Nous parlons régulièrement de lui, nous vous conseillons de ficher son manuel, mais qui est réellement Emmanuel Combe ?

Le célèbre concepteur de l’épreuve d’ESH ESCP/SKEMA nous a accordé une interview exclusive. Il a eu la gentillesse de répondre à nos sollicitations et on lui redit un grand merci pour cela. Evidemment nous pouvons insister sur l’apprentissage du cours qui reste LA condition principale pour la réussite de cette épreuve, mais il est intéressant de savoir ce que le concepteur de l’épreuve en question peut attendre de vous.

En espérant que ces conseils vous aident, on vous souhaite une bonne lecture !

0. La version audio pour les flemmards

1.    Présentez nous votre parcours académique et professionnel

Après Normale Sup en lettres, un doctorat en sciences économiques, j’ai passé l’agrégation de sciences sociales puis l’agrégation du supérieur, ce qui m’a conduit à devenir professeur d’université en 1998. J’enseigne l’économie à l’Université de Paris 1 Panthéon Sorbonne et comme professeur affilié à l’ESCP Europe, où je préside également le jury d’ESH  ; cette tâche consiste notamment à confectionner chaque année le sujet d’écrit du concours d’entrée  et à encadrer une équipe d’examinateurs, à l’écrit et l’oral.

Depuis 2007, je me suis mis en disponibilité de l’Université : d’abord pour faire du cabinet ministériel pendant 5 ans, avant d’être nommé Vice Président de l’Autorité de la concurrence en 2012. Si cette fonction m’occupe à plein temps, je continue toutefois à enseigner à l’ESCP Europe et à m’occuper de l’épreuve d’ESH du concours d’entrée. Je continue également à publier et écrire sur différents sujets comme la concurrence, la compétitivité, la lutte contre la criminalité.

Je tiens une chronique hebdomadaire dans le journal L’Opinion. Les étudiants peuvent d’ailleurs retrouver toutes mes publications à l’adresse suivante : http://www.emmanuelcombe.fr

2.    En quoi consiste votre travail à l’Autorité de la concurrence ?

L’autorité de la concurrence est en quelque sorte le gendarme du marché en matière de concurrence. Notre fonction consiste à détecter et sanctionner les ententes anti concurrentielles, les abus de position dominante. En 2015, année exceptionnelle il est vrai, nous avons ainsi infligé pour plus de 1,2 milliards d’euros d’amendes. Nous sommes également compétents pour autoriser les projets de mariage entre entreprises : par exemple , lorsque la FNAC a racheté Darty, l’opération a été analysée par l’autorité de la concurrence, qui a d’ailleurs exigé la cession de certains magasins à des concurrents sur Paris. Enfin, l’Autorité de la concurrence rend des avis sur des sujets généraux de concurrence : par exemple, on ne sait pas toujours que la réforme des « bus Macron » est née à la suite d’un avis de l’autorité de la concurrence, appelant à une plus grande ouverture du marché. La réforme du notariat, l’essor de la vente en ligne de médicaments sur Internet, la bataille des VTC et des taxis : tous ces sujets qui touchent à la vie quotidienne des Français ont donné lieu à des avis de notre institution.

3.    Sans transition, pour vous, qu’est ce qu’une bonne copie d’ESH ?

Une bonne copie est celle qui est capable d’utiliser les mécanismes économiques pour les mobiliser dans un raisonnement  et de les illustrer avec des exemples concrets ; trop souvent les candidats se contentent d’affirmer ou de se réfugier derrière des auteurs sans que l’on sache vraiment s’ils ont bien compris les raisonnements propres à l’économie ; de même, il est nécessaire d’illustrer sa démonstration par des références historiques ou d’actualité : l’économie n’est pas une discipline théorique mais ancrée dans le réel.

Bref, une bonne copie est celle qui démontre plutôt qu’elle n’affirme.

4.    Est-ce réellement utile de suivre l’actualité économique régulièrement ? 

Oui il me parait utile de suivre l’actualité économique, notamment pour  bien se préparer à l’oral.  Il est attendu des candidats qu’ils connaissent des ordres de grandeur réalistes sur les données économiques comme le chômage, la croissance, la population,  etc. Quoi de mieux que de consulter régulièrement un quotidien pour se tenir au courant des tendances ? Certes, le programme n’est pas centré sur l’actualité mais sur des questions de fond qui sont structurantes ; pour autant, il me parait intéressant,  l’économie étant une discipline ancrée dans le réel, de chercher à prolonger les concepts, les raisonnements par des applications empruntées tant à l’histoire économique qu’à l’actualité.

5.    Qu’est ce qui peut différencier une bonne copie (13-14/20) d’une excellente copie (17/20 et plus) ? 

L’excellente copie me semble présenter trois caractéristiques principales. Tout d’abord, le candidat a cherché à répondre au sujet et ne s’est pas contenter de réciter, même parfaitement, un cours. Il y a donc un véritable effort de construction d’un raisonnement personnel sur la base de connaissances et un refus d’instrumentaliser le sujet. Cela suppose donc une petite prise de risque : répondre à une question, à un sujet, c’est s’exposer un peu. Ensuite, l’excellence copie ne se contente pas de donner des opinions ou d’affirmer : elle démontre tout ce qu’elle avance, sans s’abriter derrière des auteurs, fussent ils connus. Citer un auteur ne dispense pas d’expliciter le raisonnement qu’il a tenu, ses hypothèses et ses limites. Enfin, l’excellente copie définit les termes du sujet et expose les différents angles possibles pour le traiter, quitte à faire ensuite des choix. Par exemple, dans le sujet de la session 2016, trop de candidats ont fait l’impasse dès le début de leur copie sur une discussion du terme de « mondialisation », en le réduisant au seul commerce international : la mondialisation est en réalité une notion très large, qui inclut aussi les mouvements de facteurs de production mais aussi les mouvements de capitaux. De même, le terme de « performances » méritait que le candidat s’y arrête, en explicitant les différentes acceptations que ce terme pouvait revêtir.

6.    Avez vous un petit secret le jour J pour se démarquer ? 

Prendre le temps de lire et relire le sujet attentivement ; chaque terme  du sujet a un ou plusieurs sens qui doivent être explicités. Trop de candidats cherchent à se raccrocher immédiatement à une partie de leur cours ou du programme, ce qui les conduit à lister des connaissances qui, sans être hors sujet, les font s’éloigner ou tourner autour de la problématique posée, sans vraiment chercher à se battre avec le sujet. Il faut donc commencer par réfléchir par soi même, en se demandant pourquoi la question posée est importante en économie, quelles réponses sont possibles.

Bref, il faut construire un raisonnement personnel, en mobilisant seulement dans un second temps des références et mécanismes.