economie droit

La prépa ECT est différente de la prépa ECG à bien des égards, et le fait que l’une des épreuves que tu auras à passer comprenne deux matières très différentes l’une de l’autre n’y est pas pour rien ! Je veux bien sûr parler de l’épreuve d’économie-droit, et pour être encore plus précis, de celle conçue par l’ESSEC, soit de loin la plus difficile comparée à celles élaborées par BSB et Ecricome.

Parce qu’elle est éprouvante tant au niveau du volume que de la diversité des connaissances requises, et en raison de la minutie qui t’est imposée dans l’application de tes méthodes pour rester cohérent dans ta copie, il ne serait pas étonnant que tu la trouves extrêmement difficile ou même interminable pour l’instant. Je préfère être honnête avec toi : même en prenant soin d’apprendre tes cours à la perfection et en développant des méthodes parfaites, l’épreuve d’économie-droit ESSEC te donnera toujours du fil à retordre !

Lorsque j’étais encore en prépa, il m’était d’avis qu’elle était de loin l’épreuve la plus difficile de celles que j’aurais à passer, mais paradoxalement, c’était également celle que je préférais : le propre de la prépa n’est-il pas de constamment chercher à se dépasser intellectuellement ? Qui sait, peut-être qu’à force de faire des annales, tu apprendras à y prendre plaisir toi aussi (si ce n’est pas déjà le cas).

Néanmoins, rassure-toi : il existe un certain nombre de petits automatismes qui te permettront d’apprivoiser tant bien que mal les différents exercices économiques et juridiques auxquels tu seras confronté pendant quatre heures. Dans cet article, je vais t’exposer ces fameuses astuces qui ont très bien fonctionné pour moi. Cet article n’est pas là pour te rappeler les fondamentaux (apprendre ton cours, faire des annales, etc.), mais plutôt pour améliorer ta compréhension des enjeux de l’épreuve et t’aider à y répondre.

Tu peux consulter les coefficients détaillés de l’épreuve et voir pour quelles écoles elle compte !

Les difficultés de l’épreuve

Je pense qu’il est plus facile de savoir comment performer sur une épreuve après avoir clairement identifié les différentes difficultés qu’elle peut poser. Pour ce faire, une simple lecture des rapports de jury des années précédentes peut suffire, mais faisons-le ensemble.

  • Avec un peu plus de recul, mon avis d’ex-préparationnaire n’a toujours pas changé : la difficulté majeure à surmonter réside dans la gestion du temps. L’épreuve est très (trop) longue et il est important de ne pas trop traîner sur un seul exercice pour ne pas se retrouver à la fin du temps imparti sans avoir pu traiter l’épreuve dans son intégralité.
  • La restitution des connaissances en bonne et due forme peut également poser problème. Il ne suffit pas d’apprendre des chapitres de cours sans pouvoir faire de lien entre eux, ou pire, sans même les comprendre. Il y a une manière de restituer ses connaissances pour réussir les différents exercices. Nous y reviendrons.
  • La capacité à analyser des informations de façon pertinente est une condition sine qua non pour s’en sortir. Si je me fie à la longueur de la synthèse, par exemple, il semble clair que les concepteurs de l’épreuve n’attendent pas des candidats qu’ils prennent en compte toutes les informations mises à leur disposition. Il faut, au lieu de vouloir tout lire, prendre du recul et avoir une vision d’ensemble de l’exercice dans sa globalité, savoir parfaitement où on veut nous emmener en quelques minutes. Je parle ici de la synthèse, mais c’est tout aussi vrai pour les cas pratiques, à titre d’exemple. Prends une annale tout de suite et essaie de formuler un bon problème de droit pour les trois cas pratiques sans lire la question posée sous les faits donnés par l’énoncé : c’est impossible. Maintenant, essaie de faire pareil sans lire l’introduction de la partie droit et tu verras que tu n’y éprouveras aucune difficulté. En fait, ça prouve qu’il faut juste savoir directement où aller chercher l’information restituable et comment la restituer.

Je vais maintenant te suggérer plusieurs solutions qui m’ont permis de surmonter ces trois difficultés, et ce, pour les quatre exercices que contient l’épreuve d’économie-droit ESSEC.

La synthèse

Posons les bases : la synthèse t’impose de résumer, entre 450 et 550 mots, un corpus de plusieurs documents qui totalise environ six pages (graphiques inclus). Juste en lisant les exigences de l’exercice, on en revient à nos trois difficultés identifiées juste avant, à savoir : (i) qu’il faudra être rapide et efficace pour rester dans les temps, (ii) qu’a priori, sans connaissances préalables (cours), il semble compliqué de restituer en des termes économiques les informations qui nous seront données et (iii) que notre pensée doit être structurée afin de produire un travail qui le sera tout autant.

Pour la gestion du temps

Pour ce qui est de la gestion du temps, je conseille de ne pas dépasser les 1 h 45 sur cet exercice. On pourra monter jusqu’à 1 h 30, ou même un peu plus, sans problème parce qu’il est quand même nécessaire de particulièrement bien s’appliquer au moment de la rédaction : la synthèse sera la première impression laissée au correcteur de l’épreuve d’économie (pas de celui de celle de droit : les correcteurs ne seront pas les mêmes).

Pour la forme

Au niveau de la forme, je faisais personnellement une introduction en trois temps qui ne me prenait jamais plus de 100 mots : j’avais généralement une première phrase pour illustrer l’origine du sujet (cette phrase doit permettre de répondre à la question : pourquoi ce sujet et pas un autre ?), souvent à l’aide d’un fait assez ancien, comme une crise par exemple. Le corpus contient systématiquement au moins une allusion assez nette à des faits passés qui doit se retrouver dans l’introduction. Ensuite, on aurait dans l’idéal une deuxième phrase pour relier ce fait au sujet de la note de synthèse (n’hésite pas à réécrire le sujet, mais fais-le de façon « fluide ») et une troisième phrase dans laquelle on peut annoncer le plan. Par la suite, je conseille de faire deux grandes parties avec deux sous-parties dans chacune d’entre elles. Les titres doivent répondre clairement au sujet (j’y reviendrai plus tard car cela relève du fond). Enfin, n’oublie pas d’inclure une conclusion qui reprend clairement le sujet et y répond brièvement.

Pour le fond

La bonne formulation des titres des grandes parties ainsi que des sous-parties est excessivement importante. Si tu respectes cette condition, tu démontres que tu as compris où veut t’emmener le sujet et que tu sais prendre du recul, ce qui est vecteur d’une pensée structurée. C’est clairement ce que les concepteurs de l’épreuve cherchent à évaluer. Il faut des titres clairs, simples, formulés en des termes économiques, qui s’enchaînent dans un ordre logique et qui englobent les idées économiques principales des documents. Si tu veux tout savoir, les correcteurs d’économie classent leurs tas de copies en deux catégories après un simple coup d’œil : des titres hors sujet, trop larges, trop précis ou pas assez économiques feront que la copie partira du côté des « mauvaises copies » et ne dépassera pas la moitié des points sur la synthèse. Et donc, sur l’intégralité de l’épreuve d’économie…

Il faut garder à l’esprit que les idées doivent être classées dans les différentes parties/sous-parties indépendamment de leur ordre d’apparition. Si tu as un sujet sur la crise de la Covid et que la crise de 2008 est évoquée dans la dernière phrase du corpus, tu devras quand même probablement l’évoquer dans la première phrase de la synthèse. Il se peut que le même document contienne des informations qui devront être reclassées dans différentes parties : il faut bien sûr prêter attention aux titres et aux auteurs des documents ; pour autant, il ne faut pas oublier que toutes les idées sont susceptibles d’être classées n’importe où. Après la prise de notes, on reclassera les idées dans les différentes parties en fonction des titres choisis : pour chaque idée, demande-toi quelle grande partie puis quelle sous-partie lui correspondent le mieux, indépendamment du document dans lequel elle est apparue.

Dernier point à retenir : il te faut reformuler les idées qui ne sont pas assez techniques d’un point de vue économique. Par exemple, s’il est écrit que la BCE « fait chauffer la planche à billets », on préférera traduire par : « La BCE a intensifié/a maintenu sa politique monétaire expansionniste, ce qui a entraîné une injection massive de liquidités dans l’économie ». C’est là que le cours sera indispensable : le maîtriser, c’est être capable d’utiliser un langage économique pertinent. Fais comme si la synthèse était une épreuve de LV3 italien russe japonais économie. 🙂

La réflexion argumentée

Cet exercice propose un sujet qui sollicitera à la fois les connaissances du cours, mais également un suivi méticuleux de l’actualité. Pour caricaturer, dans les grandes lignes, le sujet fera quasiment systématiquement office d’appel de phares aux candidats pour qu’ils mobilisent leur cours, mais seuls les plus avisés sauront faire référence à l’actualité qui y est associée. La réflexion argumentée permet donc trois niveaux de différenciation entre les candidats : (i) ceux qui ne traitent pas le sujet par manque de temps ou par hors sujet, (ii) ceux qui répondent au sujet grâce à leurs connaissances de cours et (iii) ceux qui maîtrisent parfaitement leur cours et parviennent à le relier à l’actualité. Afin de faire partie de la dernière catégorie de candidats, il y a plusieurs règles à respecter.

Pour la gestion du temps

Idéalement, la réflexion argumentée doit être terminée après 45 minutes maximum. Si tu as mis 1 h 45 pour terminer ta note de synthèse, tu pourrais alors avoir terminé la partie économie de l’épreuve après 2 h 30. Ça te laisserait à peu près 1 h 30 pour la partie droit, ce qui est une avance plutôt confortable. Dans tous les cas, je déconseille fortement de dépasser les 45 minutes sur la réflexion argumentée. Tu n’auras pas le temps de terminer l’épreuve si tu y passes plus de temps, à moins d’être supersonique dans la résolution des autres exercices.

Pour la forme

On peut se contenter d’une introduction, de deux grandes parties (des sous-parties sont appréciées si elles ne se « marchent pas trop dessus ») et d’une conclusion. Je conseille de ne pas excéder une page et demie, déjà parce que l’exercice en lui-même ne doit pas prendre plus de 45 minutes et parce que les correcteurs ont horreur des longues dissertations qui partent dans tous les sens. Un traitement clair du sujet étayé d’illustrations et d’exemples brefs mais précis sera bien plus apprécié. En revanche, l’introduction doit permettre de bien introduire le sujet (surprise) et peut donc être assez longue.

Pour le fond

En parlant de l’introduction, elle doit repartir des connaissances économiques les plus basiques pour venir progressivement se rattacher au sujet : garde l’image du sablier en tête lorsque tu rédiges la réflexion argumentée (il faut aller du plus large au plus précis). C’est le moment de ressortir les cours de première année et d’exposer la vision économique transversale que tu auras pu acquérir. Fais des liens entre les dossiers, prends du temps, mais introduis le sujet de façon méticuleuse. C’est très important pour que tes idées ne donnent pas l’impression de venir se poser « comme un cheveu sur la soupe ».

En ce qui concerne les grandes parties, il faut encore une fois que les titres soient clairs, précis et liés au sujet. Ils devront d’ailleurs être à l’image des arguments que tu rédigeras, c’est-à-dire qu’ils devront aussi si possible se suivre et démontrer un vrai raisonnement, non pas seulement un enchaînement de connaissances. Un bon moyen pour faire cela est de s’efforcer de comprendre les mécanismes économiques en profondeur, de faire des liens entre les différents chapitres, plutôt que de restituer du par cœur. Par exemple, si je prends la réflexion argumentée de l’annale de 2021, « Comment la France finance sa dette publique », ce qui aurait été très valorisé aurait été d’expliquer dans une première partie les mécanismes du quantitative easing, puis dans une deuxième partie, de montrer les inconvénients de cet outil non conventionnel inclus dans la politique monétaire de la BCE. Je pense que ce sujet, bien plus que ceux des années précédentes, démontre la volonté des correcteurs à forcer les candidats à bien comprendre et expliquer les mécanismes économiques, au lieu d’apprendre des causes et des conséquences par cœur… Mon pronostic s’orienterait vers un sujet du même type pour les années à venir.

Exemples d’arguments de réflexion argumentée

À des fins d’approfondissement de ce dernier point, au lieu de simplement écrire « l’État français a recours au quantitative easing pour financer sa dette publique », j’avais personnellement entièrement complété ma première partie avec cet argument :

« La dette publique de l’État français est en partie financée par l’émission d’Obligations publiques assimilables au trésor (OAT) sur les marchés des capitaux, qui sont ensuite rachetées par des agents investisseurs (dont les investisseurs institutionnels). Par la suite, dans le cadre de sa politique monétaire expansionniste menée depuis 2008 et notamment pour faire face aux effets de la crise de la Covid (développer…), la BCE rachète ces obligations auprès des agents investisseurs (quantitative easing). Cela permet de préserver la confiance des agents investisseurs en la capacité des États à rembourser leur dette, en plus de maintenir des taux d’intérêt bas puisqu’en rachetant ces obligations, la BCE injecte des liquidités sur les marchés des capitaux. Or, l’offre sur les marchés de capitaux, ce sont les liquidités (l’épargne des agents à capacité de financement), et le prix sur ces mêmes marchés est le taux d’intérêt. Par la loi de l’offre et la demande, la politique monétaire de la BCE permet ainsi de maintenir des taux d’intérêt bas (hausse de l’offre = baisse du prix) et donc à l’État de s’endetter à bas coût. C’est pourquoi la politique monétaire expansionniste de la BCE favorise le financement à bas coût des politiques budgétaires de relance des États européens, dont celle de la France. » (La dernière phrase serait à relier brièvement avec l’actualité concernant les effets de la crise de la Covid et l’intervention publique pour y faire face : politique de l’offre, chômage partiel, subventions publiques…)

Pareillement, s’il est question de l’annulation de la dette publique des États et que l’on cherche à démontrer que cette solution n’est pas viable sur le long terme par exemple, je pense qu’un candidat qui se contenterait de restituer que « L’annulation de la dette par les Banques centrales risque de favoriser un retour de l’hyperinflation » ferait pâle figure face à un concurrent qui expliquerait le même argument de la façon suivante :

« L’annulation de la dette publique par les Banques centrales risque de favoriser le retour de l’hyperinflation, puisque les fonds des Banques centrales deviendraient alors négatifs. Ces dernières ne pourraient alors plus avoir recours à l’augmentation de leurs taux d’intérêt directeurs pour contrôler la quantité de crédits accordés par les banques commerciales aux ménages et aux entreprises. En effet, une hausse des taux d’intérêt directeurs incite les banques commerciales à déposer leurs fonds propres auprès des Banques centrales (puisqu’elles seraient rémunérées de façon plus avantageuse). C’est pourquoi, sans hausse des taux d’intérêt directeurs possible, les banques commerciales détiendront davantage de fonds propres et attribueront plus de crédits aux entreprises et aux ménages, ce qui entraînera une hausse de l’investissement privé et de la consommation des ménages, donc de la quantité de monnaie en circulation dans l’économie. Or, selon la théorie monétaire popularisée par l’économiste néolibéral Milton Friedman, une augmentation de la masse monétaire est vectrice d’une hausse de l’inflation. Ainsi, parce qu’elle rendrait impossible la hausse des taux d’intérêt directeurs, l’annulation de la dette publique des États par les Banques centrales pourrait générer un risque inflationniste et ne constitue pas une solution pour financer les politiques budgétaires des États. »

Dans ces exemples, comme tu peux le constater, je fais de multiples détours pertinents dans mon raisonnement afin d’envoyer des signaux au correcteur qui prouvent que je maîtrise le mécanisme économique derrière le quantitative easing, et donc également celui derrière le financement de la dette publique française.

Il ne faut pas trop en faire non plus parce que le temps est limité, et ne surtout pas oublier de revenir au sujet à chaque fois pour ne pas sortir du cadre posé par le sujet. Le tout est de trouver un juste milieu : n’hésite pas à faire l’effort d’essayer de comprendre ce que tu apprends et tu n’auras aucun problème avec la réflexion argumentée. Imagine que compléter tes parties s’apparente à aller au magasin et à piocher, dans un rayon, des explications de mécanismes pertinents afin de construire un argument solide relié au sujet. Pour pousser la métaphore encore plus loin, on pourrait même imaginer que tu paies tes arguments en minute, donc fais attention à ne pas trop en faire non plus : ça pourrait te coûter… cher.

Bref, tu as compris l’idée. C’est le moment de prouver que tu as compris les mécanismes économiques en détail, que tu ne te contentes pas seulement d’effleurer de façon artificielle des théories ou des faits d’actualité sans les relier au cours ou à l’actualité. Pour autant, garde une certaine synthéticité pour ne pas gaver le correcteur. En faisant ça, tu as de grandes chances d’engranger tous les points sur cet exercice !

Conclusion de la première partie

Cet article était consacré à la partie économie de l’épreuve. La deuxième partie se focalise sur la partie droit, tu peux la retrouver ici. Tu peux retrouver ma copie d’économie-droit de la session 2020 ici (et prochainement celle de la session 2021) pour voir ce que donnent tous ces conseils lorsqu’ils sont appliqués. Tu peux aussi lire cette excellente copie de la session 2022.

Bon courage !