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Bienvenue sur cette dissertation corrigée du sujet de géopolitique ESSEC 2021 ! Cette copie a reçu 20/20 et est présentée ici sans aucune modification. Parcourons-la ensemble avec des commentaires sur le fond et la forme (méthodologie). Ils te seront utiles, quel que soit le sujet à traiter. Retrouve également la copie scannée en PDF.

 

Sujet ESSEC 2021

La maîtrise des espaces communs (maritime, aérien, extra-atmosphérique et numérique), enjeu de puissance par les États depuis 1945

Le 9 mars 2021, la Chine et la Russie annonçaient leur projet de création d’une base internationale de recherche spatiale, en orbite ou sur Terre, afin de lutter contre l’accaparement des territoires et ressources de l’espace extra-atmosphérique par la puissance américaine. Invitant tous les pays qui le souhaitent à participer, la Chine et la Russie cherchent en réalité à coopter les puissances émergentes qui ne participent pas au programme Artémis des États-Unis. Il s’agit bien d’une initiative visant à un meilleur contrôle d’un espace commun encore méconnu, dans un cadre multilatéral.

Accroche : récente, précise, non mainstream et apprise à l’avance, mais directement analysée dans le prisme du sujet. Phrase de conclusion dans l’accroche pour montrer qu’on répond au sujet.

La maîtrise est synonyme de contrôle et de bonne gestion. Maîtriser les espaces communs, c’est exercer une souveraineté sur l’espace, le placer sous influence et domination au détriment des autres États qui désirent potentiellement être des acteurs dans la même zone. Mais la maîtrise est aussi associée à la résistance face aux risques, notamment naturels. Par exemple, la maîtrise du territoire est une explication à la montée en puissance du Japon après 1945. 

Les espaces sont à distinguer des territoires, qui sont des espaces appropriés par les hommes. Ainsi, les espaces deviennent de plus en plus des territoires, avec des phénomènes tels que la territorialisation de la mer. Il existe bien une typologie des espaces communs (maritime, aérien, extra-atmosphérique et numérique), c’est-à-dire en partage mais sur lesquels vont apparaître des conflits de souveraineté.

L’espace maritime est historiquement un espace de projection de puissance selon les théories de Mahan qui développe le concept de « thalassocratie », tandis que l’espace numérique (ou cyberespace) est un nouvel enjeu apparu dans le cadre de la mondialisation (extension de l’économie marchande à l’ensemble de la planète, mettant en relation les territoires et les hommes qui y vivent) et d’un « nouveau capitalisme numérique » (Daniel Cohen et Pierre Royer).

L’enjeu est ce que l’on met en jeu, ce que l’on peut espérer gagner ou perdre, et il se distingue du défi qui concerne davantage des thématiques d’avenir. Les enjeux sont actuels et sont des enjeux de puissance, capacité de faire, faire faire, refuser de faire et empêcher de faire selon Serge Sur, voire capacité de laisser faire.

Les États sont les « dépositaires de la violence légitime » pour Max Weber, et la notion d’État renvoie à celle d’État-nation (État westphalien) ainsi qu’à celle de souveraineté et des frontières géographiques, objet virtuel à fonction de marquage réel, symbolique ou identitaire.

Enfin, 1945 marque la fin de la Seconde Guerre mondiale et ouvre le début de la guerre froide, qui voit l’URSS et les États-Unis s’affronter indirectement pour étendre leur sphère d’influence respective et contrôler le plus de territoires possible. Ainsi, depuis 1945, la tendance pour les États est à la maîtrise des espaces communs pour en tirer profit (économique, influence, appropriation de l’espace, etc.), comme en témoignent les nombreux conflits liés aux zones économiques exclusives (ZEE). La maîtrise des espaces communs peut révéler l’unilatéralisme et l’hégémonie de pays, mais cette maîtrise peut aussi être collective, donnant naissance à des institutions et zones d’intégration régionale.

Analyse du sujet : très longue car l’énoncé du sujet est long, mais il est essentiel d’analyser tous les termes, c’est ici que tu montres ton niveau d’analyse. Définir les termes dans l’ordre et les relier à des thèses et des concepts/mots-clés pour montrer le potentiel de tes connaissances. Il est apprécié de savoir faire des typologies, par exemple ici celle des espaces (un indice pour faire une typologie : lorsque le mot est au pluriel). On peut même définir des concepts qui ne font pas partie de l’énoncé mais qui sont liés au sujet (ici, le pouvoir et les frontières par exemple). « Depuis 1945 » peut susciter des pages entières : il faut donc analyser cette donnée temporelle uniquement dans le cadre du sujet pour pouvoir rester bref. Ne pas connaître les définitions de l’enjeu, État, espace… est fortement handicapant. En revanche, connaître les nuances de base et le montrer (espace vs territoire, enjeu vs défi…) et s’appuyer sur des auteurs est fortement différenciant. Enfin, dans l’analyse des termes, on aurait également pu montrer la différence entre les expressions « par les États » et « pour les États ».

Ainsi, entre coopérations et conflictualités, les espaces communs sont-ils destinés à être toujours partagés ? Depuis 1945, que révèle la géopolitique zonale quant à la mutation de la hiérarchie des puissances ? Les espaces communs sont-ils des territoires gagnants permettant une meilleure intégration dans le système-monde désormais multipolaire ?

Problématique : si tu ne sais pas comment introduire ta problématique, je te conseille le connecteur « ainsi », à condition que la question découle bien des problèmes posés dans l’analyse du sujet. Trois questions pour la problématique, c’est le format le plus adapté pour en dire le maximum sans paraître excessif aux yeux du correcteur.

La maîtrise des espaces communs a toujours été une constante dans la recherche de puissance, bien que des nouveaux espaces soient apparus plus tardivement comme nouveaux nœuds névralgiques (I). Ces dynamiques s’expliquent par des multiples causes qui évoluent au gré du temps (II). Les États sont confrontés à une conflictualité croissante, aux limites de la coopération et aux nouveaux enjeux liés à l’espace, dans une « mêlée mondiale » (Hubert Védrine) (III).

Annonce de plan : être le plus explicite possible, éviter les phrases trop longues et préciser entre parenthèses les numéros de partie rendra la vie facile au correcteur. Glisser des citations d’auteur est un conseil pour te différencier. Il est apprécié et différenciant de réaliser une première partie de perspective historique (partie complète ou a minima la première sous-partie). Ici, pour schématiser, la première partie joue le rôle de constat, la deuxième d’explication, et la troisième dresse le tableau des nouveaux enjeux.

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 Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la maîtrise des espaces communs devient une priorité pour les deux grands (A), et les espaces maritimes et aériens sont désormais au cœur des stratégies de puissance (B). L’espace extra-atmosphérique et l’espace numérique se révèlent être les nouveaux espaces partagés et clés dans les rapports de force internationaux (C).

Amorce partie 1 : préciser la composition de la partie dans l’amorce est fortement conseillé, avec les mêmes techniques que pour l’annonce de plan. Dans cette dissertation, la difficulté est de traiter tous les types d’espaces de façon équilibrée et de choisir entre les traiter séparément ou non. J’ai choisi de traiter le maritime et l’aérien ensemble, puis le spatial et le numérique ensemble. Cette répartition n’est pas fixée pour toute la dissertation.

En 1945, alors que la plupart des territoires européens sont exsangues, une nouvelle ère débute avec la lutte d’influence entre l’URSS et les États-Unis. Chacun des deux grands cherche à obtenir la maîtrise des espaces communs, à commencer par les espaces faisant partie du voisinage proche. Les théories de Rayleigh influencent celles de Alfred T. Mahan qui voit dans les espaces maritimes la clé de la puissance : le contrôle des espaces maritimes est la voie de la puissance pour un État. Mackinder ajoute à cela que la maîtrise du heartland (espace eurasien), le « cœur du monde », est déterminante dans la stratégie de puissance. Enfin, Spykman ajoute au heartland le rimland (bordure continentale de l’Eurasie), témoignant du rôle clé des littoraux.

C’est dans cette logique que se développe pendant la guerre froide la « thalassocratie » américaine (Mahan) et la « thalassopolitique » (Julien Freund) qui consiste à maîtriser les espaces maritimes. Dans ce domaine, les États-Unis deviennent une véritable hégémonie en mettant en place un « Empire des bases » (Chalmers Johnson) sur tous les océans, une présence mondiale avec une force navale surpuissante qui s’inscrit dans la logique du surclassement (overmatch).

La crise de Suez en 1956 révèle l’importance de la maîtrise du canal de Suez et de la région par les deux superpuissances : les détroits et passages stratégiques sont les nœuds stratégiques des espaces communs. Aussi, la maîtrise de l’espace aérien est un vecteur de puissance, comme le démontre parfaitement le pont aérien organisé par les États-Unis lors du blocus de Berlin, mettant en échec l’Union soviétique. L’URSS, elle aussi, cherche à maîtriser les espaces communs, notamment grâce à son emprise sur les pays d’Europe centrale et orientale : l’URSS assure son accès aux espaces maritimes (mer Noire, mer Caspienne…). Ainsi, dès 1945, les espaces communs maritimes et aériens sont au cœur de la stratégie de puissance, principalement pour les deux grands.

Sous-partie 1 : perspective historique (fortement conseillée) expliquant la considération évolutive des espaces maritimes dans la géopolitique. Déroulé de tous les concepts existant sur les espaces maritimes et liens avec le sujet. Phrase de conclusion pour coller au sujet et éviter tout risque de hors-sujet.

Toutefois, les puissances désirantes de maîtriser les espaces communs se multiplient au lendemain de la guerre froide. Les espaces maritimes sont l’objet de projection de puissance et de territorialisation. Les États recherchent à étendre leur zone économique exclusive pour élargir leur souveraineté sur l’espace maritime, notamment la Turquie qui n’a pas reconnu la conférence de Montego Bay. La Turquie veut retrouver une « patrie bleue » en Méditerranée, où ont été découverts des gisements gaziers (Tamar, Léviathan, Aphrodite, Zohr) qui font l’objet de convoitise.

La Chine est un autre nouvel acteur dans la maîtrise des espaces : elle revendique 90 % de la mer de Chine méridionale et orientale, suivant une ligne en neuf traits qu’elle a dessinée, et notamment les îles Spratleys, Paracels et Senkaku. La Chine territorialise la mer en y créant des îlots et des bases (grande muraille de sable) et se projette dans l’espace maritime pour assurer une présence militaire et développer ses routes commerciales. L’Iran, puissance révisionniste qui se sent isolée politiquement et encerclée, se projette désormais sur la mer Caspienne où les ressources abondent (esturgeons) et où elle peut concentrer sa flotte navale.

Au niveau des pays, on observe une littoralisation des activités qui reflète l’importance de la mer et la « maritimité » (Tristan Lecocq), c’est-à-dire la dépendance au fait maritime. En fait, comme l’explique Alain Corbin dans Le Territoire du vide : l’Occident et le désir de rivage, un « désir de rivage » d’abord lié à l’agrément est aujourd’hui le signe que la maîtrise de l’espace maritime proche est essentielle : il s’agit d’avoir une maîtrise des routes maritimes commerciales (90 % du commerce est maritime) qui se dirigent vers les façades maritimes.

Quant à l’espace aérien, il est devenu de plus en plus stratégique avec la mondialisation qui permet le développement des flux et des transports. La maîtrise de ces flux aériens est un enjeu de puissance pour l’État : elle lui permet de développer le tourisme ou au contraire de fermer le pays (fermeture unilatérale des États-Unis lors de la crise de la Covid), mais aussi de peser face aux compagnies aériennes privées. Le cas du Qatar ou des Émirats arabes unis montre que le poids dans l’espace aérien (via des compagnies comme Qatar Airways ou Emirates) est une voie de la puissance. Ainsi, les espaces communs maritimes et aériens sont un enjeu de puissance pour un nombre croissant d’États, rivaux dans cette maîtrise.

Sous-partie 2 : on montre à quel point les espaces maritimes et aériens sont stratégiques en utilisant des concepts (maritimité, territorisalisation, etc.). Le but est d’essayer d’être exhaustif sur les arguments et de respecter la règle « 1 idée, 1 exemple ». La différenciation se fait sur la précision des exemples (chiffres précis, noms de plusieurs gisements, connaître le type de ressources en mer Caspienne, titre de l’œuvre et pas seulement nom de l’auteur, etc.).

L’espace extra-atmosphérique est apparu plus tardivement que l’espace maritime comme un enjeu de puissance. En effet, sa maîtrise nécessite des technologies avancées. Il devient pendant la guerre froide un terrain d’affrontement exclusivement pour les États-Unis et l’URSS, et essentiellement dans une démarche de soft power, même si la dimension politique et économique joue un rôle. Avec le premier homme dans l’espace (Gagarine) pour l’URSS et le premier homme sur la Lune (Armstrong) pour les États-Unis, l’espace extra-atmosphérique apparaît comme une nouvelle frontière (lieu des possibles) et non plus comme l’absolu inconnu.

Cet espace par définition commun a été utilisé pour développer les technologies comme le GPS ou des technologies militaires. Le programme « Guerre des étoiles » déclenché par Reagan suscitait une peur révélatrice de la domination permise par la maîtrise de l’espace extra-atmosphérique. Aujourd’hui, de nombreuses puissances développent des programmes spatiaux et cet espace est de plus en plus un territoire. La course scientifique pour la découverte révèle le rôle de l’espace extra-atmosphérique, riche en ressources et élément possible de soft power. Russie, Chine, États-Unis, Union européenne mais aussi émergents (Inde, Brésil) sont dans cette course à la maîtrise.

L’espace numérique est l’espace commun sans doute le plus récent. Il est cependant devenu à une vitesse fulgurante le nœud névralgique de la géopolitique du monde mondialisé. Thomas Gomart, dans Guerres invisibles : nos prochains défis géopolitiques (2021), montre que le contrôle des données du cloud et l’innovation dans le numérique sont désormais les priorités absolues des grandes puissances pour pouvoir gagner les « guerres non guerrières » qui sont les guerres d’aujourd’hui. Les écoutes de la NSA (National Security Agency) américaine, l’attaque informatique WannaCry en 2017 (un logiciel de rançon) ou celles d’aujourd’hui qui augmentent dans le contexte de crise, témoignent des nouveaux enjeux : la souveraineté numérique, à la fois pour se protéger que pour enquêter, influencer, divulguer (Wikileaks) ou enfin user des données à des fins économiques.

Christopher Walker et Jessica Ludwig parlent d’un « sharp power russe », pouvoir d’influence reposant sur la subversion et la falsification des données et de l’information, aujourd’hui nouveau moyen de puissance pour la Russie. Ainsi, les espaces extra-atmosphérique et numérique doivent être maîtrisés par les États et sont au cœur de ces enjeux de manière croissante depuis 1945.

Sous-partie 3 : à nouveau, une perspective historique pour l’espace extra-atmosphérique. Retenir l’œuvre de Thomas Gomart, récente et utile pour des ouvertures sur le futur.

En mars 2021, la France a déplacé sa flotte maritime militaire vers la mer de Chine méridionale (notamment un porte-avions) afin de patrouiller dans une zone sous tensions et garantir la liberté de navigation. Cet acte peut être vu comme la volonté d’étendre la souveraineté maritime dans la zone indopacifique, alors que les acteurs rivaux sont déjà multiples.

Transition 1 : plutôt que répéter tout ce qui a été dit, utiliser la transition comme fait d’actualité qui projette sur la partie 2. Un conseil : suivre l’actualité !

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De nombreux facteurs expliquent cette volonté de maîtrise des espaces communs, maritimes et aériens tout d’abord (A). Une étude de cas sur la mer Noire explicite ces enjeux contemporains liés à des rivalités (B). La maîtrise de l’espace extra-atmosphérique et numérique permet notamment de développer des capacités asymétriques et s’explique par l’avènement d’un nouveau capitalisme mondialisé numérique (C).

Amorce partie 2 : faire une étude de cas est différenciant. Mais seulement si le correcteur s’aperçoit qu’on en fait une ! C’est pourquoi j’ai explicitement écrit « une étude de cas sur la mer Noire ».

La maîtrise des espaces communs maritimes constitue tout d’abord un enjeu économique. Il s’agit de sécuriser les routes maritimes mondiales et les circuits d’approvisionnement en matières premières. Cette thématique explique le collier de perles chinois dans la zone indopacifique, qui consiste en une multiplication de bases militaires littorales. Il s’agit aussi pour les États de contrôler les ressources naturelles offshore (ou ressources halieutiques, par exemple).

La Chine cherche à étendre sa ZEE en mer de Chine méridionale et orientale pour les ressources offertes dans la zone des îles Spratleys ou Paracels, de même que les pays de Méditerranée orientale (Turquie, Israël, Chypre, Grèce, Égypte) s’affrontent pour l’accaparement des nouveaux gisements gaziers. Plus encore, pour la Chine, la maîtrise des mers est essentielle pour la construction du projet des routes de la soie (projet BRI), qui sont terrestres et maritimes (OBOR) et dont le budget s’élève à 1 000 milliards de dollars. Les enjeux sont aussi sécuritaires. Les forces de l’AFRICOM américaines se positionnent au niveau des côtes somaliennes pour lutter contre la piraterie, comme celles de l’opération Atalante de l’Union européenne et dans le golfe de Guinée.

La maîtrise de l’espace maritime peut ainsi conférer une image de puissance stabilisatrice et de gardien de la paix. D’autre part, cette maîtrise est un instrument évident du soft power des États. Par exemple, la France rayonne dans le monde par ses territoires d’outre-mer qui lui confèrent la seconde ZEE mondiale. Enfin, la maîtrise des mers permet de renforcer le hard power et la dissuasion, ainsi qu’une capacité de nuisance. D’une part, les États-Unis placent la zone indopacifique sous leur domination et rendent la Chine dépendante des Américains pour la sécurité dans la zone. D’autre part, la Chine développe sa présence dans les Caraïbes pour mettre aussi les États-Unis sous pression et agir dans la sphère d’influence de leur adversaire, les Caraïbes étant « l’arrière-cour » (Denise Artaud) des États-Unis. Par exemple, la Chine cherche à peser davantage géopolitiquement dans la région avec le projet du canal du Nicaragua.

Sous-partie 4 : paragraphe très dense pour pouvoir mentionner tous les arguments et exemples dans le temps imparti. Les atouts dans cette partie : exemples très précis et nombreux, concepts et mots-clés, et surtout aucun remplissage.

La mer Noire illustre le phénomène du partage difficile des espaces communs entre puissances concurrentes. Pendant la guerre froide, les États-Unis voulaient avoir un certain contrôle sur la mer Noire grâce à la Turquie alliée et membre de l’OTAN. En effet, la Turquie contrôlait les détroits du Bosphore et des Dardanelles, décidant de l’accès ou non de la Russie aux mers chaudes. La Turquie pouvait en effet bloquer l’accès des navires de guerre russes à la Méditerranée.

Avec « l’occidentalisation » des pays d’Europe centrale et orientale au lendemain de la guerre froide, la Turquie a craint de perdre le privilège d’être l’unique puissance liée aux États-Unis dans la zone. Aujourd’hui, la Turquie se rapproche de plus en plus de Moscou au détriment des États-Unis, qui craignent de ne plus avoir aucune maîtrise de la mer Noire. La Turquie a notamment acheté des missiles S-400 à la Russie et Washington menace de ne plus vendre ses F-35 à la Turquie. On observe donc que la Turquie joue un rôle pivot grâce à sa maîtrise des deux détroits, et que la maîtrise d’un espace commun (mer Noire) à la croisée de plusieurs aires régionales est un enjeu majeur de puissance, car elle permet par exemple un containment d’une puissance rivale.

Sous-partie 5 : cette sous-partie est une étude de cas. Si tu as les connaissances requises, il est très différenciant de réaliser une étude de cas à l’intérieur d’une sous-partie ou d’y consacrer une sous-partie entière. Tout ce que j’ai à dire sur le sujet a été réparti dans le reste de la dissertation, ce qui m’a permis de « libérer » une sous-partie. Dans ce sujet sur les espaces, et plus particulièrement dans la partie sur les tensions, il semble pertinent de s’arrêter sur un espace clivant comme la mer Noire. On en profite également pour placer de la perspective historique ! Un conseil : intègre des études de cas dans tes révisions.

De même, la maîtrise des espaces numérique et extra-atmosphérique est désormais un enjeu de puissance. En effet, concernant l’espace numérique, il s’agit de la maîtrise du monde immatériel. Christian Harbulot distingue le monde matériel du monde immatériel (les données, extraterritorialité du droit…) et explique qu’il est désormais beaucoup plus important de contrôler le monde immatériel. Par exemple, l’espace numérique permet de développer des capacités asymétriques, qui sont partie intégrante des guerres contemporaines et remplacent la guerre conventionnelle. Désormais, on recherche un modèle de « guerres propres », sans aller sur le terrain (« no boots on the ground »), et en utilisant par exemple des drones, si bien que nous sommes dans un monde « post-héroïque » (Luttwak).

L’espace numérique est aussi un lieu de nouvelles menaces (ransomware) contre lesquelles il s’agit de se défendre et à ce titre, il est un enjeu de puissance. Dans l’économie, les nouveaux géants (GAFAM et BHATX) sont des firmes spécialisées dans l’économie numérique. Ainsi, les États doivent maîtriser une souveraineté numérique pour peser. L’espace extra-atmosphérique, quant à lui, est un nouvel espace d’armement et d’accaparement des ressources. Il s’agit aussi pour les États de devenir pionniers d’un monde nouveau, destiné à devenir une partie intégrante du monde dans le futur.

Sous-partie 6 : j’arrive au moment redouté, la fin de mes connaissances sur l’espace extra-atmosphérique, danger identifié au moment de créer mon plan. Pour le cacher, faire des sous-parties qui mélangent les types d’espaces est la meilleure solution car les traiter séparément m’exposerait. Ça tombe bien : c’est justement comme cela qu’est conçue la partie 3 ! Un conseil : évalue tes connaissances réelles au moment du plan.

Frédéric Lasserre et Barthélémy Courmont, dans Géopolitique de la mer de Chine méridionale, eaux troubles en Asie du Sud-Est (2019), montrent que les tensions en mer de Chine méridionale n’ont pas perdu de vigueur et qu’elles s’internationalisent, pouvant conduire à tout moment à une escalade des tensions, voire à une guerre. La maîtrise des espaces communs appelle ainsi à une forme de gouvernance mondiale face aux volontés unilatéralistes.

Transition 2 : plutôt que répéter tout ce qui a été dit, utiliser la transition pour citer une thèse intéressante et analysée pour amener la partie 3.

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La coopération pour une maîtrise collective des espaces communs semble atteindre des limites (A) et la conflictualité reste élevée (B). Dans un monde multipolaire, « navire sans capitaine » (Jean-Marc Siroën), de nouvelles dynamiques se mettent en place (C).

Amorce partie 3 : la dernière sous-partie donne des perspectives pour le futur, basées sur le constat du monde actuel.

La coopération dans les espaces communs semble être une voie d’apaisement et de résolution pour un partage équitable des ressources. Celle-ci semble trouver des formes au niveau régional, avec par exemple le conseil de l’Arctique qui arbitre face aux volontés expansionnistes. Concernant les hydrocarbures, des États s’entendent pour la construction de gazoducs et oléoducs à travers des espaces communs (Nord Stream 1 et 2, de la Russie à l’Allemagne en passant par la Baltique) comme le projet EastMed conclu entre Israël et Chypre pour l’approvisionnement vers l’Europe via la Méditerranée.

Aussi, la mer Caspienne est un véritable espace de coopération entre les cinq puissances riveraines, qui ont signé un accord historique pour en faire un lac et donc obtenir que les puissances extérieures n’interviennent pas. Ces pays s’accordent sur la répartition des ressources et coopèrent militairement (Iran et Russie). Dans le cyberespace, les États-Unis et la Chine ont signé un accord stipulant qu’ils ne s’attaqueraient pas dans cet espace virtuel. Enfin, dans l’espace extra-atmosphérique, les coopérations en recherche scientifique sont nombreuses entre les différents pôles et il existe une station spatiale internationale (ISS).

Sous-partie 7 : montrer comment la coopération s’opère dans chaque type d’espace. Avoir des exemples est essentiel pour éviter le remplissage avec des phrases vagues. Montrer que tu connais le trajet d’un oléoduc ou gazoduc est un atout. Traiter l’Arctique ou l’Antarctique est également original.

Toutefois, les espaces communs restent davantage des centres de conflictualité où les intérêts nationaux priment sur le multilatéralisme. L’attitude russe dans l’océan glacial arctique témoigne du non-respect des règles internationales ou édictées par le conseil de l’Arctique. De même, la Chine pratique le déni d’accès et la politique du fait accompli pour s’approprier les espaces. Les conflits entre puissances voisines s’exacerbent et il n’existe pas d’instance capable de régler ces conflits.

Aussi, la maîtrise des espaces maritimes peut être un enjeu sanitaire et alimentaire (accès à l’eau) et une gouvernance mondiale de l’eau, qui est pourtant un droit fondamental selon l’ONU, n’existe pas malgré un conseil mondial de l’eau à Marseille. Il semble que la distinction entre territoires gagnants et territoires perdants perdure et que les territoires gagnants, bénéficiant de l’accessibilité et des ressources, restent toujours des objets de convoitise sans multilatéralisme.

Sous-partie 8 : montrer les limites de la coopération. Un paragraphe plus court car c’est bientôt la fin du temps imparti. Dans ces situations, tenter de rester pertinent et précis quitte à être plus court. Ne pas faire de phrase pour ne rien dire. Continuer à donner des concepts et mots-clés (déni d’accès, politique du fait accompli…). S’efforcer de garder une trame argumentative (ne pas donner l’impression de faire une liste), avec des connecteurs par exemple.

Dans le contexte de crise sanitaire et de mondialisation numérique, on peut toutefois observer un repli des puissances, et peut-être une volonté de retrouver le contrôle de son propre territoire avant de se projeter sur les espaces communs. On observe un phénomène de barriérisation du monde et de sanctuarisation du monde aujourd’hui, alors que la mondialisation est souvent considérée comme celle qui abolit les frontières (village global de McLuhan).

La maîtrise du territoire intérieur est un défi pour la Chine comme pour les États-Unis qui, par exemple, ne nécessitent plus un contrôle des pays arabes depuis la découverte du pétrole offshore. La CIA, dans Le Monde en 2035 vu par la CIA, imagine un monde d’îlots, séparés les uns des autres avec une croissance devenue atone : dans ce contexte, c’est la maîtrise du territoire national et des espaces proches qui est nécessaire, mais la projection internationale aura faibli. C’est notamment ce qu’on observe avec l’eurasisme dans les théories d’Alexandre Douguine : une volonté d’influence sur l’étranger proche russe. Ainsi, une tendance de repli observée lors de la crise sanitaire peut être une perspective pour le monde futur, avec des enjeux davantage dans la maîtrise des espaces locaux.

Sous-partie 9 : les tendances actuelles et projections possibles sur le futur. Utilise des auteurs et œuvres qui dessinent des futurs possibles (déclinistes, optimistes, etc.). Les scénarios pour 2035 conçus par la CIA sont intéressants d’autant plus qu’on s’approche un peu plus chaque année de cette échéance.

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Les espaces communs sont des objets de convoitise et un enjeu pour les États qui cherchent à les maîtriser pour y trouver des profits multiples. Ces espaces se sont multipliés avec la mondialisation, ainsi que les acteurs désireux de peser dans la répartition du pouvoir et des sphères d’influence. C’est bien dans la géographie que repose la notion de pouvoir encore aujourd’hui, mais désormais probablement dans une géographie numérique, où la hiérarchie des puissances n’est pas la même. Si la coopération reste faible, la conflictualité reste élevée et on peut imaginer, comme Michel Duclos dans Le Monde des nouveaux autoritaires (2019), un monde de conflits permanents d’une nature nouvelle : des conflits dans le cyberespace entre puissances nuisibles et concurrentes.

Conclusion : parfois le moment où il faut écrire sans réfléchir car il reste deux minutes… Si tu n’as pas le temps de réfléchir à une structure, retrace le fil de la dissertation avec une ou deux phrases par grande partie, puis conclus avec un fait d’actualité, une œuvre ou un auteur, si possible de type ouverture sur l’avenir.

 

Nous sommes arrivés au bout ! J’espère que ces conseils te serviront dans tes prochaines dissertations. Enfin, n’hésite pas à jeter un coup d’œil à la mise en page de la copie : sauts de ligne, alinéas, symboles pour séparer les parties, etc.

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