C’est LA question la plus importante que se pose l’étudiant en prépa HEC déçu de ses résultats : faut-il cuber ou non ?

PS : Avant toute chose, je tiens à préciser que j’ai cubé, dans ma prépa publique (Lycée La Bruyère à Versailles) pour intégrer HEC. Toutefois, j’ai essayé d’être le plus objectif possible dans l’écriture de cet article.

Il faut déjà chasser une idée reçue : non, cuber n’est pas forcément la garantie d’obtenir une meilleure école. De très nombreux cubes font “seulement” aussi bien, voire pire que leur année de carré. Cuber n’est pas une garantie, c’est avant tout un risque. Toutes les écoles post-prépas offrent des garanties solides en termes de formation et, in fine, d’employabilité. Cuber ne vaut donc le coup que s’il s’accompagne d’une progression sensible de l’école intégrée, une progression qui permettra de compenser l’année de retard de ton entrée sur le marché du travail.

Les risques associés au cubage

Tu as pu constater que la filière prépa est conçue de telle manière à ce que tout se joue lors des concours : les notes de l’année ne comptent pas. Tu penseras encore à ton ami minor de culture générale qui a tapé une super note totalement inattendue, ou encore à celui qui, brillant dans une matière en prépa, se retrouve avec des notes à peines convenables aux concours.

La performance aux concours est influencée par deux grands types de facteurs.

D’un côté, les facteurs endogènes, ceux liés à ton travail, aux heures passées (ou non) devant ton bureau à préparer plus ou moins ardemment l’ensemble des épreuves du concours, à ta capacité à gérer la pression et le stress le jour J.

De l’autre côté, les facteurs exogènes, ceux qui sont hors de ton contrôle. Typiquement, lors de ton placement aux concours, seras-tu placé dans un paquet de copies excellent ou bien médiocre ? Ton correcteur sera-t-il irrité par le type d’erreurs que tu réalises ou non ? De notre côté, nous avons été surpris de voir que certaines copies notées 19 au concours par un correcteur auraient à peine reçu un 12 de la part d’un autre à qui nous avions donné cette copie à corriger. Et on ne parle pas d’une matière mineure, mais de géopolitique, qui représente en général entre 17 et 20% des coefficients de l’écrit.

Si le cubage peut servir à appréhender et à mieux maîtriser l’ensemble des facteurs endogènes de ta performance, tu ne pourras jamais contrôler ceux exogènes.

Le profil-type du candidat qui cube

Ainsi, le cube idéal est celui qui est capable de révolutionner sa manière de travailler dans les matières les plus importantes, où l’aléatoire joue moins. On parle notamment des mathématiques, de l’économie, de la géopolitique, du management ou encore des langues, voire de la CG. Le candidat qui cube est un candidat qui a obtenu des notes très clairement en-dessous de sa moyenne annuelle aux concours, et qui dispose logiquement de la marge de progression nécessaire à l’obtention d’une école qui lui permettra de compenser l’année de retard engendrée. Le cube idéal est celui qui s’est raté dans des matières où il dispose d’un potentiel inexploité. On peut notamment détecter une matière à fort potentiel lorsque tu obtient des notes bien supérieures en colles qu’en DS, manifestant un potentiel de réflexion qui n’est pas accompagné par un effort suffisant d’approfondissement. Parmi les nombreux cubes qui affichent une sensible progression en mathématiques, on remarque qu’ils ont souvent obtenu des notes plus qu’honorables en colles, ce qui témoigne d’une forte marge de manœuvre.

En revanche, si tu as d’ores et déjà travaillé au moins trois heures tous les soirs et 15 heures par week-end, il faut que tu te poses réellement des questions sur ta capacité de progression… Cuber n’est logique que si cela marque un véritable ÉCHEC aux concours.

Enfin, tu dois être très frais et fort mentalement afin de supporter une nouvelle année de prépa alors que la plupart de tes amis seront en école en train de te narrer leur nouvelle vie à base de FIFA, bières et sport sur Snapchat…

Le profil-type du candidat qui ne devrait pas cuber

Tu fais partie de ceux qui ont obtenu de moins bonnes notes aux concours à cause d’un stress intense que tu n’as pas su canaliser ? Alors évite de cuber. Tu risques d’être encore plus stressé que lors de ton année de carré… et d’autant plus te rater.

Le candidat qui ne devrait pas cuber est également celui qui obtient des notes plus que correctes dans les matières plus aléatoires (langues, contraction, synthèse), et qui s’expose donc à obtenir de moins bonnes notes qui peuvent annuler sa progression dans les autres matières.

Enfin, le dernier profil du candidat qui doit éviter de cuber est celui qui, ayant réussi ses écrits, a raté de trop nombreuses écoles à l’oral. Un étudiant peu à l’aise à l’entretien n’aura quasiment aucun nouvel élément rendant sa vie plus intéressante en entretien l’année suivante. Il aura beau améliorer ses admissibilités et s’entraîner à prendre la parole publiquement, le risque est beaucoup trop élevé…

Prépa publique vs prépa privée ?

Sempiternel débat : vaut-il mieux rester dans sa prépa ou aller dans une autre prépa publique, ou privée, souvent hors contrat ? Il faut raisonner en termes de valeur ajoutée.

Premièrement, ne vous faîtes pas avoir par les résultats des prépas privées hors contrat : souvent, elles utilisent deux labels, un d’excellence attribué aux candidats qui cartonnent au cours de l’année (souvent des cubes déjà issus des meilleures prépas publiques), et un autre destiné aux candidats de niveau plus modeste. Certaines d’entre elles vont même présenter des candidats libres afin d’assurer leurs sacro-saintes statistiques. Il ne s’agit ni plus ni moins que d’une manipulation mensongère au service d’un marketing de la peur, notamment dénoncé dans cet article du quotidien Le Monde. Nous avons d’ores et déjà adopté la position de regrouper les labels des prépas privées hors contrat au sein de nos classements. Nous pensons même bientôt les exclure à cause de la multiplication de la présentation de candidats libres.

Deuxièmement, le changement de prépa apporte un risque conséquent : faut-il prendre le risque de perdre tous ses repères afin d’en adopter de nouveaux ? Il s’impose seulement si vous pensez que le changement d’équipe pédagogique et de cadre vous fera du bien. Ce n’est pas toujours le cas. À titre d’exemple, dans ma prépa (La Bruyère à Versailles), parmi la petite dizaine de cubes (sur 35 étudiants), presque tous ceux qui ont intégré une parisienne sont ceux qui sont restés au sein de la prépa. Alors certes ce n’est qu’un cas particulier qui ne saurait être transposé à l’échelle nationale, mais cela en dit long sur la légende qui voudrait dire que changer de prépa est indispensable pour réussir en cube.

Enfin, pour le choix d’une prépa où cuber comme pour le choix d’une école, regarde au-delà des classements et réfléchis à tes réelles aspirations, aussi bien professionnelles que personnelles. Cuber uniquement pour viser une école qui t’accordera un certain prestige social, et sans réel fondement autour d’un projet professionnel spécifique, est le meilleur moyen de te planter.