cycle de Kondratiev

Le cycle de Kondratiev est l’un des cycles les plus observés. Cette notion de première année et souvent négligé, pourtant cela peut être un véritable atout à mettre dans sa copie le jour J sur un sujet autour des crises. D’où l’intérêt de comprendre ce qu’est véritablement un cycle de Kondratiev.

Le cycle de Kondratiev en quelques phrases

Un cycle de Kondratiev, dans les sciences économiques, est un cycle économique de l’ordre de 40 à 60 ans. Ce cycle est également appelé cycle de longue durée. Il est mis en évidence dès 1926 par l’économiste Nikolai Kondratiev, à la demande de Lénine, dans son ouvrage Les vagues longues de la conjoncture.

Comme Karl Marx, il considère que les fluctuations économiques sont liées à des facteurs endogènes. Ainsi le système génère même les conditions de la reprise. Cette théorie fait ainsi du capitalisme « un phénix renaissant de ses cendres » pour reprendre l’expression de Pierre Dockès et Bernard Rosier.

Dans son modèle, il distingue deux phases distinctes, une phase ascendante (phase A) et une phase descendante (phase B). 

Les cycles de Kondratiev historiques

Premier cycle de Kondratiev : 1790-1850

Phase A : elle est facile à expliquer car elle marque le début de la Révolution Industrielle, période pendant laquelle il y a beaucoup d’innovations.

Phase B : l’analyse de Joseph Schumpeter a une certaine pertinence dans la phase B, elle peut s’expliquer par le ralentissement des effets d’enchaînement ou encore par certaines résistances sociales dues à l’aggravation de la condition ouvrière. Apparaissent les mouvements luddistes.

Le luddisme est, selon Edward P. Thompson, un « conflit industriel violent » qui a opposé dans les années 1811-1812 des artisans aux employeurs et manufacturiers qui favorisaient l’emploi de machines.

Deuxième cycle de Kondratiev : 1850-1890 (point haut : 1873)

Ce deuxième cycle de Kondratiev est moins évident à expliquer. Même l’analyse schumpetérienne est difficilement tenable car il n’y a pas de réelles grappes d’innovations qui expliqueraient une expansion.

Phase A : malgré tout, il est possible de trouver certaines innovations qui vont être à l’origine des secteurs moteurs de ce Kondratiev :

  • La construction des chemins de fer.
  • La mise en place du convertisseur de Bessmer.
  • Une augmentation assez nette de la productivité du travail qu’on estime entre 2 et 3 % par an pour la France en moyenne.
  • Une augmentation du salaire réel dans les mêmes proportions. Cette hausse est plus marquée au Royaume-Uni qu’en France.

La phase A est également marquée par l’accélération du développement des secteurs bancaires et des marchés des capitaux.

Phase B : le retournement coïncide avec une crise économique, et la Grande Dépression à la fin du XIXe siècle, on entre alors dans une crise structurelle plus longue. Cette crise ne touche pas de façon homogène tous les pays puisqu’elle touche avant tout les pays les plus jeunes.

Notons que cette période se combine avec la fin de l’hégémonie du Royaume-Uni et la montée en puissance de l’Allemagne et des États-Unis. De plus, cette période voit aussi s’instaurer des mesures protectionnistes dans le commerce international, notamment aux Etats-Unis.

Troisième cycle de Kondratiev : 1890-1940 (point haut : 1913)

Phase A : elle correspond à une période de reprise puisqu’elle succède a la fin de la Grande Dépression. Les révolutions et les innovations sont surtout institutionnelles. Les innovations économiques sont, pour le coup, les conséquences de cette dépression, notamment par rapport au protectionnisme.

  • L’électricité
  • Le pétrole
  • La chimie
  • L’automobile
  • L’OST (Taylor) et la chaîne de travail (Ford)
  • Quelques découvertes d’or.

On peut parler de deuxième Révolution Industrielle. C’est aussi le début de la première mondialisation, qui marque l’essor du commerce international.

Phase B : elle est beaucoup plus difficile à expliquer que dans les autres cycles. On ne peut pas vraiment parler d’un essoufflement des secteurs moteurs comme l’automobile ou l’électricité.

Pourquoi ? Car ces secteurs n’arrivent pas à maturité durant la phase B mais bien plus tard. Malgré tout, on peut considérer que les investissements importants ont déjà été faits ; d’où l’essoufflement de l’investissement qui explique le cycle mais pas des secteurs en soi, ce qui expliquerait leur dynamisme.

Quatrième cycle de Kondratiev  : 1940-1990 (point haut : 1973)

Phase A : d’emblée, ce cycle ne s’inscrit pas dans l’analyse des cycles longs puisque la phase A est censée être une période d’expansion correspondant à la Seconde Guerre mondiale. Cette guerre est suffisamment importante pour être considérée comme une période de dépression.

Malgré tout, elle constitue aussi le facteur prépondérant qui va expliquer la période d’expansion qui la suit : les Trente Glorieuses. Le progrès technique qui a permis cette exepension ne s’explique pas par des grappes d’innovations. C’est plus l’utilisation d’anciens progrès techniques qui est à l’origine, bien que cette période soit marquée par l’émergence de nouveaux biens de consommation dans l’électroménager, aéronautique…

Phase B : cette période est appelée période de croissance molle. Dans le contexte du renouveau des analyses schumpétériennes dans les années 1980, il y a une relecture des Trente Glorieuses et de la rupture, liée à l’essoufflement des effets d’entraînement des secteurs moteurs des Trente Glorieuses. Apparaît alors l’idée de saturation de la demande en biens durables. De plus, il y a une rupture des gains de productivité à partir de 1973.

Les cycles de Kondratiev contemporains

Cinquième cycle de Kondratiev : 1990- ?

Phase A : la phase A du cinquième Kondratiev est constituée de :

Nouvelles technologies : foisonnement d’innovations (nanotechnologie, NTIC,…) qui laissent à penser qu’on est en présence d’une grappe d’innovations. Ces innovations vont provoquer de nombreuses mutations sociales.

Les NTIC font rentrer l’économie dans une nouvelle ère. D’après J. Rifkin, dans La nouvelle société du coût marginal zéro, c’est notamment grâce au développement de ces NTIC que l’économie mondiale va exploser et en particulier la sphère financière. En effet, grâce à ces NTIC, les pays se retrouvent interconnectés H24, 7/7.

Développement de l’externalisation dû au développement des nouvelles technologies : le progrès technique a tendance à toucher tous les secteurs et tous les domaines d’une société.

Le progrès technique, même si Solow contredit cette partie en 1987 avec son fameux paradoxe “les ordinateurs sont partout, sauf dans les statistiques”.

S’il est vrai que les chiffres de la productivité ne sont pas mirobolants entre 1989 et 1995, la productivité du travail repart à la hausse, avec un rythme de croissance plus soutenu (environ 2,2%/an en moyenne entre 1995 et 2001).

En outre, en 2000, Solow, face à la constatation du retour de la productivité, déclare que : « la vérité est qu’on n’en sait rien. Il est naturel de suspecter que cette accélération de la croissance de la productivité en 1996 soit la conséquence tant espérée et attendue des technologies de l’information. » Ainsi on voit à ce moment que le progrès technique est un phénomène de moyen terme voire de long terme.

Phase B : on manque de recul historique pour pouvoir donner les réelles raisons de ce retournement. Mais on remarque cependant que depuis le milieu des années 2000, la croissance repart à la baisse. Les crises se multiplient (le meilleur exemple est celui de la crise de 2008 qui illustre parfaitement la déconnexion entre la réalité économique et la sphère financière, la finance folle), le chômage, dans l’ensemble des PDEM redevient important, bien que certains pays le maîtrisent mieux que d’autres.

La situation politique, la montée des extrêmes, le repli protectionniste de plusieurs pays (USA à l’image de son président D. Trump, la Grande-Bretagne et sa volonté de sortir de l’Europe qui se concrétise avec le Brexit, …) et le ralentissement des innovations de masse expliquent également ce ralentissement, voire ce retournement de la croissance.

Vers un sixième cycle de Kondratiev ?

Alors qu’on ne sait toujours pas tirer de réelles conclusions sur le cinquième cycle de Kondratiev, plusieurs économistes anticipent déjà le sixième. C’est le cas d’économistes comme Philippe Aghion, Gilbert Cette et Elie Cohen (Changer de modèle, 2014) ou encore Jeremy Rifkin (La nouvelle société du coût marginal zéro, 2014). Pour eux, le sixième Kondratiev englobera :

  • La mondialisation et la démographie, qui vont représenter deux accélérateurs du changement économique et social de demain ;
  • L’Asie va de plus en plus s’affirmer comme étant le centre de gravité de la planète ;
  • Les pays industrialisés se transformeront potentiellement en épicentre du sixième Kondratiev ;
  • La mondialisation verte sera primordiale et, avec une analyse schumpéterienne de la croissance, sera responsable de grappes d’innovations importantes ;
  • Les technologies vertes seront un marché de croissance. 

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