maths

Les notions hors programme se destinent surtout aux candidats qui visent les trois Parisiennes. Cet article te propose de décortiquer la notion de polynôme minimal d’un endomorphisme, assez récurrente dans les sujets de concours. Tu retrouveras également une liste des propriétés intéressantes de cette notion afin d’être sensibilisé·e et non pris·e au dépourvu le jour J. Cela te simplifie la tâche pour ficher aussi.

Ce que tu dois savoir sur les liens entre polynômes et valeurs propres d’un endomorphisme (au programme) :

Soit \(f\) un endomorphisme de \(\mathbb{R}^n\) canoniquement associé à \(A\). Si \(Q\) est un polynôme annulateur de \(f\) (respectivement de \(A\)), alors toute valeur propre de \(f\) (respectivement de \(A\)) est racine de \(Q\). Ainsi, les valeurs propres de \(f\) (respectivement de \(A\)) sont parmi les racines d’un polynôme annulateur de \(f\) (respectivement de \(A\)).

Cependant, une fois le polynôme annulateur trouvé, il faut souvent constater si chaque racine du polynôme est bien une valeur propre de \(f\) ou non. C’est là que le polynôme annulateur minimal va entrer en jeu pour supprimer cette seconde tâche.

Définition du polynôme minimal

En français : le polynôme minimal d’un endomorphisme \(f\) est le polynôme unitaire annulateur de \(f\) ayant le plus petit degré.

Démonstration de son existence et de son unicité : on se place dans un espace vectoriel de dimension \(n\).

Démontrons d’abord que tout endomorphisme \(f\) admet un polynôme annulateur :

Dans toute la suite, on considère la matrice \(A\in\mathcal{M}_{n}(\mathbb{R})\) canoniquement associée à \(f\).

La famille \((I_n\)\(,A\,,A^2\,,…A^{n²})\) est de dimension \(n^{2}+1\), donc liée dans \({M}_{n}(\mathbb{R})\).

Ainsi \(\exists(u_0,u_1,…,u_{n^2})\in\mathbb{R}^{n^2}\displaystyle \sum_{k=0}^{n^2}u_kA^k=0\). Donc, en prenant \(P=\displaystyle \sum_{k=0}^{n^2}u_kX^k=0\), on a \(P(A)=0\). Toute matrice, donc tout endomorphisme canoniquement représenté par cette matrice, admet un polynôme annulateur.

Démontrons ensuite l’existence du polynôme minimal :

On note \(P_A\) l’ensemble des polynômes annulateurs de \(A\) et \(D\) l’ensemble des degrés des polynômes annulateurs de A non nuls. Comme \({P_A}\ne\emptyset\), \(D\) est minoré par 0 et non vide, donc admet un plus petit élément noté \(d\). Soit \(P\) tel que \(deg(P)=d\), on peut diviser P par son coefficient dominant pour obtenir un polynôme unitaire, annulateur de \(A\), de degré minimal. C’est donc le polynôme minimal qu’on note \(\Pi_A\).

Démontrons enfin l’unicité du polynôme minimal :

Supposons par l’absurde qu’il existe un autre polynôme unitaire \(Q\) de degré \(d\) annulateur de A. On effectue la division euclidienne de \(\Pi_A\) par \(Q\), il vient \(\Pi_A(X)=Q(X)M(X) + R(X)\) avec \(deg(R)\le{d-1}\). En évaluant alors en \(A\), on trouve \(R(A)=0\) et la minimalité de \(d\) impose que \(R\) soit le polynôme nul. Ainsi, on a \(\Pi_A(X)=Q(X)M(X)\) et par l’égalité des degrés : \(\Pi_A(X)={\lambda}Q(X)\), qui se conclut en utilisant le caractère unitaire des polynômes que \(\lambda=1\) et donc \(\Pi_A(X)=Q(X)\). D’où l’unicité.

Propriétés du polynôme minimal

Définir le polynôme minimal n’était pas inutile (la démonstration est d’ailleurs souvent à refaire quand ce dernier tombe en exercice), il possède des propriétés intéressantes.

Toutes les propriétés suivantes seront à démontrer si la notion de polynôme minimal intervient dans un sujet.

Propriété 1 : \[P_A={\{\Pi_AQ(X),Q\in\mathbb{R}[X]}\}\]

Démonstration : Soit \(P\in{\Pi_A}\), on effectue la division euclidienne de \(P\) par \(\Pi_A\). Il vient \(P(X)=\Pi_A(X)Q(X) + R(X)\) avec \(deg(R)\le{d-1}\). En évaluant en \(A\), on trouve \(R(A)=0\) et la minimalité de \(d\) impose que \(R\) soit le polynôme nul. On a donc \(P(X)=\Pi_A(X)Q(X)\). D’où la propriété ci-dessus.

Propriété 2 : \[\text{2 matrices semblables ont le même polynôme minimal}\]

Démonstration : Soient \(A\) et \(B\) deux matrices semblables, il existe \(Q\) inversible telle que \(A=Q^{-1}BQ\).
Soit \(P=\displaystyle \sum_{k=0}^{d}u_kX^k\in\mathbb{R}[X]\,,u_d\ne{0}\),

\(\begin{align}P(A)=0&\Leftrightarrow\displaystyle \sum_{k=0}^{d}u_kA^k=0\\&\Leftrightarrow Q^{-1}(\displaystyle \sum_{k=0}^{d}u_kA^k)Q=0\\&\Leftrightarrow\displaystyle \sum_{k=0}^{d}u_kQ^{-1}A^kQ=0\\&\Leftrightarrow\displaystyle \sum_{k=0}^{d}u_kB^k=0\\&\Leftrightarrow P(B)=0\end{align}\). 

Donc, \(P_A=P_B\). Ainsi \(\Pi_A=\Pi_B\).

Propriété 3 : \[\text{Les racines de }\Pi_A\text{ sont exactement les valeurs propres de }A\]

C’est la propriété la plus intéressante, on obtient directement les valeurs propres de la matrice et de l’endomorphisme canoniquement associé.

Démonstration :

\(\Pi_A\) est annulateur de \(A\), donc nécessairement, les valeurs propres de \(A\) sont parmi les racines de \(\Pi_A\).

Soit \(\lambda\) une racine de \(\Pi_A\). Alors, il existe \(Q\in\mathbb{R}[X]\) non nul tel que \(\Pi_A(X)=(X-{\lambda})Q(X)\) avec \(degQ=d-1\). Si \(\lambda\) n’est pas valeur propre de \(A\), la matrice \(A-{\lambda}I\) est inversible. En multipliant l’égalité par \((A-{\lambda}I)^{-1}\), on obtient \(Q(A)=0\), en contradiction avec la minimalité de \(d\). Donc \(\lambda\) est une valeur propre de \(A\).

On a donc bien que les valeurs propres de \(A\) sont parmi les racines de \(\Pi_A\).

Les sujets de concours avec cette notion