II – Néanmoins, ne rien aimer pourrait être la condition du bonheur et d’une vie apaisée

Il est en effet envisageable de voir dans cette négation de l’amour la possibilité d’une vie indépendante, de l’expression de notre libre-arbitre.

1) L’amour en tant que sentiment subjectif doit laisser la possibilité de ne rien aimer : nous en avons le choix

L’homme à la différence de l’animal est doté du logos, de la capacité de raisonner et de s’auto-déterminer. Descartes mesure d’ailleurs la liberté à notre capacité à faire des choix. Ne rien aimer serait ainsi l’expression la plus radicale de ce libre-arbitre et en même temps la phase suprême de la liberté. Il écrit ainsi dans Le discours de la méthode : « Il est donc évident que nous avons une volonté libre qui peut donner son consentement ou ne pas le donner quand bon lui semble. » On ne peut pas forcer quelqu’un à aimer, on est libres de ne rien aimer.

2) Ne rien aimer serait même l’expression d’une liberté retrouvée

Si comme nous l’avons vu l’homme semble contraint par la force de l’amour, aveuglé par sa puissance, il est possible de voir l’amour comme une négation de notre liberté. Ainsi ne rien aimer pourrait être la condition d’une liberté retrouvée, d’une émancipation face à la maladie d’amour, une guérison salvatrice. Pour en découvrir davantage : la réflexion de Sade.

III – Finalement, il ne s’agit pas de faire du renoncement à l’amour un marqueur de notre liberté. C’est bien en aimant que cette dernière s’exprime

Il serait tentant après ces deux premières parties qui nous ont amenées à poser la question centrale de la liberté de conclure avec facilité que l’amour en tant que sentiment qui enferme et aveugle serait un obstacle à notre liberté. Or, il faut finir sur une revalorisation de l’amour et du rien comme condition de la liberté.

1) Qu’entend-t-on par aimer ?

Il y aurait plusieurs formes d’amour qui ne se valent pas et en un certain sens n’aimer rien peut être comme nous l’avons vu vecteur de liberté face à l’aliénation qu’un tel sentiment pourrait causer. On pourrait ainsi dire qu’il faille n’aimer rien pour ensuite aimer mieux, aimer vraiment au sens de philia. Il s’agit alors de sortir du mirage voluptueux de l’amour qui n’est qu’une illusion de liberté pour s’inscrire dans un amour vrai qu’il ne serait pas souhaitable d’éviter.

2) Être libre c’est aimer, aimer c’est être libre

L’amour est la condition de la liberté. On ne peut pas rien aimer car l’amour est une force créatrice qui rend heureux et qui permet la vie en société. C’est la thèse notamment défendue par Platon pour qui l’amour améliore l’homme à la fois sur le plan éthique et sur le plan politique.

On arrive finalement à une situation paradoxale : être libre c’est renoncer à aimer quoi que ce soit, c’est n’aimer rien pour se libérer des autres, de soi même et du sentiment dévorant de l’amour. Mais sans amour, aucune liberté n’est possible si bien qu’il faille aimer pour exprimer sa liberté.

Pour conclure, il s’agissait d’un beau sujet de culture générale où il était possible de briller avec une analyse personnelle tant le dépassement du sujet laissait libre cours à de multiples interprétations originales. Ce plan n’est en aucun cas exhaustif et permet seulement de balayer quelques idées possibles pour répondre à la question posée.

Pour tout savoir sur les concours ECRICOME (conseils, sujets et analyses) : Inside Concours Ecricome 2022.

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