L’épreuve de culture générale HEC est une épreuve phare et redoutée du concours BCE. Cette année, le thème général portait sur “Le monde”. Dans cet article, retrouve l’analyse de Major Prépa du sujet de culture générale HEC/EMLyon pour la BCE 2023 !

Cette année comme l’année dernière, Major-Prépa t’accompagne tout au long des concours. Retrouve le Live Inside Concours à 18h30 tous les jours.

Tu peux retrouver le sujet de culture générale HEC/EMLyon ici !

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“L’épreuve du monde” : un sujet doublement adapté au concours

“L’épreuve du monde” : voilà un sujet étonnant ! Typique de l’épreuve HEC/emlyon, il comporte, évidemment, la notion au programme, accolée à un mot qui semble au premier égard bien mystérieux.

Or, on ne pouvait pas proposer un terme aussi parlant que celui-ci pour des candidats à un concours ! En effet, cette épreuve, vous la connaissez depuis deux ans : l’épreuve est d’abord ce qu’on éprouve, c’est-à-dire ce que l’on ressent, ce dont on fait l’expérience et qui constitue un poids. L’épreuve a une connotation négative : elle nous angoisse, nous implique, mais peut aussi permettre de nous surpasser.

Or, il en est de même avec ce sujet ! Il est donc doublement adapté au concours : d’une part, il est typique de cette banque d’épreuves, qui, tous les ans, propose des sujets unissant la notion au programme et un terme original, étonnant (“Dire l’animal” , “Le crépuscule de la vérité”) ; d’autre part, il ne peut que parler à des candidats qui ne savent que trop bien ce qu’est une épreuve.

Il fallait donc ne pas se laisser totalement emporter par la panique, et affronter le terme pour en proposer une analyse qui permette de construire une belle dissertation. Voici la nôtre : évidemment, elle n’est pas exhaustive, pas plus qu’elle n’est la seule possible !

Proposition d’analyse

Une double entente : l’importance du génitif

Avant d’analyser les termes du sujet un à un, il faut d’abord prendre un pas de recul, et écouter véritablement le libellé. Qu’est-ce que “l’épreuve du monde” ? Qu’est-ce que cela peut désigner ? Deux acceptions du libellé doivent alors ressurgir :

  1. L’épreuve du monde est d’abord, évidemment, l’épreuve que l’on fait du monde ;
  2. Mais l’épreuve du monde est également l’épreuve que fait le monde lui-même !

Il ne fallait donc pas se contenter de la première acception, mais entendre le sujet dans ses deux sens possibles. Une fois ceux-ci dégagés, passons à l’analyse des termes.

Les termes du sujet : la particularité de l’épreuve de CG HEC/EMLyon

“Le monde”

Evidemment, on retrouve la notion au programme : celle sur laquelle vous planchez depuis maintenant 7 mois (dont vous avez donc véritablement fait l’épreuve). Rien de surprenant, et rien de discriminant a priori : mais il faudra, en revanche, bien la définir, et l’entendre également dans toutes ses acceptions pour déployer trois parties qui soient vraiment dialectiques, et répondent à une problématique.

Or, la manière dont vous convoquerez et analyserez ces acceptions du concept de monde dépendront évidemment de la manière dont vous analyser la notion d’épreuve : et bien entendu, la difficulté se trouve là.

“L’épreuve”

Premier terme du sujet, il le commande, et doit orienter votre problématique dès la première phrase de votre introduction. C’est la particularité d’HEC/EMLyon que de proposer des sujets de CG aux notions improbables : aussi faut-il alors faire un effort de conceptualisation, et déployer l’épreuve dans tous ses sens.

  1. L’épreuve, à proprement parler, est ce qu’on éprouve : on en fait l’expérience. Elle implique directement le sujet.
  2. Mais elle a aussi un sens négatif : une épreuve est ce dont on souffre (“c’était une épreuve”).
  3. Si elle a un tel sens négatif, c’est parce qu’une troisième acception de la notion d’épreuve consiste à y voir ce qui teste quelque chose : l’épreuve est ce qui juge de la valeur de quelque chose (ou de quelqu’un, en l’occurrence lors d’un examen ou un concours. Voir aussi le sens de l’expression “mettre à l’épreuve”).

Il faut donc unir ces trois sens : l’épreuve, terme d’apparence négative, est une expérience à laquelle quelque chose ou quelqu’un se confronte. De cette confrontation, l’on tire alors une certaine conclusion quant à la valeur de l’objet ou du sujet mis à l’épreuve. Reste donc à comprendre comment le monde pourrait être mis à l’épreuve.

Le monde mis à l’épreuve : jongler avec les conceptions du monde

On voit donc ici qu’une première acception du sujet pouvait être dégagée (l’épreuve du monde est l’épreuve que l’on fait du monde), mais il fallait également entendre le monde comme lui-même mis à l’épreuve. Il faut alors unir ces deux acceptions : l’épreuve du monde est l’expérience douloureuse que le sujet fait du monde, mais le monde ne fait-il pas également l’épreuve du sujet ?

Pour arriver à ces deux questionnements, qui, affinés, formeront une problématique, il faut jouer avec les différentes définitions du monde.

  1. Le monde comme cosmos est mis à l’épreuve lors de la révolution copernicienne par exemple : on se demande si le monde est vraiment une totalité close, un bel ordre (kosmos en grec), ou s’il n’est pas au contraire un chaos, comme chez Nietzsche par exemple. Autrement dit, on met à l’épreuve l’harmonie du monde.
  2. Le monde comme ensemble du réel est mis à l’épreuve par l’avènement du sujet qui s’affirme : une fois le monde mis en doute par le cogito cartésien, l’inconscient freudien ou la phénoménologie, on se demande si le monde est ce sans quoi le sujet n’existe pas, ou si, au contraire, le monde n’existe-t-il pas sans sujet. Autrement dit, l’épreuve du monde pose problème : le sujet fait-il l’épreuve du monde, éprouve-t-il le monde en tant qu’instance existant indépendamment de lui, ou n’est-il pas au contraire ce qui détermine le monde voire son existence même ?

Autrement dit, il faut ici questionner le rôle joué par le sujet dans la détermination de la valeur, voire de l’existence du monde. Je suis celui qui éprouve le monde, ou plutôt, le monde est d’abord ce que j’éprouve, avant d’être un objet à part : toute expérience est expérience du monde. Dès lors, le monde n’est-il pas indépendant du sujet qui l’éprouve ? Est-ce à dire que je suis source du monde – et alors comment échapper au solipcisme ? Et surtout, si je suis source du monde (et l’on retrouve là une seconde acception permettant de problématiser), comment expliquer que l’épreuve que je fais de celui-ci soit parfois douloureuse ?

Revenons donc au sens premier, immédiat, et peut-être le plus parlant pour un préparationnaire : l’épreuve du monde indique que faire l’expérience du monde est une épreuve. Dès lors, je peux tenter de m’en extraire ; je trouve alors que je ne peux le faire, que toute existence est épreuve du monde. S’ensuit alors une revalorisation du monde, qui est donc mis à l’épreuve suite à l’épreuve que l’on en fait : ne dois-je pas apprendre à l’aimer, puisqu’il est ce dans quoi j’évolue nécessairement ?

Voici donc la problématique : l’épreuve du monde est-il ce qui m’en éloigne, ou n’est-elle pas au contraire ce qui donne de la valeur au monde ?

Proposition d’axes directeurs : quelques idées de parties

Une bonne problématique donne directement les deux premières parties d’une dissertation : il faudra alors, vous le savez, dépasser l’opposition qu’elle pose. Voici donc les axes que nous te proposons pour cette problématique, dont tu trouveras une correction rédigée ici.

– On pouvait commencer par illustrer cette épreuve du monde : vous pouvez ici, par exemple, réutiliser les oeuvres et idées du sujet ESSEC “Être hors du monde” . Le monde peut en effet constituer une épreuve : Pascal déplore son caractère infini, le poète au contraire son caractère sensible et donc imparfait. Cette épreuve du monde est donc expérience négative, dont s’ensuite un premier paradoxe : éprouver véritablement le monde donne alors comme l’envie de le quitter. On pouvait ici penser à Nietzsche, les dilettantes, ou encore Madame Bovary.

– Mais une deuxième partie pouvait alors avancer que de cette épreuve du monde, le sujet doit alors se mettre à l’épreuve lui-même : en s’appropriant ce monde dans lequel il ne voyait que chaos, il peut alors re-créer un cosmos, un monde qui lui appartienne, à défaut d’être maîtrisable. Le second paradoxe et thèse de ce II) serait alors le suivant : l’épreuve du monde, plutôt qu’une fuite en avant, doit permettre un mouvement de réflexivité qui mette à l’épreuve le sujet, celui-ci se découvrant alors à la lumière du monde. Faire l’épreuve du monde, c’est donc mettre à l’épreuve le monde, et par le même mouvement, notre monde. Pensez ainsi à Hobbes, Arendt, ou la phénoménologie.

– Plusieurs options alors pour un III) ; nous te proposons celle-ci : dépasser l’opposition entre le monde mis à l’épreuve, et l’épreuve que le sujet fait du monde, pour réunir les deux. Autrement dit, on pouvait ici montrer que l‘épreuve du monde n’est qu’une position du sujet. Sans tomber dans le relativisme ni le solipcisme, on pouvait ainsi dire qu’aborder le monde par le prisme de l’épreuve que l’on en fait, c’est déjà lui assigner une valeur : le penser chaotique, infini et donc indésirable, expérience négative – voire fatale, pensez à Ulysse ou Jankélévitch -, c’est d’ores et déjà le mettre à l’épreuve. C’est donc dire qu’il faut se défaire d’une position dans laquelle le monde est d’abord ce dont on fait l’épreuve, pour tenter de le penser sans valeur : mettre à l’épreuve notre propre conception du monde, ce qui est le propre d’une dissertation de CG.

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