justice

Salut, étudiant en prépa ECT ou ECP ! Après avoir vu la méthodologie de l’analyse d’une situation juridique grâce au syllogisme juridique et celle de l’analyse de contrat, je te propose, afin de compléter les articles sur la méthodologie en droit pour les trois épreuves d’économie-droit (ESSEC, SCBS et Ecricome), la méthodologie à adopter pour analyser une décision de justice. Elle te servira précisément pour l’épreuve Ecricome.

En effet, la partie droit de l’épreuve se compose de trois cas pratiques, d’une analyse de document (soit l’analyse d’un contrat, soit l’analyse d’une décision de justice), ainsi que d’une veille juridique.

Méthodologie de l’analyse d’une décision de justice

La juridiction, la date et le lieu

Le tribunal qui a rendu ses dernières décisions, la date et le lieu de la décision.

Les parties et leurs fonctions

Leurs qualités, leurs noms et leurs fonctions.

Ex. : Demandeur : Monsieur X, propriétaire, Défendeur : Monsieur Y, locataire.

La qualification des faits

Résumé des faits qui sont liés au problème juridique et antérieurs à la procédure, en utilisant des termes juridiques. Quels sont les faits ? Que s’est-il passé ?

Le problème juridique

La ou les questions générales de droit auxquelles le juge devra répondre. C’est le point central de l’arrêt. On cherche à savoir quel est le problème juridique posé.

La procédure (le suivi de l’affaire jugée)

Degré Juridiction Partie Partie Décision
1 Tribunal judiciaire/Conseil de prud’hommes/Tribunal de commerce Demandeur Défendeur Déboute/accorde
M. X

M. Y
2 Cour d’appel Appelant Intimé Confirmatif/Infirmatif
M. X M. Y
Cour suprême Cour de cassation Demandeur Défendeur Rejette/casse, annule et renvoie
M. X M. Y

Les arguments et les prétentions des parties

Arguments : démonstration, justification de leurs droits.

Prétentions : ce que réclament les parties.

La décision et le motif

C’est la réponse au problème juridique. Dans l’arrêt, cela débute souvent par « Attendu que… » ou encore « Vu que… ».

Exemple concret d’une décision de justice

Attendu que Mme X et Mme Y, respectivement engagées par la société Follet Boyauderie Blésoise en qualité de manœuvre le 1er décembre 1992 et le 14 septembre 1993, et affectées en dernier lieu pour la première, à un poste de mesurage des gros et menus de bœuf, pour la seconde, à un poste de grattage des gros de bœuf, ont été licenciées respectivement le 8 septembre 1997 et le 22 mai 1996, pour insuffisance professionnelle et insuffisance de résultats ;

Qu’elles ont saisi la juridiction du Conseil de prud’hommes ;

Attendu que les salariées font grief à l’arrêt infirmatif attaqué (Orléans, 21 septembre 2000) de les avoir déboutées de leur demande tendant à voir condamné leur employeur au paiement d’une somme à titre d’indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse […]

Alors, selon le moyen, que l’insuffisance des résultats ne peut constituer, en soi, une cause de licenciement ;

Qu’il appartient au juge d’apprécier dans le cadre des pouvoirs qu’il tient de l’article L122-14-3 du Code du travail (devenu L1235-1), si les faits invoqués par l’employeur dans la lettre de licenciement peuvent caractériser une cause réelle et sérieuse de licenciement ;

Qu’à cet égard, le juge devra nécessairement rechercher, d’une part, si les objectifs étaient réalistes, et d’autre part, si les salariées étaient en faute de ne pas les avoir atteints ;

D’où il résulte que la cour d’appel, qui, pour estimer que le licenciement des salariées était fondé sur une cause réelle et sérieuse, se borne à constater les mauvais résultats de celles-ci au regard des objectifs fixés par l’employeur, dont elle précise qu’ils étaient réalistes, a entaché sa décision d’un défaut de base légale au regard de l’article L122-14-3 du Code du travail ;

Mais attendu que si l’insuffisance de résultats ne peut constituer en soi une cause de licenciement, la cour d’appel qui a constaté, d’une part, le caractère réaliste des objectifs fixés par l’employeur, et, d’autre part, que le fait de ne pas avoir atteint les objectifs résultait d’une insuffisance professionnelle des salariées, n’avait pas à relever une faute des salariées pour décider que le licenciement avait une cause réelle et sérieuse ;

Que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi […]

La juridiction, la date et le lieu

Cour de cassation, Paris.

Les parties et leurs fonctions

Demanderesses : Mme X et Mme Y, salariées.

Défenderesse : société Follet Boyauderie Blésoise, entreprise.

La qualification des faits

Mme X et Mme Y, salariées de l’entreprise Follet Boyauderie Blésoise, ont été licenciées respectivement le 8 septembre 1997 et le 22 mai 1996, pour insuffisance professionnelle et insuffisance de résultats, elles contestent cette décision et saisissent la juridiction du Conseil de prud’hommes.

Le problème juridique

Dans quelles mesures peut-il y avoir un licenciement pour cause réelle et sérieuse du salarié par son employeur ?

La procédure (le suivi de l’affaire jugée)

Degré Juridiction Partie Partie Décision
1 Conseil de prud’hommes Demandeur Défendeur On ne sait pas (mais on suppose qu’il accorde)
Mme X et Mme Y

Société FBB
2 Cour d’appel Appelant Intimé Infirmatif
Société FBB Mme X et Mme Y

Cour suprême Cour de cassation Demandeur Défendeur Rejette
Mme X et Mme Y

Société FBB

Les arguments et les prétentions des parties

Arguments de Mme X et Mme Y : l’insuffisance des résultats ne peut constituer, en soi, une cause de licenciement.

Prétentions de Mme X et Mme Y : condamnation de leur employeur au paiement d’une somme à titre d’indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Argument de l’entreprise FBB : il y a bien une insuffisance professionnelle et une insuffisance de résultats justifiant un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Prétentions de l’entreprise FBB : ne pas verser de somme à titre d’indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La décision et le motif

La décision est le rejet pour motif que la cour d’appel a constaté d’une part, le caractère réaliste des objectifs fixés par l’employeur et, d’autre part, que le fait de ne pas avoir atteint les objectifs résultait d’une insuffisance professionnelle des salariées ; ainsi la cour d’appel n’avait pas à relever une faute des salariées pour décider que le licenciement avait une cause réelle et sérieuse.

Vocabulaire nécessaire pour une bonne analyse de décision de justice

  • Jugement : décision rendue par une juridiction du premier degré.
  • Arrêt : décision rendue par une Cour (cour d’appel, Cour de cassation).
  • Arrêt confirmatif : arrêt d’une cour d’appel confirmant le jugement d’une juridiction du premier degré.
  • Arrêt infirmatif : arrêt d’une cour d’appel qui rend une décision contraire à celle rendue par une juridiction du premier degré.
  • Arrêt de rejet : arrêt de la Cour de cassation qui rejette le pourvoi et, donc, confirme la décision précédemment rendue.
  • Arrêt de cassation : arrêt de la Cour de cassation qui accepte le pourvoi, casse (= annule) la décision précédemment rendue et renvoie l’affaire devant une juridiction de même nature que celle qui a précédemment statué.
  • Demandeur (demanderesse) : personne qui prend l’initiative du procès.
  • Défendeur (défenderesse) : personne contre laquelle un procès est engagé par le demandeur.

Remarque : devant la cour d’appel, le demandeur est dénommé : « appelant » et le défendeur : « intimé ».

  • Débouter : décider que la demande est mal fondée et rejeter les prétentions du demandeur.
  • Dépens : frais de justice.
  • Juge du fond : juge des premier et deuxième degrés de juridiction (tribunaux, cour d’appel et Cour de cassation).
  • Faire grief : reprocher.
  • Moyen : argument de droit par lequel l’auteur d’un pourvoi en cassation critique la décision contestée. Il peut y avoir plusieurs moyens. Chaque moyen peut lui-même être divisé en branches. (Les branches sont donc les subdivisions d’un moyen.)
  • Assemblée plénière : formation de la Cour de cassation comprenant des représentants des chambres civiles et de la chambre criminelle. Elle intervient obligatoirement lorsqu’un second pourvoi est fondé sur les mêmes moyens que le premier.
  • En l’espèce : dans ce cas précis.

Conclusion

Il peut être difficile à la première lecture de comprendre une décision de justice, d’où l’importance de faire une deuxième relecture. Petite astuce, lire l’arrêt en commençant par la décision rendue, c’est-à-dire lire en commençant par la fin pour ensuite continuer avec le début, est un excellent moyen de mieux comprendre la décision de l’arrêt.