Cette année, les cours de culture générale te fournissent des visions différentes sur la thématique du désir. Ici, nous te proposons la traduction d’un texte qui traite du désir (notamment l’éros, ou l’amour, qui est également l’incarnation du désir), tel qu’il est représenté dans les arts picturaux.

La représentation du désir en est le fondement puisque, rappelons-le, le désir se différencie du besoin en ce qu’il a trait à un caractère insaisissable et potentiellement irréalisable (qui voudrait donc atteindre un objectif idéalement représenté, mais qui ne peut de fait se réaliser), tandis que le besoin est l’expression nécessaire d’une potentielle carence si le besoin n’est pas satisfait. Ici, Philip Stewart semble soutenir que la représentation graphique du désir agrémente l’expérience de la lecture, façonne des idéaux, mais aussi des clichés, notamment sur le genre féminin, source d’inspiration artistique et de désir pour les sociétés.

On te laisse avec la suite, enjoy !

Texte à traduire

Summary of Engraven Desire: Eros, Image, and Text in the French Eighteenth Century, Philip Stewart (1)

How do literary illustrations affect the way we read—or more subtly, what we read? Through a critical investigation of the role engraving played in eighteenth-century French literature, Philip Stewart grapples with this question. In both its approach and its conclusions, his project marks a provocative departure from the tradition of viewing illustrations as merely pictures, rather than as texts to be interpreted themselves. (2)

Focusing on the objectification of women by the “male gaze”, Stewart analyzes the various ways in which this masculine power is simultaneously represented and veiled: the fascination with women playing “male” roles, such as soldiers; the preponderance of voyeuristic images of the naked female body; the transformation of male power into hostile forces of nature that render women helpless. (3) Further, Stewart shows how “indecent” engravings that purported to test the limits of eighteenth-century morality often merely reinforced prevailing images of women. (4)

Addressing critical concerns about the societal enforcement of gender roles in literature along with essential questions about the function of illustration, Engraven Desire provides surprising insight into the culturally conditioned act of reading. (5) Stewart’s work, itself richly illustrated with hundreds of arresting reproductions, makes a significant contribution to our understanding of the interplay of art, literature, and society. (6)

Proposition de traduction

Résumé de Désir gravé/Désir en gravure : l’éros, l’image et le texte dans le XVIIIe siècle français, Philip Stewart (1)

Comment les illustrations littéraires affectent-elles la manière dont nous lisons – ou dans une moindre mesure, ce que nous lisons ? Dans une étude critique du rôle que la gravure a joué dans la littérature française du XVIIIe siècle, Philip Stewart essaie de répondre/faire face à cette question. À la fois dans son approche et dans ses conclusions, son projet marque un détachement provocateur de la tradition des illustrations graphiques vues comme de simples images, plutôt que comme des textes qui doivent être interprétés indépendamment/de leur côté. (2)

En se focalisant sur l’objectification des femmes par le « regard masculin », Stewart analyse les différentes manières dont ce pouvoir masculin est dans le même temps représenté et dissimulé : la fascination envers les femmes qui interprètent des rôles « masculins », tels que des soldats ; la prépondérance d’images voyeuristes du corps dénudé de la femme ; la transformation du pouvoir masculin en forces de la nature hostiles qui rendent les femmes vulnérables. (3) En outre, Stewart montre combien les gravures « indécentes » qui prétendaient tester les limites de la moralité du XVIIIe siècle ne faisaient souvent que renforcer l’image qui prévalait à propos des femmes. (4)

En traitant des préoccupations critiques sur la mise en place par la société des rôles de genre/sexo-spécifiques dans la littérature parallèlement à des questions essentielles sur la fonction de l’illustration, Désir gravé/Désir en gravure offre un aperçu surprenant de l’acte culturellement conditionné de la lecture. (5) Le travail de Stewart, lui-même richement illustré de centaines de représentations saisissantes, apporte un contribution considérable à notre appréhension de l’interaction entre art, littérature et société. (6)

Quelques précisions sur la traduction

(1)

  • Attention à cette erreur : summary ≠ sommaire, mais summary = résumé.
  • Pour traduire engraven, deux options s’offrent à nous, selon les interprétations, « en gravure » (peut-être plus littéraire et idiomatique) ou « gravé ».
  • On a ajouté les déterminants « l’ » et « le » pour « l’éros, l’image et le texte ». En effet, on omet plus difficilement des pronoms en anglais qu’en français.
  • Sur ta copie, souligne les noms d’œuvres (ce qui transcrit l’italique de manière manuscrite).

(2)

  • Il faut faire attention à utiliser un français correct lors de la formulation des questions (ne pas oublier le sujet « elles »).
    Petit rappel bonus : en transcrivant une question vers la forme déclarative en français, fais aussi attention à ne pas répéter deux fois le sujet. Par exemple, on n’écrira pas (et on ne dira pas à l’oral) : « Nous allons voir comment les illustrations littéraires affectent-elles la manière dont nous lisons », mais plutôt « Nous allons voir comment les illustrations littéraires affectent la manière dont nous lisons ».
  • « More subtly » est traduit par « dans une moindre mesure », car c’est une expression littéraire et idiomatique, en somme plus usitée que « plus subtilement » en français. On aurait pu utiliser « de manière plus subtile », mais il vaut mieux éviter de répéter le mot « manière », déjà employé un peu plus tôt dans la même phrase.
  • Through est traduit par « dans », et non par « à travers » (moins élégant), même s’il était possible de l’utiliser.
  • Vocabulaire : « to grapple with » comprend la notion de tentative (pas forcément aboutie). On le traduira donc par « essayer de répondre à » ou « essayer de faire face à ».
  • Both peut signifier « les deux » ou bien « à la fois » (ce qui est le cas, ici).
  • On préférera utiliser le terme « détachement », plus approprié au niveau du registre contextuel que « départ », pour traduire departure.

(3)

  • Les formes « be-ing » telles que focusing en (3) ou addressing en (5) se traduisent par le complément circonstanciel de manière « en + participe présent ».
  • Vocabulaire : a veil = un voile → veiled = voilé, dissimulé (on préférera ici expliciter la métaphore pour montrer que l’on a compris le sens du mot).
  • With devient « envers », car on ne parle pas en français de « fascination avec », mais plutôt de « fascination pour » ou « fascination envers ». Ce sont des collocations.
  • Helpless peut être traduit par « vulnérables » ou « sans défense ».

(4)

  • Même si la traduction littérale de further est « plus loin », on choisira le mot de liaison le plus adapté pour transcrire cette idée de superposition (coordination) à une autre idée, c’est-à-dire « en outre ».
  • Il est plus élégant de traduire « to show how » par « montrer combien » plutôt que par « montrer comment », lorsque ce qui suit comprend la notion de grande quantité, de puissance…
  • La traduction de la dernière partie de la phrase est difficile, il convient alors d’éviter le contresens ou le faux-sens en prenant plus de temps pour comprendre lors de la lecture.

(5)

  • The enforcement = la mise en place.
  • An insight (= un aperçu) est un terme de vocabulaire très important et très employé, il faut donc le connaître.
  • En français, on préfère utiliser des noms plutôt que des verbes ; c’est pourquoi « the act of reading » ne sera pas traduit par « l’acte de lire », mais par « l’acte de la lecture ».

(6)

  • On peut traduire « hundreds of reproductions » par « des centaines de représentations », mais aussi par « des représentations par centaines ».
  • Arresting = saisissante.
  • Understanding = compréhension, entendement, appréhension.

Nous espérons que cet article aura pu te montrer qu’on peut toujours piocher dans différentes matières pour sa propre culture générale. Retiens bien qu’on peut associer les exercices de sorte à s’alléger la tâche, tant les thèmes étudiés en culture générale sont universels et ouverts !