finance

Selon le ministère de l’Économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, la finance verte se définit comme « l’ensemble des opérations financières qui concourent à favoriser la transition énergétique et la lutte contre le réchauffement climatique ».

 

Introduction et définition de la finance verte

L’ensemble de la sphère financière a un rôle prépondérant à jouer dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique. En ce sens, l’article 21c des Accords de Paris souligne qu’aligner le secteur financier sur les objectifs climatiques nécessite l’action non seulement des institutions financières, mais aussi des institutions internationales et des pourvoyeurs de données.

Le développement de la finance verte est une réponse du secteur financier et des marchés à la crise climatique. D’une part, pour financer la transition écologique et répondre à des considérations éthiques, et d’autre part, pour anticiper une « bulle climatique » avec des stranded assets, des actifs échoués, des activités polluantes.

 

Réduire (ou non) l’exposition aux risques des banques et intérêt de la finance verte pour celles-ci

La notion de « risques » est omniprésente dans la question de la finance verte. La différence de l’exposition aux risques des actifs « verts » par rapport aux actifs « classiques », ou même les sin stocks (actions ou titres non éthiques) est ambiguë. Elle permet de comprendre en quoi la prise en compte du facteur « environnement » dans la décision d’investissement des banques est loin d’être désintéressée. 

En effet, les actifs verts peuvent avoir une exposition davantage modérée aux risques dits « physiques ». C’est-à-dire, une exposition moindre aux instabilités et catastrophes climatiques. Un risque de transition pèse aussi sur la balance. L’évolution des normes et l’obsolescence de certaines firmes face au changement climatique (fin moteur thermique, indépendance vis-à-vis de certaines terres et ressources rares…) risquent d’entraîner de fortes dépréciations des titres des entreprises concernées.

Le Comité européen du risque systémique a ainsi estimé en 2016 que ces risques pourraient amener des ventes forcées de titres, mais aussi des problèmes de liquidités sur les marchés. Cependant, investir uniquement dans des entreprises « vertes » réduit la diversification de son portefeuille et augmente donc le risque (Markowitz et la théorie des choix du portefeuille, 1952).

Ainsi, la décision des banques d’investir dans des actifs verts découle souvent davantage d’une volonté de réduire leur exposition aux risques ou même de greenwashing en soignant leur image. De plus, la plupart des investissements se font dans un horizon de 5 à 10 ans maximum (4 % des prêts bancaires aux sociétés non financières de la zone euro sont accordés à une échéance supérieure à 10 ans, selon Kalinowski). À un horizon de trois, cinq ou même dix ans, ces investissements ne sont soumis qu’à la marge au dérèglement climatique. Mark Carney, gouverneur de la banque d’Angleterre, parle de « tragédie de l’horizon ».

 

Donner du sens à son investissement

Néanmoins, une fois la décision prise de réorienter ses actifs vers un investissement plus durable, il existe deux manières d’approcher la finance verte et donner du sens aux investissements. D’une part, on retrouve l’engagement. Méthode qui consiste à investir dans une firme et d’y exercer une certaine activité de lobbying en faveur de la considération environnementale. Elle suppose un engagement fort de la part de l’investisseur. Une seconde voie, l’exclusion, serait simplement d’investir dans des firmes ou des fonds en adéquation avec les valeurs et considérations environnementales. 

En suivant cette dynamique, on en vient maintenant à s’interroger sur le rendement des actifs plus verts. Une étude de Koundouri, Pittis et Plataniotis en 2021 va chercher à comparer l’efficacité et le rendement selon l’adoption ou non du critère ESG pour les firmes. Les résultats sont probants. Non seulement les entreprises ayant une bonne performance ESG semblent être moins risquées, mais elles semblent également profiter d’une meilleure marge bénéficiaire et d’une meilleure rentabilité des capitaux propres. Dans le même sens, de nombreuses études (Berg et al., 2019, Busch et al., 2011) tendent à observer une corrélation positive entre la performance environnementale d’une firme et sa performance financière. 

 

Focus sur le cas des obligations vertes

Outre les actions, les obligations vertes jouent aussi un rôle primordial dans la transition vers une finance plus verte. Une obligation verte finance uniquement des projets en faveur de projets durables. En 2008, la Banque mondiale lance la première « obligation verte ». En 2021, Climate Bond Initiative estimait que le marché des obligations vertes atteignait près de 1 600 milliards de dollars.

La Commission européenne prévoit d’émettre au moins 250 milliards d’euros d’ici 2027. Dans le cadre africain, l’African Development Bank a lancé ses propres obligations vertes en 2013. En 2017, le marché africain totalisait un montant de trois milliards de dollars d’obligations vertes, qui ont permis de financer 24 projets dans 14 pays différents et la réduction d’émissions de CO2 à hauteur de 43 millions de tonnes. Plus récemment, un partenariat a été mis en place entre la Chine et l’Europe sur le développement de ce type d’obligations et la mise en place d’une terminologie et d’un langage communs à propos de la finance verte.

Des obligations souveraines peuvent aussi être émises sous la forme d’obligations vertes. Ainsi, en 2017, l’État français lance pour la première fois des OAT (Obligations assimilables du Trésor) vertes pour un montant avoisinant les sept milliards d’euros.

 

Un modèle obsolète nécessitant de nouveaux outils

Le virage vers une finance durable s’opère aussi par une transparence et une meilleure prise en compte de l’impact environnemental des firmes dans le bilan financier et le reporting. À l’heure actuelle, l’évaluation de la performance d’une entreprise ne prend pas en compte les conséquences et les dégradations environnementales de celle-ci.

Néanmoins, de nouvelles méthodes comptables et de reporting sont à l’étude. Dans le cadre du Pacte Vert de l’Europe, la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) vise à harmoniser, améliorer la transparence et la qualité des données ESG et rendre obligatoire une section dédiée au reporting de durabilité dans le rapport de gestion, par exemple. La directive CSRD a été adoptée par le Conseil de l’Union européenne le 28 novembre 2022. 

Encore plus ambitieux, le projet de comptabilité CARE (Comprehensive Accounting in Respect of Ecology, anciennement Comptabilité adaptée au renouvellement de l’environnement). C’est une extension du modèle comptable classique avec une considération du capital humain et naturel.

Cela passe notamment par la réalisation de bilans matières et sociaux et la prise en compte du coût de renouvellement (notion de coût de préservation) des capitaux impactés par l’activité de la firme, par exemple. Ce modèle est encore en expérimentation, que ce soit par des chercheurs (Agro-ParisTech, Dauphine…), des cabinets comptables ou des entreprises privées.