ENS

Si tu es en prépa littéraire, tu as forcément rencontré dans chaque matière des grands noms du monde de la recherche. Certains d’entre eux sont normaliens (de Paris-Saclay [ex-Cachan], Rennes, Lyon ou Ulm), c’est-à-dire anciens élèves d’une École normale supérieure. Mais en quoi cette école est-elle un moyen privilégié pour faire une carrière dans le monde de la recherche ?

C’est ce que nous t’expliquons dans cet article qui entend démystifier un peu cet établissement. Bonne lecture !

Qu’est-ce qu’une ENS ?

Une École normale supérieure est un établissement d’enseignement supérieur accessible à partir de bac+2, traditionnellement à l’issue d’un concours sanctionnant la fin de deux, voire trois années de classes préparatoires aux grandes écoles A/L, LSH, B/L, D1 et D2 pour les littéraires et économiques, et MP, PT, PC et BCPST pour les scientifiques.

Comme nous te l’expliquions dans cet article portant sur l’engagement décennal, la voie d’entrée sur concours n’est pas la seule. Il est possible de suivre la même scolarité que les élèves fonctionnaires-stagiaires pour le diplôme en quatre ans en candidatant sur dossier sans être payé. De la même manière, il existe le statut d’auditeur, qui permet à tout étudiant disposant d’un niveau bac+3 d’effectuer son master dans une ENS, la plupart du temps pour deux ans.

Intégrer une ENS est très difficile dans la mesure où seulement une centaine de postes sur des milliers de candidats inscrits sont ouverts chaque année. À titre d’exemple, il n’y a qu’une soixantaine de postes à Ulm pour les prépas littéraires A/L et LSH, 35 pour la série langues vivantes de l’ENS de Lyon pour 1 200 candidats, 10 postes en B/L à Lyon, etc.

La vocation première des ENS est de former des professeurs, certifiés (qui ont le Capes), agrégés (pour l’enseignement secondaire et le supérieur) et de permettre à ses étudiants de réaliser une thèse pour embrasser la carrière de chercheur.

L’ENS : « une formation à la recherche par la recherche »

La devise de l’ENS de Lyon est « La formation à la recherche par la recherche ». Autrement dit, toute ta scolarité dans cet établissement, et ce, quel que soit ton statut, est tournée vers la recherche. Cela se traduit par l’obligation de valider un master 2 de recherche pour obtenir le diplôme de l’ENS, nécessitant la rédaction d’un mémoire de recherche.

Il est possible aussi, voire conseillé, d’effectuer des stages dans un laboratoire de recherche. Cela est facilité par l’implantation de nombreux laboratoires du CNRS ou d’autres unités de recherche directement sur le campus des ENS. En effet, une grande partie des professeurs qui font cours dans une ENS sont des enseignants-chercheurs, dont le laboratoire est souvent localisé sur le campus.

L’avantage de cette organisation est que les étudiants ont un contact direct avec le monde de la recherche. Les professeurs sont disponibles pour répondre aux questions que les étudiants se posent sur cette voie et peuvent également observer ce fonctionnement.

L’agrégation

Une autre des caractéristiques des ENS est qu’elle dispose de formations spécifiques préparant à l’agrégation. Il s’agit d’un concours enseignant du second degré, qui permet d’exercer dans le secondaire (surtout au lycée) et dans le supérieur, notamment en classes préparatoires. Il existe une agrégation pour chaque matière qui est enseignée en France, des mathématiques au tahitien, en passant par la musique, la géographie ou les lettres modernes.

Si ce sujet t’intéresse, tu peux consulter ici le nombre de postes qui sont ouverts à l’agrégation pour chaque matière. Ces derniers varient d’une année à l’autre, il s’agit là aussi d’un concours très sélectif.

Même s’il n’est pas obligatoire d’avoir obtenu une agrégation avant de se lancer dans la recherche, du moins dans certaines matières, cela reste un avantage, voire parfois un prérequis.

Par exemple, il est difficile d’obtenir un contrat doctoral en histoire ou en mathématiques si l’on n’a pas obtenu l’agrégation dans ces disciplines au préalable. À l’inverse, en chinois, où il n’y a qu’un ou deux postes les meilleures années (il n’y en a parfois aucun), l’écrasante majorité des doctorants et docteurs en études chinoises ne sont pas agrégés.

Le Capes

Il est possible également de préparer le Capes (Certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré), même si certaines formations proposées à l’ENS n’y préparent pas directement.

Par ailleurs, il est à noter que les normaliens élèves, c’est-à-dire ceux qui sont entrés sur concours, peuvent être dispensés s’ils le souhaitent du passage des écrits du Capes. Ils sont donc dans ce cas admissibles d’office. Leur classement sera déterminé par la moyenne des notes entre le premier et le dernier admissible.

Certains font le choix de passer quand même les écrits, car ils se sentent plus à l’aise à l’écrit qu’à l’oral, et estiment que cela les aide à se préparer. En revanche, dans les matières où le programme du Capes et de l’agrégation est différent, comme en histoire, il peut s’agir d’un avantage.

En effet, cela permet de ne pas passer des épreuves écrites sur un programme qui n’a pas été préparé. Néanmoins, l’obtention du Capes ne permet pas d’enseigner dans le supérieur et les rémunérations sont également moins élevées par rapport à un enseignant agrégé.

Les CDSN

Ce sigle t’est peut-être inconnu : il s’agit des Contrats doctoraux spécifiques normaliens. Il s’agit de contrats doctoraux réservés aux normaliens élèves et étudiants (dans certaines disciplines, il peut également y avoir des postes pour les auditeurs).

Si beaucoup peuvent s’offusquer de ce « privilège », il faut en réalité garder à l’esprit que les normaliens fonctionnaires-stagiaires sont soumis à un engagement décennal. S’ils le rompent, même en travaillant un mois dans le privé ou en étant au chômage une fois dans les six ans qui suivent la fin de la scolarité payée à l’ENS, ils doivent rembourser la totalité de la somme qu’ils ont perçue durant les quatre ans d’études.

Pour éviter cette situation, des contrats doctoraux sont réservés aux normaliens, comme c’est le cas également dans l’ensemble des universités en France. Leur nombre est certes proportionnellement plus élevé, car la vocation première des ENS est la formation des étudiants pour qu’ils deviennent enseignants ou enseignants-chercheurs. Et cela passe nécessairement par l’obtention d’un doctorat.

Enfin, il ne faut pas oublier que de nombreux établissements universitaires ont un mauvais a priori à l’égard des normaliens. En effet, une partie d’entre eux étant payés, ils sont accusés d’être très privilégiés par rapport à des étudiants de l’Université.

De plus, la réputation des classes préparatoires est parfois mauvaise à l’Université. En effet, il s’agit d’un dispositif plus coûteux que celui de l’Université et il est accusé d’être élitiste et d’encourager la reproduction sociale. Pour toutes ces raisons, il est souvent difficile pour les normaliens, du moins en sciences humaines et sociales, d’obtenir un contrat doctoral ailleurs que dans une ENS.

L’ENS, voie unique pour accéder à la recherche ?

Comme tu l’auras compris, les ENS ne sont naturellement pas la seule voie pour accéder au monde de la recherche. L’Université est tout autant, sinon plus, une condition pour y accéder. Ainsi, la majeure partie des formations dispensées dans les ENS le sont en partenariat avec les Universités à proximité.

C’est le cas à Lyon où, pour obtenir sa licence, si l’on a intégré l’ENS après deux ans de prépa (en carré), il faut obligatoirement suivre les cours de L3 de la discipline dans laquelle on est entré à l’ENS.

Par conséquent, les ENS ne sont en aucun cas fermées aux autres établissements universitaires. Au contraire, les deux sont d’une certaine façon complémentaires.

L’ENS ne mène-t-elle qu’à la recherche ?

La réponse est évidemment non, ne serait-ce qu’en raison du nombre limité de places pour les contrats doctoraux et les postes de chercheurs. Il existe d’autres voies que l’enseignement et la recherche comme l’administration, le secteur de la culture, de l’édition, du journalisme, et plus largement le secteur privé pour les normaliens étudiants qui ne sont pas soumis à l’engagement décennal.

Il y a quelque temps, nous avions publié un article sur les débouchés d’une prépa littéraire, que tu peux (re)lire juste ici.

Des exemples de parcours à l’ENS

Parce que toutes ces informations peuvent te paraître abstraites, voici quelques témoignages d’anciens étudiants de prépas littéraires A/L et B/L, qui ont intégré l’ENS ou d’autres écoles à l’issue des concours.

Et ailleurs, après une prépa littéraire

Nous espérons que cet article t’aura permis d’y voir plus clair. Si tu souhaites lire davantage d’articles en lien avec la prépa littéraire, rendez-vous dans notre rubrique dédiée !