crises

L’histoire économique est parsemée de crises financières qui ont eu des répercussions significatives sur les marchés mondiaux et les économies nationales. La régulation de ces crises est donc un enjeu majeur pour les gouvernements, les institutions financières et les économistes du monde entier. Comprendre les causes, les mécanismes et les conséquences des crises financières est essentiel pour élaborer des politiques économiques robustes et des mécanismes de régulation efficaces. Il est par ailleurs crucial de maîtriser cet article, qui est utile pour tous les sujets portant sur les crises financières, sur la régulation et sur les politiques économiques.

 

Introduction

Les débats sur la régulation financière continuent de mettre en opposition deux approches principales.

 

Régulation endogène

Cette approche implique que les banques elles-mêmes élaborent des règles internes pour évaluer les risques.

Les néoclassiques soutiennent cette forme de régulation, croyant en la capacité des acteurs financiers à réguler leur propre conduite. Selon cette perspective, les banques, en utilisant leurs propres modèles internes, peuvent gérer efficacement les risques.

 

Régulation exogène

À l’opposé, cette approche préconise la surveillance externe par une autorité indépendante qui assure la stabilité financière en tant que bien public.

Les économistes keynésiens préfèrent cette forme de régulation. Ils mettent en avant le risque systémique, qu’ils considèrent comme impossible à gérer efficacement par les banques elles-mêmes. De plus, ils estiment que les banques n’ont pas d’incitation intrinsèque à restreindre excessivement leurs activités. Ils sont donc en faveur d’une régulation externe pour maintenir la stabilité financière.

 

La nécessité d’une régulation pour prévenir les crises et en réduire l’impact

Le principal rôle des États, établi à partir de 1929, consiste à atténuer les conséquences des crises financières. Parallèlement, ils interviennent également afin de tirer des enseignements des crises passées.

Cette tâche s’avère complexe, du fait que les crises évoluent dans leur nature et que les acteurs impliqués sont souvent convaincus que « cette fois, c’est différent ».

 

La nécessité d’une régulation pour prévenir les crises financières est indiscutable

Les conséquences des crises financières sont gravement dommageables et justifient l’importance d’une régulation adéquate

L’effondrement de l’activité économique, marqué par une réduction de moitié de la production entre 1929 et 1932, a entraîné une montée rapide du chômage, symbolisée par les files de demandeurs d’emploi devant les bureaux de placement. Cette crise a rapidement contaminé l’économie mondiale, touchant particulièrement l’Europe, et notamment l’Allemagne.

Dans les années 1980-90, les crises financières en Amérique latine ont également eu des conséquences désastreuses pour les populations. L’hyperinflation, les programmes d’ajustement structurel réduisant les dépenses sociales et l’augmentation du chômage ont conduit à une décennie perdue pour de nombreux pays de la région.

La crise des subprimes a durablement impacté la croissance dans les pays développés, entraînant une forte hausse du chômage. Par la suite, la crise des dettes souveraines a contraint certains États à adopter des politiques d’austérité. Suscitant le mécontentement de la population et sapant davantage la dynamique de croissance économique.

 

Les États doivent intervenir

Face aux crises financières, l’approche des gouvernements a souvent été de laisser faire. Une perspective qui dominait jusqu’à l’année 1929. Cette approche reposait sur l’idée que ceux qui avaient spéculé devaient assumer les conséquences de leurs actes, afin de lutter contre l’aléa moral. L’aléa moral, dans ce contexte, signifie que si les spéculateurs savaient qu’ils seraient secourus en cas de crise, ils seraient incités à prendre des risques excessifs.

Pour éviter le retour des crises financières, les États ont mis en place divers instruments de régulation. Dès la fin du XIXe siècle, des mesures de spécialisation bancaire stricte ont été instaurées au Royaume-Uni et en France. La crise de 1907, particulièrement sévère aux États-Unis, a conduit à la création de la Réserve fédérale en 1913. La crise de 1929 a mis en lumière la fragilité du système bancaire américain, conduisant à l’adoption du Glass-Steagall Act en 1933, qui a instauré une séparation stricte entre les banques de dépôt et les banques d’investissement, ainsi qu’un système fédéral d’assurance des dépôts (FDIC).

Cependant, l’ampleur des crises peut amener les États à intervenir plus directement pour sauver le système économique. Comme cela a été observé lors de la crise de 2008. Les plans de sauvetage massifs mis en place à cette époque ont réussi à éviter un scénario similaire à celui de 1929. Mais ils ont également entraîné une augmentation significative de la dette publique. Ces mesures ont également renforcé l’idée que les acteurs des marchés financiers pouvaient privatiser les profits tout en socialisant les pertes.

 

La crise de 2008

Les graves conséquences de la crise de 2008 ont suscité un questionnement sur le mécanisme de la mondialisation financière mis en place depuis les années 1980. La comparaison avec les années 1930 a conduit à des appels en faveur d’une régulation et d’un contrôle accrus des marchés financiers.

Il est intéressant de noter que l’ouverture des marchés dans les années 1980, motivée en partie par une régulation jugée excessive et coûteuse, a finalement conduit à un retour des crises financières. Ce qui a mis en évidence le dilemme complexe entre la nécessité de la régulation et les pressions pour une allocation efficace des ressources et des coûts de financement plus faibles.

 

Mais cette régulation est difficile à mettre en œuvre

Les crises peuvent revêtir des formes différentes et nécessitent donc des outils différents

Au cours des dernières décennies, les crises financières se sont manifestées de manière fréquente, adoptant des formes variées, avec des bulles spéculatives prenant des aspects changeants.

  • Dans les années 1980, des crises de dettes souveraines ont éclaté à la suite d’une spéculation intense sur l’endettement des pays émergents tels que le Brésil, le Mexique, l’Argentine et la Pologne.
  • Au début des années 1990, une spéculation sur les taux de change a été observée, en particulier en Europe (1992-1993).
  • La fin des années 1990 a été marquée par la crise asiatique, résultant d’une ouverture importante de ces pays aux flux internationaux de capitaux, alors que leur économie n’était pas prête à les absorber.
  • Au début des années 2000, la bulle internet s’est développée, prenant la forme d’une bulle boursière.
  • Plus tard, dans les années 2000, la crise des subprimes a éclaté, reposant sur une bulle immobilière aux États-Unis.

 

La géographie des crises financières est tout aussi diversifiée. Les chocs peuvent survenir n’importe où dans le monde et se propager rapidement à l’échelle de la finance mondiale.

 

L’intervention peut être contre-productive

L’intervention de l’État peut avoir des effets pervers en accroissant l’aléa moral. C’est l’une des raisons qui a probablement conduit les autorités américaines à ne pas sauver Lehman Brothers lors de la crise de 2008. Si les institutions financières estiment qu’elles sont « too big to fail » et qu’elles seront secourues par les États en cas de crise, elles sont incitées à prendre des risques excessifs.

Bien que la garantie apportée par les États aux dépôts à vue soit nécessaire pour prévenir les paniques bancaires, elle peut également encourager les banques à s’engager dans des activités plus risquées. En particulier dans le modèle de la banque universelle où plusieurs services financiers sont offerts sous un même toit. Trouver l’équilibre entre la régulation nécessaire et le bon fonctionnement des marchés demeure donc un défi majeur pour les autorités financières.

 

Un exemple

La Grèce a adopté une politique d’austérité budgétaire à partir de la fin de l’année 2010, sous l’impulsion des bailleurs publics, principalement le Mécanisme européen de stabilité (MES). Cette politique consistait en des coupes drastiques dans les budgets publics, afin de générer un solde primaire positif. C’est-à-dire un excédent budgétaire hors paiements des intérêts de la dette.

En échange de l’aide financière des bailleurs publics, la Grèce s’est engagée à maintenir un excédent primaire de 3,5 % du PIB jusqu’en 2022. Pour atteindre cet objectif, le gouvernement grec a considérablement augmenté les impôts. Notamment en relevant le taux de la TVA de 8 % à 24 % et en améliorant la collecte des impôts. Parallèlement, les dépenses publiques ont été réduites, entraînant une diminution des pensions de retraite et des dépenses de santé.

Cependant, ces mesures d’austérité ont eu des conséquences économiques sévères. Le produit intérieur brut (PIB) de la Grèce s’est contracté de manière significative, chutant de 24 % à partir de 2010. Cette contraction économique a entraîné des défis sociaux et économiques majeurs pour le pays. Ce qui a mis en lumière les dilemmes complexes auxquels sont confrontés les pays endettés lorsqu’ils adoptent des politiques d’austérité strictes pour restaurer la stabilité budgétaire.

 

Quelles formes pour la régulation ?

Une régulation micro et macroprudentielle

La prévention des crises financières nécessite également une régulation macroprudentielle. Cette approche vise à établir des indicateurs et des politiques permettant de gérer le risque systémique.

Selon le rapport du Conseil d’analyse économique intitulé « Banques centrales et stabilité financière », la régulation macroprudentielle doit chercher à réduire les imperfections des marchés, diminuer la procyclicité des acteurs financiers, en favorisant une modération du crédit en phase ascendante et son maintien en phase descendante, et amener les acteurs à internaliser les effets externes résultant de leurs comportements individuels. Cela implique la mise en place d’indicateurs macroéconomiques et financiers permettant de repérer les bulles et de mettre en œuvre des politiques pour les contrer.

 

La question de savoir qui devrait mener cette régulation reste débattue

Certains, comme M. Aglietta dans son ouvrage La Crise : les voies de sortie (2010), plaident en faveur d’une politique monétaire élargie. Ils considèrent que les banques centrales doivent assumer la stabilité financière comme un objectif permanent, aussi important que la stabilité des prix.

D’autres préconisent la mise en place d’institutions distinctes pour assurer ces deux missions. Ils estiment qu’il est nécessaire de dissocier la conduite de la politique monétaire de la régulation prudentielle. Ce débat souligne l’importance cruciale d’une réflexion approfondie sur les mécanismes de régulation pour maintenir la stabilité financière dans un contexte mondialisé et complexe.

 

Quels changements au cours des dernières années ?

Vers une plus grande spécialisation bancaire ?

La question de la spécialisation s’est posée immédiatement avec le décloisonnement bancaire des années 1980, permettant aux banques d’explorer diverses activités et soulevant ainsi des interrogations sur la garantie des dépôts. L’assurance des dépôts est essentielle pour prévenir les crises bancaires, mais elle revient à offrir aux banques une assistance en cas de faillite, même si son origine est spéculative.

Depuis 2010, un retour à une spécialisation bancaire plus claire est en cours, avec des approches variées selon les pays. Aux États-Unis, la règle Volcker, mise en place par la loi Dodd-Frank en 2010, réintroduit partiellement la séparation bancaire du Glass-Steagall Act de 1933, abrogé en 1999. Volcker cherchait à limiter la taille des banques et à interdire aux banques de dépôt d’investir l’argent de leurs clients dans des opérations spéculatives, bien que la version adoptée soit plus souple.

Au Royaume-Uni, la commission Vickers propose en 2011 une stricte séparation entre les activités de banque de détail et de banque d’investissement, visant à isoler et sanctuariser la banque de détail. Son entrée en vigueur est repoussée à 2019 pour se conformer à Bâle III.

En France, la loi bancaire votée en avril 2013 adopte une approche similaire à celle des États-Unis. Elle place les activités bancaires les plus risquées dans une filiale spécialisée pour protéger les dépôts. Elle vise également à encadrer la définition de la « tenue de marché » pour empêcher les banques de qualifier des opérations spéculatives et impose plus de transparence dans leurs activités.

 

La BCE et la supervision bancaire

La crise financière a révélé la fragilité du système financier européen, caractérisé par des réglementations divergentes et une interdépendance importante entre les systèmes bancaires. Dans ce contexte, la BCE a été chargée d’assurer la stabilité financière en supervisant les banques à partir du 1er mars 2014, dans le cadre d’un Mécanisme de surveillance unique (MSU) ouvert à tous les pays de l’Union européenne, à l’exception du Royaume-Uni, de la Suède et de la République tchèque.

La France avait initialement souhaité que presque toutes les banques européennes soient concernées par le MSU. Finalement, seules 200 d’entre elles le sont. Les critères d’inclusion sont les suivants : les banques dépassant 30 milliards d’euros d’actifs, celles représentant plus de 20 % du PIB de leur pays d’origine et celles bénéficiant d’un programme d’aide européen.

Cette initiative marque le premier pas vers la mise en place de l’Union bancaire européenne. D’autres aspects, tels que les exigences en matière de fonds propres, l’harmonisation des systèmes de garantie des dépôts et la création d’un cadre européen unifié pour le redressement des banques, seront probablement discutés dans le futur.

 

Une gouvernance financière élargie

Au niveau international, des mesures ont été prises pour établir une gouvernance mondiale et développer des mécanismes d’intervention visant à aider rapidement les pays en difficulté. Le sommet du G20 à Londres en 2009 a été un tournant, entraînant la création du Conseil de stabilité financière, visant à renforcer la coopération dans la surveillance et la supervision financière.

Dans le cadre de la lutte contre les paradis fiscaux, des décisions ont été prises. Notamment l’établissement d’une liste noire des pays concernés et la création d’un Forum mondial sur la transparence fiscale. Ce forum facilite les échanges d’informations entre les pays et renforce la transparence fiscale internationale. Des mesures sont également en cours de mise en œuvre concernant les mouvements de capitaux.

Au sein de l’Union européenne, une proposition a été faite pour mettre en place une taxe sur les transactions financières d’ici 2014. Cependant, cette taxe ne s’appliquera que dans certains pays, en vertu de la procédure de coopération renforcée. En effet, les discussions sur une application générale ont échoué en 2012. Il est important de noter que la France a déjà instauré une telle taxe en 2012.