Globe

Aujourd’hui, on poursuit la série d’articles portant sur l’analyse de sujets de colle en géopolitique. La précédente analyse portait sur le sujet intitulé « L’Europe, combien de divisions ? ». Cette fois-ci, on analyse un sujet très différent, « Un drame asiatique est-il encore possible ? » : nouvelle zone géographique, nouveaux enjeux, nouvelles difficultés… Avec cette série de colles, je te donne un aperçu de ce qui peut t’être proposé en colle et par extension aux oraux du concours. Quoi qu’il en soit, traiter ces sujets peut te servir de manière générale en géopolitique. Alors, accroche-toi ! On commence…

« Un drame asiatique est-il encore possible ? », un sujet de géopolitique

Je t’avoue que lorsque je l’ai reçu en prépa, ce sujet m’a laissée perplexe. Les termes sont simples mais j’ai tout de suite senti une difficulté inédite qui provenait de la fin de la question. « Encore possible », comment ça « encore possible » ? Généralement, en colle ou en dissertation de géopolitique, on pose ce genre de question en ouverture ou en conclusion, histoire de réveiller l’attention du colleur/correcteur mise à mal par dix minutes de monologue…

Tout un tas de questions se sont bousculées dans ma tête : comment répondre à cette question sans donner son avis ? Ah, mais d’ailleurs, est-ce que je dois donner mon avis ? Depuis quand dois-je spéculer de l’avenir en colle ? Pourquoi a-t-il fallu que je vienne en cours aujourd’hui ?

Je m’arrête là sur les questions que je me suis posées… Je crois que j’ai remis en question jusque mon existence en l’espace de quelques secondes. J’imagine que tu attends avec impatience la conclusion de cette histoire et les réponses que j’ai pu trouver (ou pas) à ces questions… Je vais te les partager dans la suite de cet article.

Pour optimiser au maximum le temps que tu passes à lire cet article, je t’invite à devenir actif et à te pencher sur le sujet. Prends vingt minutes, rends-toi dans un endroit calme, concentre-toi comme si tu allais passer une colle. Cela fera office d’entraînement et ne pourra t’être que bénéfique. Mais avant, si tu le souhaites, tu peux lire la partie « Mes conseils pour t’aider dans ta réflexion » dans le premier article de la série. J’espère que cela t’aidera dans ta réflexion !

Analyse du sujet de colle

On attaque l’analyse du sujet, alors j’espère que tu as pu prendre vingt minutes et qu’elles ont porté leurs fruits ! Sinon, ne t’en fais pas, je vais te délivrer toutes les clés pour répondre à ce sujet.

Pour commencer, la première difficulté réside dans « drame asiatique », qui est en fait une référence au livre de Gunnar Myrdal intitulé Le drame de l’Asie (1968). Dans ce livre, il évoque quelques pistes qui peuvent nous permettre de répondre au sujet, comme les famines qui sont selon lui inévitables en Asie compte tenu de la démographie et des faibles rendements. Mais il faut rappeler qu’il a écrit son analyse avec les lunettes d’un homme des années 1960, que l’Asie d’aujourd’hui n’est plus la même qu’à son époque et que de surcroît, il n’a pas considéré les quelques exemples de réussite asiatique (le Japon depuis l’ère Meiji).

Ce n’est pas très grave si tu n’as pas trouvé la référence à G. Myrdal, ou si tu n’en avais jamais entendu parler auparavant. C’est un sujet qui peut largement être traité avec les éléments de ton cours. Avec des connaissances et un peu d’agilité, tu peux traiter même les sujets qui réutilisent des références littéraires sans forcément les avoir décelées, le tout c’est d’éviter le hors sujet tout en étant pertinent.

Proposition de plan

I – Vu les faiblesses du continent dans les années 1960, un drame asiatique semblait presque inévitable

A) Une Asie en retard de développement dans les années 1960…

B) Un retard que la démographie n’arrange pas

C) L’Asie de l’époque de Gunnar Myrdal ne laissait pas tellement de place à l’optimisme

Dans cette première partie, on fait un état des lieux de la situation de l’Asie des années 1960-1970, en soulignant les faiblesses du continent en termes d’évolution démographique, de pauvreté, de démocratie, etc.

II – Même si l’Asie avait déjà les moyens de l’éviter

A) Un exemple de développement réussi : le Japon

B) L’exemple de la Corée du Sud

C) Dans les années 1960, on pouvait déjà envisager l’impact que le Japon aurait sur ses voisins : « vol d’oies sauvages »

Le développement du Japon a pu profiter aux pays voisins. En effet, les activités japonaises ont permis un transfert technologique vers ces pays où le Japon exportait et délocalisait. Le Japon a permis, entre autres, cet effet « domino » qui a permis le développement des NPI.

L’objet de cette partie est de montrer que même si la tendance générale était au pessimisme concernant l’avenir du continent, il n’en reste pas moins que déjà à cette époque l’Asie avait silencieusement enclenché le processus qui allait lui permettre de se développer.

III – Et qu’en est-il aujourd’hui ?

A) Les inquiétudes de G. Myrdal concernant l’Asie ont été partiellement démenties

B) L’Asie est un continent qui se développe à vue d’œil

C) Qu’est- ce qui pourrait être à l’origine d’un potentiel futur drame asiatique ?

Ici, on revient à notre époque et on analyse l’évolution du continent. Ce qui n’allait pas à l’époque de G. Myrdal s’est-il amélioré aujourd’hui ? Qu’est-ce qui fait la force de l’Asie aujourd’hui ? Puis, on en revient à la question posée par le sujet en analysant ce qui, aujourd’hui, pourrait causer un « drame asiatique » à l’avenir.

En résumé

Ce qu’il est intéressant de mentionner, c’est que pour un homme des années 1960, l’Asie était loin de pouvoir rattraper et encore moins rivaliser avec les puissances occidentales. Or, aujourd’hui, les analyses les plus pessimistes de l’époque sont démenties par les faits. En plus d’avoir pu se développer, certains pays asiatiques rivalisent avec les puissances occidentales, et ce, aussi bien sur le plan commercial que sur la scène internationale (Chine, Japon, Corée du Sud…).

Toutefois, il ne faut pas oublier de nuancer. Tous les pays d’Asie ne se sont pas développés de la même manière, et même les pays les plus développés d’Asie ont leurs faiblesses. Dire que le paysage asiatique est diversifié est un euphémisme, ainsi il faut nuancer, la Chine n’est pas l’Asie.

J’ai trouvé cette colle passionnante, puisqu’elle est un excellent moyen de montrer que supposer de ce que sera l’avenir est toujours délicat, puisque nous sommes limités par notre lecture du monde. Pour supposer de ce qui se passera, on se base sur ce qui est, or la géopolitique est la discipline du bouleversement qui analyse un monde de turbulences. Ainsi, aussi bien nos meilleurs espoirs que nos pires craintes pour l’Asie peuvent se réaliser.

Les questions légitimes que tu peux te poser en prépa ECG

On en a fini avec l’analyse du sujet… Mais rassure-toi, je n’ai pas oublié ! Je vais répondre aux questions évoquées plus haut.

Comment répondre à cette question sans donner son avis ? Ah, mais d’ailleurs, est-ce que je dois donner mon avis en colle en prépa ECG ?

En recevant cette colle, je voulais éviter l’écueil de donner mon avis, ou d’évoquer mon ressenti sur la question par mégarde, un « je pense que » serait très mal venu. Quoi qu’il en soit, à partir de l’instant où une question comme celle-ci est posée, il faut faire un choix de réponse. Ce dernier t’engage plus ou moins personnellement, donc pas de panique, développe ton idée tout en essayant de la prouver avec des faits, des chiffres, des exemples…

Depuis quand dois-je spéculer de l’avenir en colle ?

J’avais la sensation que j’allais devoir faire de la prospective avec ce sujet, mais il n’en est rien. Ne tombe pas dans cet écueil. Contente-toi d’utiliser ton cours, d’évoquer simplement les éléments qui aujourd’hui pourraient provoquer à l’avenir un « drame asiatique ». Parle toujours au conditionnel quand tu as un tel sujet.

Pourquoi a-t-il fallu que je vienne en cours aujourd’hui ?

Courage, la colle n’est pas toujours un moment très agréable à passer, mais elle reste très formatrice !

On en a vraiment fini avec cette analyse, j’espère avoir pu te donner les clés de lecture les plus essentielles pour répondre à ce sujet. N’oublie pas, il n’existe pas de réponse toute faite en géopolitique. Chaque sujet est unique et toutes les réponses (tant qu’elles restent dans le sujet) peuvent être défendues par des chiffres et des faits.  Sur ce, on se donne rendez-vous pour un prochain article d’analyse de sujet de colle. À très vite !