4 Novembre 2016 : l’Accord de Paris sur le climat entre en vigueur.

8 Novembre 2016 : Donald Trump est élu président des Etats Unis.

Surpris, choqués, enragés, soulagés (??) ; la victoire de Trump aux Etats Unis n’a laissé personne indifférent. Entre les déclarations en faveur de l’exclusion de l’ensemble des immigrés, de la construction d’un mur ou encore de sa vision des femmes au travail, vous avez sûrement oublié de vous intéresser à sa position sur le climat.

Aucun souci ! Nous allons voir quelle menace il pourrait représenter pour l’accord de Paris sur le climat.

Avant tout, qu’est-ce que l’accord de Paris sur le climat ?

Le 4 novembre devient un « jour historique pour la planète » quand l’accord de Paris sur le climat, aussi appelé COP21, entre en vigueur moins d’un an après son adoption par 195 pays. Il a été ratifié par 55 états représentant 55% des émissions de gaz à effet de serre. Est-il vraiment différent des autres ? A priori oui. Comme n’a pas manqué de le souligner Laurent Fabius, le ministre français des Affaires Etrangères et le président de la COP21, ce premier accord universel sur le climat est surtout juridiquement contraignant. Pas d’amendes ni de mesure de rétorsion : pour s’assurer que les différents pays l’appliquent de façon efficace, cet accord joue sur la transparence en obligeant les gouvernements à remettre des bilans et des révisions d’objectifs.

En effet, c’est le premier texte élaboré par l’ensemble des pays de la planète affiche plusieurs objectifs :

  • Contenir le réchauffement climatique « bien en dessous de 2°C par rapport aux niveaux préindustriels », en plus de limiter la hausse à 1.5 degrés (article 2).
  • Se désinvestir progressivement des énergies fossiles (notamment en adaptant les flux financiers à de nouveaux types d’énergie)
  • Atteindre la neutralité carbone (article 4) : le « zero emission net » consiste à diminuer les émissions de GES pour qu’elles soient compensées par des puits de carbone, et obtenir ainsi un équilibre à long terme.

Avant de passer aux dangers que pourrait représenter le nouveau président des Etats Unis pour cet accord, il faut déjà en présenter ses critiques :

  • Il est certes contraignant, mais que partiellement, notamment pour les grands émetteurs de CO2 (Etats Unis, Chine, Inde, Brésil, Canada et Russie). C’est surtout le manque d’incitations financières qui est critiqué ici.
  • La tarification carbone est le grand oubli de cette conférence sur le climat : il est très honorable de vouloir contenir la hausse des températures mais cela n’est pas réaliste dans un monde où l’extraction et l’utilisation de carbone est très bon marché.
  • La surpopulation est un facteur négligé : aucune mesure de limitation des naissances n’a été envisagée.

Quelle est la position habituelle de D. Trump sur tout ce qui touche au climat ?

Il n’est pas le seul à remettre en cause l’idée du changement climatique, comme plusieurs des membres du parti Républicain. Il va cependant plus loin, en affirmant que ce concept a été créé par les chinois pour rendre l’industrie américaine moins compétitive, recentrant ainsi le débat sur le manque de dynamisme de l’appareil productif de son pays, un thème récurrent dans ses discours.

Voici quelques unes de ses positions sur des milieux concernés par le réchauffement climatique :

  • Il soutient le recours à la fracturation hydraulique pour exploiter le gaz de schiste puis que cela représente, selon lui, une valeur de 50 000 milliards de $ pour créer des emplois.
  • Il s’oppose à l’énergie éolienne, selon lui une source d’énergie peu fiable
  • Il souhaite relancer l’extraction de charbon, de pétrole et de gaz. Notamment, il entend accepter le contrat pour la construction d’un oléoduc entre le Canada et les Etats Unis que l’administration Obama avait rejeté en 2015.
  • Il souhaite enfin supprimer les réglementations de protection de l’eau.

Cependant, l’ancien sous-secrétaire à l’énergie d’Obama, David Sandalox a souligné un grand nombre d’incohérences dans son discours :

  • Trump dit qu’il va redonner du travail aux gens dans les mines de charbon mais il n’a pas dit comment
  • Il veut développer la fracturation hydraulique mais oublie que c’est justement le principal facteur à la baisse des prix du gaz, ce qui met des mineurs au chômage.

Pourquoi veut-il annuler l’accord de paris et quel pouvoir a-t-il de le faire?

 En mai, Donald Trump s’exprime pour la première fois sur la politique énergétique qu’il mènerait s’il était président, c’est-à-dire, la tournure que va prendre cette politique très prochainement : l’objectif et de déréguler le secteur pour exploiter au maximum les ressources présentes dans le sous-sol américain et rendre les Etats Unis indépendants sur le plan énergétique.

A ce titre, il veut renégocier l’accord de Paris pour se débarrasser de certaines régulations, qui risquent de « tuer l’emploi et le commerce ». Il ajoute aussi que « cet accord donne à des bureaucrates étrangers le contrôle sur la façon et la quantité d’énergie que nous pouvons consommer dans notre pays. Pas question ! ».

Les Etats Unis, un des gros pollueurs, sont responsables de 18% des émissions mondiales de CO2. S’il venait à se soustraire à l’effort collectif, il sera extrêmement difficile, voire impossible, de cantonner le réchauffement climatique sous le seuil de 1.5°C comme le prévoit l’accord.

Mais a-t-il le pouvoir de supprimer l’accord de la COP 21 ?

  • Il peut dénoncer l’accord comme le prévoit l’article 28, mais ce processus serait long. En effet, la dénonciation peut être effectuée à compter de 3 ans après la date d’entrée en vigueur de l’accord de Paris, c’est – à – dire le 4 novembre 2019 et ce n’est qu’en 2020 que la dénonciation prendrait effet (fin du mandat de Donald Trump).
  • Trump peut aussi dénoncer un accord antérieur, comme la Convention –cadre des Nations unies sur les changements climatiques signée en 1992 à Rio.
  • Enfin, il peut aussi choisir de ne pas appliquer le texte que son prédécesseur a entériné par décret, sans le faire voter au Congrès. Le texte est purement incitatif (pour les Etats Unis, il conseille la réduction de 26 à 28% des émissions de GES à l’horizon 2025 par rapport à 2005) mais ne prévoit pas de sanctions si rien n’est mis en œuvre.

Toutefois, ce qui est le plus à craindre est un effet domino : d’autres Etats pourraient alors être tentés de sortir de l’accord, ce qui serait fort regrettable alors que la ratification conjointe du traité par la Chine et les Etats Unis en septembre (42% des émissions de CO2 à eux deux), avait justement entraîné d’autres puissances à accepter l’accord de Paris.