Oral

Je te propose de partager ma position de colleuse d’anglais pour mieux comprendre les attentes du jury lors d’un oral d’anglais. Nous verrons comment je m’organise pour établir ma note ainsi que quelques conseils pour que ton entretien soit réussi !

La peur de l’irréversible

Lors des différentes colles que j’ai pu évaluer, j’ai réalisé que les candidats appréhendaient énormément les épreuves orales. En effet, à l’oral, il n’y a pas de blanc ou d’effaceur, et on ne peut pas rayer ce que l’on vient de dire. Bref, Saussure l’a dit avant moi : le langage est linéaire, irréversible, et bien souvent, c’est cette peur de l’irréversibilité qui paralyse les candidats.

C’est embêtant, car l’anglais est une langue vivante, et c’est pour cette raison que les coefficients oraux sont si importants. Le jury évalue non seulement la manière dont tu traites le sujet proposé, mais également ta façon de communiquer en anglais. L’épreuve orale d’anglais se teinte donc d’une dimension humaine. Il ne suffit plus, comme à l’écrit, de disserter sur un sujet. Il est nécessaire de transmettre sa pensée avec des mots, mais également des gestes et une attitude adéquats. Donc, pas de problème s’il y a un petit blanc ou que tu t’autocorriges, l’essence de la colle réside ailleurs !

Qu’est-ce que je fais pendant un passage à l’oral ?

Accueillir le candidat et organiser mes notes

Mon objectif en tant que jury, ce n’est pas que le candidat soit traumatisé. Je sais qu’il est sûrement stressé, et je me sens vraiment impuissante quand quelqu’un arrive tout pâle ou en situation de panique. Je suis censée être impartiale, donc je n’ai pas le droit de rassurer l’étudiant !

Ce que je fais avec tous les candidats, c’est que je leur propose de prendre quelques secondes pour s’installer, préparer leurs brouillons et reprendre leur souffle après leur temps de préparation. Je te conseille vraiment de tirer profit de ces quelques secondes de pause pour reprendre tes esprits. Un peu avant de passer les oraux du bac, un enseignant m’avait conseillé de me redresser, de prendre une grande inspiration et de souffler juste avant de commencer. C’est une technique qui a, par la suite, toujours fonctionné pour moi.

Après avoir accueilli le candidat et pendant que ce dernier s’installe, je prépare la feuille sur laquelle je vais écrire. J’ai un barème avec des cases à cocher et quelques informations à renseigner. À côté de ça, personnellement, je prends aussi des notes plus complètes sur une feuille vierge sur laquelle j’ai tracé un trait vertical. À droite, je note les fautes de prononciation et de grammaire, et à gauche, je note le contenu de la présentation. Au fur et à mesure du commentaire, je note les éventuelles questions que je pourrais poser.

Prendre des notes

J’apprécie énormément quand le candidat ralentit pour annoncer son plan et les informations importantes pour me permettre de les noter. Il faut savoir que quand on colle, on entend plusieurs personnes à la suite. Si les présentations ne sont pas claires, c’est souvent difficile à suivre. Donc, en tant que candidat, il serait vraiment bien que tu essayes de faciliter la vie à ton colleur ou à ton jury en étant clair, en parlant assez fort et pas trop vite, et en utilisant le vocabulaire adéquat.

Est-ce qu’il y a des choses que je ne note pas ? Oui, une chose. Je ne prends pas en notes la présentation de l’article si le candidat n’analyse pas le paratexte et se contente de dire : « C’est un article du Guardian écrit par telle personne et publié à telle date. » À la place, je note « analyse du paratexte ? » et c’est une question que je poserai certainement lors de l’entretien.

Il y a aussi des moments où je ne sais pas quoi noter. Ça arrive surtout quand l’étudiant commence par me parler d’un exemple avant de me donner son idée. Je ne sais pas où il veut en venir et, du coup, je suis un peu perdue. Pense donc bien à respecter la structure : idée/exemple/argument et à rendre explicite ce dont tu vas parler. Il faut absolument être clair pendant ton passage. Donc, évite tous les mots parasites tels que « euuuh », « sorry », « in fact » car ils nuisent à la fluidité du propos.

Ce que je regarde

Personnellement, je ne suis pas le genre de jury qui va regarder ta tenue ou ta coiffure, mais je sais qu’il y en a beaucoup qui le font. Donc, fais attention aux petits détails auxquels on ne pense pas toujours, par exemple veille à ce que tes vêtements ne soient pas transparents.

En revanche, ce que je regarde avec attention, c’est la façon dont le candidat communique. Est-ce qu’il me regarde pour voir si j’ai bien pu prendre en notes son plan ? Est-ce qu’il a l’air convaincu par ce qu’il dit ? Est-ce que ses gestes étayent ses propos ? Etc.

Comment j’établis ma note

Il y a des barèmes pour chaque élément de l’épreuve, donc je les respecte globalement. Néanmoins, quand je colle, je prends également en compte l’impression générale que j’ai eue et ça peut faire varier la note d’environ un point.

Il existe aussi des plafonds. Si le fond est parfait, mais qu’il y avait trop de problèmes de grammaire, je ne peux pas mettre une bonne note. C’est pour cette raison que je te conseille d’éviter de répéter des fautes tout au long de ta présentation.

Il n’est déjà pas facile de parler en public dans notre langue maternelle sans faire de fautes, alors il est encore moins évident de le faire dans une langue étrangère. Une seule faute ne te pénalisera pas énormément (l’oubli d’un « s » de troisième personne est imputable au stress), mais lorsqu’elle est répétée, tu perds énormément de points.

Certains de mes étudiants ne font pas beaucoup de fautes à l’écrit, mais l’appréhension de l’oral leur fait perdre leurs moyens et ils commettent toutes les fautes graves qu’il faut absolument éviter. Notamment celles-ci : oublier les « s » de troisième, ajouter un « s » au verbe d’une question alors que cette dernière contient déjà un auxiliaire, employer des barbarismes, mal prononcer le nom des acteurs politiques connus.

Quelques conseils

Pour remédier à ce problème, une seule solution : l’entraînement. Les organes vocaux sont en grande partie des muscles, et pour parler anglais parfaitement, ils doivent être préparés. À titre de comparaison, un coureur qui s’entraîne régulièrement gagnera plus facilement le marathon que quelqu’un qui ne s’est jamais entraîné.

Un autre conseil est de bien t’hydrater. Quand j’étais étudiante, je ne m’en rendais pas compte, mais maintenant que j’enseigne, je le vois. Parler en continu dessèche énormément et le stress n’arrange rien à l’affaire. Pour minimiser le risque de fautes de prononciation, personnellement, je bois de l’eau doucement, en la gardant un peu dans ma bouche, et c’est une technique que tu peux faire juste avant ton oral. En outre, évite de manger trop salé, de fumer ou de vapoter juste avant l’épreuve. Le sel tout comme la fumée assèchent énormément la bouche, en plus, l’odeur de tabac froid pourrait rebuter le jury.

L’entretien

C’est là où le bât blesse selon les rapports de jury, mais également selon mon expérience. Les candidats n’ont plus de support écrit et se sentent complètement désemparés face aux questions du jury. Un candidat qui garde la même attitude pendant sa présentation et pendant l’entretien a donc de fortes chances de se démarquer et de faire bonne impression.

En tant que jury, si une présentation est plutôt bonne, je ne sais pas toujours quelles questions poser et je me retrouve à demander des choses « bateau » comme « Could you develop this point a little further? ». Pour cette raison, j’apprécie lorsqu’un candidat me tend une perche en formulant des ouvertures. J’utilise le terme « ouvertures » au pluriel, car il doit y en avoir plusieurs dans ton oral. Une à la fin de ta conclusion, certes, mais également d’autres à la fin de tes réponses aux questions.

En civilisation, les ouvertures peuvent prendre la forme d’une citation brièvement explicitée, d’une date ou d’un événement qui se passe après l’article étudié, d’un point de vue historiographique ou critique, ou encore de statistiques sur un thème proche de celui dont tu as parlé. En littérature, les ouvertures peuvent aussi être des citations d’autres œuvres ou de critiques littéraires, mais tu as également l’opportunité de parler d’autres œuvres du même auteur pour diriger l’entretien vers une étude comparatiste.

Les types de questions

Lors de la partie entretien, le jury a recours à plusieurs types de questions qu’il est intéressant de connaître pour pouvoir non seulement les anticiper, mais également comprendre le type de réponse attendu.

  • Il existe les questions de reformulation qui visent à te faire éclaircir un point de ta présentation. Pour y répondre, ne répète pas ce que tu as dit, mais utilise des synonymes et insiste sur la façon dont tes idées s’articulent.
  • Il y a également les questions de connaissances : le jury cherche à vérifier ta maîtrise d’un sujet, n’hésite donc pas à donner des chiffres (dates, statistiques) et des noms (d’acteurs politiques, d’historiens de la question, etc.).
  • Les questions sur le texte cherchent à attirer ton attention sur un point précis du texte qui t’a peut-être échappé. Elles peuvent aussi avoir vocation à parfaire, voire corriger, ta compréhension de l’article. Pour y répondre, tu devras nécessairement faire une référence au texte.
  • Les questions du type « Are you sure that…? » peuvent avoir deux objectifs :
  1. Vérifier que l’erreur que tu as commise est une erreur d’inattention.
  2. Néanmoins, dans certains cas, les questions du type « Are you sure that…? » cherchent simplement à te faire nuancer ton propos et à t’emmener plus loin dans la réflexion.

Généralement, une question « Are you sure that…? » qui arrive en début d’entretien a pour objectif de t’inviter à corriger une erreur. En revanche, si elle arrive au milieu ou à la fin de l’entretien, elle aura plutôt vocation à t’inviter à développer une idée.

Enfin, j’insiste sur le fait qu’il n’y a pas de question dite « piège ». Le jury peut en effet te pousser dans tes retranchements pour voir ta capacité à argumenter en anglais, mais à aucun moment le but n’est de te piéger !

Quelques conseils pour plaire d’emblée au jury

Souris

As-tu déjà souri à un inconnu dans la rue ? Ce dernier t’a certainement souri en retour. Sans entrer dans des explications scientifiques, le sourire et la bienveillance sont contagieux, donc n’hésite pas à les instiguer chez ton jury. Comme l’a dit Victor Hugo ; « Pour que l’orateur soit grand et puissant, il faut que l’auditoire fasse la moitié du chemin. »

Soigne ton accroche

Lorsque l’on écoute une musique, les premières secondes déterminent si oui ou non on va continuer à l’écouter. Pour les oraux d’anglais, le jury n’a pas d’autre choix que de t’écouter, mais essaye de lui donner envie de le faire avec une accroche fine. Il peut par exemple s’agir d’une citation, d’une date, d’une question rhétorique, ou de statistiques qui amènent le sujet.

Remercie ton auditoire

À la fin d’une présentation, il y a parfois un moment de latence où l’on ne sait pas si le candidat a terminé. Pour éviter cela, pense à remercier ton auditoire avec la phrase « thank you for your attention », formulation très appréciée en milieu académique, que le jury percevra comme extrêmement prévenante de ta part.

L’importance de connaître son auditoire

J’espère ainsi t’avoir un peu rassuré concernant les oraux d’anglais. Rien n’est irréversible, et tant que l’épreuve n’est pas terminée, tu peux toujours gagner des points. L’objectif de l’épreuve est surtout d’évaluer ta capacité à transmettre une idée. Il ne s’agit donc pas de débiter un flux ininterrompu de paroles sans faire de fautes, mais au contraire de parvenir à rebondir sur tes éventuelles erreurs, sur les possibles réactions du jury et sur ses questions. En effet, contrairement à l’épreuve écrite, l’épreuve orale est essentiellement intersubjective, c’est-à-dire qu’elle prend en compte la relation que tu crées avec ton jury.

Pour finir, si tu souhaites expérimenter et te mettre à la place du jury en préparant tes épreuves, tu peux utiliser les sujets proposés sur Major-Prépa et 1) écouter la colle d’un ami, penser à d’éventuelles questions et lui faire un retour sur sa performance ou 2) te filmer sur un sujet, puis t’autocorriger en regardant la vidéo subséquemment. Cela renforcera d’autant plus ta connaissance des attentes du jury car, pour reprendre les termes de John Locke : « Comprendre son auditoire et ses attentes est ce qu’il y a de plus important si l’on veut atteindre le succès. »