Coca-Cola, Amazon, Apple, Ford, Nike… Le grand génie de ces firmes américaines, petite poignée d’exemples parmi tant d’autres, est d’avoir réussi à créer une stratégie marketing centrée sur le consommateur (consumer). Ce dernier se laisse conter une histoire, toujours construite autour de la marque, et qui devient tellement emblématique (iconic) que nos comportements sociaux en deviennent profondément marqués. Mais cette façon de vendre pose des questions : dans quelle mesure la publicité (advertising) et, plus largement, les stratégies marketing peuvent influencer le choix des consommateurs ? Jusqu’à quel point ces domaines façonnent notre vision du monde, et faut-il s’en offusquer ? Réponse à ces questions via deux exemples marquants, dont il peut être utile de se souvenir en cas de sujet d’expression écrite sur ce thème.

L’exemple de De Beers

Fondée en 1888 par l’homme d’affaires britannique Cecil Rhodes, De Beers est une entreprise qui s’est peu à peu fait un nom dans le business du diamant, de la mine jusqu’à la bijouterie. Très vite, avec l’achat de terres en Afrique du Sud, la société prospère au point où dans les années 90 elle représente 90 % du marché du diamant, soit un quasi-monopole. Mais cette histoire commence vraiment à nous intéresser pour notre sujet quand en 1947, De Beers confie à N.W. Ayer & Son, une agence de publicité basée à Philadelphie, sa nouvelle campagne marketing. Ils ont alors ensemble une idée de génie : faire du diamant le symbole de l’amour. Ils créent un slogan « A Diamond is forever » (qui est d’ailleurs resté aujourd’hui comme slogan de l’entreprise) et réussissent à convaincre les gens d’acheter une bague pour leur fiancée (ancienne mode qu’ils remettent donc au goût du jour), ornée bien sûr d’un diamant De Beer. Ils missionnent des ambassadrices, stars de cinéma hollywoodiennes, comme Marylin Monroe, et relancent à intervalle régulier cette campagne. Celle-ci devient un immense succès, au point où aujourd’hui, la tradition est restée partout dans le monde occidental.

L’exemple de Starbucks

Tout le monde connaît Starbucks, surtout aux États-Unis où la chaîne est géographiquement très implantée, au point où l’humoriste Gad Elmaleh, dans un de ses derniers spectacles, se moquait des Américains qui indiquent un trajet en prenant pour point de repère les Starbucks. Mais le génie de cette chaîne est d’avoir profondément installé la mode du café aux USA. En effet, avant, les Américains n’en buvaient pas beaucoup : ils consommaient beaucoup plus de sodas classiques, comme du Coca-Cola. L’idée, lors de la fondation de l’entreprise Starbucks en 1971, est de viser une classe moyenne citadine plutôt aisée et de lui proposer un service de café rapide. Pour vendre ce concept, pas de publicité mais bien une stratégie marketing, que pourrait reprendre l’expression « To keep up with the Joneses », qui signifie « se comparer à son voisin en termes de modes ou de façons de vivre ». Ainsi, boire un café Starbucks devient source de reconnaissance sociale. Mais pour qu’il y ait une vraie envie de consommer comme les autres, il faut une expérience. Chez Starbucks, elle repose tout d’abord sur le jargon utilisé : des dénominations de boissons italiennes pour conserver un aspect authentique dans le produit proposé. Ensuite, on peut souligner le sentiment, comme on le disait, de connexion et de proximité avec les autres (le client est appelé par son prénom, une salle avec une ambiance cosy pour discuter…). Last but not least, le goût a été la clé pour convaincre les Américains d’abandonner les sodas pour passer au café : pour se faire, la chaîne rajoute beaucoup de sucre, de crème et de sirop dans ses boissons afin d’adoucir le goût. Voici donc comment Starbucks, grâce à son offre unique, a lancé la mode du café et toute une expérience sociale autour de ce dernier.

Conclusion

Ainsi, ces deux exemples prouvent bien que les stratégies marketing des firmes anglo-saxonnes peuvent aller jusqu’à faire évoluer les comportements sociaux et les façons de vivre des consommateurs. Reste à répondre à la question : faut-il s’en offusquer ? D’une part, on pourrait répondre que c’est le consommateur qui prend la décision, qu’il reste seul maître de ses choix, et que cela fait partie du jeu pour les marques d’essayer de le convaincre par tous les moyens possibles. Mais d’autre part, il faut souligner le fait qu’en incorporant des comportements de consommation dans ce que l’on pourrait appeler des normes sociales (la bague de fiançailles, l’image que l’on renvoie de soi, etc.), la liberté du consommateur se retrouve restreinte puisque son choix devient presque inconscient, voire mimétique. Le débat reste donc ouvert ! Mais attention, si cette question se pose dans un essai, il faut trancher !