L’avènement de Mohammed Ben Salmane en Arabie Saoudite le 21 juin 2017, désigné comme le prince héritier du Royaume par l’actuel roi Salmane, laisse entrevoir une profonde mutation de l’économie et de la société saoudiennes.

Sur le plan économique, Mohammed Ben Salmane (MBS) a lancé son projet nommé Vision 2030. Ce projet, initié à la suite de la chute du cours du pétrole en 2014, cherche à diversifier l’économie saoudienne et à la sortir de sa dépendance liée à la rente pétrolière, dépendance non viable sur le long terme et qui débouche sur ce qu’on appelle « le mal hollandais » (l’exploitation massive des hydrocarbures entraînant  un déclin de l’industrie manufacturière locale). Une réduction des dépenses publiques ainsi que des privatisations et des ventes sont à l’ordre du jour, comme la vente de 5% d’Aramco, compagnie nationale saoudienne d’hydrocarbures. Cette vente devrait servir à alimenter le fonds souverain saoudien, qui pourrait alors atteindre les 2 000 milliards de dollars.

Cette diversification économique passe par une libéralisation du pays, et par l’accord de nouveaux droits aux citoyennes. Ces dernières sont de plus en plus nombreuses à travailler (23% d’entre elles en 2016 contre seulement 12% en 2010), et jouent donc un rôle croissant dans l’économie saoudienne. Le Royaume Saoudien a ainsi décidé d’autoriser les femmes à conduire dès juin 2018, alors qu’il était l’unique état du monde à leur refuser ce droit.

La libéralisation du Royaume Saoudien s’accélère aussi avec la fin de l’interdiction des cinémas en décembre 2017, et la réapparition des concerts (en mai 2017 eu lieu le concert de Toby Keith, chanteur américain de country, ce qui fut le 1er concert en Arabie Saoudite depuis plus de 30 ans). Tous ces nouveaux droits ont pour but, non seulement de diminuer le « tufush », terme arabe désignant l’ennui et le mal être des jeunes, mais également d’apporter de nouvelles rentrées d’argent et de diversifier l’économie.

Si ces nouveaux droits accordés redorent l’image de l’Arabie Saoudite sur le plan international et attirent la sympathie de l’Occident, ils engendrent de nouvelles tensions sur le plan interne avec les conservateurs religieux, lesquels prônent un wahhabisme rigoureux. Néanmoins, face à la menace iranienne pour la conquête du leadership régional, l’Arabie Saoudite ne peut entièrement se passer d’une religion forte. MBS n’est d’ailleurs pas prêt à baisser la garde face au régime iranien, en témoignent la guerre au Yémen contre les rebelles houthis, qu’il a orchestrée en tant que Ministre de la défense en 2014, et la crise au Qatar, soupçonnée d’avoir des liens avec Téhéran.

Ces mutations ont donc pour but d’améliorer l’image de l’Arabie Saoudite et ainsi, de s’attacher le soutien de l’Occident face à l’Iran, mais également de transformer l’économie saoudienne, en la sortant de sa dépendance pétrolière (70% des recettes de l’Arabie Saoudite proviennent du secteur pétrolier) et en préparant l’après-pétrole.