Guerre

Les guerres d’Indochine et du Viêt Nam sont des évènements majeurs du XXᵉ siècle. Elles sont indispensables pour saisir les enjeux de la décolonisation pour la France puis ceux de la Guerre Froide pour les États-Unis. La compréhension et la connaissance de ces deux conflits et de leur enchaînement peut être utile tant aux khâgneux A/L que B/L dans le cadre d’un oral ou d’une dissertation d’Histoire. Tu seras incollable sur ces sujets après la lecture de cet article !

La guerre d’Indochine (1946-1954)

La France fait ses premières conquêtes dans la péninsule indochinoise sous le Second Empire. Ensuite, la conquête se poursuit grâce à l’impulsion de Jules Ferry sous la IIIᵉ République. En 1887 est fondée l’Indochine française, qui regroupe la Cochinchine, l’Annam et le Tonkin qui formeront le Viêt Nam. L’Union indochinoise inclut également les protectorats sur les royaumes du Laos et du Cambodge.

Remise en cause de la puissance coloniale française

Pendant la Seconde Guerre mondiale, la France est affaiblie dans la région. Le Japon occupe la colonie jusqu’à sa capitulation en 1945. La perturbation de la présence coloniale permet aux mouvements indépendantistes d’arriver à leurs fins. Ils étaient actifs et réprimés depuis le début du XXᵉ siècle.

Les nationalistes communistes se soulèvent dans le nord du pays. Les rebelles du Viêt Minh (Ligue pour l’indépendance du Viêt Nam) proclament l’indépendance le 2 septembre 1945 à Hanoï. Hô Chi Minh et Pham Van Dong mènent le mouvement et entament ainsi la guerre contre la France.

La guerre à proprement parler débute en décembre 1946. Le Viêt Minh lance une offensive générale afin de prendre le contrôle du Nord Viêt Nam. La guérilla communiste remporte une série de victoires. Elles rendent possible l’existence de la République démocratique du Viêt Nam proclamée en 1945. Hô Chi Minh en est le président et gouverne depuis Hanoï qu’il a conquise en 1947.

La « vietnamisation » du conflit

Peu de temps après la déclaration d’indépendance vietnamienne, la nouvelle se répand dans l’opinion. La presse parle alors de « troubles fomentés par les indigènes » (article du Monde : Les troubles continuent à Saigon du 27/09/1945). Les dirigeants français sont englués dans la Constitution de la IVᵉ République. Pour cette raison, ils peinent à prendre une décision pour faire face aux soulèvements.

La France ne reconnaît finalement pas le « Viêt Nam nord ». En 1949, elle crée l’État du Viêt Nam regroupant le Nord et le Sud et dont la capitale est Saïgon. Ce nouveau pays reste sous tutelle coloniale au sein de l’ « Union française », qui regroupe déjà les colonies africaines françaises. On parle de « vietnamisation » puisque ce sont désormais des Vietnamiens qui combattront la guérilla du nord et non pas l’armée française elle-même.

Une défaite française

La situation s’envenime ensuite au tournant des années 1950. La Chine devient communiste en 1949, ce qui rend possible l’émergence de nouveaux conflits. Le régime chinois appuie la République démocratique de Corée, ou « Corée du Nord », lors de la guerre qui l’oppose à la République de Corée, ou « Corée du Sud », de 1950 à 1953.

La multiplication de l’influence communiste en Asie inquiète les États-Unis. Ils soutiennent donc la France dans le cadre de la guerre d’Indochine sans pour autant intervenir. Le conflit s’achève finalement en 1954 à la suite de la défaite française de Diên Biên Phu. La signature des accords de Genève acte la fin de l’Indochine française et la reconnaissance de quatre pays par la communauté internationale :

  • la République démocratique du Viêt Nam, ou « Viêt Nam du Nord », qui est contrôlée par le Viêt Minh et dont la capitale est Hanoï ;
  • au sud du 17ᵉ parallèle, l’État du Viêt Nam, ou « Viêt Nam du Sud », dont la capitale est Saïgon ;
  • le Royaume du Cambodge ;
  • le Royaume du Laos.

La guerre du Viêt Nam (1955-1975)

Le régime dictatorial du « Viêt Nam Sud »

Un régime anticommuniste et pro-américain se met en place au Sud. Ngô Dinh Diêm s’autoproclame chef d’État à l’issue d’un référendum très probablement truqué. On a longtemps présenté Diêm comme un dictateur à la merci des puissances occidentales. Des études comme celles de l’historien américain Edward Miller semblent prouver le contraire.

Diêm aurait eu pour projet de créer une véritable identité nationale vietnamienne au sud. Cette vision nationaliste aurait déplu aux leaders étasuniens. Il y a aujourd’hui un quasi consensus historique affirmant que la CIA est à l’origine du coup d’État de 1963. À l’issue de ce dernier, Duong Van Minh prend la tête de la dictature sudiste.

Un envenimement du conflit au tournant des années 1960

Carte du Viêt Nam
Carte du Viêt Nam après sa partition dans le cadre des accords de Genève de 1954

De 1955 à 1959, la guerre du Viêt Nam est encore largement indirecte. Les États-Unis financent le régime de Diêm (« South Vietnam » sur la carte) qui réprime de Parti communiste au Sud. La situation dérape en 1959.

En février, les communistes sud-vietnamiens lancent une véritable insurrection contre le régime en place. Ils sont rapidement soutenus par le Viêt Nam du Nord d’Hô Chi Minh (« North Vietnam » sur la carte). En 1960, leur mouvement se structure avec la naissance du « Front national de libération du Sud-Vietnam », appelé « Vietcong » par ses opposants.

Les « Viets » du Sud sont directement soutenus par le gouvernement du Nord. Celui-ci les alimente en armes et en provisions par un réseau dans la jungle appelé « Piste Hô Chi Minh ». Cette piste passe par le Cambodge et le Laos, qui sont techniquement des pays neutres. La menace d’une extension du communisme à ces deux royaumes adjacents motive également l’intervention directe américaine dans les années 1960.

Les Américains contre les « Vietcongs »

Les Américains se font de plus en plus présents sur place. En 1961, le président Kennedy déclare souhaiter augmenter les effectifs militaires. L’année suivante, les États-Unis créent un commandement militaire à Saïgon. Enfin, le Congrès vote en 1964 la « résolution du Tonkin », qui permet au président Johnson d’engager massivement l’US Army dans le conflit.

Cette implication américaine se manifeste par une série d’attaques, comme celle du Camp Holloway en 1965. le président Johnson lance par ailleurs la même année une opération aérienne de bombardement. Appelée « Rolling Thunder », elle dure trois ans et tue des milliers de civils pour des résultats peu concluants.

Les États-Unis développent aussi de nouvelles stratégies. Ils commencent à utiliser le napalm et mettent en place la tactique « Recherche et destruction ». Celle-ci prévoit que des hélicoptères et des GI (soldats américains) explorent les territoires hostiles, repèrent et exécutent sommairement toute personne susceptible d’être un ennemi avant de se retirer.

En 1967, ces méthodes semblent commencer à payer. Le Pentagone parle alors d’une « lumière au bout du tunnel ». L’objectif est de rassurer la population, alors qu’un demi-million de soldats américains sont présents sur place. Les « Viets » semblent affaiblis et la guerre sur le point d’être gagnée.

Une guerre psychologique et culturelle

Mais le triomphalisme étasunien est rapidement remis en cause. En 1968, le Front national de libération lance l’offensive du Têt. 80 000 soldats communistes essuient une défaite militaire face à l’armée américaine. Cet échec sur un plan territorial et humain est cependant un net succès politique.

L’armée et l’opinion américaines sont surprises et déstabilisées. C’était l’objectif de Võ Nguyên Giáp, ministre de la Défense du Nord Viêt Nam. Pour lui, une guerre est à la fois diplomatique, militaire, politique et surtout psychologique. Les États-Unis seront forcés de se retirer si les Américains sont défavorables au conflit.

Dès le début des années 1960, les critiques se multiplient pour dénoncer la Guerre du Viêt Nam. À l’automne 1967, une manifestation au Pentagone réunit plus de 100 000 personnes. Ces protestations sont reprises au sein du mouvement hippie et notamment lors du festival de Woodstock. Plus qu’un rassemblement culturel, il s’agit là d’un véritable évènement politique durant lequel de nombreux chanteurs et groupes s’engagent. On peut prendre l’exemple de la chanson « I-Feel-Like-I’m-Fixin’-to-Die » du groupe Country Joe and the Fish qui critique directement la politique militaire américaine.

Le désengagement progressif des États-Unis

En 1969, le président Nixon nouvellement élu entame une politique de « vietnamisation ». L’armée américaine se retire et les États-Unis poursuivent le conflit plus indirectement en finançant le Viêt Nam du Sud. Ils interviennent également au Cambodge où la CIA orchestre le renversement de la monarchie. Cela permet ensuite l’instauration de la République khmère qui lutte plus activement et plus efficacement contre les guérillas communistes « vietcongs » et des Khmers rouges.

Mais la pression sur le pays de l’Oncle Sam ne cesse de s’accroître. En 1972, la photographie de Nick Ut montrant la jeune Vietnamienne Phan Thi Kim Phúc brûlée au napalm fait le tour du monde. Le président Nixon cherche à étouffer l’affaire en vain. Le photographe remporte le prix « World Press Photo of the Year » en 1973.

Des personnalités médiatiques, comme l’actrice américaine Jane Fonda, prennent position publiquement contre la politique américaine. Cette dernière part pour le Viêt Nam en juillet 1972. Elle va même jusqu’à monter sur le siège d’un canon anti-aérien nord-vietnamien coiffée d’un casque militaire. La classe politique américaine s’indigne et cherche à décrédibiliser ce geste politique qualifié d’« antipatriote ». Ces tentatives sont vaines et l’évènement politico-médiatique conduit à une intensification des critiques de l’intervention américaine.

La fin de la guerre et ses conséquences

En 1973, les États-Unis signent les accords de paix de Paris. Ils se retirent du Viêt Nam et obtiennent de la République populaire une libération des prisonniers américains. La guerre se poursuit en réalité jusqu’en 1975 avec la capitulation de Saïgon et du gouvernement du Sud-Viêt Nam. Le Viêt Nam est réunifié et sa capitale devient Saïgon, rebaptisée Hô Chi Minh-Ville en hommage au fondateur du Viêt Minh décédé en 1969.

À la suite de la guerre du Viêt Nam, la vague communiste submerge la péninsule indochinoise. En 1975, les Khmers rouges arrivent au pouvoir au Cambodge et se rapprochent de la Chine. La même année, la guérilla communiste du Pathet Laos arrive à la tête du Laos qui devient un État satellite du Viêt Nam, lui-même allié à l’Union soviétique.

La concurrence entre la République populaire de Chine et l’URSS pour l’influence sur ces trois pays débouche sur de nombreux conflits dans les années 1970 et 1980 qui s’apaisent progressivement après la chute de l’URSS dans les années 1990.