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Le programme de lettres peut parfois faire peur ! Riche de plusieurs œuvres et axes de travail, c’est probablement l’une des matières les plus documentées. Pour y voir plus clair, il est important de bien cerner les principaux axes de chaque œuvre. Cela permet d’avoir une vision synthétique et globale des principaux aspects et thèmes à comprendre. Afin de t’aider dans ton étude du thème de cette année, nous te proposons d’analyser La Princesse de Clèves, de Madame de La Fayette. Cette présentation a pour but de te donner les éléments clés de l’œuvre. Tu pourras t’assurer que tu n’as pas fait de contresens, ou rattraper un peu ton retard, si tu en as !

Le résumé de La Princesse de Clèves

Mademoiselle de Chartres, une jeune femme de 15 ans, est présentée à la cour d’Henri II. Rayonnante, elle impressionne toute la cour, et plus particulièrement le prince de Clèves, qui en tombe fou amoureux. Elle accepte de l’épouser, mais n’en est pas amoureuse. Cependant, sa vie change lorsqu’elle rencontre le duc de Nemours. Charmée, la princesse de Clèves en tombe amoureuse. Dévasté par cette nouvelle, le prince de Clèves meurt de chagrin. Au beau milieu d’une situation délicate, la princesse de Clèves se retrouve en plein cœur d’un dilemme moral. La jeune femme hésite alors entre son amour pour le duc et ses remords pour le prince.

Le découpage de l’œuvre

Première partie

Pour simplifier l’œuvre, il est possible de la découper en quatre parties. La première commence dès la première page du livre. Elle se termine au moment où la mère de la princesse de Clèves meurt. Madame de La Fayette ouvre son livre sur un portait peu flatteur de la cour, décrite comme hypocrite et fausse : « Mais elle avait une si profonde dissimulation qu’il était difficile de juger de ses sentiments. » Mademoiselle de Clèves fait ses premiers pas dans ce nouvel univers et attire l’attention de plusieurs hommes.

L’un d’entre eux, le prince de Clèves, la demande en mariage. Elle accepte, conformément aux conseils de sa mère, bien qu’elle ne soit pas amoureuse du prince. Malgré son mariage, la princesse de Clèves rencontre le duc de Nemours, avec qui elle danse. C’est à ce moment qu’ils tombent tous deux secrètement amoureux. « Il n’y avait rien que M. de Nemours ne put prétendre auprès de cette princesse. » Un amour véritable, mais difficile à assumer à cause des obligations sociales des deux personnages. Inquiète pour la princesse, sa mère lui rappelle avant de mourir de songer à sa réputation en priorité par cette phrase : « Pensez que vous allez perdre cette réputation que vous vous êtes acquise et que je vous ai tant souhaitée. »

Deuxième partie

La deuxième partie s’ouvre sur la révélation de monsieur de Chartres à sa femme. On y apprend que son ami Sancerre entretenait une relation avec Madame de Tournon, cette dernière vient de mourir (« Il devient amoureux de Mme de Tournon… Et me le cacha avec beaucoup de soins. »). L’héroïne se rend à Paris où elle se rend compte de son grand amour pour le duc. Blessé lors d’un combat, madame de Clèves ne peut s’empêcher de se préoccuper de sa santé. L’auteure écrit : « On courut à lui, et on le crut considérablement blessé. Mme de Clèves le crut encore plus blessé que les autres. » Cependant, ses sentiments sont troublés lorsque la reine dauphine lui remet une lettre destinée au duc. En effet, cette lettre est supposée avoir été écrite par une femme dont le duc de Nemours est épris.

Troisième partie

Nous apprenons dans cette partie que cette lettre n’a pas été écrite par le duc. En réalité, c’est celle du vidame de Chartes, un des amants de la reine. Ne voulant pas que la reine sache qu’il aime madame de Thémines, il a demandé l’aide du duc. Ce dernier avait donc la lettre en sa possession, même s’il a refusé d’affirmer que c’était la sienne, ne voulant pas froisser Madame de Clèves. Se rendant compte de son amour grandissant, la princesse de Clèves décide d’avouer à son mari son amour secret : « Je vous demande pardon si j’ai des sentiments qui vous déplaisent », sans toutefois donner l’identité du duc, bien que son mari la lui demande (« Et qu’est-il, madame, cet homme heureux qui vous donne cette crainte ? »). Le duc de Nemours ayant surpris cette conversation s’empresse de la révéler au vidame de Chartes.

Lorsque ce secret arrive à la cour, les époux sont surpris. Ne sachant pas que c’est le duc qui est derrière cet agissement, ils s’accusent mutuellement d’avoir révélé ce secret. L’indiscrétion du duc permet à monsieur de Chartres de savoir que c’est de Nemours que sa femme est amoureuse. La troisième partie se termine tragiquement par la mort du roi. Ce dernier grièvement blessé lors d’un duel succombe à ses blessures.

Quatrième partie

Un nouveau roi est sacré et toute la cour se rend à Reims. Cependant, la princesse préfère rester à la campagne à Coulommiers. Ayant appris cela, le duc de Nemours s’y rend pour la voir. Le prince de Clèves, sachant que sa femme était éprise du duc, a demandé à un espion de la surveiller. Ce dernier lui rapporte alors que la princesse a vu le duc. Or, cette dernière a esquivé Nemours et n’a pas trompé son mari, ce que l’espion ne sait pas. Lors de son rapport à Monsieur de Clèves, l’espion laisse sous-entendre que la princesse aurait pu le tromper.

Profondément malheureux de cela, le prince tombe malade. La princesse se rend à son chevet et lui affirme qu’elle a toujours été fidèle. « Je n’ai jamais fait d’action dont je n’eusse souhaité que vous eussiez été témoin. » Le Prince lui fait confiance. « Mais ce me sera toujours un soulagement d’emporter la pensée que vous êtes digne de l’estime que j’ai eue pour vous. » Mais il finit par mourir, « enfin avec une constance admirable ».

Profondément attristée, la princesse s’isole à Paris et oublie le duc, très affecté également par l’état de la princesse. Cette dernière finit cependant par le croiser sans qu’il ne s’en rende compte. Ce qui lui rappelle son amour pour lui. Elle le surprend ensuite en train de l’épier. Voulant alors la revoir, le duc demande au vidame d’organiser une entrevue, ce qu’il accepte. Ces derniers se confessent leur amour, mais la princesse précise ne pas vouloir aller plus loin. « L’aveu n’aura point de suite. »

La princesse tombe malade et frôle la mort, avant de s’isoler dans un couvent. Le duc de Nemours qui essayera plusieurs fois de la voir sera toujours éconduit. « Elle voulait bien qu’il sût que son devoir et son repos s’opposaient au penchant qu’elle avait d’être à lui, les autres choses du monde lui avaient paru si indifférentes qu’elle y avait renoncé pour jamais. » Cet éloignement conduit à la fin de leur amour. « Enfin, des années entières s’étant passées, le temps et l’absence ralentirent sa douleur et éteignirent sa passion. »

Une œuvre difficile à cerner techniquement

Ce roman est une œuvre difficile à classer. Bien que rattaché au mouvement littéraire du classicisme, il est possible d’identifier de nombreux passages caractéristiques de la préciosité. Des influences jansénistes et libertines peuvent également être remarquées dans le texte. Considéré comme l’un des premiers romans psychologiques, ce livre peut être compris de manière générale comme un roman d’analyse. La précision et l’importance de l’ancrage historique rapprochent le livre du roman historique ou de la fiction historique. Cet aspect inclassable enrichit le livre tout en renforçant sa complexité. Cette complexité est un aspect important pour le programme de cette année. En effet, cet aspect inclassable fait directement référence aux propriétés et valeurs de l’œuvre littéraire.

Les thèmes principaux de La Princesse de Clèves

La vie de cour

Dans ce texte, la société est décrite à travers la cour du roi présentée comme une façon de détruire l’individu. Ou du moins de le changer. Tous les courtisans sont dépeints comme faux, jouant un double jeu, malhonnêtes et hypocrites : « Si vous jugez sur les apparences en ce lieu-ci, répondit Mme de Chartres, vous serez souvent trompée : ce qui paraît n’est presque jamais la vérité. »

La règle principale dans cet espace est de dissimuler, mais aussi de se dissimuler : « Je fus soutenue ensuite par le plaisir de dissimuler avec vous, comme vous dissimuliez avec moi. » Les véritables personnalités des individus sont cachées par un rôle joué, par une position sociale ou un autre artifice. (« Cette princesse était belle, quoiqu’elle eût passé sa première jeunesse. ») La cour et la société plus généralement sont présentées comme étant oppressives pour l’individu. Ce sont des espaces qui suivent leurs propres règles et valeurs, qui sont contraires à celles de l’individu. « Elle était née avec tant de dispositions pour toutes les belles choses, que, malgré sa grande jeunesse, elle les aimait et s’y connaissait mieux que personne. »

La passion

Cette œuvre met en perspective les mauvais côtés de la passion. Vue comme destructrice, elle est presque toujours considérée comme une souffrance. S’opposant perpétuellement à la morale, elle est vue comme un obstacle à la tranquillité et à la conformité. L’objectif de l’œuvre est de montrer que les passions s’opposent constamment à la raison.

Les différentes scènes illustrent la fragilité des humains face à leurs passions. Bien souvent, ces dernières les guident, comme illustré ici : « Le cardinal de Lorraine, son frère, était né avec une ambition démesurée. » Constamment tiraillés par leurs désirs, c’est l’opposition à leurs passions qui font la grandeur d’âme des humains. Les passions peuvent dans ce livre conduire jusqu’à la mort et à la culpabilité. (« Elle considéra qu’elle était la cause de sa mort, que c’était par la passion qu’elle avait eue pour un autre qu’elle en était cause. »)

La psychologie

Ce qui fait la célébrité du roman est son aspect psychologique. Il est considéré comme l’un des premiers romans psychologiques français. Cela se matérialise par une attention particulière aux pensées des personnages, à leurs sensations : « Je fus prête cent fois à éclater par mes reproches et par mes pleurs. » Le thème central du dilemme moral permet d’étudier soigneusement les différentes facettes psychologiques des personnages, notamment celles de la princesse de Clèves, l’héroïne du roman. On peut observer le détresse de la princesse après la mort de son mari par exemple, décrite ci-après : « L’horreur qu’elle eût pour elle-même et pour M. de Nemours ne se peut présenter. »

La religion

Le roman est fidèle à la doctrine janséniste. Selon les jansénistes, tous les humains sont coupables du péché originel. Pour se repentir, et ainsi obtenir le salut, les humains doivent avoir un comportement irréprochable. En conséquence, ils doivent avoir une moralité exemplaire. Ce comportement parfait est constamment recherché par la princesse. La vie pieuse est d’ailleurs considérée comme la preuve d’une moralité absolue. La princesse de Clèves finit par se rendre dans un couvent pour prouver sa moralité exemplaire. « Elle passait une partie de l’année dans cette maison religieuse et l’autre chez elle, mais dans une retraite et dans des occupations plus saintes que celles des couvents les plus austères ; et sa vie qui fut assez courte laissa des exemples de vertu inimitables. »

La morale

Elle est perçue comme le but ultime de toute vie. La conduite de chaque individu doit suivre les règles de la moralité. Cette œuvre met en avant le fait que la morale est constamment mise à l’épreuve. Ces défis doivent être relevés par les humains, cela leur permet de prouver leur vertu et leur valeur.

Le combat moral que doit livrer la princesse est double. Le premier est de prouver sa moralité à la cour. « Si ce bruit continue » ou encore « Vous savez combien cette réputation est désagréable ». Le second est un combat moral intérieur. Car ses propres envies et désirs sont mis à l’épreuve. « Elle n’avait encore osé se l’avouer à elle-même. » Elle doit prouver à la société qu’elle est capable de respecter la mémoire de son mari. Mais elle doit aussi se prouver qu’elle est capable de renoncer à sa passion pour honorer ses devoirs. Elle parvient d’ailleurs à le faire, mais en se sacrifiant.

L’œuvre et les thèmes de l’année

Voilà quelques pistes que tu peux utiliser en dissertation. Elles te permettront d’aborder cette œuvre sous les trois angles d’étude de l’année. Évidemment, tu peux les approfondir, les développer et les enrichir, c’est même conseillé !

Littérature et morale

Cette œuvre tend à prouver que la littérature doit raisonner les individus. Elle montre que se fier à ses passions est une mauvaise chose, et que cela conduit aux malheurs. La littérature est là pour rappeler aux humains le bon chemin à suivre. Il est possible de voir ce livre comme une mise en garde morale. Montrant que les humains, s’ils ne suivent pas le droit chemin, sont promis à la souffrance. Ce livre tend donc à prouver que la littérature doit être conforme à la morale. Et qu’en plus, elle doit montrer le chemin à suivre. Dans ce cas, les problèmes sont rapidement résolus. En ne s’exposant pas, elle perd ses sentiments pour le duc. « Si elle ne s’exposait point au péril de le voir » et « le temps et l’absence ralentirent sa douleur ».

L’œuvre littéraire, ses propriétés, sa valeur

Ce roman est inclassable. Ou du moins, très difficilement classable. Comme dit plus haut, ce livre entre dans plusieurs catégories de roman. Cela tend à prouver que l’œuvre littéraire est inclassable et que ses propriétés ne sont pas définissables. L’œuvre littéraire ne peut pas être catégorisée ou classée : c’est un objet à part, car constamment au carrefour de plusieurs genres, mouvements et catégories. On trouve par exemple du dialogue, comme ici avec cette insertion : « Comment, reprit madame la dauphine. » Mais aussi des passages proches du roman historique « Henri VIII », « François Ier » et « Marie Stuart, reine d’Écosse », personnages historiques réels.

La prose

L’écriture en prose dans ce livre est utile, car elle permet de mieux cerner les pensées des personnages. En effet, l’écriture en prose est libre, elle permet d’épouser les pensées de chaque personnage. L’aspect libre de la prose permet d’écrire sans contrainte de forme, contrairement à l’écriture versifiée.

En d’autres termes, elle est plus à même de décrire les sentiments. La prose peut les décrire de manière précise : sans contrainte de forme, elle peut saisir les changements et les évolutions des pensées. « Quels retours ne fit-elle point sur elle-même ! Quelles réflexions sur les conseils que sa mère lui avait donnés ! Combien se repentit-elle de ne s’être pas opiniâtrée à se séparer du commerce du monde. » Cela est particulièrement vrai en ce qui concerne les dialogues, en témoigne cette citation : « Je suis très affligée, répondit Mme de Clèves », du moins plus que dans le cas d’un dialogue versifié. Qui peut imaginer qu’un éclat de colère en vers est plus réaliste qu’un éclat de colère en prose ? Ce livre montre donc que la prose est plus à même de saisir le réel, notamment les sentiments humains.

Te voilà maintenant prêt pour approfondir l’étude de La Princesse de Clèves ! Cette présentation succincte de quelques pistes peut être utilisée directement en dissertation, mais est surtout là pour être approfondie. Tiens bon, le premier semestre est presque derrière toi !