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Le thème des inégalités en Italie est extrêmement vaste. Il touche à la fois les domaines politiques, économiques et sociaux, et il recoupe notamment tous les débats qui ébranlent la société italienne depuis quelques années.  Ces inégalités sont d’autant plus criantes depuis la crise économique (la crisa economica) de 2008 qui a touché le pays. Traiter des inégalités en Italie, ce n’est pas seulement parler de la différence entre un Nord riche et un mezzogiorno plus pauvre ; il s’agit de parler également des inégalités entre les hommes et les femmes, et des inégalités en termes d’accès à la santé, à l’éducation ou encore à l’emploi.

Les inégalités régionales en Italie

L’Italie n’a connu que 0,1 % de croissance de son produit intérieur brut (PIB) par habitant entre 2001 et 2006, contre une moyenne de 1,3 % en Europe occidentale. Il s’agit de l’avant-dernier pays de la région, mais cette stagnation est loin d’être homogène à l’échelle territoriale. Le fossé (il divario) entre le Nord et le Sud est plus profond que jamais.

Ces inégalités entre le Nord et le mezzogiorno sont d’abord historiques, mais elles sont aujourd’hui plus marquées que jamais. Cette « Italie à deux vitesses » se caractérise par de profondes différences en termes de richesses. Par exemple, aujourd’hui encore, un Italien du Sud gagne seulement 57 % de ce que gagne un Italien du Nord pour un emploi équivalent, et 11 % des familles sont considérées comme vivant sous le seuil de pauvreté.

Un article entier sera consacré à ce sujet prochainement.

Les inégalités hommes/femmes en Italie

La crise de 2008 a mis en lumière la persistance d’un modèle italien paternaliste dans lequel la femme n’est que peu valorisée. Entre 2016 et 2017, l’Italie a perdu 32 places dans le Global Gender Gap Report du forum économique mondial de Davos, et se situe actuellement à la 82e place sur 144 pays. Ce classement, qui prend en compte les salaires (i stipendi), mais également l’accès aux soins de santé et à l’instruction, ainsi que la participation à la vie politique, montre une régression sans précédent en Italie.

Tout d’abord, en termes d’inégalités (disuguaglianze) salariales, l’Italie pointe à la 126e place mondiale. Les hommes gagnent davantage que les femmes – ce qui n’est certes pas une nouveauté –, mais les femmes travaillent proportionnellement plus que les hommes : 512 minutes, contre 453 minutes. À cela s’ajoute une sous-représentation déplorable des femmes en politique : seulement 30 % d’entre elles figurent au Parlement italien.

Au-delà des inégalités salariales et du manque de représentation féminine, les inégalités dans l’instruction ont également augmenté depuis la crise. Les filles sont moins scolarisées que les garçons et ont moins accès à Internet, ce qui les handicape pour la suite de leurs études.

Finalement, il faut relier ces inégalités à une certaine perception de la femme en Italie qui est d’abord culturelle. Selon un rapport (un resoconto) publié en mars 2015, « la femme est encore perçue comme un objet sexuel et comme la principale responsable de l’éducation des enfants. » À l’heure actuelle, ces inégalités proviennent majoritairement d’un manque d’aides de la part de l’État italien et du fait que la femme italienne ne peut, par conséquent, déléguer certaines responsabilités par rapport à sa vie de famille.

Un exemple d’inégalité sociale : l’accès à la santé (la salute)

Depuis 1978, l’Italie possède un système de santé national universel (Servizio sanitario nazionale – SSN) qui propose gratuitement les soins de base. Néanmoins, ce système est vecteur d’inégalités.

Tout d’abord, les spécialistes sont chers et en accès limité, et les délais sont très longs. C’est la raison pour laquelle beaucoup d’Italiens ont recours au privé pour leurs visites ; mais les honoraires sont alors extrêmement élevés (jusqu’à 150 euros pour une consultation chez un spécialiste) et tous les Italiens ne peuvent donc pas se le permettre.

De plus, on retrouve ici de très fortes inégalités régionales. Le système de soin italien est décentralisé, et donc toutes les régions ne disposent pas de moyens équivalents. Le Sud est encore une fois négligé (trascurato) et de nombreux Italiens du Sud font donc le choix d’aller se faire soigner au Nord, ce qui engendre d’autant plus de frais.

Quel bilan dresser de la situation ?

L’Italie ne cesse donc de voir l’écart se creuser entre riches et pauvres. Ces inégalités, dans un pays pourtant industriel et exportateur, sont l’un des thèmes qui alimentent les campagnes politiques et les propositions pour améliorer la situation : du « revenu universel » (reditto universale) proposé par le Mouvement 5 Étoiles (populiste), au « revenu d’inclusion » du Parti démocrate sous Matteo Renzi (centre gauche), ou encore le « revenu de dignité » proposé sous Berlusconi (droite). Ces inégalités alimentent aujourd’hui les discours de l’extrême droite, portée par la Lega Nord de Matteo Salvini. Son récent succès dans la région d’Ombrie, pourtant un fief de la gauche italienne, montre que les Italiens sont loin d’être insensibles à ce type de discours.

L’Italie semble donc être enlisée dans une « spirale » de l’inégalité qui pourrait être enrayée « à condition de remettre en marche l’ascenseur social qui reste désespérément bloqué en Italie », comme l’explique Pier Giorgio Ardeni.

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