Cuba

On peut attendre de toi que tu maîtrises l’histoire de Cuba, qui a été au cœur de nombreux évènements au XXᵉ siècle. Que tu sois en A/L ou en B/L, Cuba peut faire l’objet d’un sujet en colle d’histoire, de presse ou de littérature hispanophone. Cet article reprend les principaux évènements ayant marqué l’île depuis la fin du XIXᵉ siècle jusqu’aux années 1990. Les informations que nous te proposons sur la littérature cubaine te seront indispensables si tu passes des épreuves d’espagnol en A/L. Elles peuvent aussi enrichir tes dissertations ou tes colles d’histoire.

De la colonisation espagnole au giron étasunien

Sur le plan historique

L’indépendantisme cubain connaît un renouveau dans les années 1890. Il se fait autour de figures comme celle de José Martí (homme politique et leader indépendantiste). De 1895 à 1898, une armée indépendantiste de libération s’oppose aux colons espagnols avec un appui de plus en plus grand des États-Unis.

Débute ensuite la guerre hispano-américaine (1898) gagnée par les États-Unis. On l’appelle « Desastre del 1898 » en Espagne. Cet échec de l’empire colonial espagnol constitue un véritable traumatisme pour toute une génération d’intellectuels et d’écrivains dits « del 98 ». « Más se perdió en la guerra de Cuba » (on a perdu plus à la guerre de Cuba) est l’équivalent de l’expression française « il n’y a pas mort d’homme ».

Le retrait des troupes américaines acte l’indépendance cubaine en 1902. Dans les faits, l’influence étasunienne reste forte notamment avec la mise en place de l’Amendement Platt (Enmienda Platt en espagnol). Ratifié en 1901, il instaure un protectorat étasunien.

La proximité de l’île avec la Floride et l’installation d’une base militaire à Guantánamo entérinent la domination des États-Unis. Cuba connaît une autre période d’administration américaine de 1906 à 1909. Au début des années 1910, l’emprise étasunienne sur la jeune république cubaine est telle que certains hommes politiques de part et d’autre du détroit de Floride sont favorables à une annexion.

La domination étasunienne se poursuit même après l’abrogation de l’Amendement Platt en 1934. L’économie cubaine est la propriété d’entrepreneurs yankees. Ceux-ci contrôlent les sucreries, les réserves minérales et la plupart des services publics.

Sur le plan littéraire

Les velléités indépendantistes cubaines de la fin du XIXᵉ siècle ne sont pas que politiques, mais aussi littéraires. Des auteurs cherchent à créer une littérature proprement cubaine et détachée du giron espagnol et européen.

C’est le cas de José Martí qui n’est pas qu’un homme politique. Journaliste et essayiste, il est aussi un poète de renom s’insérant dans le courant moderniste (modernista). Il entend fonder une culture sud-américaine et cubaine, notamment par ses recueils de poésie. On peut citer Madre América (1889) ou ses Versos libres (1882).

L’effervescence intellectuelle se poursuit sous la République cubaine. Des revues littéraires et poétiques dans lesquelles se distinguent des auteurs comme José Lezama Lima poursuivent cette recherche de l’identité et de la littérature cubaine. Cette émulation est aussi l’occasion de dénonciations sociales et de défense des intérêts du peuple cubain.

La dictature de Fulgencio Batista

Batista est un militaire, un homme fort de la République cubaine. D’abord élu président au début des années 1940, dans un strict respect des règles démocratiques, il prend ensuite le pouvoir par la force en 1952 avec l’appui supposé de la CIA.

C’est sous sa présidence que la présence étasunienne et de la mafia se fait le plus sentir. La Cosa Nostra italienne installe de nombreux casinos et hôtels qui attirent beaucoup de touristes : Cuba devient « le bordel des États-Unis ».

La dictature de Batista est une période difficile pour la population. Il n’y a pas de liberté d’expression ou de pensée comme en témoigne la création en 1953 d’un Bureau de répression des activités communistes. De nombreux auteurs et résistants cubains dénoncent alors les conditions de vie misérables et le racisme du régime. De fait, les infrastructures mises en place sont essentiellement touristiques et pensées par et pour les Américains. Pendant des années, les Cubains n’ont pas accès à certaines plages réservées aux touristes.

La révolution cubaine

Elle débute le 26 juillet 1953 lorsque des rebelles castristes attaquent la caserne de Moncada. La tentative de Coup d’État échoue. Elle est menée par des activistes socialistes-démocrates et surtout anti-impérialistes menés par l’avocat Fidel Castro.

Le jugement de ce dernier a lieu en septembre 1953. Ce procès sera largement mythifié sous le régime communiste. Castro se défend seul, sans avocat ni code, et dénonce les dérives de la dictature de Batista. Il prononce la célèbre phrase : « Condamnez-moi, peu m’importe, l’Histoire m’absoudra. » (« Condenadme, no me importa, la historia me absolverá. »)

Castro n’est pas encore affilié au parti communiste. Il s’oppose à certains intérêts yankees, mais ne demande pas leur départ de l’île, qu’il considère alors comme un suicide économique. Les projets castristes recoupent cependant certaines visions politiques soviétiques. Castro réclame notamment une confiscation et une redistribution de certaines entreprises et propriétés agricoles.

Lancé en 1956, le mouvement du 26 juillet (M-26) entame sa progression dans la Sierra Maestra cubaine. Il atteint Santiago de Cuba le 1er janvier 1859 et La Havane quelques jours plus tard. Fulgencio Batista prend la fuite pour les États-Unis. Castro annonce dans un discours la véritable indépendance cubaine qui ne dépend plus ni de l’Espagne ni des États-Unis.

La mise en place d’un régime communiste antiaméricain

Sur le plan historique

Les premières réformes castristes ne plaisent pas aux États-Unis. On peut notamment citer la confiscation des biens jugés mal acquis pendant la dictature. Des nationalisations symboliques ont lieu comme celle de la compagnie des téléphones, monopole yankee, qui passe sous contrôle de l’État cubain dès mars 1959. Marque de la fin d’une ère de tourisme et de fête pour les Américains : les plages jusque-là réservées aux touristes sont nationalisées en avril 1959. 

Dans un premier temps, Castro essaye malgré tout de maintenir un lien avec les impérialistes. De fait, il veut que le tourisme demeure une ressource pour l’île. Ce projet n’aboutit pas et les relations entre les deux pays se détériorent. Après la réforme agraire de 1960, qui nationalise et redistribue les terres des compagnies étrangères (et donc Américaines), les États-Unis mettent fin à leur partenariat commercial avec Cuba. Par exemple, le traitement préférentiel du sucre cubain sur le marché américain prend fin.

Un certain nombre de personnes fuient ce nouveau régime et forment des communautés cubaines aux États-Unis (à Miami notamment). Pour autant, les réformes agraires, mais aussi sur la santé et l’éducation, sont populaires auprès de la population. Le régime développe un récit national dénonçant l’impérialisme américain et la dictature de Batista.

En parallèle, Castro, à la recherche d’alliés, se rapproche de l’URSS. En décembre 1961, la Révolution cubaine est déclarée comme marxiste-léniniste. Des partenariats commerciaux signés au tout début des années 60 scellent l’alliance de Moscou avec La Havane.

Sur le plan littéraire

La majorité des milieux littéraires et intellectuels cubains soutient la révolution. De fait, le régime castriste laisse à ses débuts plus de liberté que la censure de la dictature de Batista. En outre, les réformes éducatives favorisent une alphabétisation et augmentent le nombre de lecteurs.

Dans les auteurs en faveur de Castro, on retrouve des figures du « Boom » latino-américain des années 1960. On peut citer à nouveau José Lezama Lima et son roman Paradiso (1966) ou encore Alejo Carpentier, véritable monument littéraire célèbre pour ses romans parmi lesquels Los Pasos perdidos (1953).

En poésie, il est indispensable de connaître le poète Nicolas Guillén et son célèbre poème Tengo (1964), qui s’insère dans le développement de l’imaginaire révolutionnaire cubain.

Cuba au centre de la guerre froide

Pour rappel, depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, le monde se divise entre le bloc de l’Ouest sous domination américaine et le bloc de l’Est sous domination soviétique.

Cuba, lorsqu’elle est sous la dictature de Batista, constitue un allié parmi tant d’autres pour les États-Unis. Ces derniers se sont constitués, en appliquant la doctrine Monroe, une « arrière-cour » (backyard) en Amérique latine. La plupart des pays sont dirigés par des dictateurs favorables à l’impérialisme et assurant une hégémonie américaine sur tout le continent.

Le basculement de Cuba dans le camp marxiste-léniniste alors même que l’île n’est qu’à 160 km de l’archipel des Keys (État de Floride) est un véritable drame pour Washington. Ces tensions rythment le début des années 1960 à une échelle caribéenne, mais aussi internationale.

Une proximité géographique à l’origine de tensions et de stratégies

Cette proximité inquiète côté étasunien, et le président John Fitzgerald Kennedy entend mater au plus vite la dangereuse révolution castriste. La CIA travaille en secret avec des Cubains anticastristes qu’elle entraîne dans des camps secrets au Guatemala et au Nicaragua. Ils débarquent dans baie des Cochons (Bahía de Cochinos) en avril 1961, mais l’opération est un échec. Les opposants sont capturés ou tués sur la plage et Castro se présente comme le meilleur opposant du Tiers-Monde face à l’impérialisme américain.

L’URSS et son dirigeant, Nikita Khrouchtchev, entendent profiter de cette proximité. Des 1960, Moscou envoie des conseillers techniques militaires et des espions à Cuba. En 1962, le KGB crée une station radar d’écoute près de La Havane.

Castro a intérêt à coopérer avec le grand frère russe puisque celui-ci garantit sa sécurité face à des Américains de plus en plus remontés. En septembre 1962, un accord soviéto-cubain stipule explicitement qu’une attaque nord-américaine contre Cuba provoquerait une guerre nucléaire. Ce renforcement de Cuba face aux États-Unis permet à Castro d’envisager une exportation de la révolution en Amérique latine.

La crise des missiles : « le monde retient son souffle »

L’URSS ne s’est pas contentée d’installer des postes d’espionnage à Cuba. Dès 1962, elle entame l’installation de rampes de lancement pour des fusées susceptibles d’atteindre les États-Unis. Cette situation est mise à jour, photographies à l’appui, par l’État-major américain au Président Kennedy le 15 octobre 1962.

S’ensuit un conseil de guerre extraordinaire où est décidé l’embargo des États-Unis sur Cuba. L’annonce est faite le 22 octobre 1962 par Kennedy lors d’un discours à la télévision. Il lance un ultimatum à peine dissimulé à son rival soviétique. « Le prix de la liberté est élevé. Mais l’Amérique l’a toujours payé. »

Dans un premier temps, Khrouchtchev se montre belliqueux et envoie des troupes vers Cuba. La presse titre que « Le monde retient son souffle » craignant une guerre nucléaire. En définitive et après des négociations tenues secrètes, Moscou se rétracte le 28 octobre 1962 et Khrouchtchev annonce le démantèlement des rampes.

Cette décision soviétique tend les relations avec Cuba. Castro reproche au dirigeant de l’URSS sa lâcheté et de ne pas l’avoir consulté lors des négociations avec Kennedy. Ces tensions restent discrètes, mais vont en s’aggravant jusqu’à la chute de l’URSS en 1991.

Durcissement et isolement du régime castriste

Sur le plan historique

Si l’URSS entame, après la crise des missiles, une période de détente avec les États-Unis, Castro reste attaché à l’exportation de la Révolution. L’Armée nationale de la libération lance des insurrections en Amérique latine, mais aussi en Afrique dans un contexte de décolonisation. C’est notamment lors de ces guérillas que s’illustre la figure du Che Guevara qui sera tué en Bolivie en 1967 lors de l’une d’entre elles. Il va sans dire que cette politique n’arrange pas les relations avec les États-Unis qui défendent mordicus leur « arrière-cour » latino-américaine.

Rapidement, cette politique irrite également les dirigeants de l’URSS. Notamment à partir des années 1980 avec l’arrivée au pouvoir de Mikhail Gorbatchev. Ce dernier initie la perestroïka, politique plus libérale développant la transparence du régime soviétique et censée initier un progrès économique, social et éthique. « Gorbi » entend également améliorer davantage les relations avec les États-Unis.

Cette direction s’oppose à celle du Líder Máximo cubain. En 1986, lors du troisième congrès du Parti communiste cubain (PCC), Castro annonce une reprise en main de l’appareil d’État. Il s’agit d’éliminer les cadres libéraux ou trop « gorbatchéviens » de l’administration pour sauver le communisme.

Sur le plan littéraire

Cette rigidification du régime concerne également les milieux littéraires. De plus en plus d’auteurs marquent leur opposition au régime et s’exilent.

Le premier virage marquant est le caso Padilla qui a lieu en 1971. Heberto Padilla est un auteur homosexuel. Arrêté et jugé, on attend de lui qu’il fasse une autocritique de toute son œuvre en public. Cette condamnation marque le divorce des intellectuels avec le régime. Un manifeste protestataire est publié.

Le second virage à connaître est l’exode de Mariel (1980). Alors que Castro adopte une ligne de plus en plus orthodoxe, il expulse 120 000 Cubains « contre-révolutionnaires ». Ceux qu’il appelle les « déchets » ou encore les « vermines » sont accueillis aux États-Unis avec le statut de réfugiés. Los del puente de Mariel partent pour Miami et viennent grossir les rangs de la diaspora cubaine de la Little Havana.

Parmi ces expulsés, on peut citer l’écrivain Reinaldo Arenas. À l’origine favorable à la Révolution, il est ensuite persécuté en raison de son homosexualité. Son autobiographie Antes que anochezca (1992) retrace cet exil.

El periodo especial en tiempo de paz

Sur un plan historique

Alors même que l’Europe de l’Est sort du joug communiste, Castro poursuit sa politique de rigueur. En 1989 se déroule une série de « purges » qui se soldent par l’exécution de hauts dignitaires jusque-là glorifiés. Enfin, en 1991, alors même que l’URSS est au bord de l’implosion, Castro maintient le cap. Il réaffirme la stricte orthodoxie marxiste lors du quatrième congrès du PCC. C’est « le socialisme ou la mort », il faut défendre l’île « entourée d’un océan de capitalisme ».

Débute la « période spéciale en temps de paix ». Cuba est seule face au monde et fait face à des problèmes de pénuries dramatiques. La situation économique est catastrophique alors que se poursuit l’embargo étasunien et que l’URSS, qui s’est effondrée, ne subvient plus aux besoins cubains.

Sur un plan littéraire

Les auteurs n’hésitent plus à critiquer le régime. La Révolution ne fait plus rêver personne et le monde littéraire ne se sent plus redevable des réformes castristes. C’est la literatura del desencanto (littérature du désenchantement).

Se développe un realismo sucio a la cubana (réalisme sale à la cubaine), notamment à travers les romans policiers. Ceux-ci permettent une représentation de Cuba comme un champ de ruines. La vision qu’ils donnent de La Havane est très loin des images splendides proposées par Carpentier dans les années 1960. Parmi ces auteurs des années 1990, on peut citer Leonardo Padura Fuentes qui donne à voir à ses lecteurs une société cubaine en décomposition.

En conclusion

Au fil du XXᵉ siècle, Cuba passe du giron espagnol à celui des États-Unis avant d’être affiliée à l’URSS. Au moment des années 1990, l’île semble très isolée et traverse une mauvaise passe tant sur un plan économique que politique ou diplomatique. La littérature cubaine reflète ces évolutions historiques et permet de mettre en lumière les préoccupations et les divisions des intellectuels et de la population.

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