Depuis une dizaine d’année, les pays développés connaissent plusieurs problèmes (décrochage de l’industrie et des exportations, faible croissance, augmentation du chômage, pouvoir d’achat en baisse, inégalités en hausse, etc..). Evidement c’est une généralisation, d’autres pays s’en sortent bien mieux que d’autres, mais dans l’ensemble, ces problèmes restent une réalité. A ces déclins viennent s’ajouter de nouvelles problématiques, comme par exemple le réchauffement climatique, l’explosion des inégalités, la population vieillissante dans certains pays … Mais pouvons nous hiérarchiser ces problèmes ?

En 2014, le Fonds Monétaire International (FMI) a demandé à cinq lauréats du prix de la Banque de Suède en sciences économiques en mémoire d’Alfred Nobel de décrire ce qui constitue à leurs sens le problème économique majeur des années à venir. Les cinq concernés sont Paul Krugman (prix Nobel 2008), George A. Akerlof (prix Nobel 2001), Robert Solow (prix Nobel 1987), Michael Spence (prix Nobel 2001) et Joseph Stiglitz (prix Nobel 2001).

Le réchauffement planétaire : la seconde vérité qui dérange … (George Akerlof, Nobel 2001)

Aujourd’hui, les dirigeants de la planète entière se réunissent en grands conclaves: Rio de Janeiro, Kyoto, Copenhague, Paris… Cependant, les mesures de lutte contre le réchauffement climatique sont sans cesse remises à plus tard. Le mari de Jannet Yallen affirme d’ailleurs que le réchauffement climatique n’incite ni l’homme, ni les gouvernants à passer à l’action, car la conséquence de ce dernier se fera dans le temps et non dans le présent.

Mais ce réchauffement est un problème planétaire et les émissions viennent de partout, donc il faut que l’intervention soit planétaire et non nationale. Le problème principal vient du fait que les pays en développement ne souhaitent pas s’engager dans la protection de la planète car ils estiment que les pays développés avaient le droit d’utiliser les matières premières polluantes en abondance pour bâtir une croissance solide, alors pourquoi devraient ils, eux, s’en priver ?

Pour Akerlof, chaque pays doit comprendre qu’il est de son devoir de venir à la rescousse de la planète. Ainsi, il conclut en disant qu’il y a aujourd’hui deux vérités qui dérangent. La première étant le réchauffement planétaire. La second est que nous nous racontons encore les histoires qui nous convaincraient de la nécessité de lutter contre.

Le manque de la demande : la crise non résolue (Paul Krugman, Nobel 2008)

Pour Paul Krugman, vers 2050, le problème majeur qui se posera à l’économie mondiale (et surtout aux pays riches) sera la carence persistante de la demande. En gros, cet auteur considère que les gens ne dépensent pas assez pour que les capacités de production dont nous disposons soient convenablement utilisées.

Un problème se fait jour, dans les pays développés : il semblerait que les capacités de production augmentent plus rapidement que les capacités de consommation.

Quoi qu’il en soit, il est urgent de relancer la demande. Dans la théorie Keynésienne, la demande est fondamentale, car c’est elle (la demande effective) qui indique aux entreprises si il faut recruter, et si il faut produire. Malheureusement nous avons appris depuis 2007 que nos institutions dirigeantes économiques ne sont pas du tout adaptées pour faire face à une grave et persistante insuffisance de la demande.

On peut donc dire, d’après les déclarations de Paul Krugman que l’insuffisance de la demande est problématique et semble devoir le rester pendant quelques années encore.

La stagnation séculaire : les pays riches resteront au point mort (Robert Solow, Nobel 1987)

Pour Solow, la stagnation séculaire est le réel danger des années à venir. Effectivement, Dans la thèse, développée par l’économiste américain Robert Gordon, la population et la productivité globale des facteurs vont croitre à l’avenir plus lentement que pendant la période faste passée.

En 2013, avec le difficile retour à la croissance, Larry Summers a remis au goût du jour la théorie de la stagnation séculaire. Cette théorie de Halvin Hansen (Economic progress and declinin population growth, 1939) affirme que le ralentissement du progrès technique et de la croissance démographique condamnent les économies à une période de stagnation économique. Le faible rentabilité anticipée est désincitative à l’égard des investissement, et elle prive ce faisant les économies de croissance.

Ainsi, Solow résume les causes de la stagnation séculaire :

1 – Excès d’épargne qui constitue pour Keynes une fuite hors du circuit, problématique.
2 – Baisse de la demande et anticipation pessimiste des entreprise (Keynes chômage)
3 – Contrainte écologique: matière rare et plus chère, augmentation des coûts.
4 – Système éducatif moins efficace: plus de R&D pour moins de Pté, (cf Jeremy Rifkin)
5 – Vieillissement des sociétés (hausse charge, dépense pub, endettement, baisse INV)
6 – Ralentissement de la croissance de la population active. (Japon, Europe, Allemagne)

Accompagner la croissance des pays en développement et s’y adapter (Michael Spence, Nobel 2001)

« L’économie mondiale présente beaucoup de problèmes pressants, mais le plus crucial à mon sens est d’accompagner la croissance des pays en développement et de parachever le processus de convergence qui a débuté au lendemain de la seconde guerre mondiale »

Pour Spence, il s’agit de lutter contre les inégalités et la pauvreté mais également de permettre à 80% de la population mondiale de goûter à une croissance digne de ce nom. Pour cela, il va falloir inclure de nombreux pays dans le commerce international.

Cette inclusion va nécessiter une modification profonde des mentalités (notamment dans les pays développés). Les pays développés devront aider les pays en développement à décoller économiquement, mais ils devront également accepter de partager le gâteau qui, jusque là, était réparti de manière inégalitaire.

Ainsi, le monde de demain sera grâce aux nouvelles technologies, aux accords économiques et politiques entre les différents Etats, de plus en plus connecté, et il est du devoir des pays développés d’apprendre comment accomplir ce voyage de manière responsable, stable et surtout équitable!

Les inégalités : une réforme pour que l’économie soit au service de la société (Joseph Stiglitz, Nobel 2001)

Aujourd’hui, pour le Nobel 2001, un débat se fait jour, celui de savoir quelle est la forme d’économie de marché qui fonctionne le mieux ? Pendant longtemps le capitalisme démocratique à l’américaine a semblé triompher. Mais depuis la crise de 2008, ce modèle est de plus en plus remis en question.

Depuis cette crise, plusieurs économistes analysent ce modèle qui pendant plus de 25 ans à fait stagner le revenu médian. Il est devenu clair que ce système ne marchait pas pour la plupart des citoyens, bien qu’il fonctionne très bien pour les revenus les plus aisés.

Ainsi, l’enjeu majeur pour l’économie mondiale dans les décennies à venir n’est pas seulement de brider les excès de l’économie de marché (finance folle, bulles etc). C’est avant tout de faire fonctionner les marchés comme ils sont sensés le faire, avec une concurrence qui favorise l’innovation et la croissance pour tous, et pas seulement pour une minorité d’individus. Il faut alors veiller à ce que l’économie soit au service de la société.