[tps_header] Avec Sarah Abdesselam, nous avons l’objectif de vous fournir dix clés d’analyses de la question environnementale sous deux aspects différents. Il y aura un aspect très classique, qu’il faut savoir manier et que vous verrez très certainement en cours. Puis un second, plus original peut-être et qui vous permettra d’élargir votre réflexion à ce sujet, voire même de l’inscrire dans une perspective qui dépasse la seule question environnementale. Enjoy![/tps_header]

1. Comment le réchauffement climatique peut déstabiliser la finance

By World Economic Forum

By World Economic Forum

En 2015, Mark Carney (gouverneur de la Bank of England) a livré un discours qui visait à nous alerter des potentiels dangers liés au réchauffement climatique. Par là, il cherche à convaincre les acteurs financiers qu’il est nécessaire d’agir pour préserver la sphère financière dans laquelle ils s’insèrent.

Mais alors quels sont les liens entre le réchauffement climatique et la finance ? La finance pourrait être touchée par trois biais :

  • « Physical risks » : Le réchauffement climatique risque d’endommager des biens, et donc de détériorer le prix de l’actif financier qui leur est associé. Par exemple si les locaux d’une entreprise sont abîmés suite à une inondation, on peut logiquement s’attendre à une baisse du cours de son action.
  • « Liability risks » : Il y a le risque que les personnes et entités ayant subi les ravages du réchauffement climatique exigent une compensation auprès des acteurs responsables de celui-ci. En conséquence, ce sont les grandes entreprises qui exploitent des énergies fossiles qui seraient les premières touchées. Les assurances seront néanmoins les acteurs les plus exposés, sachant qu’avec le réchauffement climatique l’endommagement de biens assurés va se multiplier (inondations, sécheresses, tempêtes..).
  • « Transition risks » : Les changements majeurs nécessaires pour effectuer une transition énergétique — changement de politiques, de technologies.. — pourraient modifier radicalement la valeur de plusieurs actifs. Par exemple, les panneaux solaires pourraient se démocratiser, donc leur prix baisserait.

Ces ajustements brutaux de prix pourraient affecter la stabilité financière. C’est pour cela que le gouverneur suggère de commencer la transition énergétique le plus tôt possible pour que les changements soient le moins brutaux possibles.

2. En quoi peut-on parler d’une crise écologique ?

Article8

       Les effets de l’activité humaine sur l’environnement s’observent à échelle mondiale

Depuis la révolution industrielle, le réchauffement climatique s’est accéléré et intensifié. Cela se traduit par une hausse des émissions de gaz à effet de serre, la diminution de la biodiversité, etc. La transformation climatique observée et à venir serait à 93% due aux activités de l’homme et à l’effet de serre. En effet, depuis 1850, la concentration en gaz carbonique a augmenté de 40% et celle de méthane a été multipliée par 25.

       Une crise qui s’apparente à une crise financière

Voilà un parallèle intéressant à produire puisqu’il permet d’établir un lien entre deux crises qui semblent n’en avoir aucun ! C’est un bon moyen pour pouvoir prolonger vos raisonnements de dissertations, voire relier crise financière, économique et environnementale.

La finance est liée au futur tout comme l’environnement. Dans ces domaines, il existe un risque que l’on doit prendre en compte.

D’autre part, on peut convoquer le concept d’ “aveuglement au désastre” (Minsky, 1975). Cela qualifie le comportement de déni des agents économiques lors de la “Ponzi Finance”, une phase de l’économie où les entreprises ont de plus en plus de mal à rembourser leur endettement grandissant, et où parallèlement, leurs actifs détenus sont de moins en moins rentables. Tous les signes d’une crise prochaine sont réunis mais les agents continuent à multiplier leurs transactions risquées comme si de rien n’était, précipitant l’économie dans la crise financière. Ce concept est repris par A.Orléans  pour qualifier le comportement des agents économiques face au réchauffement climatique. Dans tous les cas, on observe ce paradoxe d’une crise qui apparaît ex post comme prévisible et pouvant être évitée alors même que jamais ex ante on ne réussit ni à la prévoir, ni à la prévenir ! C’est exactement la même situation pour le cas de la crise écologique que nous traversons actuellement.

3. La dette écologique et son lien avec l’exportation des émissions polluantes

By George Steinmetz
By George Steinmetz

La notion de « dette écologique » émerge dans les années 1990. On peut la définir ainsi : « (…) la majorité qui surexploite les ressources naturelles (particulièrement les pays riches) est en situation de dette « écologique » aux dépens de ceux en possession de ces ressources (les pays pauvres). » (Delord, Sébastien, 2010). Elle justifie à terme les PED à revendiquer un « droit à polluer » pour se développer, comme l’ont fait les pays développés durant la révolution industrielle.

La question de la dette écologique est excellente à traiter si vous êtes amenés à disserter sur les PED ! Elle permet de faire le lien avec la dette économique qu’ont les PED envers les pays développés, de plus, l’existence de cette dette écologique est un moyen de nuancer l’importance de la dette économique qu’ont les PED. Plusieurs questions émergent : faut-il reconnaître l’existence de cette dette écologique ? Si oui, est-ce suffisant pour justifier le développement de ces pays par un mode de production polluant ?

Honorer sa dette écologique ?

Certains économistes justifient l’éco dumping dans le cadre du commerce international. Il existerait un avantage comparatif (cf Ricardo) de normes environnementales plus faibles dans les PED. Il serait ainsi logique que les PED exploitent cet avantage comparatif pour permettre leur développement grâce à leur insertion dans le commerce international. Le rattrapage des PED devrait donc s’opérer au détriment de l’environnement, tout comme le décollage économique des pays développés s’est produit lors de la Révolution industrielle grâce à un mode de production très polluant.

La question de la “dette écologique” des pays développés envers les PED a notamment été évoquée par Anil Agarwal (un responsable indien) qui employait le terme de “colonialisme environnemental” pour désigner l’attitude des pays développés vis-à-vis des PED. Ceux-ci chercheraient à traiter les émissions de CO2 des PED de manière équivalente aux leurs, alors qu’en réalité elles seraient de nature bien différentes. En effet, selon Agarwal, il y aurait d’un côté des émissions de subsistance des PED dues à l’usage de l’agriculture, et d’un autre les émissions des pays développés liées à leur mode de vie luxueux.

       Le lien avec les délocalisations d’activités polluantes

De nombreux PED endossent une partie des émissions de CO2 délocalisées des pays développés, ce qui vient soutenir la thèse d’une dette écologique des pays développés envers les PED. Cette idée peut constituer une limite à la courbe de Kuznets environnementale (Grossman & Krueger, 1995) , c’est-à-dire l’idée que l’empreinte écologique augmente avec le développement mais s’amenuise avec le temps. (l’empreinte écologique selon C.Fudge correspond à la superficie nécessaire pour subvenir aux besoins et absorber les déchets d’une population.). Si on semble observer une courbe de Kuznets environnementale pour des régions telles que l’Europe, celle-ci ne prend pas en compte les émissions exportées vers les autres pays. Alors, y a-t-il vraiment diminution quand on prend cela en compte ? Les pays développés demeurent les plus grand pollueurs de la planète en émission de CO2 par tête.

Avec la théorie de Lawrence Summers (1991), les délocalisations des émissions polluantes sont justifiées. Cette mise en pratique ne fait qu’accroître la dette écologique des pays développés envers les PED. Selon lui, il est justifié que les pays développés délocalisent leurs activités polluantes au sein des PED. Son raisonnement controversé et utilitariste permet de justifier des havres de pollution. Les pertes de bien être des individus dans les PED sont bien inférieures à celles des pays développés lors de la production d’activités polluantes. En effet, selon ses mots, les individus des PED ont une espérance de vie plus faible, donc s’ils doivent développer un cancer à cause de la pollution, ils n’en sentiront pas les effets car ils seront déjà morts. Donc la perte d’utilité qu’engendre la pollution est inférieure chez les PED que chez les pays développés (s’ils ont un cancer, ils vivront assez longtemps pour en souffrir). Parallèlement, on suppose que l’activité polluante augmente l’utilité des pays développés, de telle sorte qu’elle compense les pertes d’utilité des PED. Donc, conformément à ce calcul utilitariste, on constate une augmentation du bien être global, d’où un intérêt à délocaliser les activités polluantes vers les PED.

       Les solutions

  • Lors des négociations à l’OMC, les pays développés ont proposé l’adoption de la taxe carbone à leur frontière pour obliger les PED à opter pour des modes de production moins polluants. Nombreux sont les PED qui dénoncent une forme de protectionnisme de la part des pays développés, ces derniers multipliant les réglementations et les normes environnementales — parfois injustifiées à bien des égards — afin de limiter leurs importations auprès des PED.
  • Lors de la COP21 : un fond vert de 100 milliards de dollars a été mis en place pour faciliter la transition énergétique des PED afin d’enrayer le réchauffement climatique. Ce serait un moyen de permettre aux pays développés de rembourser leur dette écologique vis-à-vis des PED.

Pour les plus curieux d’entre vous, on vous renvoie à cet excellent article qui traite de cette question là !

4. Développement durable : de la naissance du concept à la COP21

by Novetic
by Novethic

       Émergence du concept

  • 1972, le rapport du Club de Rome souligne pour la première fois les risques d’épuisement du capital naturel à cause de la croissance du PIB.
  • 1987, le rapport Brundtland fait émerger le concept de développement durable que l’on peut définir comme étant la “capacité à répondre aux besoins des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à satisfaire les leurs”. C’est une illustration du concept de choix intertemporels de Fisher où il s’agit d’arbitrer entre une consommation présente et une consommation des futures générations.
  • 1992, le sommet de la Terre se tient à Rio et soutient l’engagement à lutter contre pauvreté, à préserver ressources et la diversité biologique, à stabiliser l’émission de gaz à effet de serre et à défendre principes de précaution et d’entraide.
  • 1997, le Protocole de Kyoto (non ratifié par les États-Unis) est un engagement de la part des pays développés à réduire les gaz à effet de serre.

Toutefois, de nombreux sommets internationaux ont eu lieu (1996 à Romes, 2000 à New York, etc.) mais il demeure un écart significatif entre les promesses tenues et la réalité. Par exemple, les aides publiques au développement devaient représenter 0,7% du PIB des pays de l’OCDE mais représentent en réalité moins de 0,3%, ces aides doivent notamment permettre la transition énergétique dans ces pays.

  • Cop21

La COP21 est un sommet qui s’est tenu en 2016 à Paris, qui entre en vigueur en 2017 et qui a été adopté par 195 pays mais ratifié seulement par 55 pays. Face à la chute drastique des coûts dans le domaine de l’énergie renouvelable, une efficience de la production apparaît avec la possibilité d’économie d’échelle.

Plusieurs objectifs ont été mis en avant pour 2020, notamment celui de contenir le réchauffement climatique en dessous de 2°C (et préférablement en dessous de 1,5°C)et de produire zéro émission nette.

Toutefois,

  1. Il n’y a pas de budget carbone même s’il existe un pôle dans le budget européen pour réduire les émissions de carbone
  2. Il relève en dernière instance de la souveraineté des États concernant leur choix de diminuer les émissions de gaz à effet de serre.

5. Portée et limites du rôle de l’Etat dans l’émergence d’une croissance verte durable

By AP Photo/Philippe Wojazer,Pool

       Qu’est-ce que la croissance verte ?

Elle désigne l’intégration de contraintes et d’objectifs environnementaux à la croissance économique. L’OCDE défend l’idée d’une croissance verte inclusive, qui non seulement prend en compte la question environnementale mais également la recherche de bien être social, ce qui passe par la volonté d’équité sociale.

       Des premières mesures de la part des Etats suite à la crise de 2008

Il apparaît que la question économique supplante celle écologique en cas de crise économique. Or, ces notions ne sont pas diamétralement opposées. Pour J.Sachs, au contraire, la sortie de crise de 2008 doit nécessairement passer par l’impulsion d’une transition énergétique par les Etats.

“Le monde ne sera pas véritablement sorti de la crise tant que les gouvernements n’auront pas mis en place des politiques d’investissement en direction des énergies vertes.” J.Sachs (2009)

C’est ce qui a amené B.Obama en 2008 à parler de “Green New Deal” au cours duquel entre 2008 et 2009, 15% du plan de relance suite à la crise est accordé à la croissance verte. En effet, une sortie de crise peut-être facilitée par la création d’emploi dans le secteur des énergies renouvelables, mais également le financement d’innovation dans le domaine vert. Une levée de fonds publics s’est opérée dans le domaine de l’innovation verte (énergie éolienne, solaire…), ainsi les États espèrent générer des effets multiplicateur et des incitations dans le domaine privé.

       Les limites auxquelles pourrait se heurter une action de l’Etat favorable à l’environnement

  • Risque de surestimation de la croissance verte : existe-t-il une forte rentabilité dans ce domaine ? Investir dans les équipements verts a un coût assez élevé, puisqu’il implique dans la plupart des cas de rénover entièrement le fonctionnement des entreprises. De plus, les perspectives de rentabilité ne peuvent se manifester qu’à moyen ou long terme. L’Etat peut ainsi être confronté à un “paradoxe de Solow vert” : on innove dans le domaine environnemental mais les gains de productivité sont faibles et la croissance également.
  • L’action de l’Etat peut s’avérer inefficace si elle ne se traduit pas par des incitations qui modifient effectivement le comportement des consommateurs à adopter des pratiques qui rentabilisent les investissements verts effectués. Il y a en effet un risque de formation d’une “bulle verte”, du fait d’une inadéquation de l’offre avec la demande. Pour que la croissance verte puisse avoir lieu, il faut une adaptation de la demande à un nouveau mode de consommation. Or, consommer bio, réduire sa consommation d’eau ou acheter une voiture hybride nécessitent un changement d’attitude de la part du consommateur qui ne peut se faire qu’à long terme, s’il n’y a pas d’incitation massive de la part de l’Etat pour que ce changement s’opère.
  • Et enfin il est possible que l’Etat ne dispose pas d’assez de moyens nourrir une croissance verte. Les budgets de R&D publics ont diminué au cours des dernières années  – une tendance attribuable en partie à la dépréciation du rôle de l’Etat dans la promotion de l’innovation et de la croissance, et plus récemment au politique budgétaire d’austérité suite à la crise financière de 2008. De plus, la part attribuée aux recherches environnementales a aussi diminué : elle ne représente plus que 4% du budget de R&D des États-Unis, contre 11% en 1981. Concernant l’UE, ce n’est pas avec un budget aussi restreint (1% du PIB communal) qu’elle va devenir leader dans le domaine des énergies renouvelables, malgré ses ambitions affichées en la matière.

6. Un point sur le lobbying

By AP Photo/Philippe Wojazer,Pool
By AP Photo/Philippe Wojazer,Pool

Vous ne l’ignorez pas et cela figure probablement dans votre cours : derrière les questions de développement durable se cachent des intérêts économiques qui tentent de freiner la transition énergétique de certains pays. Le but ici est de vous communiquer quelques données précises à ce sujet.

Comment parler du lobbying en rapport avec l’environnement ?

En 2008, 90 millions de dollars ont été dépensés aux États-Unis en lobbying en matière de climat (100 000 $ par parlementaire). Une étude du Center for Public Integrity dénombre plus de 4 lobbyistes par membre du Congrès sur ce thème. Les lobbyistes opposés à toute modification de la législation sont 8 fois plus nombreux que les autres…

Dans ce même pays, les intérêts des lobbys sont particulièrement bien représentés dans le parti des Républicains. Selon Sachs (2015), ce parti nie intentionnellement le réchauffement climatique car il est principalement financé par les géants de l’industrie pétrolière.

       Comment y remédier ?

  • La solution proposée par Stigler (1971), d’institutionnaliser le lobbying, ne semble pas porter ses fruits. En effet, se rattachant à une analyse microéconomique, le lobbying est fondamentalement utile pour l’économie car il permet la transmission d’informations. Donc il ne faudrait pas purement et simplement le supprimer de l’économie : il faudrait l’institutionnaliser, pour qu’il ne soit pas incontrôlable. Or on le voit bien, l’institutionnalisation politique du lobbying n’a servi qu’à lui donner plus d’importance aux Etats-Unis où le Congrès (majoritairement composé par les Républicains) bloque toute loi interférant avec les intérêts de l’industrie pétrolière.
  • Evidemment, la mainmise des lobbys pétroliers est avérée pour la politique américaine car les cadres politiques restent préoccupés par le fait de se faire réélire, chose qui ne serait pas possible sans l’immensité des fonds apportés par les géants du secteur pétrolier. C’est pour cela que Sachs suggère de retirer la gestion des questions environnementales du pouvoir des politiques. Pour lui, ces questions doivent être détachées d’une gestion s’inscrivant dans le court terme (le temps d’un ou plusieurs mandats). A l’image des banques centrales qui ont obtenu leur indépendance avec succès, les gouvernements devraient donner leur autonomie aux agences en charge des questions environnementales pour qu’elles puissent se construire pour le long terme.
  • Et si on voyait plus grand ? Déjà en 2002, Stiglitz pointait cet accaparement de la question environnementale par les intérêts privés, suggérant qu’il faudrait réformer les institutions mondiales.

“Aujourd’hui la mondialisation ne marche pas pour l’environnement, la stabilité économique et la pauvreté. Le problème, c’est la manière dont les institutions économiques mondiales ont contribué à fixer des règles dans l’intérêt des pays industrialisés et des intérêts privés en leur sein”. — Stiglitz

Cela laisse à penser qu’il faudrait désormais penser l’émergence d’une organisation mondiale de l’environnement, à l’image de celle qui existe actuellement pour le commerce.

7. Dès les classiques émergent des préoccupations pour l’état des ressources naturelles

NPG L241; David Ricardo by Thomas Phillips

Pensez à donner une perspective historique à vos analyses sur le développement durable. Pour cela, se référer à la vision de la croissance chez les classiques est toujours un plus. En effet, dès le XIXe siècle des économistes se sont interrogés sur le caractère durable de la croissance et ont répondu à la négative en raison de la rareté des ressources naturelles.

       Pour Ricardo, la croissance n’est pas durable en raison de l’étendue limitée des terres cultivables

Pour comprendre cette théorie, il faut à la conception de la répartition des richesses pour Ricardo.

Tout d’abord, il distingue dans la société trois classes différentes : (1) les propriétaires terriens (2) les entrepreneurs et (3) le salariat. Les premiers reçoivent une rente, les seconds un profit et les derniers un salaire.

  1. La richesse créée se partage entre les trois classes, et le prix est égal au coût marginal plus la rente différentielle et absolue. Le salaire est le salaire naturel, c’est-à-dire, celui qui permet la conservation et la reproduction du salariat grâce à l’acquisition de biens de consommation. La rente provient des différentiels de rendement des terres exploitées. Le profit quant à lui, est le résidu.
  2. La production d’équilibre dans le marché d’une ressource naturelle (par exemple : le blé) nécessite l’exploitation de multiples terres qui ont chacune un rendement différent.
  3. Sur la terre la plus fertile, le coût de production est le plus faible, mais tous les producteurs vendent au même prix, c’est-à-dire, le prix d’équilibre. Ainsi, le producteur de la terre la plus fertile obtient une rente qui correspond au prix auquel on soustrait les coûts de production.
  4. Une hausse de demande d’une ressource naturelle, inhérente à une augmentation de la population, entraîne la mise en culture de terre moins fertile au coût de production plus élevé compte tenu de la loi des rendements décroissants. Ainsi, le prix augmente,la rente différentielle du propriétaire de la terre la plus fertile aussi et également la rente absolue.
  5. Ainsi, pour subvenir aux besoins du salariat, le salaire naturel augmente également. La rente augmentant, les salaires aussi, le résidu devient de plus en plus faible. Les profits tendent à être nul, ce qui peut conduire à l’état stationnaire, qui selon Ricardo, peut être repoussé grâce au libre échange.

Point vocabulaire :

  • la rente différentielle : elle correspond à l’écart entre les coûts de production et le prix, elle dépend des différences de fertilité entre les terres, d’où son nom.
  • la rente absolue : c’est une rente qui est perçue par les propriétaires fonciers sans que celle-ci proviennent de la différence de fertilité entre les terres.

Et pour conclure, vous pourrez enfin dire comme Marx :

« J’y vois enfin clair dans l’emmerdante question de la rente foncière » — Lettre de Marx à Engels, le 18 juin 1864

       Pour Jevons, le Royaume-Uni devrait se méfier de sa dépendance au charbon car cette ressource est limitée.

Dans son célèbre ouvrage The coal question (1865), il explique que l’hégémonie du Royaume-Uni n’est que passagère du fait du caractère non infini et non renouvelable de la matière primaire sur lequel il fait valoir sa puissance économique.

Il ajoute que la réalisation du progrès technique dans l’usage d’une ressource naturelle entraîne une hausse de l’utilisation de cette ressource : c’est le paradoxe de Jevons.

“Il est illusoire de penser qu’un usage plus économique d’un carburant conduit à une consommation moindre. C’est l’exact opposé qui est vrai.” — Jevons

  1. Le progrès technique dans l’usage d’une ressource naturelle engendre un effet de substitution.
  2. Ce progrès technique entraîne une baisse des prix et se traduit donc par une hausse de la demande pour cette ressource : il s’agit d’un effet de rebond.

L’illustration de cet effet de rebond est le cas actuel de l’Allemagne : le progrès technique dans l’exploitation du charbon, loin d’avoir réduit sa consommation, a eu l’effet contraire !

8. Un exemple clé : la transition énergétique entamée de la Chine

Article6

Voilà un exemple qui pourrait enrichir votre cours : celui de la Chine qui a entamé sa transition énergétique. Non, le pays ne s’est pourtant pas découvert une âme d’écolo, alors quelles sont les raisons d’un tel choix ?

  • Le pays, très dépendant vis-à-vis des autres pays pour financer ses consommations d’énergie (il consomme 45% du charbon mondial..), souhaite entamer une politique d’indépendance énergétique.
  • La pollution devient de plus en plus difficile à supporter pour la population chinoise, notamment dans les métropoles du pays où la pollution atmosphérique atteint des montants records. On compte environ 750 000 morts prématurées chaque années à cause de la pollution en Chine.

Plusieurs mesures ont été prises pour réduire la consommation d’énergies fossiles :

  • Le gouvernement semble vouloir initier un processus de “décarbonisation” du pays. Plus de 1000 mines de charbon vont être fermées en 2016. Ces mesures semblent porter leur fruit puisque déjà en 2015,  les émissions de carbone liées à l’énergie ont baissé de 1,5% pour le pays grâce à la réduction du charbon.
  • Généralement, l’énergie générée par des énergies fossiles a baissé de 0,7% en 2014. La baisse se poursuit les années suivantes.

Parallèlement, le pays a engagé un plan de “révolution énergétique” qui a pour but de porter à 20% la part des énergies propres dans la production énergétique d’ici 2030. Depuis, la Chine investit massivement dans le domaine des énergies propres (montant record d’investissement de 110,5 milliards de dollars en 2015, soit une hausse de 17% par rapport à 2014) : elle est leader sur le marché des énergies renouvelables. Finalement les énergies vertes génèrent 31% de l’électricité chinoise.
Parfois ce sont même des entreprises qui emboîtent le pas de la Chine. Apple a (fièrement) annoncé que l’un de ses principaux fournisseurs dans le pays a décidé de n’utiliser que des énergies renouvelables d’ici à 2018.

9. Voir l’environnement différemment : un bien public mondial

Article1

       Qu’est-ce qu’un bien public mondial ?

Ce sont des biens non rivaux et non exclusifs. Leur consommation est indivisible, elle vient des États nationaux. Selon Kindleberger, il existe cinq types de bien publics mondiaux : le SMI, le système financier international, le commerce international, le système de coordination des politiques économiques et le système de droit privé.

D’autre part, les institutions internationales telles que l’OMS, l’UNESCO, l’ONU, le FAO entrent dans cette catégorie.

       Dès lors, comment appréhender l’environnement ?

Dans le Rapport Stiglitz (2009) on propose la création d’un conseil mondial de coordination économique qui se substituerait au G20 et au FMI.

« Par définition, sans coordination, les pays n’ont pas d’incitation suffisante à investir dans des biens publics régionaux et globaux (par exemple, la stabilité éco, la stabilité financière et la stabilité de l’écosystème) » — Rapport Stiglitz (2009)

En effet, compte tenu de la portée mondiale du problème de l’environnement, il existe une forte interdépendance entre les États. Pour cette raison, on peut qualifier l’environnement comme étant un bien public mondial. Ainsi, les solutions coopératives sont préférables aux solutions individuelles conformément au Folk Theorem. A l’encontre de la théorie d’A.Smith qui spécifie que la somme des actions individuelles aboutissent à l’intérêt général (cf : la main invisible), ce théorème montre que les solutions coopératives sont les plus efficiente. Toutefois, dans le cadre d’une action collective, ce que présupposent les solutions coopératives, il y a toujours le risque du free rider, comme le souligne OLSON, ce qui entraîne un risque de dumping écologique.

Petit topo sur le Folk Theorem

Le Folk Theorem décrit ce qui se produit en situation de dilemmes du prisonnier répétés et aboutit à la conclusion que les acteurs ont intérêt à coopérer ! Cette situation s’adapte à tous les dilemmes du prisonnier.

Dans une situation de dilemme du prisonnier non répétée, tous les acteurs ont intérêt à continuer à polluer pour favoriser leur production — polluante —  à court et moyen terme. Les pays n’ont ici pas intérêt à se mettre d’accord puisque leur décision affecte le court terme.
Néanmoins, si on décide de répéter le dilemme du prisonnier (une situation plus conforme à la réalité), les Etats vont devoir intégrer dans leur calcul le fait que s’ils décident tous de polluer comme dans la situation précédente, ils vont déclencher une crise écologique majeure. Afin d’éviter que ce risque — qui porterait préjudice à tous à long terme — se concrétise, la solution la plus optimale change : il devient avantageux pour les pays de ne pas polluer de manière concertée.

10. Enrichir son analyse en distinguant les émissions de CO2 émises issues de la consommation et de la production

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Si en général votre cours se concentre sur le fait de réduire les émissions de CO2 au niveau de la production (marché des droits à polluer, taxe pigouvienne…), attention à ne pas vous y tromper. On observe chez les pays développés une divergence au niveau des émissions totales de CO2 au niveau de la consommation et de la production. Il se trouve que les émissions de CO2 dues à la consommation sont supérieures de 500 tonnes aux émissions dues à la production.

Cela implique que dans votre traitement de la politique environnementale, il ne faut pas oublier des mesures politiques visant à réduire les émissions de CO2 du côté des consommateurs. Par exemple, on peut se référer au système de bonus-malus mis en place en 2007 par le gouvernement français pour inciter les acheteurs de voiture à choisir des modèles qui émettent moins de gaz à effet de serre. A partir de 130 g de CO2/km, le prix d’achat de la voiture est majoré par un malus dont le montant évolue proportionnellement à la quantité de CO2 émise. Inversement, en dessous de 60g de CO2/km, il y a une minoration du prix d’achat (bonus).