Ce chapitre, au même titre que celui sur la croissance, est un incontournable du programme d’ECE. Il est donc nécessaire d’être très au point sur les définitions, les auteurs incontournables, ainsi que sur les problématiques liées à cette notion de crise.

La crise se définit comme étant un point particulier dans un cycle : moment où une phase de dépression succède à une phase de croissance. Plus généralement, la crise désigne la période de stagnation durable de l’économie. Selon Jean-Baptiste Say, les crises sont « des états de maladies, des situations nécessairement passagères, car si elles étaient durables, le corps social cesserait d’exister ».

À partir du XIXe siècle, la récurrence des crises oblige les auteurs à penser la crise, et Marx sera l’un des premiers. La crise est un événement anormal qui contraste avec la continuité de la croissance.

Dans cette première partie, nous allons aborder les grandes crises qui ont frappé l’économie mondiale depuis le XIXe siècle.

1) Les crises du XIXe siècle

Au cours du XIXe siècle, trois grands types de crises se succèdent :

  • Les crises d’Ancien Régime dues à de mauvaises récoltes (ex. : disette de 1816)
  • Les crises mixtes en raison du développement conjoint de l’industrie et de l’agriculture (ex. : crise de 1847-1848 en France)
  • Les crises industrielles à partir de la seconde moitié du siècle

Les crises sont souvent financières et bancaires.

En 1873, commence une période appelée la « Grande Dépression », qui se termine en 1896. La crise est marquée par l’éclatement des bulles spéculatives et est en partie liée à la saturation d’équipements ferroviaires en Europe occidentale. Elle commence, comme on vient de le dire, par des krachs boursiers en Allemagne et en Autriche, puis s’étend au reste de l’Europe. Cette crise spéculative se traduit par la faillite d’un certain nombre de banques, entraînant la raréfaction des crédits, la hausse des taux d’intérêt, la faillite des entreprises et finalement la surproduction industrielle. De plus, on assiste à une chute des prix agricoles, notamment en raison de la mise en concurrence de l’agriculture européenne avec l’agriculture des pays neufs (bateaux frigorifiques).

2) Les deux crises majeures du XXe siècle

– La crise de 1929 : cette crise modifie durablement l’ordre social, économique et politique de l’ensemble de la planète, car rares sont les pays où des groupes sociaux ont été épargnés par la crise. Elle est la crise majeure de l’histoire du capitalisme. Il s’agit à la fois d’une crise boursière (avec le krach boursier du 24 octobre 1929), d’une crise bancaire (plus de 5 000 banques font faillite aux États-Unis) et finalement d’une crise économique mondiale. Les conséquences sont désastreuses : on ne dénombre pas moins de 13 millions de chômeurs aux États-Unis. Elle est également marquée par un fort repli protectionniste, une forte déflation, une « guerre » des dévaluations entre les différents pays, des programmes ambitieux mis en place (notamment le New Deal de Roosevelt) et enfin une montée des extrêmes en Europe.

– Les chocs pétroliers : la crise est de nature radicalement différente par rapport à celle de 1929. La croissance ne fait que ralentir (elle avait chuté dans les années 1930) : on observe seulement un ralentissement de la croissance. Sauf exception de récession, on est globalement largement au-dessus de 0 %. Il y a juste une rupture brutale et durable dans un contexte de forte croissance antérieure. Elle est inflationniste : alors que depuis les débuts de la révolution industrielle toutes les crises capitalistes étaient des crises de surproduction, donc déflationnistes, à partir de 1973, l’inflation devient un symptôme de la crise. Elle provient d’un choc d’offre et non plus de demande.

Un virage cette fois-ci libéral s’opère avec notamment les arrivées au pouvoir de Reagan aux États-Unis en 1981 et de Margaret Thatcher en Grande-Bretagne en 1979. Paradoxalement, on assiste à une hausse du commerce international (qui avait chuté de 7,5 % en 1975, mais augmenté de 12 % en 1976, dépassant ainsi le niveau de 1974).

Comment expliquer cette crise ?

– Les deux chocs pétroliers de 1973 et 1979.

L’épuisement du modèle fordiste (saturation de la consommation de masse et baisse de la rentabilité).

3) De nombreuses crises à la fin du XXe siècle

La fin du XXe siècle est marquée par de nombreuses crises financières, parmi lesquelles :

– La crise mexicaine de 1994

– La crise asiatique de 1997

– La crise argentine de 2000-2001

– La crise de la bulle Internet au début des années 2000

Pour rappel, il ne faut pas expliquer toutes les crises dans une copie, un seul exemple bien détaillé suffit. Prenons donc l’exemple de la crise mexicaine de 1994 : après la crise d’endettement du début des années 1980, le pays a fait de gros efforts et a mis en place un mécanisme de « parité glissante » (crawling peg) consistant à adopter un taux fixe du peso vis-à-vis du dollar, modifié régulièrement afin de compenser les écarts d’inflation. À partir de 1988, les réformes structurelles sont approfondies grâce à une finance internationale (l’apport des capitaux étrangers double de 1990 à 1993) constituée en majorité d’investissements de portefeuille. En 1994, une série d’événements va entraîner la crise : la révolte des Indiens du Chiapas au sud du Mexique, la hausse des taux d’intérêt américains qui attirent les capitaux flottants aux USA et la dévaluation du peso en décembre 1994 qui va accroître la fuite des capitaux. La crise va alors devenir systémique en s’étendant à tous les domaines de l’activité économique et à d’autres économies.

4) La crise des subprimes

La crise des subprimes est une crise financière qui a touché le secteur des prêts hypothécaires à risque aux États-Unis à partir de juillet 2007. Avec la crise financière et bancaire de l’automne 2008, ces deux phénomènes inaugurent la crise financière mondiale de 2007-2008.

Pour faire simple, la crise des subprimes est une crise liée à l’effondrement du marché immobilier américain, marché entretenu par l’octroi massif de crédits aux ménages. Or, ces crédits sont devenus de véritables produits financiers et ainsi, lorsque la crise financière éclate, cela débouche sur une crise économique.

On estime en général que la crise a débuté avec la faillite de la banque Lehman Brothers le 15 septembre 2008. Du fait de l’interconnexion entre toutes les places financières mondiales, la crise devient rapidement mondiale. Comme en 1929, on a à la fois une crise boursière (avec un effondrement brusque des indices boursiers d’environ 50 %) et une crise bancaire. La crise devient économique en raison de l’appauvrissement des ménages américains (entraînant un effondrement de la consommation). En 2009, on enregistre ainsi une récession de près de 5 % pour les pays de l’OCDE. Par ailleurs, le chômage explose dans de nombreux pays, par exemple en France ou aux États-Unis.

On a alors un renouveau des idées keynésiennes, à tel point qu’en 2008, le New York Times fait de Keynes « l’homme de l’année ». Les gouvernements et les banques centrales injectent massivement des liquidités dans le système bancaire pour renflouer les banques et rassurer les marchés.

5) La crise de la zone euro

À partir de 2010, la zone euro connaît une crise majeure, celle des dettes publiques. Pour comprendre cette crise, il est nécessaire de constater qu’au cours des années 2000, de (trop) nombreux pays ont accumulé de la dette publique. On pense bien évidemment en priorité au PIIGS (Portugal, Italie, Irlande, Grèce, Espagne), mais il faut savoir que d’autres pays comme la France sont aussi concernés. Or, avec la crise de 2008, l’endettement de ces États devient insoutenable. Cela s’explique à la fois par la diminution de leurs recettes fiscales (due à la contraction de l’activité) et par les plans de relance de l’économie.

De fait, les marchés financiers s’agitent et, à partir de 2010, spéculent sur des défauts de remboursement de dettes pour certains États en difficulté, comme la Grèce à l’aide de CDS (Credit Default Swap). Cette spéculation a alors pour effet de rendre de plus en plus difficile le financement sur le marché, car les taux d’intérêt ont littéralement explosé. Ils atteignent même le taux record de 29 % en Grèce.