En 2016 le Bureau Maritime international enregistrait une augmentation de 30% des prises d’otages. La piraterie mondiale a changé de visage. Le vol de cargaisons et des produits a diminué au profit des prises d’otage avec demande de rançon. La piraterie maritime a évolué au même titre que l’ensemble des marchés dans le monde. Mais la piraterie mondiale a-t-elle seulement un avenir ? Avant de tirer des conclusions, il est préférable d’identifier le foyer de ces actes et d’identifier l’évolution de ces pratiques ainsi que les mesures qui existent.

L’Afrique et l’Asie demeurent les endroits les plus risqués

Il semblerait que le Golfe de Guinée ait remplacé le Golfe d’Aden pour devenir l’épicentre de la piraterie mondiale. Selon le Bureau maritime international (BMI), l’activité se serait déplacée le long des côtes somaliennes vers celles nigériennes. Un rapport de la fondation One Earth Future rapportait une cinquantaine d’accidents en 2015, contre 94 en 2016. Les deux tiers des attaques ont lieu dans les ports de Bonny, Lagos, Cotonou (Bénin), Lomé (Togo), Tema (Ghana) et Abidjan (Côte d’Ivoire).

Le Golfe de Guinée et l’Océan Indien n’ont cependant pas le monopole des attaques.L’Asie du Sud-Est reste également l’une des zones à plus haut risque. Le détroit de Malacca et les eaux à l’ouest de la Malaisie, le long des côtes de Bornéo et celles entre les Philippines et la Malaisie sont réputés pour le danger qui y règne. C’est d’ailleurs dans cette région que la piraterie que l’on pourrait qualifier de « moderne » s’est développée.

Dans une moindre mesure l’Amérique est également touchée par de tels actes, en particulier au niveau des eaux territoriales du Pérou, de la mer des Caraïbes, et des côtes bordant les Highlands Brésiliens. D’une façon générale ce sont les zones en développement ou en manque de développement qui sont le plus touchées par ce phénomène de façon directe.  En effet les pirates le deviennent souvent dans un contexte d’extrême pauvreté où une telle activité est une importante source de revenus. Mais d’où vient-elle, quelle est son histoire ?

Un phénomène historique qui a muté

 La piraterie est une activité aussi vieille que la navigation elle-même et existait de fait dès l’Antiquité. A cette époque, toutes les civilisations ayant une marine- par exemple la civilisation Mycénienne et la civilisation Phénicienne- l’ont pratiquée. Mais elle n’a connu son apogée que durant le XVIIIe siècle. Dans le domaine du droit international la piraterie est considérée comme le plus ancien exemple d’utilisation du principe de juridiction universelle. Elle était considérée par les états souverains comme étant hosti humanis generis (crimes contre l’humanité). Les articles 100 et 101 de la convention de l’ONU sur le droit de la mer traitent de ce sujet.

La pratique de prise d’otage et de demande de rançon s’est principalement développée en Asie du Sud-Est, plus précisément dans la mer de Sulu, soit dans la zone de chasse de groupes de pirates qui seraient liés au mouvement islamiste Abou Sayyaf. On remarquera que la piraterie maritime moderne cible indifféremment les navires de commerce, de pêche et les bateaux de plaisance !

Les capacités portuaires limitées qui conduisent des centaines de navires à attendre pendant plusieurs jours en rade, facilitent vols et enlèvements dans les régions à risque. Pour des raisons économiques les contrôles policiers et militaires de ces ports restent faibles. Mais les pays concernés ne restent pas passifs. Par exemple, les pays de la région du Golfe de Guinée ont récemment créé un organisme de coopération pour la sécurité maritime. Le réseau de surveillance est essentiellement symbolique à l’heure actuelle car il n’est pas encore bien équipé en navires garde-côtes, mais l’accord permet des échanges d’informations.

Un phénomène qui menace la pérennité mondiale malgré sa relative discrétion dans les médias

La piraterie maritime a certes régressé depuis une dizaine d’année mais elle demeure préoccupante. 80% du commerce mondial passe par voie maritime, et le détroit de Malacca et le Golfe de Guinée qui sont des nœuds clefs dans les routes maritimes mondiales sont particulièrement concernés. Or ce phénomène demeure peu présent à l’esprit du grand public en dehors de l’imaginaire presque fantastique lié à la littérature classique et des productions plus commerciales comme Pirate des Caraïbes.

Toutefois les dirigeants dans le monde ont bien conscience de l’enjeu. En particulier les dirigeants africains. Ils se sont réunis notamment en octobre 2016 en sommet exceptionnel à Lomé dans le but d’«adopter une charte en vue de lutter efficacement contre la piraterie maritime», selon le ministre togolais des Affaires étrangèresBien que non directement concernés, les pays occidentaux participent également à la lutte contre la piraterie. Certaines bases militaires localisées à des points clefs comme Djibouti permettent une certaine dissuasion ou du moins la possibilité d’un certain contrôle. En 2008 l’U.E. avait mené avec un relatif succès l’opération « Atalante ».

Toutefois les dispositifs requis sont extrêmement coûteux et complexes à mettre en place. Pour cette raison les actions sont limitées et ne parviennent souvent pas à endiguer mais simplement limiter la progression de la piraterie. Dans la mesure où une demande de rançon coûte en moyenne 5 millions de dollars et où la piraterie par prise d’otage augmente, on peut supposer qu’il va devenir plus rentable économiquement d’investir davantage pour endiguer les actes de piraterie. Cette dernière devrait donc continuer à régresser.

Les pirates ne sont pas qu’une simple fiction, bien qu’on ne parle que rarement d’eux. En 2013 Captain Phillips, un thriller de Paul Greengrass est sorti dans les salles. Ce film est basé sur une véritable prise d’otage, celle du Maersk Alabama. La situation est un parfait résumé de ce qu’est devenue la piraterie moderne. L’action est ancrée au large de la Somalie et l’acte de piraterie consiste en une prise d’otage. On retiendra donc que :

  • La piraterie moderne consiste en des prises d’otages en vue de demandes de rançons
  • Les principaux foyers de pirateries sont des nœuds cruciaux sur les routes maritimes mondiales et sont principalement localisés sur les côtes africaines et en Asie du Sud-Est.
  • Les pays qu’ils soient directement ou indirectement concernés tentent de lutter contre ce phénomène mais cette lutte est coûteuse