Dans Le bouc émissaire et Le sacré et la violence, René Girard théorise la notion de violence intestine. Celle-ci provient du désir mimétique, qui se définit par une violence apposée à l’autre par la jalousie. En effet, selon Girard, on ne désire jamais l’objet en lui-même, mais ce que l’autre désire. Revenons sur cet exemple utile pour l’épreuve de CG 2024.

La théorie du désir mimétique : le désir comme source de la violence intestine

Girard écrit, dans Le bouc émissaire, que « l’homme désire toujours selon le désir de l’Autre ».  Tout désir est donc un désir d’imitation ; or, en faisant de l’Autre un modèle, on en fait un rival, ce qui engendre une compétition et des tensions entre les Hommes. Pour Girard, dans La violence et le sacré, la violence s’installe donc et perdure par la mimésis intrinsèque à l’Homme.

En effet, d’une première action violente s’ensuit un désir de vengeance. Par principe d’imitation, la victime va en effet chercher à se venger en faisant de même : d’où l’entrée dans un cycle de violence. C’est dire que la violence humaine est donc autoreproductrice. Cela menace la société de dissolution : c’est la violence intestine.

La “violence intestine” en question : désir mimétique et vie en société

La violence mimétique comme source de crise collective

D’un point de vue collectif, ces accès de violence se traduisent notamment par des guerres civiles. Ces crises, issues du désir mimétique, affaiblissent les institutions politiques, qui sont alors substituées par des foules rivales. Dès lors, la soif de violence des hommes est décuplée par l’imaginaire collectif, et donnent lieu à des persécutions collectives.

La société fait alors appel à des simulacres de justice, qui servent à contenir la violence du désir mimétique des hommes en faisant reposer l’unité du groupe sur la détestation commune d’un individu : c’est la fonction sociale du bouc-émissaire.

Mettre fin à la violence intestine : le bouc-émissaire comme solution à la crise collective

Le bouc-émissaire est la victime de la violence intestine des hommes. C’est celui qui subit toutes les fautes des autres. Pour se constituer et se solidifier, le groupe fait en effet reposer son unité sur la détestation commune d’un seul membre. Celui-ci catalyse à lui seul les violences individuelles, et permet de renforcer la cohésion interne de la société : c’est une victime nécessaire, parce qu’un ciment pour le groupe.

Ainsi, le bouc émissaire est lapidé pour mettre fin à une crise collective. Ce sacrifice permet d’éliminer les rivalités, les jalousies et les querelles entre les hommes. La société ruse donc avec la violence de ses membres pour éviter qu’ils déchainent cette brutalité, les uns contre les autres : elle cherche à masquer la violence des actes barbares de ceux qui la composent.

Cela passe par la recherche d’une cause à ce désordre, c’est-à-dire d’un bouc-émissaire. Il permet de faire figurer la violence comme étant extérieure au groupe, et donc de préserver celui-ci de la « violence intestine » , comme l’écrit Girard dans Le bouc émissaire :

Grâce aux mécanismes persécuteurs, l’angoisse et les frustrations collectives trouvent un assouvissement vicaire sur des victimes qui font aisément l’union contre elles, en vertu de leur appartenance à des minorités mal-intégrées.

Le sacrifice du bouc émissaire permet donc de faire durer la paix dans la société. En effet, paradoxalement, la violence déchaînée à l’encontre d’un membre permet de pacifier la violence intestine du groupe :

 On ne peut tromper la violence que dans la mesure où on ne la prive pas de tout exhutoire, où on lui fournit quelque chose à se mettre sous la dent (…). La dimension pacificatrice et purificatrice de la violence prend le pas sur sa dimension destructrice.

Girard parle ainsi d’une « réciprocité de la violence » : le système judicaire cherche un coupable et abat la vengeance sur lui, en continuant donc à faire violence au violent.

Conclusion

La violence mimétique découle du désir mimétique propre à l’homme, et compromet ainsi la pérennité et la stabilité de la société. Elle produit alors un bouc émissaire, sacrifié pour pouvoir protéger la paix sociale. Le bouc émissaire est donc une victime nécessaire pour contenir la violence intestine de la société.

Retrouve ici les sujets pour lesquels tu pourras utiliser l’exemple de Girard sur “La violence” , ainsi que tous nos autres articles et fiches sur la notion.