L’Allemagne a fêté les trente ans de sa réunification le 3 octobre dernier. Trente ans, c’est à la fois beaucoup, mais cela peut aussi être peu, surtout en termes de mentalités. On n’efface pas comme cela près de 45 ans de séparation. État des lieux des résultats (ou non) de cette réunification pour impressionner en khôlle et en essai.

Point historique : la réunification

Le 3 octobre 1990 a eu lieu la réunification (die Wiedervereinigung) de la RFA et de la RDA. Face à des voisins français et anglais très méfiants et quelque peu réticents, Helmut Kohl mène ce moment historique d’une main de maître. Véritable coup de tonnerre dans l’environnement géopolitique mondial, cette décision entérine le délitement de l’URSS. Les cinq Länder de l’ex-RDA se rattachent à ceux de la RFA pour former la République fédérale d’Allemagne que nous connaissons aujourd’hui. La ville de Berlin est également réunifiée.

Bilan politique

“Trop grande pour l’Europe, trop petite pour le monde”, d’après Henry Kissinger. On craignait que l’Allemagne prenne trop de place en Europe. Mais force est de constater que malgré son économie florissante, l’Allemagne favorise le multilatéralisme sur le plan politique. Elle a fait de la France son grand allié européen et n’agit jamais seule. L’Allemagne n’impose son opinion que sur le plan économique, essentiellement pour sauver ses intérêts. Elle reste cependant très discrète à l’international, surtout hors Europe. Une chose est sûre : d’un point de vue extérieur, l’Allemagne ne fait plus qu’une.

Écarts économiques

30 ans plus tard, les différences persistent et l’unité est loin d’être totale. On remarque tout d’abord un taux de chômage plus élevé en ancienne Allemagne de l’Est, ainsi que des salaires plus bas. Plus étonnant, on peut constater un déclin démographique plus fort, toujours à l’Est. Ces différences datent de la période soviétique, qui a eu un impact très fort sur les mentalités et sur les modes de vie. L’ex-RDA présentait également un retard économique assez important au moment de la réunification. Pour compenser ce retard, le gouvernement a mis en place en 1991 un impôt de solidarité, le “Soli”, payé par les Länder de l’Ouest, pour aider les Länder de l’Est. Il s’agit d’un prélèvement de 5,5 % des revenus des ménages et des entreprises et il devait être supprimé en 1999, mais cela n’a pas été le cas. Et, malgré ces aides économiques, ce retard persiste encore aujourd’hui, bien qu’il soit moins visible.

Une frontière mentale

Le mur de Berlin est tombé, mais les frontières persistent dans les esprits. Ainsi, 57 % des Allemands de l’Est se sentent considérés comme des “citoyens de seconde zone”. On constate également une recrudescence de l’emploi des termes Wessis et Ossis (personnes provenant de l’ex-RFA ou de l’ex-RDA). C’est cette sensation de rejet chez certains qui explique également le succès de l’AfD, l’extrême droite allemande, dans l’est de l’Allemagne. On parle même d’« Ostalgie », qui est la nostalgie du temps de l’ère soviétique à l’Est. C’était mieux avant ?

Ainsi, 30 ans après la réunification, la ligne entre les anciens Est et Ouest demeure très marquée.