Tu n’as pas pu passer à côté, la fin de l’été a malheureusement été marquée par de violents incendies en Amazonie qui ont ému et inquiété la planète entière. Considérée comme le poumon du monde, quels sont les réels enjeux de la région ?

L’Amazonie en chiffres

  • 5,5 millions de km2

L’Amazonie est la plus vaste forêt tropicale de la planète avec une superficie totale de 5,5 millions de km2, soit plus de la surface totale de l’Europe.

  • 25 % des espèces mondiales

Plus de 30 000 espèces de plantes différentes sont présentes en Amazonie. La région abrite 10 % de la biodiversité mondiale, avec 3 000 espèces de poissons d’eau douce, 1 500 d’oiseaux, 500 de mammifères, 550 de reptiles et 2,5 millions d’insectes, soit 25 % des espèces mondiales.

  • 420 tribus

L’Amazonie n’abrite pas que des animaux. Peuplée depuis au moins 11 000 ans, quelque 24 millions d’habitants vivent dans la région. Celle-ci abrite également trois millions d’Indiens qui formeraient 420 tribus selon l’OTCA. Raoni Metuktire est le plus célèbre de leurs représentants et une figure emblématique de la lutte pour la préservation de la forêt amazonienne et des indigènes. Ce dernier a même eu l’occasion d’assister au dernier sommet du G7, où il a demandé à Emmanuel Macron de l’aide pour la préservation des terres amazoniennes.

  • 20 % de l’eau douce

L’Amazone est avec ses 6 900 km, le fleuve le plus long et le plus important en débit du monde. Grâce à lui et à ses affluents, l’Amazonie possède 20 % de l’eau douce non gelée de la planète.

  • 20 % de forêts en moins

Près de 20 % de la forêt amazonienne a disparu ces 50 dernières années selon WWF, et le phénomène n’a fait que s’accélérer suite à l’élection en décembre 2018 du président climatosceptique Jair Bolsonaro. Des statistiques alarmantes : 6 404,4 km2 supplémentaires ont disparu entre janvier et août 2019, contre 3 336,7 sur la même période en 2018, soit une augmentation de 92 %.

  • 73 millions d’arbres à replanter

Différentes initiatives permettent de protéger la forêt et de répondre à la déforestation massive. La France a créé en 2007 le parc amazonien de Guyane, qui forme la plus vaste aire protégée de forêt tropicale au monde. En 2017, un projet de reforestation a été initié à la demande de l’entreprise Rock in Rio ; 73 millions d’arbres devraient être replantés d’ici 2023, soit le reboisement de 30 000 hectares de forêt amazonienne. Il s’agit du plus grand projet de reforestation au monde.

L’Amazonie, un territoire partagé entre neuf pays

La forêt amazonienne s’étend en effet sur neuf pays différents : le Brésil, englobant à lui seul 60 % de la forêt amazonienne, mais encore le Pérou (13 %), l’Équateur, la Colombie, le Venezuela, la Bolivie, la Guyane française, le Suriname et la République du Guyana. Vendredi 6 septembre dernier, quatre d’entre eux se sont réunis à Leticia, capitale colombienne de l’État d’Amazonas, pour sceller le « Pacte de Leticia ». Ce pacte existe depuis 40 ans et n’a pas eu d’impact réel. Ce sommet a eu lieu en urgence, et sous la pression internationale, suite aux violents incendies qui ont frappé la forêt amazonienne cet été, inquiétant la planète entière, avec 30 901 foyers d’incendie détectés au mois d’août dans la région, soit trois fois plus qu’en août 2018 (10 421). Cela reste malheureusement fréquent dans la région.

Le sommet du 6 septembre dernier avait donc pour objectif de lancer un « appel mondial » pour protéger l’Amazonie et « d’unifier les visions » des pays amazoniens pour envisager des solutions de façon collective. Cependant, les différents pays présents dans le bassin amazonien, tels que le Brésil et la Colombie, ont une approche et des ambitions très différentes, et la question de la souveraineté dans la région freine également les négociations.

Côté brésilien, le président a bien fait comprendre que l’écologie n’était certainement pas sa priorité. Ce dernier ne s’est pas rendu au sommet soi-disant pour des raisons médicales. C’est son ministre des Affaires étrangères, Ernesto Araújo, qui a représenté le Brésil lors du sommet. Bolsonaro s’est rendu quelques jours plus tard à l’Assemblée générale de l’ONU, qui a eu lieu le 24 septembre, afin de défendre la position du Brésil sur l’Amazonie. Celui-ci a réitéré son approche nationaliste, précisant qu’il n’appréciait pas les interventions étrangères en Amazonie et que cette dernière restait une question de souveraineté nationale, et que le Brésil devrait donc gérer la situation. Bolsonaro a même jugé le comportement de certains pays comme « colonial », mettant en évidence la France qui a réuni plusieurs pays en faveur de la reforestation de l’Amazonie.

Côté colombien, le point de vue est totalement différent de celui de son voisin brésilien. La Colombie souhaite s’armer pour préserver la forêt, le pays étant l’un des plus touchés par la déforestation en 2018. Ivan Duque s’est ainsi montré volontaire et engagé pour préserver la forêt. Il le déclarait le 25 août dernier : « Nous devons tous comprendre que la protection de notre mère Terre et de notre Amazonie est un devoir moral. » Duque a notamment mis sur la table le sujet de l’OCTA, l’Organisation du traité de coopération amazonienne. Cette organisation a été créée en 1995 pour appliquer les objectifs du traité de coopération amazonienne signé en 1978, dans le but de préserver la forêt amazonienne et de gérer ses richesses. Cependant, après l’implantation de son siège à Brasilia, l’organisme n’a quasiment plus aucun poids.

Les Boliviens partagent les mêmes idées que le Brésil. Evo Morales a signé en juillet un décret autorisant les « incendies maîtrisés » dans le cadre d’exploitations agricoles dans les départements de Santa Cruz et de Beni, faisant frontière avec le Brésil, et dans le but de permettre d’augmenter les surfaces agricoles. La quantité de terres cultivables a augmenté de 83 % depuis l’an 2000 et se situe aujourd’hui autour des 3,5 millions d’hectares. Le 6 août dernier, le gouvernement bolivien a annoncé qu’il avait l’intention d’étendre cette aire à dix millions d’hectares d’ici 2025, grignotant ainsi sur la forêt amazonienne.

Enfin, les tensions au sujet l’Amazonie ont provoqué une crise diplomatique entre la France et le Brésil, considérée comme la plus grave de toute l’histoire des relations franco-brésiliennes. Tout a commencé avec ce tweet du président Emmanuel Macron :

Alors que le président plaignait les Brésiliens et la planète entière en déclarant que « notre maison brûle » et en évoquant une « crise internationale », le président brésilien a violemment riposté en niant l’existence des incendies, accusant les ONG d’en être à l’origine et en s’attaquant au président français sur Twitter également. La crise diplomatique semble s’être apaisée depuis.