« Par mondialisation, j’entends une série du mutations dans l’économie internationale qui tendent à créer un seul marché mondial pour les biens, les capitaux et les services » affirmait Suzanne Berger dans Notre première mondialisation, leçons d’un échec oublié (page 6, 2003). La mondialisation serait ainsi un phénomène plus complexe qu’un simple accroissement des échanges internationaux, car si la dimension économique est présente, elle n’est pas exclusive !

Le thème de la mondialisation est omniprésent en seconde année, que ce soit pour les ECS ou les ECE. Ainsi, il est bon de connaître le b.a-ba de ce thème pour ensuite l’élargir au reste du programme.

La mondialisation est typiquement le thème qui demande le jour J une grande analyse de l’intitulé du sujet et une bonne connaissance des définitions de ce thème. Commençons donc par étudier ce qu’est la mondialisation !

I – Définition et introduction du concept de « mondialisation »

Dans l’histoire, nous comptons deux mondialisations (si on excepte celle que certains considèrent comme la première, à savoir l’ère du commerce triangulaire). La première de notre point de vue daterait de la période 1870-1914, et la seconde aurait une quarantaine d’années selon les économistes. Mais une caractéristique commune de ces deux mondialisations repose dans les différentes facettes que celle-ci peut prendre. La mondialisation repose sur quatre traits caractéristiques, à savoir :

  • Une accélération de l’ouverture extérieure des nations. Rappelons que le taux d’ouverture indique la dépendance du pays vis-à-vis de l’extérieur. La formule du calcul est la suivante : ((Exportations + Importations) /2) x 100. Cette accélération de l’ouverture extérieure commerciale représente la mondialisation commerciale.
  • La mise en oeuvre croissante de stratégies globales de la part des firmes, notamment via la division internationale des processus productifs (DIPP) des firmes et la croissance des flux d’investissements directs à l’étranger (IDE). C’est ce qu’on appelle la mondialisation productive.
  • La mise en connexion des marchés financiers nationaux ainsi que la déréglementation financière. C’est ce qu’on appelle la mondialisation financière.
  • Et pour finir, une baisse de la régulation étatique sur son économie et la difficulté de la mise en place d’une régulation supranationale.

Si un sujet sur la mondialisation tombe le jour d’un DS, et plus important, le jour d’un concours, vous devez définir la mondialisation via ces différents aspects. Car ces différents aspects nuancent grandement les impacts que la mondialisation peut avoir sur l’emploi, sur l’économie, sur l’effet des politiques budgétaires, et ainsi de suite. C’est le b.a-ba ! Cependant, selon le sujet, il sera plus pertinent de parler de certaines formes que prend la mondialisation plutôt que d’autres ; à vous donc de sélectionner les bons arguments dans l’analyse qui précède la rédaction.

Enfin, la mondialisation peut être culturelle, politique, sociologique…

Maintenant que nous avons analysé les différentes facettes de la mondialisation, étudions-les dans une perspective historique !

II – « La première mondialisation » des années 1870-1914

Plusieurs historiens ou économistes, à l’image de Suzanne Berger, parlent d’une « première mondialisation« . Elle incarnerait la période d’expansion du commerce et d’intensification des échanges de capitaux qui se manifeste au milieu du XIXe siècle.

La première révolution industrielle a en effet fourni à plusieurs pays, comme le Royaume-Uni, la France ou encore les Etats-Unis le quasi-monopole des productions, notamment dans les manufactures. Cela se caractérise par une montée du commerce international. On peut également expliquer cette montée du commerce international par le fait que les pays riches vont échanger des biens manufacturés aux pays pauvres contre des matières premières (par exemple, l’importance des échanges commerciaux entre la Grande-Bretagne et ses anciennes colonies). Ainsi, on peut dire que cette première mondialisation commerciale va surtout toucher les pays riches et les pays producteurs de matières premières.

Cette première mondialisation va s’auto-entretenir grâce aux innovations dans les transports, ce qui fait baisser leurs coûts, notamment dans le transport maritime. D’après Paul Bairoch dans Mythes et paradoxes (1995), le coût moyen du transport (assurance et frais annexes compris) passe de 20% en 1830 à 8% en 1910.

Ces innovations viennent s’ajouter à la signature de traités de libre-échange bilatéraux comme par exemple en 1860 avec le traité Chevallier-Cobden entre la France et l’Angleterre, en 1862 entre la France et la Prusse, en 1863 avec l’Italie, en 1864 avec la Suisse, en 1865 avec la Suède et la Norvège, ainsi de suite.

Cependant, les USA, eux, restent protectionnistes, ce qui fonctionne très bien pour eux.

Enfin, financièrement, les dernières décennies du XIXe siècle sont aussi marquées par une augmentation et une intensification de l’intégration financière entre les nations. Le Royaume-Uni, en particulier, finance des projets sur la plupart des continents et en particulier dans ses colonies. Dans les années 1880, les capitaux vont alors passer les frontières assez librement. A cette époque, la finance mondiale, dont la capitale est Londres, se concentre essentiellement sur des projets de développement, comme par exemple la construction de grandes infrastructures. Ainsi, la mondialisation commerciale et financière va entretenir un cercle vertueux, ce qui va permettre au commerce international de croître rapidement.

Mais la fin du XIXe siècle avec la grande stagnation va entraîner une contraction de l’activité économique à l’échelle mondiale et un repli protectionniste. Le commerce international est alors de -1,5% par an. Enfin, la crise de 1929 va entraîner un effondrement des échanges internationaux, notamment à cause de la déflation qui a des conséquences économiques désastreuses sur les pays développés.

Se met alors en place un grand nombre de mesures protectionnistes. En 1922, les USA augmentent leurs droits de douane avec les tarifs Fordney McCumber et en 1930 avec les tarifs Hawley-Smooth. L’Europe va également décliner économiquement, cela marquera la fin de la première mondialisation et le début de la guerre des monnaies pour regagner en compétitivité-prix.

Il faudra attendre la fin de la Seconde guerre mondiale et notamment les années 1970 pour voir le commerce international et les échanges de capitaux augmenter de nouveau.

III – La seconde mondialisation (1978-2008)

Nous pouvons noter qu’à partir de la décennie 1980, les échanges de marchandises progressent de nouveau. De plus, les investissement directs à l’étranger (IDE) croissent exponentiellement (mondialisation productive) et la mondialisation financière explose.

Si le marasme des années 1930 a tué le commerce international, la crise des années 1980 va, au contraire, provoquer l’entrée dans la mondialisation. Cette évolution s’explique par plusieurs facteurs :

  • La troisième révolution industrielle : Jeremy Rifkin en 2011 dans The Third Industrial Revolution: How Lateral Power Is Transforming Energy, the Economy, and the World, affirme que l’essor des NTIC va permettre de réduire considérablement les frais de transports, et surtout le coût de transport des données informatiques.
  • L’invention du container qui permet de baisser le coût du transport. Notons qu’aujourd’hui, 90% du transport de marchandises par voie maritime se fait par container.
  • La déréglementation économique et surtout financière. Le financement sera désormais plus simple et l’allocation des ressources devait être amélioré. Dans les faits, on remarque que cette déréglementation a du bon, mais également beaucoup de mauvais, car elle a permis au système financier de contourner les règles. (cf. l’article sur les Panama Papers et les paradis fiscaux).
  • La remise en cause du système de Bretton-Woods qui va permettre la fin de la fixité des taux de change. Cette fin de la fixité du taux de change et du système de Bretton-Woods va permettre aux Etats de lever la contrainte de l’équilibrage des comptes extérieurs. Les idées de Friedman l’emportent.

Ainsi, la seconde mondialisation va entraîner une montée en puissance des firmes transnationales qui vont de plus en plus s’affirmer dans le paysage économique mondial. Pour Reich, la firme en réseau a succédé à la firme organisée de manière pyramidale et bureaucratique. Cette transformation s’explique par le besoin de répondre à une demande qui provient de marchés plus nombreux. La stratégie des entreprises a alors consisté à rechercher une souplesse d’organisation et des structures décentralisées permettant de répondre plus rapidement à une demande et surtout à moindre coût. B. Lassudrie-Duchêne introduira le terme de « DIPP » pour prolonger l’analyse des firmes transnationales, et soulignera que cette seconde mondialisation a entraîné une fracture sociale entre les pays riches et les pays pauvres qui fournissent la main-d’oeuvre bon marché.

Enfin, la seconde mondialisation va permettre une explosion des IDE. Nous pouvons souligner qu’entre 1980 et 2001, le flux d’IDE augmente de 20%. Cela s’explique en grande partie par le fait que la politique des grandes FMN a évolué : elle est passée d’une stratégie multinationale à une stratégie beaucoup plus globale.

Vient s’ajouter à cela une déréglementation financière qui encourage ce flux financier. La mondialisation financière va donc s’accélérer grâce au décloisonnement des systèmes financiers et la déréglementation supra-nationale. Les possibilités de financement sur les marchés entre les pays à capacité de financement et à besoin de financement vont donc augmenter de manière significative.

Conclusion et bilan de la mondialisation

Aujourd’hui, nous pouvons réellement parler d’une mondialisation car les pays du Sud s’ancrent de plus en plus dans le commerce international. Les flux Nord-Sud existent toujours mais les flux Sud-Sud se développent et c’est sans doute l’une des caractéristiques principales de cette seconde mondialisation. Mais la théorie économique de ces dernières années souligne également l’imperfection de cette seconde mondialisation.

C’est ce que nous montre Joseph Stiglitz dans La grande fracture, la mondialisation engendre des gagnants et des perdants. Les gagnants sont les travailleurs qualifiés des pays développés et les perdants sont les travailleurs peu qualifiés des pays développés qui, eux, sont victimes de l’ajustement par les quantités (augmentation du chômage) et par les prix (baisse des salaires pour devenir plus compétitif par rapport aux pays du « Sud »).

Ainsi, durant une dissertation d’ESH, il ne faut pas oublier les bons et les mauvais cotés de la mondialisation, que ce soit sur l’emploi, la croissance, les flux d’IDE, etc. Il ne faut également jamais oublier de bien définir ce qu’est une mondialisation ! Non, la mondialisation ne s’arrête pas aux échanges de marchandises ! Elle englobe également une sphère financière et l’ensemble des stratégies des entreprises qui changent !

Pour finir sur une touche d’actualité, la crise de 2008 a entraîné une chute du commerce international et une baisse des échanges d’IDE, si bien que certains économistes se sont mis à prôner une « démondialisation » ! (Jacques Sapir, La démondialisation, 2011). Mais cela reste un petit peu radical (et irréaliste). Emmanuel Combe (votre concepteur d’ESH à l’ESCP) dans ses nombreux articles sur L’Opinion, lui, se montre en faveur d’une mondialisation intelligente, qui permettrait une croissance nationale en se basant sur le Made In France, et une croissance internationale en incorporant de plus en plus les Etats du Sud tout en réduisant autant que possible les inégalités.

Révise efficacement ton ESH avec nos autres articles 🙂