Pour ce nouveau numéro de notre mini saga alumni EM Strasbourg, nous sommes partis à la rencontre de Julie Chalmette, DG de Bethesda France, un important studio de jeu vidéo. Il est à l’origine de franchises très connues du grand public comme The Elder Scrolls, Fallout ou encore Doom.

 

Pouvez-vous présenter votre parcours ?

J’ai été en prépa à Lyon, puis j’ai intégré l’EM Strasbourg. Je suis rentré en relation avec Flammarion pour l’élaboration de mon mémoire de fin d’études qui portait sur le multimédia et son impact sur l’édition traditionnelle. J’ai fait mon stage chez eux avant d’être embauché chez Gallimard.

J’ai ensuite voulu donner une dimension plus internationale à ma carrière et j’ai rejoint CUC Software, inc. Qui est devenue Vivendi Games. J’étais responsable des territoires exports de l’Italie, l’Espagne et les territoires nordiques. Je suis ensuite partie vivre à Stockholm où j’ai eu la charge de la filiale scandinave pendant 5 ans. Vivendi a été rachetée par Activision et je suis partie à cette époque. J’ai rencontré des collaborateurs de Bethesda qui souhaitaient renforcer la présence française du groupe en créant une filiale. Je suis DG France depuis 2010.

 

Qu’est-ce qui vous a le plus marqué dans votre cursus à l’EM Strasbourg ? 

Ce qui m’a marqué, c’est l’expérience internationale. Je voulais absolument passer une partie de ma scolarité à l’étranger, c’est la raison pour laquelle j’ai choisi l’EM Strasbourg. J’ai réalisé mon échange à Rome et c’était une ouverture formidable tant d’un point de vue académique que personnel. C’était un rêve. Je retiens également la forte présence d’étudiants étrangers qui enrichissaient les parcours.

 

En quoi consiste votre métier de directrice générale de Bethesda France ?

Si je devais définir ma fonction, ce serait celle d’une cheffe d’équipe. J’ai auprès de moi des talents et des experts dans le monde du jeu vidéo ou des médias. Mon rôle est de donner la direction et d’impulser un rythme de travail tout en veillant au respect du budget. Notre responsabilité aujourd’hui est de faire la mise sur le marché français des jeux, de défendre ces œuvres, de les faire connaître et de s’assurer d’une proximité avec les communautés de joueurs pour répondre à leurs attentes.

 

Quid de votre rôle de présidente du SELL, le principal syndicat de l’industrie du jeu vidéo en France ?

Je suis présidente du SELL depuis 2016. Ce syndicat a différentes missions. Nous devons promouvoir le jeu vidéo auprès des instances gouvernementales. Nous sommes en dialogues constant avec la CNC, le ministère de l’Économie et le ministère de la Culture. Nous représentons également le secteur dans les médias. Notre rôle est de démystifier le jeu vidéo, d’en expliquer la richesse et de montrer le visage des créateurs. Nous portons la responsabilité d’un univers très en vogue. Enfin, nous organisons chaque année la Paris Games Week.

 

Comment se porte l’industrie du jeu vidéo aujourd’hui ?

Nous avons renoué avec une croissance à deux chiffres, en signant une hausse de 11%. Notre chiffre d’affaires s’élève à 5,3 milliards d’euros en France. Le marché se porte bien. L’année a été particulière avec la sortie de deux nouvelles consoles. De plus, la consommation de jeux vidéo a été forte pendant les périodes de confinement.

 

Quelles sont les grandes tendances du secteur ? 

Le jeu vidéo est un secteur qui se renouvelle. Depuis 20 ans, j’ai vu beaucoup de vérités qui semblaient inéluctables se défaire. C’est aussi un univers qui connaît des innovations technologiques très fortes. Aujourd’hui, le jeu vidéo s’est démocratisé. 71% des Français jouent au moins occasionnellement, la moyenne d’âge des joueurs est de 40 ans et le secteur s’est fortement féminisé puisque les femmes représentent la moitié des joueurs. À l’heure actuelle, nous entrons dans une nouvelle phase d’évolution intéressante, celle du cloud gaming qui va rendre les jeux plus accessibles. L’expérience de jeu sera de plus en plus fluide et immersive, tout comme l’expérience d’achat. Désormais, l’accès à l’offre a été démultiplié, entre le free-to-play, l’abonnement, le format dématérialisé. Cela va rendre la prochaine période extrêmement intéressante.

 

Vous êtes aussi co-fondatrice de Women in Games, une association œuvrant pour la mixité dans l’industrie du jeu vidéo en France. Pouvez-vous nous en dire un peu plus ? 

Le constat que nous tirons, c’est que les femmes représentent la moitié de la population des joueurs. En revanche, elles ne sont que 14% dans les studios. Le jeu vidéo a besoin de diversité pour être encore plus créatif. De plus, il faut répondre aux attentes des joueuses. C’est important qu’elles soient plus présentes dans la création de jeu vidéo.

La mission que nous nous sommes fixée avec Audrey Le Prince, présidente de l’association, est de doubler le nombre de femmes dans l’industrie du jeu vidéo en 10 ans. Nous n’aurons pas réussi, mais les chiffres progressent. Aujourd’hui, nous comptons 2 000 membres et nous démultiplions les actions. Nous rendons les femmes plus visibles dans les médias ou les conférences, sur les sujets liés aux jeux vidéo. Nous leur proposons d’ailleurs une formation de prise de parole en public. Enfin, nous sensibilisons les jeunes femmes aux métiers du jeu vidéo et les parcours qui permettent d’intégrer cet univers.

Retrouvez le premier épisode de cette saga alumni juste ici sur le parcours de Mihail, manager RH au parlement européen et le second sur le parcours de Olivier Goy, CEO de la FinTech October, classée au Next40.