art

En panne d’inspiration pour tes accroches ou tes ouvertures en essai et en colle d’anglais ? Cet article te propose de découvrir 10 œuvres d’artistes anglophones que tu pourras exploiter dans tes travaux.

I. Royaume-Uni

1. John Constable, The Hay Wain, 1821

John Constable, The Hay Wain, 1821

John Constable est l’un des peintres romantiques britanniques les plus connus. Le romantisme est un mouvement littéraire et pictural au sein duquel l’artiste joue le rôle de médiateur entre l’homme et la nature à une période où les débuts de l’industrialisation transforment les espaces naturels. Il n’est donc pas surprenant que la majorité des œuvres de John Constable représentent des paysages, à l’instar de sa toile The Hay Wain.

En outre, l’artiste romantique est solitaire et exprime sa subjectivité et ses émotions au travers de son art. L’œuvre de John Constable est en effet emplie d’émotions, mais ces dernières sont attribuées à la nature. Le ciel mouvementé de The Hay Wain évoque la mélancolie, voire la nostalgie pour une Angleterre pastorale. Cette hypothèse est renforcée par l’orientation politique de l’artiste qui était un fervent conservateur défendant les traditions rurales.

À l’arrière-plan, à droite, survient une fusion entre l’homme et la nature. Les points blancs représentant des fermiers anamorphiques en train de récolter leur blé. En outre, la distance qui sépare ces travailleurs de la chaumière à gauche du tableau constitue une représentation métaphorique des divisions de classes entre propriétaires et employés agricoles à l’époque de John Constable. Les fermiers aux moyens modestes sont à peine visibles sur le tableau, faisant ainsi écho aux tentatives de marginalisation et d’invisibilisation des pauvres au XIXᵉ siècle. Cette disparition picturale des travailleurs agricoles reflète également les mouvements de population qui ont eu lieu après les débuts de l’industrialisation. Les développements technologiques ont réduit le nombre de travailleurs agricoles nécessaires au maintien des zones rurales tandis que de nouvelles opportunités d’emploi se sont présentées dans les villes, entraînant un exode rural important.

2. J. M. W. Turner, Rain, Steam and Speed, 1844

J. M. W. Turner, Rain, Steam and Speed, 1844

Comme Constable, J. M. W. Turner est également associé au romantisme, mais certains historiens de l’art affirment qu’il préfigure également l’impressionnisme. En effet, dans Rain, Steam and Speed, un travail sur la couleur et la luminosité est effectué (n’hésite pas à jeter un œil à notre vocabulaire sur les couleurs pour réussir à décrire un tableau avec précision). Dans ses œuvres, Turner représente l’aspect anamorphique de l’industrialisation. Sur cette toile par exemple, l’échelle de représentation du train est bien plus importante que celle des petites navigations traditionnelles en bas à gauche, donnant un côté monstrueux à ce train. Il s’agit de montrer à quel point le développement technologique écrase l’homme et la nature tout en le déshumanisant (comme le confirment les formes corporelles peu définies dans ses toiles).

Analyser le symbolisme des couleurs dans les œuvres du peintre peut également s’avérer intéressant. Ici, le train est sombre, presque noir, une couleur associée à la stérilité et à la mort. Ce train apparaît comme un surgissement, les coups de pinceau se superposent (notons à ce sujet que la peinture à l’huile se travaille directement sur la toile, permettant cet effet de « flou »). Il est difficile de distinguer le sens dans lequel se dirige le train aussi bien que sa provenance et sa destination. L’œuvre de Turner est ainsi la représentation spéculaire de l’angoisse d’un pays face au progrès industriel exponentiel du XIXᵉ siècle.

3. Paul Nash, We Are Making a New World, 1918

Paul Nash, We Are Making a New World, 1918

Paul Nash était un peintre de la Première Guerre mondiale. Ses œuvres sont souvent des scènes de guerre où l’absence prédomine, comme dans We Are Making a New World. Cette absence fait bien évidemment référence aux soldats morts au combat, tandis que cette dimension thanatophore est également mise en avant par le parallèle entre ce paysage et un cimetière militaire, les arbres représentant métaphoriquement les croix des tombes. Peut-être Paul Nash a-t-il voulu représenter la difficile gestion des corps lors de la Grande Guerre. Certains furent laissés longtemps dans les tranchées avant d’être enterrés tandis que d’autres, ayant par exemple disparu dans une explosion, ne pouvaient tout simplement pas l’être.

Le sol vallonné est bien évidemment une référence aux tranchées. Sa dimension boueuse rappelant également « le pied des tranchées » (trench foot, en anglais : à force de toujours marcher dans la boue, le froid et l’humidité, les soldats attrapaient des infections aux pieds pouvant aller jusqu’à la nécrose). Enfin, la stérilité est évoquée dans ce tableau au moyen du sentiment d’absence, mais également à la vue des arbres morts, qui ne sont donc plus fertiles. Le premier plan est donc globalement pessimiste. Néanmoins, à l’arrière-plan, le soleil se lève, annonçant un renouveau qui fait écho au titre : We Are Making a New World. Le message de cette œuvre est donc intrinsèquement ambivalent, évoquant à la fois la mort et l’espoir.

4. Francis Bacon, Three Studies for Figures at the Base of a Crucifixion, 1944

Francis Bacon, Three Studies for Figures at the Base of a Crucifixion, 1944

Francis Bacon est un artiste britannique relativement singulier qui s’inscrit dans l’expressionnisme, bien que ses œuvres prennent également des tons surréalistes et parfois cubistes. La forme de Three Studies for Figures at the Base of a Crucifixion, nommément le triptyque, est inspirée des œuvres chrétiennes. De nombreuses œuvres à trois panneaux (rappelant la trinité) représentent la crucifixion de Jésus souvent entouré de Marie et Saint-Jean (un panneau par personnage). Or, chez Francis Bacon, cet idéal religieux est subverti et le sacré devient sacrilège avec des formes hybrides mi-humaines, mi-animales. Ces formes biomorphiques font référence à l’animalité de la Seconde Guerre mondiale ainsi qu’aux corps métamorphosés par le développement du nucléaire.

L’œuvre est également injectée de paganisme. Les trois personnages de Bacon représentant les Furies, des déesses grecques qui punissaient les erreurs des hommes. Enfin, les bouches ouvertes qui crient sont inspirées de la propagande nazie, à l’instar de cette image de Goebbels. Enfin, les couleurs utilisées par Bacon sont associées à la souffrance. Qu’il s’agisse du noir symbolisant la mort au rouge faisant évidemment écho au sang. L’objectif de Bacon était ainsi de dépeindre la violence et la monstruosité de la guerre.

5. Banksy, Girl with Balloon, 2002

Banksy, Girl with Balloon, 2002

On ne présente plus Banksy, cet artiste britannique anonyme qui produit de nombreuses œuvres de street art. Girl with Balloon, graffiti réalisé au moyen de pochoirs, est l’une des productions les plus connues de l’artiste. On y voit une petite fille aux cheveux volants qui vient de laisser échapper son ballon en forme de cœur. Néanmoins, l’interprétation de cette œuvre est ouverte et certains considèrent que l’enfant est sur le point d’attraper le ballon. La citation qui accompagnait le graffiti était « There is always hope » et l’envolée de ce ballon a été analysée comme le symbole de la perte d’innocence des enfants, bien que ce cœur puisse aussi représenter l’espoir que les enfants représentent.

Les œuvres de Banksy sont ainsi cryptées et polysémiques, laissant au spectateur une liberté interprétative, bien que d’autres productions telles que Monkey Queen indiquent un message politique et un engagement explicite portant à débat. Dans les deux cas, l’objectif de ses œuvres est de faire réagir et d’inclure l’art à la vie de tous les jours en le mettant à disposition de tous dans la rue afin d’abolir l’élitisme lié à l’art.

II. États-Unis

1. Emanuel Leutze, Washington Crossing the Delaware, 1851

Emanuel Leutze, Washington Crossing the Delaware, 1851

Cette toile incontournable fait référence à un moment historique de la Révolution américaine. Le tableau aux dimensions monumentales est tout d’abord une représentation patriotique des États-Unis. En décembre 1776, Washington traverse le Delaware avant d’attaquer par surprise les mercenaires allemands envoyés par les Britanniques (appelés les « Hessois ») lors de la bataille de Trenton dans le New Jersey. Cet affrontement contribue à la victoire américaine à la fin de la guerre d’Indépendance. Sur ce tableau, c’est bien évidemment Washington qui est mis en avant et sacralisé par la touche de lumière qui lui parvient (ce type de détails est en effet commun dans les toiles religieuses).

Les autres personnages présents à bord de l’embarcation témoignent de la diversité de population dans les colonies du XVIᵉ siècle. Un homme d’origine africaine se trouve à l’avant du bateau (notons à ce propos que Washington a produit plusieurs écrits protestant contre l’esclavage), tandis qu’un Écossais (que l’on reconnaît grâce à son bonnet traditionnel) est par exemple à l’arrière.

De nombreux critiques d’art ont noté certains anachronismes sur la toile, notamment le drapeau qui correspond à celui établi en 1777 (or, la traversée a lieu en 1776). En outre, les couleurs et le traitement de la lumière donnent l’impression que la traversée a lieu à l’aube, mais elle a en réalité eu lieu la nuit. Enfin, certains historiens de l’art rapprochent cette œuvre de la mythologie grecque, notamment de la traversée du Styx (le fleuve des Enfers), associant ainsi le message patriotique de la toile à un symbolisme renvoyant à la bravoure et à l’héroïsme.

2. Grant Wood, American Gothic, 1930

Grant Wood, American Gothic, 1930

Grant Wood était un peintre réaliste de la première moitié du XXᵉ siècle. Son œuvre se concentre sur la vie rurale et agricole du Midwest, comme l’illustre American Gothic. L’aspect peu accueillant et austère des personnages montre qu’il ne s’agit pas de produire une image artificielle, esthétisée ou adoucie de la réalité, mais bien de représenter ses contraintes, notamment celles liées à la Grande Dépression qui commence avec le krach boursier de 1929. Les couleurs ternes du tableau évoquent la stérilité, aussi bien des récoltes que des relations humaines. La Grande Dépression divise en effet les Américains, comme le symbolise la fourche qui crée une séparation entre l’homme et la femme.

Leur corps fin et les joues creusées de l’homme peuvent également faire référence à l’absence de nourriture dans les années 1930. Il coûtait en effet moins cher aux paysans de laisser pourrir leurs cultures plutôt que de les ramasser pour les vendre. La tenue des personnages est également intrigante. Si la femme semble a priori porter des vêtements ordinaires, son camée suggère qu’elle est apprêtée tandis que l’homme porte une veste noire par-dessus sa salopette de fermier. S’agit-il d’un signe suggérant un abandon de la vie agricole ? Ces détails vestimentaires attribuent une dimension d’autant plus ambiguë à l’œuvre.

Enfin, le titre du tableau s’explique par le style architectural de l’habitation qui se trouve à l’arrière-plan. Les fenêtres en ogive (comme celle du premier étage de la maison dépeinte) sont caractéristiques du style gothique. Mais celle du tableau est mystérieuse. Son rideau est fermé, suggérant le secret. Ces éléments cachés ou intrigants peuvent tous être interprétés comme une représentation de l’incertitude qui dominait au début de la Grande Dépression.

3. Edward Hopper, Nighthawks, 1942

Edward Hopper, Nighthawks, 1942

Hopper s’est inspiré de ses voyages en Europe, notamment à Paris. Il est également influencé par le développement du cinéma des années 1930-1940, comme l’illustre Nighthawks, qui ressemble à une vignette de film. Le tableau sous-tend une immobilité étrange renforcée par des lignes horizontales, comme si le temps s’était arrêté. Cette stagnation crée du suspense dans la toile, comme dans les films d’époque.

Les visages des personnages au nez aquilin rappellent le titre de l’œuvre, qui se traduit par « Oiseaux de nuit ». Le thème de l’enfermement est également évoqué, puisque l’on remarque que le bar est dépourvu de sortie (elle est certainement hors cadre). Une mise en abyme de cette séquestration peut d’ailleurs être observée. Si les trois consommateurs sont prisonniers du bar, le barman, lui, est coincé derrière son comptoir qui n’a pas de sortie apparente. À l’inverse, l’extérieur, cet espace non clos, est vide.

L’une des interprétations possibles serait celle d’une critique du système capitaliste qui cloisonne les Américains puisque deux références à l’argent apparaissent sur ce tableau. La femme semble tenir une liasse dans ses mains, tandis que la boutique en arrière-plan laisse entrevoir une caisse enregistreuse.

La lumière est importante, comme le suggère l’effet de clair-obscur réalisé par Hopper. Elle apporte et illustre des informations historiques. Les néons (semblables à ceux produisant la lumière émanant du dinner sur le tableau) ont commencé à être utilisés dans les bars et restaurants américains dans les années 1940. Peut-être cette lumière fait aussi référence aux nombreuses coupures de courant qui sont survenues à New York au début des années 1940. Ainsi, la toile évoque la solitude et l’aliénation qui sont au cœur de la vie urbaine américaine en 1942. Un an seulement après l’attaque de Pearl Harbor (1941), qui a sans doute contribué à cette anxiété générale.

4. Jackson Pollock, Convergence, 1951

Jackson Pollock, Convergence, 1951

Jackson Pollock est un peintre abstrait. L’abstraction fait étymologiquement référence à l’idée d’extraction ou de séparation. Il s’agit de détacher l’art de ses objets de représentation. Ainsi, au premier abord, peu d’objets, thèmes ou sujets sont identifiables dans les toiles de Pollock, qui utilisait beaucoup la technique du dripping (qui correspond au fait de laisser des gouttes de peinture couler sur la toile). Une manière de peindre qui ajoute une dimension de hasard au processus artistique.

Puisque Convergence a été peinte durant la guerre froide, de nombreux critiques d’art considèrent qu’elle défend la liberté d’expression, valeur américaine fondamentale (la liberté est définie comme un droit inaliénable dans la Constitution des États-Unis écrite après la guerre d’Indépendance). Jackson Pollock s’oppose ainsi aux normes sociales ainsi qu’aux normes artistiques dans cette toile évoquant la rébellion.

En outre, après les deux guerres mondiales, de nombreux penseurs à l’instar de Walter Benjamin ont identifié une rupture dans la communication humaine (de nombreux vétérans souffrant d’un syndrome post-traumatique étaient devenus muets, des familles avaient été déchirées et la peur du communisme réduisait au silence…). L’art a donc dû trouver de nouveaux moyens d’expression en expérimentant comme Pollock l’a fait.

5. Norman Rockwell, The Problem We All Live With, 1964

Norman Rockwell, The Problem We All Live With, 1964

Norman Rockwell est un précurseur de l’hyperréalisme américain. Il s’agit d’un réalisme poussé à son extrême ressemblant presque à une photographie (c’est pour cette raison que l’on parle aussi de photoréalisme). Il créait d’ailleurs certaines de ses œuvres comme The Problem We All Live With à partir de clichés. En plus de sa dimension artistique, cette toile a un aspect historique et constitue un exemple d’art engagé.

The Problem We All Live With représente Ruby Bridges, la première petite fille noire qui a eu accès à une école réservée aux Blancs pendant la période des Jim Crow Laws qui ségréguaient l’espace public. Cette ségrégation faisait suite à l’arrêt Plessy v. Ferguson (1896) où la Cour suprême avait déclaré que la doctrine « Separated but Equal » était légale.

L’œuvre représente ainsi cette petite fille noire qui devait être escortée par des gardes pour aller à l’école à La Nouvelle-Orléans, sans quoi elle se faisait insulter (comme l’illustre l’insulte « nigger » en arrière-plan) ou attaquer par des suprémacistes blancs (« KKK » apparaît sur le mur à gauche). La toile met donc en avant la lutte pour les droits civiques aux États-Unis. Norman Rockwell nous force à observer cette scène, ce « problème avec lequel nous vivons tous ». L’œuvre demande donc implicitement au spectateur comment il réagirait face à cette violence latente.

Tu es maintenant incollable sur l’art britannique et américain ! Si tu veux citer d’autres œuvres que celles mentionnées dans cet article, n’oublie pas d’aller vérifier leur traduction en anglais, et si tu souhaites plus d’informations sur la culture anglophone, rends-toi sur cet article !