États-Unis

Dans cet article, retrouve quelques clés de lecture sur les différentes tensions autour du conflit « Pro-Life vs. Anti-Life », c’est-à-dire sur l’avortement, aux États-Unis !

Pro-Life, Pro-Choice, Anti-Abortion, Anti-Life : ça veut dire quoi ?

Il est aisé de confondre le camp des Pro-Life – « pour la vie » en français – avec le camp des Anti-Abortion – « contre l’avortement » en français. Cependant, les deux ont une pensée très différente : il est communément admis que les Anti-Abortion sont beaucoup plus militants que les Pro-Life. Ce sont ces premiers qui font souvent la une des titres aux États-Unis à cause de leurs nombreuses actions « coup d’éclat » ou politiques. Un sondage, mené par Gallup en 2009, montre que 51 % des Américains se considèrent Pro-Life – contre 42 % de Pro-Choice –, pourtant, 76 % des Américains sondés se disent en faveur de l’avortement dans certaines circonstances particulières, voire sans aucune condition. Ceci montre bien la déconnexion entre Pro-Life et Anti-Abortion : environ la moitié des Pro-Life n’est pas fermement contre l’avortement.

De même, le terme Anti-Life – « contre la vie » – est souvent utilisé pour désigner les Pro-Choice – « pour le choix ». La différence est simple : le premier terme est péjoratif et est souvent issu de la bouche des Anti-Abortion pour diaboliser les Pro-Choice, c’est-à-dire ceux qui souhaitent légaliser et normaliser la possibilité d’avorter quand on le souhaite.

L’avortement aux États-Unis : un conflit permanent entre deux camps

De manière assez simplifiée, le camp des Pro-Choice est plutôt démocrate et celui des Anti-Abortion est plutôt républicain. Tu auras remarqué que j’utilise le terme « Anti-Abortion » : c’est parce que ce sont eux qui font le plus de bruit aux niveaux médiatique et politique.

En effet, aux États-Unis, la légalisation de l’avortement est un sujet extrêmement controversé. Il n’est pas rare que des manifestants descendent dans la rue pour faire entendre, plus ou moins pacifiquement, leur opinion.

Une manifestation Pro-Choice à l’Université de Michigan, 21 mai 2019. Ce jour-là, plus de 300 manifestations ont eu lieu aux États-Unis en réaction aux dernières lois entravant l’avortement.

Quelques arguments Pro-Choice

Un slogan est absolument indispensable à connaître sur ce sujet : My body, my choice – « Mon corps, mon choix ». C’est un slogan féministe repris dans de nombreuses manifestations pour l’accès à l’avortement et à la contraception. Il signifie que chaque femme devrait avoir la possibilité de choisir quoi faire de son corps, et donc du fœtus qu’elle porte.

Les partisans de ce slogan invoquent parfois les difficultés sociales et professionnelles liées à une grossesse imprévue : pour beaucoup, les possibilités professionnelles sont réduites lorsqu’une femme accouche. Une sociologue, Michelle Budig, a estimé qu’en 2014, aux États-Unis, chaque nouvel enfant entraîne une réduction du salaire de sa mère de 4 % et une augmentation de celui de son père de 7 %, du fait de l’impossibilité pour les femmes de se rendre assez disponibles pour leur travail d’un côté et de l’impression pour les hommes d’être plus matures d’un autre.

Par ailleurs, la légalisation de l’avortement n’implique pas que le nombre de femmes souhaitant avorter augmente : cela signifie surtout que le nombre de femmes qui avortent dans des conditions sûres est plus élevé. La démocratisation de l’avortement, c’est surtout l’assurance d’avoir accès à des cliniques homologuées, avec des professionnels bien équipés. Par contraste, un avortement illégal implique une hausse du taux de mortalité lors de l’opération : selon l’OMS – the WHO en anglais –, au moins 4,7 % des morts maternelles sont dues à des avortements pratiqués dans de mauvaises conditions sanitaires.

Quelques arguments Anti-Abortion

Du côté des Anti-Abortion, c’est le plus souvent l’argument émotif – parfois couplé avec l’argument d’autorité de la Bible – qui prime. Le discours anti-avortement américain se centre autour de deux phrases choc : Baby-killers – tueurs de bébés – et Thou shalt not kill – Tu ne tueras point, en anglais archaïque.

La première considère que tout fœtus, même s’il n’est pas complètement formé, a le statut d’être humain : avorter ne vaudrait pas mieux que de tuer un bébé. Ces critiques s’appuient sur différentes études qui proclament que la période à laquelle les fœtus commencent à ressentir de la douleur arrive avant la date maximale pour un avortement : 20 semaines contre 24 semaines. La deuxième critique ne fait pas de différence entre le bébé et le fœtus : si Dieu proclame qu’il ne faut pas tuer d’hommes, cela s’applique également aux fœtus.

Par ailleurs, l’avortement peut mener à des complications médicales pour la mère : selon le journal scientifique International Journal of Epidemiology, environ 15 % des fausses couches au premier trimestre de grossesse sont liées à un avortement précédent. La multiplication des avortements par une même personne aurait donc un fort danger pour la santé de cette personne.

Et en pratique, on a le droit ou pas ?

Oui… mais non

En 1969, Norma McCorvey – ou Jane Roe – cherche un avocat pour la défendre et l’autoriser à avorter. L’avortement, toléré jusqu’aux années 1920, était depuis 50 ans redevenu une pratique peu accessible aux États-Unis. Jane Roe fait escalader l’affaire jusqu’à la Cour suprême, qui est le plus haut organe judiciaire des États-Unis, pour avoir gain de cause.

Face à elle, le 14ᵉ Amendement de la Constitution américaine, qui stipule qu’« aucun État ne fera ou n’appliquera de loi qui limiterait les privilèges ou immunités des citoyens des États-Unis ; [qu’] aucun État ne pourra priver une personne de la vie, de la liberté ou de la propriété, sans procédure légale régulière ; ni refuser à toute personne au sein de sa juridiction l’égale protection des lois ».

La Constitution américaine est un texte ancien qui a joué un rôle fondateur dans le développement des États-Unis : tu trouveras dans cet article un déroulé des dates fondatrices des États-Unis.

« No State shall make or enforce any law which shall abridge the privileges or immunities of citizens of the United States; nor shall any State deprive any person of life, liberty, or property, without due process of law; nor deny to any person within its jurisdiction the equal protection of the laws. » – 14th Amendment of the American Constitution

Quel est le rôle de la Cour suprême des Etats-Unis ?
La Cour suprême des États-Unis, à Washington D.C.

À cette époque, le fœtus est bien considéré comme une personne : l’avortement est donc illégal. Mais la Cour suprême décide néanmoins de reconnaître qu’un fœtus ne peut être considéré comme une personne qu’à partir d’un trimestre au minimum. Elle légalise donc l’avortement a minima dans cette fenêtre. C’est une victoire de Jane Roe, consignée dans l’arrêt fondateur Roe v. Wade de 1973.

Cependant, dans la réalité, l’accès à l’avortement est parfois très restreint selon l’État dans lequel on se trouve. Par exemple, le 1er septembre 2021, le Texas a mis en place la « loi du battement de cœur » – Heartbeat Act –, selon laquelle l’avortement est illégal dès les premiers battements de cœur enregistrés du fœtus, c’est-à-dire au bout de six semaines. La seule et unique exception est la mise en danger de la vie d’une mère par la grossesse après ce délai.

Un exemple culturel à replacer en essai : A Book of American Martyrs, Joyce Carol Oates

En 2017, l’écrivaine Joyce Carol Oates publie A Book of American Martyrs. Son roman traite de Gus Voorhees : un médecin américain de la fin du XXᵉ siècle, dans l’Ohio, qui pratique des avortements tardifs. Il se fait assassiner par Luther Amos Dunphy, un fanatique chrétien qui n’hésite pas à s’autoproclamer « soldat de l’armée de Dieu », en mission pour éliminer les « tueurs de bébés ». Deux citations peuvent t’intéresser pour faire une belle accroche d’essai :

« The fetus wished to live. Stubbornly, sometimes astonishingly – the fetus wished to live. »

« Life is the horror, abortion or miscarriage is the redemption. »

A Book of American Martyrs
L’apport de Joyce Carol Oates au conflit Pro-Life vs. Anti-Life a reçu un retour globalement positif du public

Ce livre a sans doute sa place dans ce catalogue de références culturelles à avoir en tête avant ton épreuve d’anglais.

Fiche de vocabulaire

Voici une fiche de vocabulaire sur le sujet de l’avortement aux États-Unis.

To get an abortion Avorter
A pregnant woman Une femme enceinte
To be six weeks pregnant Être enceinte de six semaines
A fetus (US) Un fœtus
To get one’s first period Avoir ses premières règles
A teen pregnancy Une grossesse précoce
To have a miscarriage Faire une fausse couche
A rainbow baby Un bébé qui survient après une fausse couche
A pregnancy test Un test de grossesse
To protest Manifester
To pass a bill Valider une loi