Afrique

Récemment touchée par de nombreux coups d’État, l’Afrique est en constante mutation politique et militaire. Cette instabilité politique se reflète aussi sur l’économie et amène les populations à trouver des alternatives de développement sans avoir recours à l’État.

 

L’Afrique, un continent propice au développement de l’informel

Avant de parler des conséquences de l’informel sur le continent africain, il faut déjà définir ce qu’est cette notion. Globalement, la notion d’informel renvoie à tout ce qui échappe à l’État et son contrôle, de surcroît sa juridiction. On parle d’informel surtout pour l’économie et les habitats. Pour les logements informels, on retrouve principalement les bidonvilles ou les quartiers qui se sont développés anarchiquement comme les favelas. En ce qui concerne l’économie, plusieurs secteurs sont impliqués. Cela englobe les emplois (payés en liquide…), les flux illicites (drogues, humains…), mais aussi licites et non contrôlés par l’État (biens et services, comme la vente au détail).

Pour comprendre l’apparition de l’informel en Afrique, je te propose un petit retour historique sur le développement du continent. L’Afrique a été un continent colonisé et développé par ses colonies selon leur bon vouloir. Ainsi, le développement des infrastructures sur le continent reste succinct et inégal, surtout que celui-ci n’a pas été pérennisé après le départ des colonies. En effet, ce départ ne signifie pas la fin des accaparements des ressources ni le début d’un développement économique autonome. Dès lors, le mal-développement conditionne l’apparition de l’informel en Afrique, puisque les populations vivent souvent sous le seuil de pauvreté et trouvent du travail en parallèle de l’économie du pays.

Aujourd’hui, le secteur de l’informel représente encore une large partie du PIB de la majorité des pays, entre 25 % et 65 % du PIB de certains pays. L’État ne représente pas un organe suffisamment puissant pour intervenir dans la régulation de l’informel, surtout en matière fiscale. Dans les pays où la corruption est présente dans le jeu politique, l’informel est le seul moyen pour les populations de trouver un emploi et subvenir à leurs besoins.

 

Les causes de l’essor des trafics informels en Afrique

Les flux informels en Afrique sont dus à plusieurs facteurs : influence d’autres puissances, territoire et développement.

Premièrement, le territoire est une des causes du développement des activités et des trafics informels en Afrique. La singularité du territoire africain renforce cette présence de l’informel, car celui-ci est vaste (30,3 millions de km2), riche en diversité (déserts, littoraux, climat tropical) et la population y est inégalement répartie. Cette inégale répartition et cette superficie suggèrent que de nombreux espaces sont peu, voire pas occupés par l’homme, ni contrôlés par l’État. Ainsi, l’illégalité est plus propice au développement dans les zones « libres ».

 

Il apparaît clairement que le développement des pays a son rôle à jouer dans le niveau d’implantation du secteur informel

On définit le développement comme la combinaison des changements mentaux et sociaux d’une population qui la rendent apte à faire croître, cumulativement et durablement, son produit global réel. Réussir à transformer structurellement leurs économies tout en créant des activités qui génèrent de la croissance permettrait aux pays de parvenir à un développement qui diminuerait l’économie souterraine. Dès lors, le mal-développement d’une grande majorité des pays africains conduit à l’informel comme normalité.

Les puissances exogènes ont toujours eu un pied sur le continent depuis la colonisation, et cela continue aujourd’hui malgré l’indépendance. Une des puissances les plus agressives dans son implantation reste la Chine. Je te propose de faire un zoom sur sa stratégie et ses conséquences. La Chine parvient à se faire une place dans la mise en place de projets en Afrique grâce à son financement. Et comme à son habitude, celle-ci utilise le piège de la dette pour se faire une place dans l’économie locale. Elle vient donc détrôner des entreprises locales au profit de son rayonnement international et, de surcroît, incite au développement de l’informel. Par exemple, elle emploie sa propre main-d’œuvre. Tu peux aussi retrouver plus d’informations sur la Chine en Afrique dans cet article.

 

Quelques exemples de l’informel en Afrique

Je te propose de nous intéresser à deux exemples qui illustrent les conséquences de l’informel en Afrique. Tu peux aussi retrouver cinq faits sur l’Afrique ici.

 

La République démocratique du Congo et sa capitale

La République démocratique du Congo (RDC) est propice au développement de l’informel au vu de son équilibre politique défaillant. C’est un vaste territoire difficile à contrôler de par sa superficie, mais aussi de par sa diversité (jungle…). De plus, au-delà du passé douloureux du pays, les rivalités de clans se font toujours ressentir et marquent la politique interne. La RDC a longtemps connu des guerres civiles (fin en 2013) et reste un territoire instable. Une instabilité entretenue aussi par ses voisins rwandais et ougandais. Ainsi, les trafics de toutes formes circulent sans difficulté dans tout le pays.

Nous pouvons aussi réduire l’échelle et nous concentrer sur sa capitale, Kinshasa. C’est un espace urbanisé de 9 900 km2 abritant environ 15 millions d’habitants. On retrouve donc les caractéristiques qui aident au développement du secteur de l’informel. Face à une urbanisation rapide et précipitée, celle-ci est devenue anarchique, avec des routes mal entretenues et souvent en terre et une mobilité réduite (57 % circulent à pied). À cela s’ajoutent un réseau d’eau potable très limité et des taux de branchement d’électricité faibles. L’économie informelle assure environ un million d’emplois et 90 % du revenu des ménages. L’informel n’est plus un choix, mais une obligation face à la défaillance de l’État.

 

Le Sahara, un désert informellement actif

C’est a priori un désert, mais contre toute attente, celui-ci est un espace dynamique. Le Sahara, c’est 8,5 millions de km2, de l’Atlantique à la mer Rouge. Un vaste espace qui est la maison de la « mondialisation grise » et donc du secteur de l’informel. Historiquement, le désert était déjà l’espace de flux de l’or, d’esclaves, chevaux et autres. Aujourd’hui, c’est un espace riche en ressources (pétrole…) qui attire les appétits de nombreux acteurs (États, FTN…). Mais l’enjeu principal reste les flux.

C’est un carrefour, voire le carrefour migratoire de l’Afrique, car 80 % des migrations africaines sont intercontinentales. Ainsi, le Sahara relie l’Afrique, mais aussi l’Europe, et devient un espace de transit incontournable. Il y a aussi une économie souterraine bien implantée dans la zone. On y retrouve tous les types de flux illégaux tels que les cigarettes, les drogues, mais aussi les armes. Ces trafics viennent déstabiliser la région et renforcer le cercle vicieux du (mal)-développement.

Ainsi, plusieurs conséquences sont observables. Tout d’abord, c’est une zone de conflits avec le séparatisme du Sahara occidental, mais aussi du Printemps arabe. Zone au cœur de ces conflits, elle abrite donc les groupes rebelles, aujourd’hui terroristes, comme Boko Haram, ou Shebab et autres. Toutefois, cette situation n’est pas sans solution, les États essayent de mettre en place une meilleure coopération militaire et économique avec l’UA et la CEDEAO.

 

Ouvrages

Pour finir, je te propose deux ouvrages que tu peux réutiliser dans tes dissertations en rapport avec ce dont je t’ai parlé aujourd’hui.

Premièrement, si tu souhaites évoquer le rôle et l’influence de la Chine sur le continent, tu peux te référer au livre, de Laure Delcourt, La Chine en Afrique : menace ou opportunité pour le développement ? (2011). L’autrice fait le bilan de l’activité chinoise qui d’un côté permet le développement du continent, tout en le rendant dépendant de son activité. Ainsi, on pourrait aller jusqu’à dire que c’est la Chine qui se développe en Afrique en l’excluant.

Ensuite, tu pourras aussi faire référence à L’Aide fatale (2009) de Dambisa Moyo, qui explique que l’aide au développement n’aide pas les pays africains à réaliser le leur mais, au contraire, perpétue ce mal-développement. Notamment avec l’économie informelle très développée.

 

J’espère que tu as pu découvrir une vision du continent africain sous un autre angle. Si tu souhaites lire d’autres articles en géopolitique, tu peux retrouver juste ici nos ressources.