observation

« L’intelligence économique consiste en la maîtrise de l’information stratégique pour tout acteur économique. Elle a pour triple finalité la compétitivité du tissu industriel, la sécurité de l’économie et des entreprises et le renforcement de l’influence de notre pays. » (SGDN, 2005)

L’essentiel de l’intelligence économique pratiquée par les entreprises repose sur un cadre légal malgré quelques exceptions. Par exemple, en 2011, EDF a été condamnée à 1,5 million d’euros d’amende pour l’espionnage de l’ordinateur de Yannick Jadot en 2006, alors directeur des campagnes de Greenpeace France.

L’avènement historique de l’intelligence économique

Le pressentiment de nouveaux rapports de force

L’ancien conseiller du président Pompidou, Bernard Ésambert, rédige en 1991 un ouvrage à contre-courant de l’idéologie officielle qui prône la « fin de l’histoire » (Francis Fukuyama) : La Guerre économique mondiale. En effet, la guerre économique émerge à l’une des périodes les plus pacifiques du XXᵉ siècle.

« L’économie se globalise : la conquête des marchés et des technologies a pris la place des anciennes conquêtes territoriales et coloniales. Nous visons désormais en état de guerre économique. »

D’une révolution géopolitique à une autre

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, marqué par la renaissance du système monétaire international et l’avènement du GATT (1947), les luttes économiques étaient circonscrites à une petite arène. Les pays capitalistes en compétition étaient contraints par une certaine solidarité du fait de la guerre froide. Cet équilibre est brisé en 1991 : les alliés d’hier deviennent ennemis d’aujourd’hui au sein d’une géoéconomie féroce, accentuée par l’intensification rapide de la mondialisation. Les vecteurs de la puissance changent donc relativement avec une guerre économique à la frontière entre hard et soft power.

Dans le cadre de cette guerre économique opposant des firmes et des États, on note l’ascension des NTIC et l’affirmation d’une économie de la connaissance. Les data disponibles augmentent de manière exponentielle. C’est dans ce contexte que l’intelligence économique s’avère cruciale pour protéger, être compétitif et influencer ; ces trois critères caractérisant l’intelligence économique à la française.

L’intelligence économique en bref

État des lieux

Contrairement aux États-Unis ou au Japon, la France n’a pas de culture de l’intelligence économique et en souffrira beaucoup. Cependant, elle tente de combler son retard depuis quelques années. À ce titre, Alain Juillet, nommé Haut responsable à l’Intelligence économique en 2003 (en poste jusqu’en 2009), fera beaucoup d’efforts pour rattraper la situation.

En outre, la conscience d’une souveraineté économique accrue s’ancre de plus en plus dans l’État français. En témoigne le décret numéro 2019-1590 du 31 décembre 2019 relatif aux investissements étrangers en France. Le seuil de participation contrôlé par des entreprises étrangères est abaissé de 33 % à 25 % et de nouveaux secteurs sont protégés (stockage de l’énergie, technologies quantiques en particulier). Ainsi, en 2020, Bercy met son veto quant au rachat de la PME française Photonis, leader de la vision nocturne, par le géant américain Teledyne.

Les États-Unis disposent d’outils bien plus puissants comme l’extraterritorialité juridique (article très intéressant ici !) ou d’entités stratégiques comme In-Q-Tel, le fonds d’investissement de la CIA.

Au-delà de l’action de l’État, les firmes françaises pâtissent également d’un manque de culture de l’intelligence économique. Par exemple, les sociétés françaises consacrent dix fois moins que leurs homologues japonaises ou britanniques à l’intelligence économique.

Les différentes formes de l’intelligence économique

Le cabinet le plus puissant historiquement, Kroll, fondé en 1972 aux États-Unis, a par exemple renseigné LVMH quant aux intentions de Pinault sur Gucci.

Outre ces travaux de veille et d’investigation, il y a aussi le lobbying. Par exemple en 2007, lors de l’ouverture des travaux de la Commission sur la question des normes d’émission de CO2, BMW, Daimler et Porsche ont menacé de procéder à des licenciements massifs en cas de réglementation jugée défavorable, s’appuyant sur de puissants relais au sein des instances européennes.

Enfin, il existe aussi la communication d’influence, c’est-à-dire la guerre par l’information. En effet, les méthodes pour conquérir un marché se sont diversifiées à cause du durcissement de la compétition. Ainsi, en 2007, la société Eurocopter a été victime pendant plusieurs mois d’une campagne de dénigrement dans les médias indiens. Des insinuations sur des pratiques de corruption ont entraîné l’annulation par les autorités indiennes d’un important contrat de 197 hélicoptères.

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