Le thème du marché du travail et des politiques de l’emploi est un classique en ECE. En effet, on le comprend d’autant mieux que les sociétés européennes sont impactées par le chômage depuis les années 1970 environ, certes à des degrés différents.

C’est pourquoi ces pays ont adopté des politiques plus ou moins spécifiques, mais on ne les abordera pas ici. On va plutôt essayer d’étudier un problème particulier à la France, en nous appuyant sur les travaux de Yannick L’Horty, spécialiste de l’économie du travail.

Pourquoi, selon L’Horty, les politiques de l’emploi françaises restent-elles relativement inefficaces ?

De manière amusante, cet économiste compare l’État à un producteur qui génère des politiques économiques, qu’il envisage donc comme des biens (comme en microéconomie en fait !). Mais le fait est que ces biens produits sont eux aussi soumis à la loi des rendements décroissants qu’énonce Turgot au XVIIIe siècle en étudiant les surfaces agricoles. Ici, une nouvelle politique économique résorbe moins le phénomène du chômage que la précédente considérant un stock fixe de chômeurs (élément essentiel dans la loi).

« Cela ne pose pas de problème », pourriez-vous arguer, et avec raison ! En effet, tant que le bénéfice marginal de ces politiques est positif, tout roule : on continue à réduire le chômage, même moins efficacement que précédemment.

Cependant, les nouvelles politiques sont contre-productives actuellement. En effet, L’Horty parle « d’empilement » de ces politiques, qu’elles soient monétaires (prime à l’emploi, dispositif d’indemnisation, etc.), ou non monétaires (Pôle Emploi, etc.). Il en résulte une extension du nombre d’acteurs et du volume des dispositifs, d’où « l’arsenal » qu’il décrit. Dans cet arsenal, les exonérations de cotisations sociales représentent le plus gros poste de dépenses.

À noter : les politiques monétaires de l’emploi désignent l’ensemble des subventions, exonérations… dont peuvent bénéficier les travailleurs (comme le RSA). Les politiques non monétaires de l’emploi visent quant à elles à améliorer le fonctionnement du marché du travail comme structure, par exemple en facilitant l’appariement entre l’offre et la demande d’emploi. Pour plus de précisions sur les politiques de l’emploi, vous pouvez vous référer à l’article « Comment lutter efficacement contre le chômage ?», disponible sur votre site préféré.

De plus, si les politiques de l’emploi ont effectivement été recalibrées dans les années 1990 pour les rendre plus efficaces, notamment afin de limiter les « trappes à inactivité » (l’instauration du RSA en 2009 en est une mesure emblématique), il n’y a pas eu de réforme globale depuis la crise de 2008. Par exemple, le CICE, mis en place en 2015, peine à entrer en action.

De ce fait, pour L’Horty, cette stratégie d’empilement a conduit à une « complexité institutionnelle » : les aides sont mal comprises ou connues, tant du côté des employeurs que des travailleurs, et n’orientent plus les comportements. On peut ici relier les réflexions de L’Horty aux analyses de Cahuc et Zylberberg dans « Le chômage : fatalité ou nécessité ». En effet, comme les agents économiques sont soumis à des limites informationnelles dues au coût d’opportunité de la recherche de l’information optimale (il est irrationnel de chercher la meilleure situation possible puisqu’elle est trop coûteuse en temps), de nouvelles aides, certes plus ciblées et efficaces, n’ont aucun effet.

L’Horty souligne ainsi que dans un contexte d’instabilité économique, cette complexité pénalise les changements de situation. D’où la « remise à plat » probablement nécessaire de ces politiques et la nécessité de repenser une architecture cohérente dans le débat public, qui jusqu’à maintenant se montre plus focalisé sur le volet normatif des politiques de l’emploi (ce qu’elles doivent être) que sur le positif (ce qu’elles sont effectivement).

« Trop d’impôt tue l’impôt », vous pouvez désormais retenir cette formule, car, en résumé, trop de politique de l’emploi tue la politique de l’emploi !

OK, maintenant, comment l’utiliser ?

Cette analyse peut être très pertinente dans une troisième partie par exemple (ou en fin de deuxième si vous faites un plan en 2 parties), pour montrer qu’en raison du manque de cohérence et de réflexion à long terme, les politiques de l’emploi en France ne sont pas aussi efficaces qu’elles pourraient l’être. Elle permet ainsi de montrer que les politiques de l’emploi sont toujours à situer selon des contextes nationaux singuliers et donc de comparer leurs efficacités respectives.

Au-delà de ça, cette analyse permettra de montrer à votre correcteur que vous vous intéressez à l’actualité ainsi qu’à la littérature économique actuelle (en plus de très bien maîtriser votre cours sur les politiques de l’emploi), et donc, in fine, de vous démarquer, ingrédient essentiel pour la réussite !